Est-il interdit de boire de l'alcool au travail ?
Principe : interdiction de l'alcool au travail
En principe, aucune boisson alcoolisée n'est autorisée sur le lieu de travail, ce qui implique par conséquent que la consommation d'alcool au travail est aussi interdite (1).
10 à 20 %des accidents du travail sont dus à l'alcool
📌 Effectivement :
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l'alcool est un facteur démultiplicateur de la survenance d'un accident du travail. Une étude, relativement ancienne, estimait en effet que 10 à 20 % de ces accidents seraient liés à l'alcool (2) ;
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30 % des accidents de la route sont liés à l'alcool (3) ;
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sur le court terme, c'est-à-dire même lors d'une consommation occasionnelle, l'alcool peut diminuer les réflexes, réduire le champ visuel, provoquer des états de somnolence, des comportements violents, une mauvaise gestion des mouvements, voire être la cause d'un coma éthylique pouvant provoquer la mort (4) ;
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sur le long terme, c'est-à-dire lors d'une consommation régulière, l'alcool est reconnu comme cancérigène, il peut avoir des effets néfastes sur le cerveau (mémoire, concentration, etc.), provoquer des troubles cardiovasculaires, etc. (4).
Naturellement, puisque les risques liés à l'alcool ne disparaissent pas en entreprise, sa consommation est réglementée.
Exceptions : quelles sont les boissons alcoolisées autorisées sur le lieu de travail ?
Aucune boisson alcoolisée autre que le vin, la bière, le cidre et le poiré n'est autorisée sur le lieu de travail."
Article R4228-20 du Code du travail
Par exception, le Code du travail dresse une liste restrictive et limitative des alcools autorisés au travail. En effet, sur votre lieu de travail, vous pouvez consommer seulement (1) :
- du vin ;
- de la bière ;
- du cidre ;
- du poiré.
Aucun autre alcool ne peut être admis dans le cadre professionnel et pendant la journée de travail (cantine, événement, etc.). Les alcools forts ne sont pas autorisés en entreprise, et ce, peu importe l'occasion ou l'événement fêté.
Paradoxalement, le Code du travail n'apporte pas de précision quant à la quantité d'alcool maximale qui peut être consommée par les salariés au travail.
💡 Bon à savoir : autrement, l'employeur a l'obligation de mettre à disposition des travailleurs de l'eau potable et fraîche (5).
Dans quels cas l'employeur peut-il interdire totalement la consommation d'alcool dans l'entreprise ?
L'obligation de santé et sécurité de votre employeur
Votre employeur a l'obligation d'assurer votre sécurité et protéger votre santé physique et mentale (6).
À ce titre, il doit mettre en œuvre des mesures pour évaluer les risques au sein de son entreprise, puis les combattre à la source afin de les éviter (7). L'état d'ivresse d'un salarié au travail ne fait pas exception.
Dans le cas contraire, la responsabilité de l'employeur peut être engagée et des sanctions prononcées à son égard.
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L'interdiction totale de consommation d'alcool
Au vu des risques liés à l'alcool et de son obligation de sécurité, le Code du travail permet à l'employeur :
- de limiter la consommation d'alcool sur le lieu de travail ;
- voire d'interdire complètement la consommation d'alcool sur le lieu de travail.
Cette limitation ou interdiction peut inclure le vin, la bière, le cidre et le poiré (1).
Néanmoins, cette interdiction doit être proportionnée au but recherché. En effet, elle doit être justifiée par la protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, afin de prévenir tout risque d'accident dans l'entreprise.
📌 Exemple : cette proscription pourrait était justifiée lors de tâches en rapport avec des machines dangereuses ou en raison de la conduite de véhicule afin d'éviter tout accident de la route.
Si les risques d'accident sont élevés, il est important pour l'employeur de limiter la consommation d'alcool au travail, car sa responsabilité peut être engagée en cas d'accident causé par un salarié ivre.
Une interdiction figurant dans le règlement intérieur ou dans une note de service
Pour être valable, cette mesure doit être inscrite dans le règlement intérieur de l'entreprise, ou dans une note de service, pour que les salariés en soient informés.
L'inspection du travail contrôle l'accomplissement de cette formalité.
Si vous consommez une boisson alcoolisée malgré l'interdiction totale inscrite dans votre règlement intérieur, vous vous exposez à une sanction disciplinaire.
Mon employeur peut-il m'empêcher de rentrer dans les locaux de l'entreprise si je suis en état d'ivresse ?
La frontière entre la consommation d'alcool et l'état d'ivresse étant mince, la loi interdit strictement les personnes ivres (8) :
- d'entrer sur le lieu de travail ;
- ou de séjourner sur un lieu de travail.
L'objectif est d'assurer la sécurité de la personne en état d'ivresse, mais également de toutes les autres personnes présentes dans les locaux de l'entreprise (collaborateurs, clients, patients, etc.).
💡 Bon à savoir : afin de ne pas compromettre la sécurité du salarié concerné, celui-ci doit être raccompagné chez lui afin d'éviter qu'il ne prenne le volant ou se mette en danger. Dans les cas les plus graves, les autorités compétentes doivent être sollicitées (services médicaux, gendarmerie, etc.).
