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Compétence

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Définition du terme Compétence

Un juge ne peut être saisi d'une cause, que dans la mesure où les dispositions sur l'organisation judiciaire et celles qui fixent les règles de procédure, lui donnent le pouvoir de la juger. Ce pouvoir, c'est la "compétence". La compétence est envisagée à plusieurs points de vue. Celui qui entend introduire un procès doit d'abord se demander quel est l'ordre, administratif ou judiciaire, de la juridiction à laquelle appartient le tribunal qui sera amené à statuer sur le conflit dont il entend la saisir. Voir sur la question, le rubrique "Tribunal des Conflits".

S'il s'agit d'un procès qui ressort à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire, il devra ensuite prendre en compte la nature pénale ou civile de l'affaire. Si le différend est d'ordre civil, il recherchera au niveau du type de juridiction, (Tribunal d'Instance, Tribunal de Grande Instance, Tribunal de commerce...) laquelle d'entre elles est appelée à connaître de ce différend. Enfin, en dernière analyse, il devra au plan territorial, déterminer où se trouve la juridiction que la Loi désigne pour juger son affaire.

La première série de questions concerne la compétence d'attribution ou compétence matérielle dite aussi "compétence ratione materiae", la seconde, intéresse "la compétence territoriale", on dit aussi "compétence ratione loci". En matière civile et commerciale, qui dans le cadre de ce dictionnaire est la seule partie du Droit qui est envisagée, la compétence matérielle répond d'abord au principe du double degré de juridiction. Selon cette règle, on ne peut porter un litige devant une Cour d'Appel avant que l'affaire ait été ait été d'abord jugée par un tribunal de première instance (Tribunal de Grande Instance, Tribunal d'Instance, Tribunal de commerce. .).

Ensuite, parmi les juridictions de première instance, il convient de déterminer si l'objet du litige est ou non de la compétence d'une juridiction spécialisée, telle que, le Tribunal de Commerce, le Conseil de Prud'hommes, le Tribunal des affaires de sécurité sociale ou le Tribunal paritaire des baux ruraux. Dans le silence du Code de l'Organisation judiciaire et du Codede procédure civile, attribuant l'affaire à la connaissance d'une juridiction spécialisée, ce sera, soit le Tribunal d'Instance, soit le Tribunal de Grande Instance qui sera saisi selon les critères que ces Codes définissent.

Une fois déterminé quel est le tribunal compétent, il y aura lieu de tenir compte du montant de la somme en litige qui détermine le taux de compétence dit aussi " taux du ressort", valeur en dessous de de laquelle une juridiction statue sans appel. C'est en effet, seulement si l'intérêt du litige excède Eur. 4. 000, 00 ou si la demande est indéterminée, que la juridiction de première instance ne statue qu'à charge d'appel. En application de l'article 35 du nouveau Code de procédure civile, lorsque plusieurs prétentions sont fondées sur des faits différents, il a été jugé par la Cour d'appel de Versailles (C. A. Versailles 1ére Ch., 2éme sect., 7 janvier 2003 - R. G. n° 01/05985, BICC 1er oct. 2003)que le taux du ressort est déterminé par la valeur de chaque prétention considérée isolément. Seul l'objet de la demande fixe le taux de la compétence, à l'exclusion des moyens de défense, exceptions de procédure et fins de non recevoir invoqués par le défendeur. Ainsi, les exceptions de nullité, certes indéterminées, soulevées en défense pour la première fois en cause d'appel, sont sans incidence sur le montant d'une demande initiale inférieure au taux du dernier ressort, et donc sur la détermination du taux du ressort. Si l'intérêt du litige est indéterminable, comme c'est le cas si le litige porte sur une obligation de faire ou de ne pas faire, le jugement est "appelable". Si la décision rendue ne rentre pas dans cette catégorie, il peut alors sous certaines conditions de recevabilité faire l'objet d'un pourvoi en cassation.

La compétence pour juger en dernier ressort des juridictions de proximité nouvellement crées, par le Tribunal d'Instance, par le Tribunal des affaires de sécurité sociale et du tribunal de grande instance a été fixée à compter du 1er janvier 2002 à 4. 000 euros par le Décret 2001-476 du 30 mai 2001.

