En cas de refus de mutation, quel type de licenciement peut être prononcé ?

En l'absence de clause de mobilité, deux situations sont à différencier : soit le nouveau lieu de travail est situé dans le même secteur géographique que le lieu de travail actuel du salarié, soit il est en dehors de ce secteur.

La notion de secteur géographique est difficile à appréhender. Les juges l'apprécient au cas par cas, en s'appuyant sur les critères suivants :

  • la distance entre les différents établissements de travail ;
  • le temps de trajet domicile - lieu de travail ;
  • la qualité des transports en commun qui desservent le nouveau lieu de travail.

La mutation professionnelle dans le même secteur géographique

Il s'agit d'un simple changement des conditions de travail. En vertu de votre pouvoir de direction, vous pouvez l'imposer à votre salarié. En cas de refus de sa part, il est possible de le sanctionner car il ne respecte pas ses obligations contractuelles. Ainsi, un licenciement pour faute simple est envisageable. En revanche, ce refus ne constitue pas une faute grave.

La mutation professionnelle dans un secteur géographique différent

Il s'agit d'une modification du contrat de travail du salarié qui nécessite donc son accord. Vous ne pouvez pas lui imposer une telle mutation. Son refus ne constitue donc pas une faute et, si vous le licenciez, la rupture du contrat sera dépourvue de cause réelle et sérieuse. Le salarié pourra ainsi valablement contester son licenciement en justice et vous pourrez être amené à lui verser des dommages-intérêts.

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En présence d'une clause de mobilité, l'employeur peut-il opérer un licenciement pour refus de mutation ? 

Rappel :

Par définition, une clause de mobilité est une clause contractuelle par laquelle le salarié accepte à l'avance que son lieu de travail pourra être modifié en cours de contrat. La clause de mobilité définit précisément la zone géographique dans laquelle pourra avoir lieu cette modification.

Est-ce-que le salarié a le droit de refuser une mutation en présence d'une clause de mobilité ? 

Le salarié ne peut généralement pas refuser de se faire muter s'il est soumis à une clause de mobilité, à moins de commettre une faute donnant lieu à sanction. S'il refuse, vous pouvez le licencier car il ne respecte pas ses obligations contractuelles (1).

Refus de mutation : licenciement pour faute simple ou grave ? 

Vous pouvez le licencier pour faute simple et même pour faute grave si vous prouvez que la faute est d'une telle gravité qu'elle empêche le maintien du salarié dans l'entreprise.

Exemples de licenciements pour faute grave justifiées :

  • une salariée a refusé sa mutation dans le cadre de sa clause de mobilité, et a indiqué qu'elle refuserait également toutes les autres propositions de mutation pour l'avenir. L'employeur a considéré que le maintien de la salariée dans l'entreprise était impossible et que son refus constituait une faute grave (2) ; 
  • un groupe de salariés a refusé la mutation dans le cadre d'une clause de mobilité, en persistant dans une attitude d'obstruction. En effet, le groupe se présentait systématiquement sur l'ancien lieu de travail. Les juges ont considéré que la faute grave était justifiée, puisque le refus n'avait aucune raison légitime et le délai de prévenance était respecté. La poursuite de leur contrat n'était donc pas possible (3).

Licenciement : preuve de la faute et indemnités 

L'avantage du licenciement pour faute grave est que vous ne devez verser qu'une indemnité compensatrice de congés payés si le salarié y a droit. Vous n'aurez pas à lui verser d'indemnité de licenciement ni d'indemnité de préavis. Cependant, la gravité de la faute doit être justifiée et prouvée, ce qui n'est pas toujours chose facile. La gravité de la faute s'apprécie au cas par cas. Le licenciement peut être requalifié en licenciement abusif (sans cause réelle et sérieuse) si la faute grave n'est pas justifiée.

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Votre salarié a fait une faute professionnelle grave ? 

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Refus de mutation : les solutions aux contestations du licenciement

Il est possible de :

  • prévenir le salarié de votre proposition de mutation dans un délai raisonnable. Ceci dépend des circonstances, mais il ne faut pas agir dans l'urgence, votre salarié doit avoir un temps de réflexion nécessaire pour donner sa réponse (4) ;
  • vérifier que la proposition de mutation ne modifie pas un élément essentiel du contrat (baisse de rémunération (5), passage en travail de nuit (6), etc.) ;
  • vérifier que la mutation ne porte pas une atteinte excessive à la vie personnelle et familiale du salarié (7);
  • en l'absence de clause de mobilité, vérifier que le nouveau lieu de travail est bien situé dans le même secteur géographique que l'ancien ;
  • en cas de clause de mobilité, vérifier sa validité (8).

En effet, ces situations permettent au salarié de refuser valablement sa mutation et ainsi, si vous décidez de le licencier, il sera en mesure de contester son licenciement.

Dans le cas ou le salarié est un salarié protégé (membre du CSE, délégué syndical, etc.), même en présence d'une clause de mobilité, obtenir son accord est nécessaire. S'il refuse et que vous envisagez son licenciement (non pas sur la base de son refus mais sur la base de la situation de l'entreprise par exemple), vous devrez obtenir l'autorisation de l'inspecteur du travail

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 Mutation disciplinaire : alternative au licenciement

La mutation peut avoir un caractère disciplinaire si elle est fondée sur la faute du salarié (9). Cette sanction doit être justifiée et proportionnée par rapport à la faute commise. En présence d'une clause de mobilité valable, la mutation disciplinaire est envisagée comme un simple changement des conditions de travail (10). Sans clause de mobilité, la modification du contrat de travail ne peut être imposé. En cas de refus du salarié si il en a le droit, l'employeur pourra prononcer une sanction différente (licenciement par exemple) (11).

A retenir :

  • En cas de refus de mutation, vous pouvez licencier votre salarié pour faute simple ou pour faute grave.
  • Le refus de mutation est une cause réelle et sérieuse de licenciement mais dans certains cas, le salarié est en droit de refuser et le licenciement prononcé pourra être contesté devant les juges.
  • En présence d'une clause de mobilité valable, le salarié ne peut refuser sa mutation et ce refus peut entraîner son licenciement. 
  • La mutation disciplinaire nécessite une faute et obéit aux mêmes exigences en terme d'accord du salarié que la mutation professionnelle. En cas de refus, l'employeur peut licencier le salarié.

 

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Références :

(1) Cass. Soc, 5 mai 2010, n°08-44593
(2) Cass. Soc. 24 octobre 2018, n°17-22600
(3) Cass. Ass plen. 23 octobre 2015, n°13-25279
(4) Cass. Soc, 1er déc. 2004, n°03-40306
(5) Cass. Soc, 15 février 2006, n°04-45584
(6) Cass. Soc, 14 oct. 2008, n°07-40092
(7) Cass. Soc, 10 févr. 2016, n°14-17576

(8) Cass. Soc, 12 janvier 1999, n°96-40755 et Cass. Soc, 9 novembre 2011, n°10-10320
(9) Cass. Soc, 11 juillet 2001, n°99-41574
(10) Cass. Soc, 5 décembre 2012, n°11-21365
(11) Cass. Soc, 2 mars 2010, n°08-44902