Ses dernières volontés

La mère du défunt a alors demandé la part qui lui a été « léguée » par ce texto car elle considère qu'il a valeur de testament et que les dernières volontés de son fils doivent être respectées.

Il s'agit de la « quotité disponible » (1) c'est-à-dire la partie de son patrimoine que l'on peut donner librement de son vivant ou à son décès. Elle est limitée par le nombre de descendant de la personne décédée car une part du patrimoine, la « réserve héréditaire », est réservée aux héritiers réservataires du défunt.

Les héritiers refusent et celle-ci assigne alors sa belle-fille et ses petits enfants devant le tribunal de grande instance de Metz.

Un texto n'est pas un testament olographe !

Le testament olographe est une des quatre formes possibles de testament. C'est la forme la plus simple et la moins coûteuse, il est rédigé directement par la main de l'auteur, le « testateur ».

Le code civil pose les conditions de validité (2) : il doit être écrit en entier, daté et signé de la main du testateur. Il n'y a pas d'autre condition de forme.

Par conséquent un texto, qui est un écrit électronique, n'est pas un document manuscrit qui pourrait avoir la valeur de testament, c'est pourquoi il a été écarté de la succession.

Question prioritaire de constitutionnalité

Avant de statuer, l'avocat de la grand-mère a demandé au tribunal de transmettre une Question Prioritaire de Constitutionnalité (QPC) (3).

Il souhaitait que le tribunal interroge le conseil constitutionnel sur la conformité des dispositions de l'article 970 du Code Civil à la Constitution au regard du droit de la propriété. Cet article, qui a été rédigé en 1803, ne prend pas en compte la possibilité d'un écrit électronique. Il limiterait donc de façon trop stricte la possibilité de transmettre sa propriété.

Mais le Tribunal a refusé de transmettre la QPC en la considérant dépourvue de « caractère sérieux ». En effet la nécessité d'un écrit daté et signé s'explique par le besoin de protéger le testateur. Il permet de limiter les risques de falsifications, de garantir une réflexion suffisante et la liberté d'esprit de l'auteur. L'écrit est requis pour des fins de validité et non pour des fins probatoires.

De plus le texto ne permet aucune sécurité juridique, il pourrait être fait par toute personne à proximité du smartphone.

Il a donc également refusé d'accorder la valeur de testament au message et a rejeté la demande de la grand-mère.

Une possible évolution ?

L'affaire sera renvoyée devant la cour d'appel compétente. On peut douter qu'elle ait une autre interprétation des dispositions du code civil.

Il faut noter qu'en Australie, dans une affaire similaire, la Cour suprême de Brisbane a considéré qu'un message contenant les dernières volontés d'une personne, même s'il n'avait pas été envoyé, avait la valeur d'un testament. Elle a ainsi validé ses dernières volontés et la transmission de ses biens à son frère plutôt qu'à son épouse et à son fils.

Le caractère informel de ce texte ne l'empêche pas d'être suffisant pour représenter les intentions testamentaires du défunt

Cour suprême de Brisbane

Entre nécessité de sécuriser certains actes graves et celle de respecter les dernières volontés d'un défunt que faire prévaloir ? C'est une question qui n'a pas fini de faire débat.

En tout état de cause, si vous souhaitez organiser votre succession et éviter à vos proches des litiges, il est très important d'anticiper !

Références :
 
(1)    Article 912 du Code Civil
(2)    Article 970 du Code Civil
(3)    Article 61-1 de la Constitution du 4 octobre 1958