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Nouveautés !

Amorcées pendant l'été 2023, les décisions de jurisprudence tendant à mettre en conformité le droit français avec le droit européen en matière de congés payés se sont succédé et visent à assurer l'effectivité des droits auxquels devraient pouvoir prétendre les salariés.

 La Cour de cassation a reconnu :

  • que les salariés malades ou accidentés devraient pouvoir acquérir des congés payés, même si l'arrêt de travail n’est pas lié à un accident de travail ou à une maladie professionnelle ;  
     
  • l'inopposabilité de la condition prévoyant que pour être considérées comme du travail effectif, les périodes pendant lesquelles l'exécution du contrat de travail est suspendue pour cause d'accident du travail ou de maladie professionnelle sont limitées à une durée ininterrompue d'un an ;
     
  •  que la prescription du droit à congé payé ne commence à courir qu'à compter de la fin de la période de référence et seulement si l'employeur a pris les dispositions permettant au salarié d'exercer son droit à congés.

 Découvrez notre article dédié : Congés payés pendant un arrêt maladie

Combien un salarié acquiert-il de jours de congés payés en un mois ? Et en un an ?

Pour rappel, l'article L3141-3 du Code du travail prévoit l'acquisition de congés payés pour les salariés : ils acquièrent 2,5 jours de congés payés par mois effectif de travail.

En un an de travail effectif, le salarié bénéficie de 30 jours de congés payés.

Les jours de congés payés peuvent être exprimés en jours ouvrables ou en jours ouvrés.

À noter : le droit de l'Union européenne prévoit que les salariés en arrêt maladie acquièrent des droits à congés payés sur leur période d’absence, de manière à ce qu'ils bénéficient d'au moins 4 semaines de congés par an (1), ce qui n'est pas le cas en droit français pour une maladie ou un accident d'origine non professionnelle. La Cour de cassation reconnaît désormais le droit, pour tout salarié, à acquérir des congés payés pendant un arrêt de travail - pour maladie ou accident professionnel ou non.

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Comment gérer un arrêt de travail qui débute le premier jour des congés payés ? 

L'état du droit français : pas de report des congés après l'arrêt maladie sauf dispositions conventionnelles

Ni le Code du travail ni la jurisprudence interne ne prévoient le report des congés après la maladie. Les congés payés ne sont pas reportés lorsque le salarié est en arrêt maladie au cours de cette période. Le salarié ne peut bénéficier d'aucun report, ni d'aucune prolongation de ses vacances (2).

Ainsi :

  • si l'arrêt maladie se termine avant la fin de la période de congés payés : le salarié doit reprendre le travail à la date de fin des congés payés (date initialement convenue avec l'employeur). Il ne peut pas exiger que son congé soit prolongé de la durée de la maladie ou qu'il soit reporté ;
  • si la guérison du salarié n'a lieu que postérieurement à la date de fin des congés : le salarié reprendra son poste de travail à l'expiration de son arrêt maladie.

Néanmoins, la convention collective applicable dans l'entreprise, peut autoriser le salarié malade pendant ses jours de repos, à prendre ses congés effectifs ultérieurement, ou à percevoir une indemnité compensatrice (3).

La position européenne

La solution applicable en droit interne pourrait être amenée à évoluer.

La jurisprudence européenne reconnaît le droit au salarié qui tombe malade pendant ses congés payés, de reporter les jours qu'il n'a pu prendre du fait de sa maladie. Ceci s'explique, car la finalité des congés payés est de permettre à celui qui en profite, de se reposer et de disposer d'une période de détente et de loisirs (4).

Une solution équivalente vient d'être reconnue par la Cour de cassation concernant les salariés en congé parental
Le Cour a admis que lorsque le salarié s'est trouvé dans l'impossibilité de prendre ses congés payés annuels au cours de l'année de référence en raison de l'exercice de son droit au congé parental, les congés payés acquis à la date du début du congé parental devaient être reportés après la date de reprise du travail (5).

Quelles sont les incidences de la maladie avant un départ en vacances : congés reportés ou prolongés ?

Si le salarié tombe malade (maladie professionnelle, non professionnelle, accident du travail) avant de partir en congés, ces derniers pourront être reportés.

En effet, les congés payés acquis par un salarié, sont reportés, dans une certaine limite, après la date de reprise du travail (6), dès lors qu'il s'est trouvé dans l'impossibilité de prendre ses congés annuels au cours de l'année de référence, en raison d'absences maladie.

Les congés payés acquis non pris ne sont donc pas perdus.

Les congés non pris en raison d'une rechute d'accident du travail peuvent également faire l'objet d'une demande de report. Le salarié peut imposer à l'employeur de reporter le nombre de jours de congés qu'il n'a pas eu le temps de prendre pendant la période de prise des vacances (7).

