À retenir :

Lorsqu'une maison est construite sur un terrain détenu en propre par l'un des époux, elle sera seulement la propriété de ce dernier. Il s'agit de la théorie de l'accession : la propriété du sol emporte propriété du dessus et du dessous. Le propriétaire du terrain sera donc le seul propriétaire de la maison (1).

Construction d'une maison sur le terrain de l'un des époux : qui est propriétaire ?

Les biens dont les époux avaient la propriété ou la possession au jour de la célébration du mariage, ou qu'ils acquièrent, pendant le mariage, par succession, donation ou legs, restent propres (2).

Autrement dit, en cas de divorce ou de décès, votre époux, propriétaire du terrain selon les modalités ci-dessus, restera seul propriétaire de la construction, bien que vous l'ayez financée ensemble.

Bon à savoir :

En revanche, si vous êtes mariés sous le régime de la communauté universelle, le terrain acquis par votre époux avant le mariage est par principe un bien commun et la construction réalisée ensemble l'est aussi. 

Par exception, votre contrat de mariage peut prévoir une clause d'exclusion. Le terrain peut rester un bien propre de votre époux même sous le régime de la communauté universelle. Vérifiez donc le contrat qui vous unit !

En cas de dissolution du mariage ou de liquidation du régime matrimonial, votre époux devra verser une récompense à la communauté si la construction est financée par des fonds communs (souscription d'un crédit en commun financé par les revenus des époux) (3).

Cette contrepartie est destinée à indemniser la communauté du montant investi dans la construction. Elle est égale au profit subsistant au jour de la liquidation de la communauté (4) 

Il n'est pas nécessaire d'apporter la preuve que la construction a été financée par des fonds communs. La loi le présume (5). Si votre conjoint prétend avoir financé entièrement la construction de la maison avec des fonds propres, la charge de la preuve pèsera sur lui, il devra justifier alors d'une déclaration d'emploi ou de remploi.

Quelles autres conséquences en cas de divorce ou de décès ? 

En cas de divorce vous pourrez donc toujours faire valoir vos droits. Mais dans l'hypothèse où votre conjoint doit vous rembourser une somme importante et qu'il n'a pas les moyens de le faire, il sera alors très difficile de récupérer les sommes investies !

📌 Exemple :

Votre conjoint a hérité d'un terrain d'une valeur de 30 000 euros. Vous faites construire une maison avec un crédit en commun pour un coût total de 100 000 euros.

Au moment de votre divorce, la valeur du terrain est de 150 000 euros, et la valeur du terrain sans la maison est de 40 000 euros. 

Le profit subsistant est de 110 000 euros.

La dépense de construction est de 100 000 euros.

La communauté sera indemnisée à hauteur de 100 000 euros car la dépense de construction est moindre que le profit subsistant.

In fine, votre conjoint devra vous indemniser de 50 000 euros.

Votre conjoint étant propriétaire, la décision de vendre la maison pour vous indemniser lui appartient. S'il décide de la conserver, il devra verser une soulte, c'est-à-dire une somme d'argent pour compenser l'inégalité suite au partage de la communauté

A l'égard de la banque, sachez qu'en tant que co-emprunteur, vous restez redevable du paiement des mensualités même après le divorce.

Vous pouvez demander à la banque de vous désolidariser du crédit bancaire, mais celle-ci n'est pas tenue d'accepter votre demande.

Soyez également vigilant en cas de donation du terrain par les parents ! Il convient de vérifier les clauses intégrées dans l'acte, car il est possible que le donateur ait prévu une clause d'exclusion de la communauté. Le bien restera alors dans tous les cas un bien propre.

Par conséquent, en cas de décès du conjoint propriétaire (et si vous n'avez pas d'enfant), si les parents donateurs le souhaitent, ils pourront exercer leur droit de retour légal (6). Il leur permet d'obtenir le retour du bien donné dans leur patrimoine. Ainsi, ils pourraient récupérer le terrain et la maison construite, par accession !

Quelles solutions pour anticiper les litiges ?

Si vous investissez des fonds propres dans la construction, pensez à effectuer une reconnaissance de dette avec votre conjoint.

A défaut, en cas de divorce entre les époux, si vous n'êtes pas en mesure de justifier qu'il était convenu que cette somme soit restituée en cas de divorce, alors ce financement sera réputé être une donation, et non un prêt d'argent (7)

En outre, vous ne pourrez pas prétendre à une récompense car celle-ci est due quand la communauté s'appauvrit au profit d'un époux, et non quand un époux s'appauvrit au profit de l'autre.

Il est également possible que le terrain et la maison deviennent des biens communs, par le biais du régime matrimonial :

  • par une clause d'ameublissement dans votre contrat de mariage : elle vous permettra de faire entrer le terrain dans la communauté ;

  • vous pouvez changer de régime matrimonial pour le régime de la communauté universelle (8). Cela permettra de faire rentrer le terrain dans la communauté, mais ce régime peut présenter d'autres risques car tous vos biens deviendront alors communs.

Même si vous avez déjà financé la construction de la maison, il est toujours temps de rédiger un accord sur la répartition des fonds, en passant devant le notaire !

Cet acte récapitule tous les travaux entrepris dans le passé. Ainsi, vous pourrez prouver votre investissement et éviter de nombreux litiges (en cas de divorce ou dans les familles recomposées quand le conjoint survivant risque de se trouver en conflit avec les enfants du conjoint disparu notamment).

Les régimes matrimoniaux peuvent receler de nombreux pièges pour votre patrimoine, c'est pourquoi il est capital de vous informer afin d'anticiper et faire les bons choix !

N'hésitez pas à vous rapprocher de votre notaire ou d'un avocat pour vous conseiller.

Vous souhaitez obtenir davantage d'informations sur les risques liés aux régimes matrimoniaux ?

Références :
(1) Articles 546 et 552 du Code Civil
(2) Article 1405 du Code Civil
(3) Article 1437 du Code Civil
(4) Article 1469 du Code civil
(5) Article 1402 du Code civil
(6) Article 738-2 du Code Civil
(7) Articles 1353 et 1874 du Code civil
(8) Article 1397 du Code Civil