1. Quand une clause de non-concurrence est-elle considérée comme abusive ?

Quelles sont les 5 conditions pour qu'une clause de non-concurrence soit valide ? Montant de la contrepartie financière, zone géographique, durée...

Votre contrat de travail prévoit une clause de non-concurrence, mais vous ne savez pas quelles sont les règles qui l'entourent ? La clause de non-concurrence doit respecter des critères de validité assez stricts pour être applicable. En effet, elle doit (1) :

  • apparaître dans le contrat de travail (ou dans un avenant) qui doit être signé ;
  • être indispensable à la protection des intérêts de l'entreprise, par exemple protéger un savoir-faire spécifique ;
  • tenir compte des spécificités de l'emploi du salarié ;
  • être limitée dans le temps (durée) et l'espace (zone géographique) ;
  • prévoir une contrepartie financière pour le salarié qui ne doit pas être dérisoire.

Ces conditions énoncées par la jurisprudence sont cumulatives, le non-respect de ce formalisme entraîne la nullité de la clause de non-concurrence. À l'inverse, si toutes les modalités sont remplies, le salarié doit respecter l'exécution de la clause, à charge pour lui de démontrer le caractère disproportionné de cette dernière.

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Définition du caractère disproportionné de la clause de non-concurrence

Une clause de non-concurrence peut être abusive même en remplissant toutes les conditions de validité. En effet, la clause peut être disproportionnée et obstruer de manière trop prononcée la liberté de travail du salarié (2).

La présence de la clause dans le contrat de travail doit avoir pour but d'équilibrer les obligations de chacun. L'employeur justifie l'impossibilité pour le salarié d'exercer des fonctions équivalentes et de partager un savoir-faire à la concurrence, pour protéger ses intérêts. De l'autre côté, le salarié ne doit pas être totalement bloqué dans une future recherche d'emploi et se retrouver lésé.

Au regard de la jurisprudence, le caractère disproportionné de la clause peut se démontrer de plusieurs manières, par exemple :

  • une zone géographique trop étendue ;
  • une indemnité au montant trop faible au profit du salarié ;
  • une durée trop longue à respecter ;
  • une notion de savoir-faire discutable ;
  • etc.

Toutefois, il peut être compliqué pour vous de savoir si la clause inclue dans votre contrat est réellement disproportionnée. Il s'agit d'une analyse au cas par cas, en fonction des éléments découlant de la spécificité de votre poste.

À ce moment-là, il est possible de se rapprocher d'un avocat spécialiste pour étudier la licéité de la clause de non-concurrence, et le cas échéant, de lancer une action contre votre ancien employeur.

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2. L'interprétation de la jurisprudence : comment démontrer qu'une clause de non-concurrence est abusive ?

De non-concurrence à pratiques anti-concurrentielles : quelques exemples de clauses abusives

La chambre sociale de la Cour de cassation a de nombreuses fois sanctionné la présence d'une clause abusive. La jurisprudence considère comme nulle la clause de non-concurrence qui :

  • ne comprend pas de contrepartie financière en cas de démission du salarié (3) ;
  • a une zone géographique étendue au monde entier (4) ;
  • a une durée de 5 ans, jugée manifestement excessive (5) ;
  • englobe trop largement les activités concurrentes, au point qu'elle empêche totalement le salarié de retrouver un poste conforme à son expérience professionnelle (6).
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Les sanctions du non-respect de la clause de non-concurrence : une indemnité pour le salarié ?

Le socle des sanctions prévues pour l'ancien employeur est purement jurisprudentiel, il n'existe pas de règle dans le Code du travail.

Le fait pour un employeur d'insérer une clause de non-concurrence abusive est un manquement à ses obligations contractuelles. En effet, les parties sont tenues d'exécuter le contrat de travail de bonne foi (7).

Tout d'abord, la sanction prononcée est bien évidemment la nullité de la clause, le salarié est levé de la restriction opérée sur sa liberté de travail.

De plus, vous pouvez être indemnisé en réparation du préjudice subi en cas de respect d'une clause abusive depuis la cessation de la relation de travail avec l'ancien employeur (8).

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Lettre contestant le refus de vous verser une indemnité compensatrice de non-concurrence

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3. Comment contester et rendre caduque une clause de non-concurrence abusive ?

La tentative d'un accord amiable avec l'employeur pour lever la clause

Il est possible  de prendre contact avec votre employeur, pendant ou lors de la rupture de votre contrat de travail, pour lui demander de renoncer à l'application de la clause. Cependant, il n'est en principe pas possible de renoncer à l'application de la clause une fois le contrat de travail rompu.

La renonciation à la clause ne peut se faire que d'un commun accord, du fait de l'engagement lors de la signature du contrat de travail. De plus, cette faculté de renonciation doit apparaître spécifiquement dans la clause de non-concurrence insérée au contrat ou dans la convention collective (9).

Si une renonciation est actée alors que la possibilité n'est pas mentionnée au contrat, vous avez droit au versement d'une indemnité pour non-respect du contrat de travail. Il en est de même lorsque l'employeur renonce sans vous en avertir (10).

Il n'existe aucun moyen de forcer la renonciation de l'employeur sur le plan amiable. À défaut, une action en justice est nécessaire pour invalider la clause de non-concurrence.

Réclamer le paiement devant le conseil de prud'hommes : quels sont les délais pour lancer une procédure ?

En cas de litige, et à défaut d'accord amiable, le salarié doit saisir le conseil de prud'hommes pour demander l'annulation de la clause de non-concurrence qu'il considère illicite.

Le Code du travail prévoit que toute action portant sur l'exécution du contrat de travail se prescrit par 2 ans, à compter du jour où celui qui l'exerce a eu connaissance des faits lui permettant d'exercer son droit (11).

À ce titre, l'action en nullité d'une clause de non-concurrence commence à courir à partir du début de l'application de la clause, c'est-à-dire au moment de votre départ effectif de l'entreprise, peu importe le motif de rupture.

Références :

(1) Cass. Soc. 10 juillet 2002, n°99-43334
(2) Article L1121-1 du Code du travail
(3) Cass. Soc. 27 février 2007, n°05-44984
(4) Cass. Soc. 8 avril 2021, n°19-22097
(5) Cass. Soc. 7 mai 1991, n°87-43470
(6) Cass. Soc. 18 septembre 2002, n°99-46136
(7) Article L1222-1 du Code du travail
(8) Cass. Soc. 25 mai 2016, n°14-20578
(9) Cass. Soc. 11 mars 2015, n° 13-22257
(10) Cass. Soc. 29 mars 2017, n° 15-27078 
(11) Article L1471-1 du Code du travail