Perdre un être cher est difficile. Mais la difficulté s’accroît lors du partage successoral entre les descendants du De cujus.  

En effet dans le cadre d’une succession, il peut arriver qu’un héritier puisse bloquer la succession à son profit au mépris des droits de ses cohéritiers. Cette situation ubuesque et incompréhensive se propage de plus en plus dans nos sociétés à tel enseigne que les contentieux connaissent un essor considérable.

En effet, bien souvent la naissance du blocage provient juste d’un conflit entre frères et s½urs, soit d’un conflit avec le conjoint survivant qui n’est pas votre parent (cas des familles recomposées), soit d’une mésentente entre les héritiers et le légataire : ces derniers remettant en question la volonté du défunt en attaquant le testament.

A ce titre, la succession peut être bloquée pour diverses raisons : un héritier qui ne répond pas au notaire, qui refuse la vente d’un bien ou encore qui n’est pas d’accord sur l’estimation des biens faite au moment du partage ou encore qui commet un recel successoral. Face à ces problématiques, les héritiers possèdent diverses solutions qui seront traitées dans cet article.

Pour remédier à ce genre de situation, il et clairement important voire vivement recommandé d’obtenir les conseils d’un Avocat spécialisé en droit des successions.

 

I.  Blocage de la succession pour défaut d’option successorale

La première cause de blocage que nous allons étudier est le défaut d’option successorale par un héritier réservataire. Il faut noter que l’option successorale ne peut être exercée avant le décès (Code civil, article 770).  

La transmission successorale est facultative, bien que celle-ci s’opère de plein droit. La transmission successorale impose nécessairement l’acceptation des héritiers. Ces derniers disposent aux termes de l’article 768 du Code civil de 3 options :

L’acceptation pure et simple ;

L’acceptation à concurrence de l’actif net (ancienne acceptation sous bénéfice d’inventaire) ;

La renonciation à succession.

L’option successorale revêt une importance considérable dans le cadre du règlement de la succession. De cette dernière découlent de nombreuses conséquences, notamment au niveau des obligations passives des héritiers.

Celui qui renonce à la succession est réputé, rétroactivement, n’avoir jamais été héritier Code civil, article 805.

Toutefois, le législateur a anticipé les situations de blocages qui pourraient résulter du défaut d’option successorale par l’un des héritiers.

D’abord, la prescription de l’option successorale, ramenée à 10 ans suivant le décès par la loi n° 2006-728 du 23 juin 2006, emporte cette renonciation (Code civil, article 780. - À noter que lorsque la succession s’est ouverte avant le 1er janvier 2007, l’héritier dispose d’un délai de 30 ans pour l’accepter ou la répudier . La dévolution ab intestat suppose donc, en principe, une acceptation volontaire, expresse ou tacite (Code civil, article782).

Exceptionnellement, la loi n° 2006-728 du 23 juin 2006 pose un tempérament à cette dernière règle, pour éviter de laisser à un héritier taisant le pouvoir de bloquer le règlement d’une succession. C’est l’action dite « interrogatoire » (Code civil, article 771 à 776), qui permet de réputer acceptant pur et simple l’héritier, qui, régulièrement sommé de prendre parti, s’abstient de le faire (ou de demander un délai complémentaire au juge), à l’expiration d’un délai de 2 mois suivant la sommation. À noter, toutefois, que celle-ci ne peut pas intervenir moins de 4 mois après l’ouverture de la succession, façon d’imposer le respect d’une période de deuil et de réflexion.

Parfois, le délai d’option est plus court. C’est notamment le cas s’agissant du droit viager au logement. Le délai d’option est d’un an à compter du décès (Code civil, article 765-1).

 

II. Que faire si un héritier bloque la vente d’un bien ?

De façon générale, un indivisaire ne peut disposer seul d’un bien (par exemple, le transformer ou le vendre) sans le consentement des autres, et l’accord de tous les indivisaires est requis pour certains actes [articles 815-2 et 815-3 du Code civil]. Cependant, les héritiers ont le choix d’organiser ou non cette indivision plus ou moins forcée dans laquelle ils se retrouvent en établissant notamment une convention d’indivision [article 815-1 du Code civil].

Hors convention, la loi a néanmoins assoupli les conditions de la gestion des biens indivis [loi n° 2006-728 du 23.06.2006]. Les titulaires d’au moins 2/3 des droits indivis peuvent accomplir, à cette majorité, des actes importants, comme par exemple des actes d’administration, confier un mandat général d’administration, conclure des baux, ou encore vendre des meubles indivis pour payer des dettes [article 815-3 du Code civil].

De même :

En cas de blocage dans la gestion des biens indivis, une autorisation judiciaire peut être obtenue afin de passer outre au refus de l’un des héritiers de consentir à un acte de gestion lorsque ce refus met en péril l’intérêt commun [article 815-5 du Code civil],

La vente d’un bien indivis peut être autorisée, sous certaines conditions et selon des modalités précises (procédure durant 4 mois), par le tribunal de grande instance, à la demande de l’un ou des indivisaires titulaires d’au moins 2/3 des droits indivis [article 815-5-1 du Code civil],

Le Président du Tribunal de grande instance peut prescrire toutes les mesures urgentes que requiert l’intérêt commun à la demande d’un ou plusieurs indivisaires [article 815-6 du Code civil].

