Jurisprudences
Le point de vue des avocats
Président : M. Pireyre
Avocat : SARL Cabinet Briard, SCP Leduc et Vigand
République française au nom du peuple français
- Cour de cassation
- Chambre civile 2
- Audience publique 16 mars 2023
- N° de pourvoi: 22-11.324
- Publié au bulletin
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 16 mars 2023
Cassation partielle
M. PIREYRE, président
Arrêt n° 263 F-B
Pourvoi n° P 22-11.324
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 16 MARS 2023
L'Etablissement national des invalides de la marine (ENIM), dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° P 22-11.324 contre l'arrêt rendu le 1er décembre 2021 par la cour d'appel de Rennes (9e chambre sécurité sociale), dans le litige l'opposant à M. [B] [Z], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Renault-Malignac, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Briard, avocat de l'Etablissement national des invalides de la marine (ENIM), de la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat de M. [Z], après débats en l'audience publique du 31 janvier 2023 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Renault-Malignac, conseiller rapporteur, Mme Taillandier-Thomas, conseiller doyen, et Mme Catherine, greffier de chambre,
Le Défenseur des droits a présenté des observations en application de l'article 33 de la loi organique n° 2011-333 du 29 mars 2011.
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 1er décembre 2021), M. [Z] (l'assuré) a exercé la profession de marin du 19 juillet 1979 au 31 mai 2003. Gravement blessé dans un accident de la circulation non professionnel, il a bénéficié, à compter du 1er juin 2003, d'une pension d'invalidité maladie qui lui a été versée jusqu'au 1er septembre 2016. L'assuré ayant atteint l'âge de 55 ans, l'Etablissement national des invalides de la marine (l'ENIM) a supprimé la pension d'invalidité maladie et l'a remplacée, à compter du 1er octobre 2016, par une pension de retraite servie par le régime d'assurance vieillesse sur la base de 25 annuités rémunérées.
2. L'assuré a saisi d'un recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
3. L'ENIM fait grief à l'arrêt de le condamner à calculer les droits de retraite de l'assuré à compter du 1er octobre 2016 sur la base de 37 ans, 2 mois et 29 jours de période cotisée et d'un salaire forfaitaire de la 9e catégorie et à payer à l'assuré les arriérés de pension dus depuis cette date, alors « qu'entrent en compte pour la pension d'ancienneté, dans la limite de la durée de services requis pour ouvrir droit à une telle pension, les périodes d'incapacité permanente de travail pendant lesquelles le marin a perçu, en raison d'une maladie ou d'un accident non professionnels, une pension d'invalidité sur le régime de prévoyance des marins ; que par conséquent, seules peuvent être comptabilisées, parmi les périodes durant lesquelles une pension d'invalidité a été perçue, celles qu'il faut ajouter, en complément des années de services accomplis par le marin, pour parvenir au seuil de vingt-cinq années lui ouvrant droit à pension d'ancienneté ; que pour condamner l'ENIM à calculer les droits de retraite de l'assuré sur la base de 37 ans, 2 mois et 29 jours de période cotisée, l'arrêt retient que le temps pendant lequel un marin placé en invalidité perçoit une pension correspondante est pris en compte, pour une durée de vingt-cinq années au maximum, dans le calcul des annuités de retraite, que cela garantit à un marin, même placé en invalidité au tout début de sa carrière, le bénéfice des vingt-cinq annuités nécessaires à la perception d'une retraite, qu'il s'agit là d'un niveau de garantie minimum, que les textes ne prévoient pas d'exclure du calcul de l'assiette de la pension de retraite les annuités dont le marin aurait pu bénéficier avant son placement en invalidité, que l'assuré a cumulé près de vingt-quatre années de travail et treize années d'invalidité et que ces années d'invalidité, d'un nombre inférieur à vingt-cinq, doivent être prises en compte en totalité pour le calcul de l'assiette de la pension de retraite, en cumul avec les annuités précédemment acquises ; qu'en statuant ainsi, quand seule pouvait être prise en compte la période d'invalidité devant être additionnée aux années de services accomplis par le marin afin de parvenir aux vingt-cinq années conditionnant l'ouverture de son droit à pension d'ancienneté, la cour d'appel a violé l'article L. 5552-16 du code des transports, ensemble les articles R. 2 et R. 8 du code des pensions de retraite des marins français du commerce, de pêche ou de plaisance. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 5552-16, 11°, du code des transports, anciennement L. 12, 12°, du code des pensions de retraite des marins français du commerce, de pêche et de plaisance, R. 2 et R. 8, V, du même code, dans leur rédaction applicable au litige :
4. Selon le premier de ces textes, entrent en compte pour la pension, dans des limites fixées par décret en Conseil d'Etat, les périodes pendant lesquelles le marin a perçu une pension d'invalidité en raison d'une maladie ou d'un accident non professionnel.
