Une commune avait lancé deux procédures afin de désigner un aménageur en vue de la création d’une zone d’aménagement concerté (ZAC) afin de revitaliser son centre-ville. 

Cette procédure avait été lancée sur le fondement de l’article R. 300-4 du code de l’urbanisme qui prévoit que : « Les dispositions de la troisième partie du code de la commande publique et les dispositions de la présente sous-section sont applicables aux concessions d'aménagement lorsque le concessionnaire assume un risque économique lié à l'opération d’aménagement. ». 

Par deux délibérations du 2 et du 6 novembre 2017, le conseil municipal a désigné une unique société comme aménageur des deux secteurs visés par la concession d’aménagement. Des conseillers municipaux avaient alors demandé l’annulation des délibérations et des contrats de concession. 

Le recours des requérants est dans l’essentiel rejeté par le tribunal administratif qui commence tout d’abord par rappeler la jurisprudence Tarn-et-Garonne du Conseil d’Etat  (Conseil d'État, Assemblée, 04/04/2014, 358994, Publié au recueil Lebon) qui dispose notamment que :  

- tout tiers à un contrat administratif susceptible d’être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses est recevable à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses non réglementaires qui en sont divisibles ; 

- cette action devant le juge du contrat est également ouverte aux membres de l’organe délibérant de la collectivité territoriale 

Les requérants peuvent éventuellement assortir leur recours d’une demande tendant, sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, à la suspension de l’exécution du contrat ;
- Les membres de l’organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné, compte tenu des intérêts dont ils ont la charge, peuvent invoquer tout moyen à l’appui du recours ainsi défini. 

Il résulte de ces dispositions que la délibération autorisant la conclusion d’un contrat ne peut être contestée qu’à l’occasion d’un recours de pleine juridiction en contestant la validité du contrat. Les conclusions à fin d’annulation de la délibération du conseil municipal approuvant le contrat constituant un acte détachable, elles ne peuvent qu’être rejetées par le tribunal administratif. 

Le tribunal administratif de Melun examine ensuite la validité de la concessions d’aménagement du 2 novembre 2017  et considère que : 
- la convocation des conseillers municipaux était régulière contrairement à ce que soutenaient les requérants au regard de l’article L.2121-12 du code général des collectivités territoriales ;
- le choix de la commune de mettre en place une concession d’aménagement n’était pas irrégulière dans la mesure où il existe bel et bien un transfert du risque économique de l’opération d’aménagement exposant le concessionnaire aux aléas du marché comme le prévoit l’article R.300-4 du code de l’urbanisme ;
- la procédure de passation n’a pas violé le principe d’égalité de traitement des candidats du seul fait que la société attributaire s’était vu confier des études préalables à la réalisation de la concession d’aménagement litigieuse ;
- la participation de la société attributaire au coût des équipements publics dans les projets qui ne sont pas compris dans la « ZAC » ne viole par l’article L.311-4 du code de l’urbanisme qui n’exclut pas une telle possibilité ;
- le traité de concession d’aménagement du secteur « c½ur de ville » comprend toutes les mentions exigées à l’article L. 300-5 du code de l’urbanisme et est donc par conséquent valide sur ce point ; 

Surtout, les requérants soutenaient que le département était seul compétent pour l’aménagement des routes départementales. Dès lors, la commune ne pouvait transférer au concessionnaire, dans le cadre de la convention litigieuse, la maîtrise d’ouvrage de l’aménagement qualitatif sur la rue Jean Jaurès dans la mesure où celle-ci est une route départementale.

Le tribunal administratif rappelle ici qu’en vertu de l’article L.3213-3 du CGCT, « le conseil départemental délibère sur les questions relatives à la voirie départementale dans les conditions prévues par les dispositions des articles L. 131-1 à L. 131-8 du code de la voirie routière ».
De plus l’article L.131-2 du code de la voirie routière prévoit quant à lui que « les dépenses relatives à la construction, à l'aménagement et à l'entretien des routes départementales sont à la charge du département ».

Dès lors, la rue Jean Jaurès comprise dans le périmètre de l’opération d’aménagement fait partie du domaine public du département qui en est dès lors le maître de d’ouvrage. Seul ce dernier pouvait contracter en vue de faire procéder à des travaux sur son domaine, soit le cas échéant déléguer la maîtrise d’ouvrage publique d’une telle opération dans le respect des exigences imposées par la loi du 12 juillet 1985. 

La commune n’avait donc pas compétence pour confier à des tiers des travaux sur cette potion dans le cadre d’une concession d’aménagement. D’autre part, le tribunal administratif a estimé que ces clauses ne pouvaient se rattacher au pouvoir de police du maire sur les routes traversant son agglomération car les travaux prévus n’avaient pas pour objet d’améliorer la sécurité des usagers.


Le tribunal administratif rappelle ensuite, en vertu de la jurisprudence Tarn-et-Garonne précédemment citée, quel est l’office du juge administratif saisi d’un recours en contestation de validité du contrat ou de certaines de ces clauses :
- il appartient alors au juge, après avoir pris en considération la nature de ces vices, soit de décider que la poursuite de l’exécution du contrat est possible, soit d’inviter les parties à prendre des mesures de régularisation dans un délai qu’il fixe, sauf à résilier ou résoudre le contrat ; 

- en présence d’irrégularités qui ne peuvent être couvertes par une mesure de régularisation et qui ne permettent pas la poursuite de l’exécution du contrat, il lui revient de prononcer, le cas échéant avec un effet différé, après avoir vérifié que sa décision ne portera pas une atteinte excessive à l’intérêt général, soit la résiliation du contrat, soit, si le contrat a un contenu illicite ou s’il se trouve affecté d’un vice de consentement ou de tout autre vice d’une particulière gravité que le juge doit ainsi relever d’office, l’annulation totale ou partielle de celui-ci ; 

- il peut enfin, s’il en est saisi, faire droit, y compris lorsqu’il invite les parties à prendre des mesures de régularisation, à des conclusions tendant à l’indemnisation du préjudice découlant de l’atteinte à des droits lésés. 

Ainsi, le tribunal administratif de Melun juge en l’espèce que le vice d’incompétence est, eu égard à sa nature, non régularisable. 

Néanmoins, le tribunal a considéré que ces clauses étaient détachables du reste du contrat dès lors qu’elles concernaient : 

-  un équipement public précisément identifié, 

-  un équipement public accessoire dans l’équilibre global de l’opération compte tenu tant de la nature des travaux qui ne portent que sur la rénovation de la chaussée, que de leur montant qui représente moins de 1,5% du montant global de l’opération, 

-  un équipement public dissociable du reste du projet alors qu’il n’était pas établi que les travaux sur la rue Jean-Jaurès auraient constitué une condition déterminante pour les
parties dans la conclusion du contrat de concession.

Enfin, l’intérêt général ne commandait pas que cette annulation soit accompagnée d’un effet différé, dès lors, que l’intérêt général ne saurait résulter, sans autre précision, de la seule nécessité de réaliser les aménagements prévus au contrat et de ne pas entraîner de retard dans le déroulement de l’opération dans l’intérêt du développement du territoire. 

Les clauses de concession du secteur « coeur de ville » sont donc annulées, en tant qu’elles confient à la société attributaire la maîtrise d’ouvrage pour la réalisation de travaux d’aménagement de la chaussée de la rue Jean Jaurès. 

 

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