Disposer d'une évaluation précise de la prestation compensatoire permet de mettre en place une stratégie judiciaire pertinente. Elle permet également de provisionner le risque ou simplement de se projeter dans l'avnir en anticipant sles conséquences financières du divorce. Nous disposons désormais d'outils innovants qui bouleversent la pratique des Avocats.

L’intelligence artificielle permet de modéliser certains aspects de l’activité juridique.

 

En appliquant une méthodologie rigoureuse, il est possible aujourd’hui aux justiciables, de disposer d’une stratégie judiciaire fondée sur les probabilités.

Nous sommes en effet, grâce à ces outils, capables aujourd’hui d’offrir une anticipation raisonnable de ce que pourrait décider une juridiction.

 

Calculer ces anticipations, c’est permettre de « quantifier l’aléa judiciaire ».

 

La quantification de l’aléa, dans tous les contentieux indemnitaires et particulièrement en matière de prestation compensatoire est devenue essentielle dans ma pratique professionnelle car elle intervient en amont, comme une aide à la préparation d’un dossier, et en tant qu’indication sur les pratiques de la juridiction éventuellement saisie.

 

Comment cela fonctionne ? 

L’Avocat rentre les données dans l’outil d’intelligence artificielle qui est capable de modéliser le processus de prise de décision, après une analyse d’une quantité significative de décisions de justice, et suivant les méthodes les plus récentes d’apprentissage automatique.

Concrètement, prenons le cas de la problématique de l’évaluation de la prestation compensatoire dans un dossier de divorce. Cette question est très fréquemment un point d’achoppement entre les époux.

 

Le cas d’espèce est le suivant : 

Monsieur K, un dentiste âgé de 59 ans, marié depuis 30 ans avec une psychologue-comportementaliste de 57 ans. Ils n’ont pas signé de de contrat de mariage préalablement à leur union.

Ils ont eu trois enfants. Seule la dernière est encore étudiante et fait ses études à Montréal en physique nucléaire. Les deux autres sont autonomes. Ils ont acquis il y a 5 ans un appartement Rue du bac pour loger leur famille. Cet appartement est évalué à 1 500 000 euros.

Monsieur K. a hérité de sa tante un capital de 50 000 euros qu’il a placé en assurance vie auprès d’AXA avec un rendement de 1,97%.

Monsieur K. perçoit des revenus annuels de 180 000 euros.

Son épouse a repris tardivement des études de psychologue. Elle a arrêté de travailler durant 3 ans pour élever ses enfants. 

Elle perçoit 48 000 euros par an de son activité libérale de psychologue.

Ils sont tous deux en bonne santé. Monsieur K. percevra une retraite mensuelle d’environ 8 000 euros tandis que son épouse percevra environ 1 500 euros à ce titre.

Lors de l’audience de conciliation, Madame a obtenu un devoir de secours de 2 000 euros par mois.

Madame K., dans le cadre du processus, indique qu’elle sollicite une prestation compensatoire de 400 000 euros. 

Nous avons tous l’habitude de travailler sur les méthodes d’évaluation habituelles : Pilote PC et les 3 ou 4 méthodes plus doctrinales habituellement utilisées par les praticiens du droit de la famille.

Les résultats obtenus sont loin d’être satisfaisants et ne permettent pas de donner des indications suffisamment précises à mon client. Faire la moyenne de deux ou trois méthodes n’est absolument pas pertinent.

 

La recherche de jurisprudence à partir d’une base de données habituelle, est naturellement une démarche intéressante. Après une heure de recherche, j’ai trouvé trois cas approchants, qui donnent des montants encore une fois assez disparates.

Une nouvelle fois, ces indications ne me permettent pas de conclure ni de conseiller mon client de façon suffisamment précise.

 

Avec un outil d’Intelligence Artificielle, et en rentrant les paramètres de celui-ci, j’obtiens les indications suivantes : 

Dans ce cas précis, je peux déterminer une distribution des montants de prestation compensatoire qui seront fixés et qui s’échelonnent entre 221 000 et 300 000 euros.

Les moteurs d’intelligence artificielle ont modélisé le raisonnement des magistrats de la juridiction compétente dans le cas d’espèce.

 

Concrètement, l’outil présente d’abord la probabilité d’une entrée en voie de condamnation, ce qui me permet d’indiquer à mon client que :

  • l’épouse a 97% de chances d’obtenir une prestation compensatoire ;
  • ce qui joue le plus en faveur (en ordre décroissant) du versement d’une prestation sont les revenus de l’époux, sa retraite et le montant du devoir de secours ;
  • ce qui a pesé pour ne pas accorder une prestation : la part chiffrée dans la liquidation (Madame récupérant un capital conséquent) et dans une moindre mesure ses revenus.
  • il y a une chance sur deux que la Prestation Compensatoire soit évaluée entre 240 et 280 000 euros.
  • il y a 50% de probabilité pour que le montant alloué ne dépasse pas 275 000 euros
  • il y a 60% de probabilité pour que le montant alloué ne dépasse pas 283 000 euros
  • les revenus de l’époux ont pesé entre 50 et 90% sur le montant alloué,
  • dans une moindre mesure, la valeur de la communauté et la part de l’époux    
  • dans la liquidation a également pesé dans la décision du juge virtuel (entre 10 et 40%),
  • la durée du mariage pèse finalement assez peu au regard des autres critères.

 

Quel intérêt pour le justifiable ?

Cela permet un premier diagnostic rapide et fiable sur lequel l’Avocat et son client peuvent s’appuyer pour approfondir leur réflexion et leur stratégie.

Concrètement, l’avocat qui maîtrise ces nouveaux outils est capable de vous donner des probabilités fiables pour conseiller la meilleure voie de résolution du litige.

C’est un outil précieux pour mettre en place les modes alternatifs de règlement des différends et notamment le processus collaboratif. 

Le client identifie une ligne directrice, peut poser sereinement le curseur sur les concessions à faire et se sent sécurisé.

L’objectivité des données et la fiabilité des projections sont autant de critères qui ouvrent la voie d’un accord.