La Cour procède à un revirement de jurisprudence : le temps de trajet d’un salarié itinérant entre son domicile et son premier client, puis entre son dernier client et son domicile peut, dans certains cas, constituer du temps de travail effectif et être pris en compte au titre des heures supplémentaires.

Jusqu’à cet arrêt du 23-11-22, n°20-2192, la Cour de cassation se refusait à reconnaître comme temps de travail effectif, le temps de trajet domicile/lieu de travail et  ainsi à faire primer  le droit communautaire.

 

La CJUE dans une décision rendue en 2015 (CJUE., 10-9-15, n°C-266/14, arrêt TYCO) avait précisé (sur le fondement de la directive 2003 sur le temps de travail) que le temps de déplacement professionnel des salariés itinérants entre le premier et le dernier client de la journée doit être assimilé à du temps de travail effectif.

 

En  application de l'article L. 3121-4 du code du travail, la Cour de cassation retenait jusqu’à présent que«  le temps de déplacement qui dépasse le temps normal de trajet, qui n'est pas du temps de travail effectif, doit faire l'objet d'une contrepartie, soit sous forme de repos, soit sous forme financière. Cette contrepartie est déterminée par convention ou accord collectif de travail ou, à défaut, par décision unilatérale de l'employeur prise après consultation du comité d'entreprise ou des délégués du personnel, s'il en existe (Soc., 30 mai 2018, pourvoi n° 16-20.634, Bull. 2018, V, n° 97).

  

Avec ce nouvel arrêt, la Cour procède à un revirement de jurisprudence : le temps de trajet d’un salarié itinérant entre son domicile et son premier client, puis entre son dernier client et son domicile peut, dans certains cas, constituer du temps de travail effectif et être pris en compte au titre des heures supplémentaires

 

La Cour de cassation prend désormais en compte les contraintes auxquelles les salariés sont réellement soumis pour déterminer si le temps de trajet des travailleurs itinérants constitue ou non un temps de travail effectif.

 

Le salarié peut -il vaquer librement à ses occupations personnelles  ou est-il à la disposition de son employeur ? 

En l’espèce, il s’agissait d’un technico-commercial «  qui devait en conduisant, pendant ses déplacements, grâce à son téléphone portable professionnel et son kit main libre intégré dans le véhicule mis à sa disposition par la société, être en mesure de fixer des rendez-vous, d'appeler et de répondre à ses divers interlocuteurs, clients, directeur commercial, assistantes et techniciens, qui ne se rendait que de façon occasionnelle au siège de l'entreprise pour l'exercice de sa prestation de travail et disposait d'un véhicule de société pour intervenir auprès des clients de l'entreprise répartis sur sept départements du Grand Ouest éloignés de son domicile,… »

 

Cette jurisprudence a vocation à s’appliquer a beaucoup de salariés itinérants dont le temps de trajet n’était pas rémunéré comme du travail effectif.