Quant à la compétence géographique, elle est fixée en tenant compte du lieu où siège l'intérêt qui doit être protégé. Ainsi pour éviter que par malveillance ou par ruse son adversaire l'oblige a exposer des frais inutiles, le défendeur sera, en principe, assigné à comparaître devant le tribunal proche de son domicile. Il reste, en revanche, que dans des cas spécifiques que la loi fixe, il est fait exception au principe ci-dessus. Ainsi, en matière d'action en paiement d'une pension alimentaire, le tribunal compétent est celui du domicile du créancier, ainsi, dans tous les cas où le différend porte sur des biens immobiliers, le tribunal compétent est celui du lieu de la situation de l'immeuble, et s'il s'agit d'une affaire portant sur un droit né de l'ouverture d'une succession, l'instance se déroulera devant le tribunal du lieu où elle s'est ouverte. Voir aussi le mot : "Privilège de juridiction" et, pour ce qui est de la prorogation de compétence, le mot "incompétence".

En ce qui concerne les exceptions d'incompétence, elles figurent au nombre des moyens de défense, et il est jugé que le demandeur n'est pas recevable à contester la compétence territoriale de la juridiction qu'il a lui-même saisie. (Cass. civ. 2., 7 décembre 2000. BICC n°529).

En matière internationale, l'article 23 du Règlement (CE) N° 44/2001 du Conseil, du 22 décembre 2000, reconnaît la validité de la clause attributive de juridiction aux seules conditions que l'une des parties au moins soit domiciliée dans un État signataire, que la situation soit internationale et que la juridiction désignée soit celle d'un État contractant. (Voir : 1re Civ. - 23 janvier 2008 BICC n°681 du 1er mai 2008). Dans un arrêt du 19 mars 2002, la Première Chambre civile de la Cour de cassation a jugé (R. et SCI Clanic c/ SA Fortis Banque : Juris-Data n° 2002-013591) que la cour d'appel, qui a, sans dénaturation, retenu que la clause attributive de compétence visait toutes les contestations relatives au contrat, a exactement jugé que la clause attribuant compétence aux juridictions de Bruxelles s'imposait en vertu de l'article 17 de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968, la juridiction d'un État contractant désignée par une clause conforme à la disposition précitée étant exclusivement compétente même pour les actions tendant à contester la validité du contrat qui les stipule. Signalons qu'il existe des compétence particulières, par exemple voir le Décret n° 2002-216 du 18 février 2002 relatif aux juridictions compétentes en matière de marque communautaire.

Relativement aux règles de compétence, lorsque le juge est saisi d'un conflit intra-communautaire, la Cour de cassation a jugé (Ch. Mixte 11 mars 2005, BICC 619 du 15 mai 2005) que les règles de droit interne ne sont pas applicables pour la détermination de la compétence du juge saisi d'un litige d'ordre international intra-communautaire et qu'étant soumis aux dispositions de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 modifiée par la Convention de Saint-Sébastien du 26 mai 1989, le défendeur, qui est assigné devant une juridiction de l'Etat de son domicile conformément à l'article 2 de la Convention précitée, n'est pas en droit, pour écarter la compétence internationale de ce juge, de se prévaloir des compétences spéciales de la section 2 du titre II de cette Convention, et, notamment, de son article 5. 1°. Il s'agissait en l'espèce d'une société dont le siège était situé en France, qui avait été attraite devant une juridiction de l'Etat de son domicile. La Cour a estimée qu'elle n'était pas fondée à invoquer la compétence spéciale du lieu d'exécution du contrat de travail pour revendiquer la compétence du tribunal de Maastricht, situé dans un autre Etat contractant. En matière de contrats internationaux portant sur des services, il a été jugé qu'il convenait de se référer au lieu où, en vertu du contrat, ces services ont été ou auraient dû être fournis. Les tribunaux français ne se trouvaient donc pas compétents dans le cas où les services avaient consisté dans la création de maquettes réalisées en France, alors que les services avaient été fournis en Allemagne. (1re Civ., 14 novembre 2007. BICC n°677 du 1er mars 2008).

Il n'a été question ci-dessus, que de la compétence des juridiction et non celle qui est propre à chaque magistrat. En France, un magistrat professionnel est amené à siéger dans n'importe quelle juridiction du territoire métropolitain ou de l'Outre-mer, il n'y a donc pas en France, comme dans certains états fédéraux des limitations géographiques à la compétence personnelle d'un magistrat.

