De plus, le souscripteur conserve la pleine propriété de son patrimoine jusqu'à son décès, à la différence de la donation-partage où il n'en conserve qu'une simple jouissance.

I. Les conditions pour faire un testament-partage

A. Les conditions liées au testateur

Pour rédiger un testament-partage de manière valide, le testateur doit remplir plusieurs conditions relatives à la validité des libéralités, telles que définies par les articles 901 et suivants du Code civil (2).

B. La rédaction du testament- partage

Le testament partage est strictement personnel, ce qui signifie qu'il n'est pas possible de rédiger un testament pour deux personnes. Il peut prendre trois formes différentes, et aucune autre (sauf cas très exceptionnels), sous peine de nullité :

  • le testament olographe rédigé de la main du testeur seul ;
  • le testament authentique rédigé devant notaire ;
  • le testament mystique ou secret rédiger seul, cacheter et sceller devant notaire.

Le testateur rédige intégralement son testament lui-même ou avec le notaire si nécessaire, à la main afin de garantir qu'il est l'auteur de ces lignes, pouvant être contestées ultérieurement. Il doit également indiquer précisément la date du document (jour, mois et année) et apposer sa signature, car une fausse datation et l'absence de signature peuvent entraîner la nullité du testament.

Quant à la rédaction, il n'est pas nécessaire d'utiliser des formulations spécifiques pour qu'un testament-partage soit considéré comme valide.

C. Le contenu du testament-partage

Le testament-partage offre au testateur l'opportunité d'exprimer ses dernières volontés et de transmettre ses biens en spécifiant leur répartition précise et individuelle.

En ce qui concerne ses biens, le testateur peut léguer tous les biens meubles et immeubles dont il est propriétaire. En revanche, le disposant ne peut inclure dans un testament-partage des biens dépendants de la communauté tant que celle-ci n’est pas dissoute. Cette faculté est limitée aux biens dont chacun d’eux a la propriété et la libre disposition. (Cass. 1re civ., 5 déc. 2018, no 17-17493)(3)

Le testateur ne peut pas procéder à une répartition libre de ses biens. Il est tenu de respecter les règles successorales, stipulant que le testateur ne peut exclure ses héritiers réservataires d'une certaine part, dénommée réserve héréditaire. Quant à la part restante, appelée quotité disponible, le testateur a le droit de la transmettre à la ou aux personnes de son choix.

Les dispositions de dernières volontés introduites par l'expression « je déclare léguer » ne peuvent être assimilées à un testament-partage, car elles ne conduisent pas à un partage équitable et global de la succession pour prévenir l'indivision. (Arrêt de la Cour d'appel de Riom en date du 7 novembre 2023, numéro 22/000175.) (4)

II. L’exécution du testament-partage

Après l'ouverture de la succession, la différence notable avec le testament ordinaire réside dans le fait que cela entraîne les effets d'un partage, et les héritiers ne peuvent contester ce partage. Ils recueillent ainsi leur part conformément à ce qui était prévu dans le testament-partage.

La libéralité-partage a un caractère irrévocable. Les biens du défunt spécifiés dans l'acte ne sont plus sujets à un partage ultérieur. Les bénéficiaires ont simplement le choix d'accepter ou de renoncer à la succession, sans la possibilité de demander un nouveau partage. Il n'est pas envisageable de refuser le lot constitué par le défunt et de demander plutôt un partage conventionnel.

Le testament partage est assimilé à un véritable partage, il donne donc lieu à un droit d’enregistrement proportionnel de 2,50% dans un délai de trois mois après le décès du testateur. Cependant, il n’est pas assujetti au droit fixe de testament (125€).

III. La contestation d’un testament-partage

A. L’action en réduction

Cependant, si le partage porte atteinte à la réserve héréditaire, les héritiers réservataires lésés pourront exercer une action en réduction conformément aux dispositions de l’article 1077-2 du Code civil (10).

La Détermination de la masse partageable

Les héritiers détiennent des droits intangibles que le défunt ne peut altérer. Le montant de ces droits est défini en fonction du patrimoine du défunt.

Avant d'entamer toute procédure de réduction, il est essentiel de reconstituer le patrimoine du défunt tel qu'il aurait été s'il n'avait pas effectué de libéralités. L'objectif est de déterminer les droits légitimes des héritiers réservataires en reconstituant la masse à partager.

Pour ce faire, il est nécessaire d'établir un inventaire complet de tous les biens du défunt au jour du décès, incluant leur valeur, et de déduire les dettes. Cette démarche permet d'obtenir l'actif net successoral.

Par la suite, il convient également d'ajouter à la masse à partager les donations réalisées de son vivant qu'il s'agisse d'avances sur héritage ou en dehors de la succession. Ces donations seront réintégrées dans le patrimoine à la valeur qu'elles avaient au jour de l'ouverture de la succession, après soustraction des charges qui y sont associées. Une fois cette masse reconstituée, il est nécessaire d'imputer ces libéralités pour procéder au partage.