5. Selon le deuxième, le droit à pension d'ancienneté est acquis lorsque se trouve remplie la double condition de cinquante ans d'âge et de vingt-cinq années de services accomplis dans les conditions indiquées aux articles L. 10 à L. 13 et R. 6 à R. 10.
6. Aux termes du troisième, entrent en compte, par application de l'article L. 12, 12°, dans la limite de la durée de services requis pour ouvrir droit à pension d'ancienneté, les périodes d'incapacité permanente de travail pendant lesquelles le marin a perçu, en raison d'une maladie ou d'un accident non professionnels, une pension d'invalidité sur la caisse générale de prévoyance des marins français.
7. Il résulte de ces textes que pour la pension de vieillesse, les périodes pendant lesquelles le marin a perçu une pension d'invalidité en raison d'une maladie ou d'un accident non professionnels sont prises en compte jusqu'à lui permettre de parvenir à la durée de vingt-cinq années conditionnant l'ouverture de son droit à pension d'ancienneté.
8. Pour accueillir le recours de l'assuré, l'arrêt constate que l'assuré a cumulé près de 24 années de travail et 13 années d'invalidité. Il retient que les années d'invalidité, d'un nombre inférieur à 25, doivent être prises en compte en totalité pour le calcul de l'assiette de la pension de retraite, en cumul avec les annuités précédemment acquises, de sorte qu'il y a lieu de calculer les droits à retraite de l'assuré sur la base de 37 ans 2 mois et 29 jours de période cotisée et d'un salaire forfaitaire de 9e catégorie.
9. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a dit n'y avoir lieu de déclarer M. [Z] irrecevable en son recours, l'arrêt rendu le 1er décembre 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;
Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée.
Condamne M. [Z] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [Z] ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé en l'audience publique du seize mars deux mille vingt-trois par Mme Taillandier-Thomas, conseiller doyen, et signé par elle, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SARL Cabinet Briard, avocat aux Conseils, pour l'Etablissement national des invalides de la marine (ENIM)
L'Enim fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement en ce qu'il l'a condamné à, premièrement, calculer les droits de retraite de M. [Z] à compter du 1er octobre 2016 sur la base de 37 ans, 2 mois et 29 jours de période cotisée et d'un salaire forfaitaire de la 9e catégorie, deuxièmement, justifier de ce calcul auprès du marin et de son conseil et, troisièmement, payer à l'intéressé les arriérés de pension dus depuis le 1er octobre 2016 selon ce calcul, avec intérêts au légal sur chaque échéance mensuelle à compter du 1er octobre 2016 jusqu'à la date du paiement ;
Alors qu'entrent en compte pour la pension d'ancienneté, dans la limite de la durée de services requis pour ouvrir droit à une telle pension, les périodes d'incapacité permanente de travail pendant lesquelles le marin a perçu, en raison d'une maladie ou d'un accident non professionnels, une pension d'invalidité sur le régime de prévoyance des marins ; que par conséquent, seules peuvent être comptabilisées, parmi les périodes durant lesquelles une pension d'invalidité a été perçue, celles qu'il faut ajouter, en complément des années de services accomplis par le marin, pour parvenir au seuil de vingt-cinq années lui ouvrant droit à pension d'ancienneté ; que pour condamner l'Enim à calculer les droits de retraite de M. [Z] sur la base de 37 ans, 2 mois et 29 jours de période cotisée, l'arrêt retient que le temps pendant lequel un marin placé en invalidité perçoit une pension correspondante est pris en compte, pour une durée de vingt-cinq années au maximum, dans le calcul des annuités de retraite, que cela garantit à un marin, même placé en invalidité au tout début de sa carrière, le bénéfice des vingt-cinq annuités nécessaires à la perception d'une retraite, qu'il s'agit là d'un niveau de garantie minimum, que les textes ne prévoient pas d'exclure du calcul de l'assiette de la pension de retraite les annuités dont le marin aurait pu bénéficier avant son placement en invalidité, que M. [Z] a cumulé près de vingt-quatre années de travail et treize années d'invalidité et que ces années d'invalidité, d'un nombre inférieur à vingt-cinq, doivent être prises en compte en totalité pour le calcul de l'assiette de la pension de retraite, en cumul avec les annuités précédemment acquises ; qu'en statuant ainsi, quand seule pouvait être prise en compte la période d'invalidité devant être additionnée aux années de services accomplis par le marin afin de parvenir aux vingt-cinq années conditionnant l'ouverture de son droit à pension d'ancienneté, la cour d'appel a violé l'article L. 5552-16 du code des transports, ensemble les articles R. 2 et R. 8 du code des pensions de retraite des marins français du commerce, de pêche ou de plaisance.
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