Enfin, il existe depuis 2007 une solution complémentaire, le mandat successoral, permettant de confier provisoirement à une personne morale ou physique l’administration des biens composant une succession "en raison de l’inertie, de la carence ou de la faute d’un ou plusieurs héritiers dans cette administration, de leur mésentente, d’une opposition d’intérêts entre eux ou de la complexité de la situation successorale" [article 813-1 du Code civil].

Il revient au juge de désigner cette personne à la demande d’un héritier, d’un créancier, de la personne qui administrait tout ou partie du patrimoine du défunt quand celui-ci était encore en vie, ou de toute autre personne intéressée.

Le juge fixe la durée de la mission et la rémunération. Sauf accord du juge, les pouvoirs du mandataire se limitent aux seuls actes purement conservatoires et de surveillance et aux actes d’administration provisoire. Dès lors qu’elle est enclenchée, la procédure de désignation d’un mandataire successoral est en principe rapide puisque le tribunal statue en la forme de référés.

 

III. Blocage en cas de désaccord sur la valeur des biens

Le désaccord sur la valeur des biens est l’une des formes de blocage qui puisse naître entre les héritiers réservataires.

L’évaluation des biens est importante puisqu’elle va aider à déterminer la masse successorale et à formaliser les parts et les lots qui seront attribués à chacun des héritiers. De plus, elle déterminera la base de calcul, d’une part, des frais de notaire et, d’autre part, des droits de succession. Une estimation trop élevée par rapport à la valeur du marché générera automatiquement des frais plus élevés, et inversement, une sous-estimation peut faire courir sur le plan fiscal le risque d’un redressement.

Dès lors qu’une succession est mise entre les mains du notaire, il revient à celui-ci de procéder à l’inventaire des biens et à leur évaluation selon des règles précises selon qu’il s’agit d’immeubles, de biens meubles, d’objets de collection ou encore de valeurs mobilières. Il peut, à sa demande ou à la demande des héritiers, recourir à un expert si la situation l’exige. Cette solution engendrera des frais supplémentaires.

Si les héritiers ne parviennent pas à se mettre d’accord sur la valeur d’un bien, le juge, saisi par l’un des héritiers, peut désigner un expert.

 

IV. Blocage en cas de recel successoral

Une autre forme du blocage de la succession est le cas du recel successoral. Le recel consiste, pour un héritier, à détourner à son seul profit des biens ou des droits héréditaires qui auraient dû être compris dans le partage intervenu ou à intervenir avec les autres héritiers. La jurisprudence y inclut « toute fraude ayant pour but de rompre l’égalité des partages entre cohéritiers » (Cass. civ., 23 août 1869 ; DP 1869, 1, p. 456).

Il peut donc s’agir aussi bien d’un enlèvement de meubles ou d’une aliénation à l’insu des autres héritiers, que de la production d’un faux testament ou de l’abus d’une procuration sur un compte bancaire obtenue du de cujus. Un arrêt admet aussi que des trusts constitués à l’étranger, d’un commun accord entre le de cujus et l’un de ses enfants, sont susceptibles de constituer des hypothèses de recel.

En tout état de cause, le recel successoral suppose une rupture de l’égalité dans le partage des biens compris dans la succession. Comme le partage suppose des droits de même nature, il n’y a pas recel dans le fait, par un conjoint survivant attributaire de la totalité de la succession en usufruit, de prélever et de dissimuler des fonds ayant appartenu au défunt : les droits du conjoint survivant ne sont pas de même nature que ceux des autres héritiers, de sorte qu’il n’y a pas lieu à partage entre le premier et les derniers.

Le recel peut aussi résulter de la dissimulation, par un héritier, de l’existence d’un cohéritier (Code civil, article 778), situation à laquelle l’article 730-5 du Code civil assimile le fait de se prévaloir d’un acte de notoriété inexact.

Les héritiers lésés sont en droit de saisir les juridictions compétentes contre l’héritier fautif.

 

V. Désaccord sur le choix du notaire

Le recours au notaire pour le règlement d’une succession est un passage obligé dès lors que celle-ci comporte des biens immobiliers. Il est également recommandé, mais non obligatoire, lorsque la succession est importante et/ou implique plusieurs personnes.

Le choix du notaire est laissé aux copartageants. Ce n’est qu’à défaut d’accord que le tribunal procède lui-même à ce choix (CPC, art. 1364, al. 2). Ce choix est d’une grande importance, car il faut éviter par exemple que le notaire choisi favorise son client au détriment des autres copartageants.

En outre, le règlement national des notaires [article 61] prévoit également qu’en cas de litige, entraînant le blocage du partage, la préférence est dévolue dans l’ordre suivant :

Au notaire de l’époux survivant non exhérédé [non écarté de la succession],

Au notaire des héritiers réservataires,

Au notaire des légataires universels,

Au notaire des héritiers non réservataires.

A égalité de rang, le notaire représentant le plus fort intérêt pécuniaire prévaudra.

 

 

Sources :

https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000037450817?init=true&page=1&query=17-24.632&searchField=ALL&tab_selection=all

https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000041620387?init=true&page=1&query=19-11.668&searchField=ALL&tab_selection=all

https://espaceclient.allianz.fr/pmt/guide/dossier/dossiers/b_succession_blocage.html

https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000032683207?init=true&page=1&query=15-13.741&searchField=ALL&tab_selection=all

https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000031150108?init=true&page=1&query=14-18.906&searchField=ALL&tab_selection=all

https://fr.calameo.com/read/005125198a235152cd9a7?page=9