La nécessité d’une atteinte à la réserve héréditaire

La réserve héréditaire représente la portion inaliénable des biens destinée impérativement aux héritiers réservataires. Cela constitue une garantie minimale d'héritage pour les héritiers réservataires. La partie restante, connue sous le nom de quotité disponible, demeure la seule fraction dont le défunt peut disposer librement. L'étendue de la réserve héréditaire varie en fonction des règles de succession, dépendant du nombre d'enfants du défunt et de la présence ou non d'un conjoint. En l'absence de conjoint et d'enfants, aucune réserve héréditaire n'est établie.  Si le défunt ne respecte pas les règles successorales en consentant des donations ou legs dont la valeur totale excède la quotité disponible, les héritiers lésés ont le droit d'engager une action en réduction pour la part excédentaire.

La mise en œuvre de l’action en réduction

Seuls les héritiers réservataires ou leur ayant droit ont le droit d'engager une action en réduction contre une libéralité qui porte atteinte à leurs droits, excluant ainsi les donataires, légataires non-héritiers légaux et créanciers du défunt.

Ils bénéficient d'une période de 5 ans à partir de l'ouverture de la succession, ou de 2 ans à partir de la connaissance de la libéralité préjudiciable à leurs droits dans la limite de 10 ans après le décès, pour exercer cette action.

En présence d’un testament-partage, c'est-à-dire si le défunt a effectué des legs, la réduction s'appliquera en priorité sur ces legs au prorata, sauf si le testateur a spécifiquement prévu une attribution préférentielle pour certains legs.

La réduction peut être effectuée soit en nature, par la restitution du bien et des fruits correspondants à l'excédent, soit en valeur, par le versement d'une indemnité équivalente au dépassement de la quotité.

Une clause pénale contenue dans le testament partage ne fait pas obstacle à une action en justice fondée sur l'article 1075-4 du Code civil (9), visant à obtenir une réévaluation de la soulte. En effet, le copartageant ne remet pas en question le partage, mais demande simplement la bonne exécution de celui-ci.

B. L’action en nullité

Certaines causes de nullités sont particulières au testament-partage.

La demande de nullité en cas d’attributions facultatives

Les testaments qui ne prévoient que des attributions facultatives pour leurs bénéficiaires ne peuvent être qualifiés de testaments-partages, qui est un acte d’autorité par lequel le testateur impose le partage. (Civ. 1re, 13 avr. 2022, FS-B, n° 20-17.199) (6).  Au visa des articles 1075 (1) et 1079 du Code civil (7), elle énonce en attendu de principe que « le testament-partage est un acte d’autorité par lequel le testateur entend imposer le partage ». Or tel n’était nullement le cas puisque la cour d’appel avait constaté que « les attributions prévues par les testaments présentaient un caractère facultatif pour leurs bénéficiaires ». Ces actes ne pouvaient donc pas être des testaments-partages et la cassation est prononcée pour violation des articles 1075 (1) et 1079 du Code civil. (7)

La demande de nullité du testament-partage portant sur les biens de la communauté ou indivis

Le testament-partage ne peut porter que sur des biens dont le testateur a la propriété et la libre disposition, ce qui exclut les biens communs ou indivis.

Si les ascendants peuvent partager, par anticipation, leur succession, cette faculté est limitée aux biens dont chacun d’eux a la propriété et la libre disposition et ne peut être étendue aux biens communs ni aux biens propres de leur époux. (Cass. 1e civ. 5-12-2018 n° 17-17.493)(3).

En revanche, des biens communs peuvent être inclus par les époux dans une donation-partage conjonctive, ou même par un seul des époux dans une donation-partage ordinaire à condition que le conjoint intervienne à l’acte pour donner son consentement.

C. La requalification en testament ordinaire

Un testament-partage peut fréquemment être qualifié de l'une des trois manières suivantes, soit il s'agit d'un testament ordinaire comportant des legs préciputaires, si le testateur a cherché à favoriser ses héritiers ; soit il s'agit d'un testament ordinaire comportant des legs rapportables, si le testateur a eu l'intention d'attribuer, d'allotir, de réaliser un partage ; soit enfin il s'agit d'un testament-partage, si le défunt a souhaité proposer ce partage de manière libérale ou l'imposer par un acte d'autorité.

Sources :

  1. https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006435751#:~:text=Toute%20personne%20peut%20faire%2C%20entre,partage%20ou%20de%20testament%2Dpartage.
  2. https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006433635
  3. https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000037819402?isSuggest=true
  4. https://justice.pappers.fr/decision/a953eda251b9809a460a7eb84f0f5a03
  5. https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006434776
  6. https://www.courdecassation.fr/decision/62566d413b20a89542a2c15c
  7. https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006435338
  8. https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006439565
  9. https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006436039
  10. https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006435319