Explication
Le délégué du personnel peut tout à fait être mis à pied. Il convient toutefois de distinguer la mise à pied disciplinaire de la mise à pied conservatoire.
Le principe
Tout délégué du personnel dispose du statut de salarié protégé pendant une durée bien déterminée. Toutefois, ce statut protecteur ne l’immunise en aucune façon contre le pouvoir disciplinaire de l’employeur. Le délégué élu y est donc soumis, pendant toute la durée de vie de son contrat, y compris pendant son mandat électif.
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Cela signifie donc qu’il peut être sanctionné en cas de faute ou d’agissements contraires au règlement intérieur de l’entreprise.
A ce titre, le délégué peut donc faire l’objet d’une mise à pied disciplinaire si celle-ci est justifiée.
La durée maximale de la mise à pied disciplinaire doit figurer sur le règlement intérieur de l’entreprise à peine de nullité de la sanction prononcée (1). L’employeur a la possibilité de fractionner la durée de la mise à pied disciplinaire si les dates d’exécution sont établies dès le prononcé de la sanction et que ça n’engendre pas la marginalisation du salarié (2).
Sauf en cas de licenciement disciplinaire, l'employeur n'a pas à solliciter d'autorisation de l'inspecteur du travail avant d'infliger une sanction à un salarié protégé.
Mais la procédure disciplinaire applicable dans l’entreprise doit être respectée. Elle démarre par la réalisation d’un entretien préalable entre l’employeur et le salarié protégé pour exposer les faits reprochés et recueillir les observations de ce dernier.
Le défaut d’entretien préalable a pour conséquence, non seulement l’annulation de la sanction mais également l’allocation de dommages intérêts au syndicat duquel dépend le délégué du personnel en cause, comme l’a jugé la Cour de cassation (3).
L’employeur a également la faculté, en cas de faute grave du représentant du personnel, de prononcer une mise à pied conservatoire, d’effet immédiat dans l'attente de l'autorisation administrative de licenciement donnée par l’inspection du travail.
En effet, dans un tel cas, le maintien du représentant dans ses fonctions, est impossible, même provisoirement, en raison de la gravité de la faute commise.
L’employeur doit d’abord consulter le comité d’entreprise dans les 10 jours de la mise à pied puis demander l’autorisation de licenciement à l’inspecteur du travail dans un délai de 48 heures suivant la délibération du comité d’entreprise (4).
S'il n'y a pas de comité d'entreprise, cette demande est présentée directement à l’administration dans un délai de 8 jours à compter de la date de la mise à pied.
La décision de l’inspection du travail, qu’elle autorise ou refuse le licenciement, met un terme à la mise à pied conservatoire affectant le délégué du personnel
Si l’inspection du travail refuse le licenciement, la mise à pied conservatoire est annulée et le délégué du personnel concerné peut demander sa réintégration et le rappel des salaires non versées pendant la mise à pied.
La Cour de cassation a admis la validité de la prise d’acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l’employeur effectuée par un délégué syndical, motivée par le refus de son employeur de le réintégrer après une mise à pied conservatoire à la suite de laquelle, le licenciement a été refusé par l’inspection du travail (5).
Pour aller plus loin
Au cours de la mise à pied, qu’elle soit disciplinaire ou conservatoire, le délégué du personnel est tout de même autorisé à exercer ses fonctions représentatives.
En effet, la mise à pied n’a pas pour effet de suspendre le mandat du représentant du personnel (6). Elle suspend simplement le contrat de travail.
En revanche, même si, a posteriori, la sanction s'avère injustifiée (la mise à pied ne repose pas sur une faute grave), le délégué du personnel ne peut pas considérer que l'employeur s'est rendu coupable de délit d'entrave (7) sauf à prouver que les agissements de l’employeur avaient pour but de faire obstacle à l’exercice des fonctions représentatives de l’intéressé.
Aussi longtemps que dure la mise à pied, l’élu est convoqué aux réunions auxquelles il peut participer. Il peut également librement circuler au sein de l’entreprise, mais uniquement dans le cadre de l’exercice de ses fonctions représentatives. De ce fait, s’il utilise ses heures de délégation, celles-ci lui seront rémunérées.
Références :
(1) Cass. Soc. 26 octobre 2010, n°09-42740
(2) Cass. Soc. 12 avril 2012, n°11-13768
(3) Cass. Soc. 17 novembre 2011, n°10-23640
(4) Article R2421-14 du Code du travail
(5) Cass. Soc. 12 avril 2012, n°10-28697
(6) Cass. Crim. 11 septembre 2007, n°06-82410
(7) Cass.Crim. 8 avril 2014, n°12-85800
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