Lorsque vous tombez malade avant votre départ en vacances, vos congés payés peuvent être reportés, mais ce report peut être limité dans le temps.

Pour la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), un droit au cumul illimité de droits au congé annuel payé acquis durant une longue période d'incapacité de travail ne répondrait pas à la finalité même du droit au congé annuel payé. Il est nécessaire de préserver l'organisation du travail par l'employeur, et de ne pas créer de difficultés trop importantes à cet égard, notamment en ce qui concerne un cumul de périodes d'absence du travailleur (8).

 Par conséquent, la jurisprudence interne a admis le fait qu'une convention collective puisse limiter la période de report des congés payés, dès lors que la durée de période de report est substantiellement supérieure à celle de la période de référence pour laquelle elle est accordée (9).

En France, le Code du travail ne prévoit aucun délai maximal de report des congés payés qui n'ont pu être pris du fait d'un arrêt maladie.

3 ansDélai de prescription

En pratique, la Cour de cassation estime que seul pourrait être invoqué le délai de prescription de 3 ans à compter de l'expiration de la période légale ou conventionnelle au cours de laquelle les congés auraient pu être pris (10), sous réserve des causes d'interruption ou de suspension.

À noter : la Cour de cassation admet désormais, conformément à la législation européenne, que la prescription du droit à congé payé ne commence à courir qu'à compter de la fin de la période de référence et seulement si l'employeur a pris les dispositions permettant au salarié d'exercer son droit à congés.

=> Si votre employeur refuse de reporter les congés payés que vous avez acquis, mais pas pris en raison d'un arrêt de travail, il devra vous verser des dommages-intérêts en réparation du préjudice subi (11).

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Vous souhaitez connaître les avantages liés à votre convention collective ? 
 

Récapitulatif des nouveautés : reconnaissance de droits par la Cour de cassation 

Acquisition de congés payés pendant la maladie validée par la Cour de cassation !

La Cour de cassation vient de reconnaître, conformément à ce que prévoit le droit de l'Union européenne (UE), que les salariés atteints d’une maladie ou victimes d’un accident, de quelque nature que ce soit (professionnelle ou non professionnelle) ont le droit de réclamer des droits à congé payé - en intégrant dans leur calcul la période au cours de laquelle ils n’ont pas pu travailler (11).

Indemnité compensatrice de congé payés plus limitée à un an (en AT/MP)

La Cour de cassation, pour écarter les dispositions du droit français non conformes au droit de l’UE, a jugé qu’en cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle (AT/MP), l’indemnité compensatrice de congé payé ne pouvait pas être limitée à un an (12).

Prescription du droit à l'indemnité de congé payé sous conditions

Qu’elle soit fixée par la loi ou de façon conventionnelle, il existe une période déterminée au cours de laquelle le salarié doit prendre ses congés payés. Ce n’est que lorsque cette période s’achève que commence à courir le délai de prescription de l’indemnité de congé payé.

En application du droit de l'UE, la Cour de cassation vient d'admettre que le délai de prescription de l’indemnité de congé payé ne pouvait commencer à courir que si l’employeur avait pris les mesures nécessaires pour permettre au salarié d’exercer effectivement son droit à congé payé (13).

 Par ces arrêts, la Cour de cassation enjoint le législateur à mettre en conformité le droit français avec le droit européen.

En attendant de se voir appliquer de nouvelles dispositions légales, les salariés peuvent espérer que leur employeur ait entendu la consigne posée par la Cour et pourront, à défaut, saisir le conseil de prud'hommes pour faire reconnaître leurs droits en matière de congés payés.

Références :
(1) DIRECTIVE 2003/88/CE DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail
(2) Cass. Soc., 4 décembre 1996, n°93-44907
(3) Cass. Soc., 13 mars 1991, n°87-41918
(4) CJUE, 5e ch. 21 juin 2012, aff. C-78/11
(5) Cass. Soc., 13 sept. 2023, n°22-14043

(6) Cass. Soc. 24 février 2009, n°07-44488 ; Cass. Soc. 28 septembre 2011, n°09-70612
(7) Cass. Soc. 16 février 2012, n°10-21300

(8) CJUE, 22 nov. 2011, aff. C-214/10, KHS
(9) Cass. Soc., 21 septembre 2017, n°16-24022
(10) Cass. Soc., 4 décembre 1996, n°93-46408, note explicative de l'arrêt 
(11) Cass. Soc., 27 septembre 2007, n°05-42293
(12) Cass. Soc., 13 septembre 2023, n°22-17340
(13) Cass. Soc., 13 septembre 2023, n°22-17638
(14) Cass. Soc. , 13 septembre 2023, n°22-10529