En revanche, à chaque étape de sa carrière, un magistrat appartient à un niveau déterminé de la hiérarchie judiciaire. De ce fait il ne peut remplir que les fonctions que la Loi et les Règlements attachent au grade qu'il occupe dans cette hiérarchie. D'autre part, et sauf exceptions prévues par la loi et notamment dans les cas qui seront examinés ci-après, il n'a compétence pour exercer l'emploi qui a été fixé par le Décrêt qui le nomme, que dans la juridiction à laquelle il est affecté et pour le temps que dure cette affectation. Mais à l'intérieur de cette juridiction, il peut être amené à statuer dans n'importe quel type d'affaires civiles ou pénales. C'est surtout le cas des magistrats affectés dans une juridiction qui comprend un petit nombre de magistrats. Dans cette hypothèse, et par la foce des choses, un juge peut se trouver affecté au fonctionnement de plusieurs formations dites aussi Chambres à laquelle il collabore selon un calendrier fixé par le Chef de la Juridiction à laquelle il appartient. Ainsi, un juge affecté à un Tribunal de grande instance peut aussi être amené à présider les audiences de l'un ou l'autre des Tribunaux d'instance ou du Tribunal des affaires de sécurité sociale du même ressort. A l'exception des juges d'instruction lesquels sont nommément désignés par le décret qui les affecte à cette fonction, les magistrats nommés soit, dans un Tribunal de grande instance, soit dans un Tribunal d'instance peuvent, en exécution d' une simple ordonnance du Président du Tribunal de grande instance, être amenés à substituer momentannément un de leurs collègues. La règle de l'interchangeabilité vaut aussi pour la composition des Chambres d'une Cour d'appel. Enfin, certains magistrats dit "Juges placés" auprès d'un chef de Cour ont vocation à remplacer temporairement n'importe lequel des magistrats du ressort qui est absent, par exemple, pour motif de congé de maladie ou de maternité, ou pour cause de vacance momentanée d'un poste. Les ordonnances dont il a été question ci-dessus sont prises, dans chaque Cour d'appel par le Premier Président ou, dans chaque Tribunal par le Président de la juridiction. Ce sont sont de simples décisions d'ordre administratif. En revanche la règle de l'interchangeabilité ne joue pas entre le Siège et le Parquet.

La liste des Tribunaux affectées par le programme de réorganisation des juridictions françaises a fait l'objet des Décret n° 2008-145 du 15 février 2008 modifiant le siège et le ressort des tribunaux d'instance, des juridictions de proximité et des tribunaux de grande instance et n° 2008-146 du 15 février 2008 modifiant le siège et le ressort des tribunaux de commerce. Cette réforme de la carte judiciaire prendra effet le 1er janvier 2010. Voir la référence des textes dans la Bibliographie ci-après et, sur la situation actuelle, le site du Ministère de la Justice et sur le même site, la nouvelle carte judiciaire carte judiciaire.

Texte tiré du site « www.dictionnaire-juridique.com » avec l'autorisation des auteurs

© Serge Braudo , Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles

et Alexis Baumann, avocat au barreau de Paris

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Textes :

  • Code l'Org. jud. art. L311-2 et s., 321-1 et s., L411-1 et s. s, L421-1,
  • CPC art. 33 et s, 42 et s.,
  • Code sécurité sociale, art. R142-25.
  • Code du travail, art. D517-1.
  • Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968.
  • D. n° 2008-145 du 15 février 2008 modifiant le siège et le ressort des tribunaux d'instance, des juridictions de proximité et des tribunaux de grande instance.
  • D. n° 2008-146 du 15 février 2008 modifiant le siège et le ressort des tribunaux de commerce.
  • D. n° 2008-146 du 15 février 2008 modifiant le siège et le ressort des tribunaux de commerce (rectificatif).
  • D. n° 2008-514 du 29 mai 2008 nouveaux ressorts des conseils de prud'hommes.
  • D. n° 2008-522 du 2 juin 2008 portant refonte de la partie réglementaire du code de l'organisation judiciaire.
  • D. n° 2008-1110 du 30 octobre 2008 modifiant le siège et le ressort des tribunaux d'instance, des greffes détachés, des juridictions de proximité et des tribunaux de grande instance. (Voir le tableau au JO n° 255 du 31/10/2008 texte numéro 20).
  • D. n° 2008-1482 du 22 décembre 2008 modifiant le siège et le ressort des tribunaux d'instance, des greffes détachés, des juridictions de proximité, des tribunaux de grande instance et des tribunaux pour enfants.
  • D. n° 2008-1482 du 22 décembre 2008 modifiant le siège et le ressort des tribunaux d'instance, des greffes détachés, des juridictions de proximité, des tribunaux de grande instance et des tribunaux pour enfants (rectificatif).
  • Bibliographie

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