Est-ce que mon employeur peut me faire souffler pour constater l'alcoolémie au travail ?
Qui peut faire un contrôle d'alcoolémie au travail ?
Le pouvoir de direction qu'il détient permet à votre employeur de contrôler votre état d'alcoolémie par éthylotest. L'employeur a effectivement une obligation de sécurité et ce test peut lui permettre de surveiller la santé physique de ses salariés.
Votre employeur peut procéder lui-même à la réalisation du test, en présence d'un tiers. Il peut également être réalisé par un autre salarié, tel que votre supérieur hiérarchique par exemple, ou encore un tiers mandaté par l'employeur, comme un laboratoire d'analyse.
Il doit en revanche justifier la réalisation de ce test, par exemple, par la nature du métier ou le poste de travail occupé (travail en hauteur, manipulation de produits dangereux, conduite de véhicules, etc.).
Un contrôle prévu par le règlement intérieur ou une note de service
Pour être valable, la réalisation du test d'alcoolémie au travail doit être prévue par le règlement intérieur de l'entreprise, ou par une note de service si l'entreprise n'est pas dans l'obligation d'établir un tel règlement. Celui-ci organise ainsi les modalités afférentes.
Pour procéder à un tel contrôle, les salariés doivent en être informés individuellement ou collectivement. L'information doit avoir lieu à chaque nouveau test.
💡 Bon à savoir : vous pouvez également solliciter une contre-expertise dans les plus brefs délais si vous considérez que le résultat du test ne reflète pas la réalité.
La possibilité de refuser le test d'alcoolémie
Même si l'employeur répond à tous les critères pour réaliser un test, vous pouvez tout de même adresser une lettre indiquant que vous refusez de vous soumettre au test d’alcoolémie. Vous risquez cependant de vous exposer à une sanction disciplinaire.
En outre, l'employeur a la possibilité de faire appel à un officier de police judiciaire afin de procéder au contrôle. Ce dernier est alors habilité à vous l'imposer.
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Le salarié peut-il être sanctionné ou licencié pour avoir consommé de l'alcool au travail ?
La consommation d'alcool au travail motif de sanction disciplinaire
Si cela est autorisé lors d'un événement particulier, boire un verre pour célébrer avec ses collègues n'a en principe pas de conséquence sur le contrat de travail.
En revanche, l'état d'ébriété peut justifier un contrôle d'alcoolémie, voire une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu'au licenciement. La consommation d'alcool peut également être sanctionnée si elle est totalement interdite par votre règlement intérieur.
Dans tous les cas, cette sanction devra être proportionnée aux faits commis (9).
Un licenciement pour consommation d'alcool au travail est possible pour l'employeur si sa consommation crée un trouble caractérisé au sein de l'entreprise. Ce licenciement prendra pour base cette faute grave.
Enfin, si vous considérez avoir été injustement sanctionné, vous pouvez saisir le conseil de prud'hommes pour faire valoir vos droits.
Alcool au travail : exemples de licenciements pour faute grave
Dans plusieurs affaires, le juge a été amené à reconnaître la faute grave du salarié en raison d'une consommation d'alcool au travail.
📌 Exemples de cas reconnus comme étant constitutifs d'une faute grave :
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l'abus d'alcool au cours d'une réunion professionnelle entraînant un comportement agressif d'un salarié déjà sanctionné pour intempérance sur le lieu de travail (10) ;
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le fait pour un chauffeur poids lourd d'avoir fait l'objet d'un contrôle d'alcoolémie positif par les services de gendarmerie, alors qu'il conduisait un véhicule de l'entreprise, donnant lieu à un retrait immédiat de son permis de conduire (11) ;
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le fait, pour un opérateur polyvalent, d'avoir été contrôlé à 0,28 gramme d'alcool par litre d'air expiré lors d'un contrôle d'alcoolémie aléatoire. Le juge relève que le salarié s'était présenté sur son lieu de travail et avait travaillé dans cet état. Ainsi, peu importe la marge d'erreur tolérée du test, la violation des obligations contractuelles du salarié rendait impossible son maintien dans l'entreprise (12).
De manière générale, si sous l'emprise d'alcool, vous avez causé un accident à un tiers et vos fonctions impliquent la conduite d'un véhicule (VRP, commercial, chaffeur-livreur, conducteur d'engin…) ou la gestion d'outils ou produits dangereux, la faute grave pourrait fortement être caractérisée.
⚠ Attention ! Selon les faits commis en état d'ébriété (cas d'un accident de la route, de violence, etc.), vous pouvez également engager votre responsabilité pénale.
Références :
(1) Article R4228-20 du Code du travail
(2) Selon l'expertise collective de l'Inserm consacrée à l'alcool de 2003 (Institut national de la santé et de la recherche médicale)
(3) Selon les chiffres de la Sécurité routière
(4) Selon les informations de l'Agence nationale de santé publique
(5) Article R4225-2 du Code du travail
(6) Article L4121-1 du Code du travail
(7) Article L4121-2 du Code du travail
(8) Article R4228-21 du Code du travail
(9) Article L1333-1 du Code du travail
(10) Cass. Soc. 6 octobre 1998, n°96-42290
(11) Cass. Soc. 30 septembre 2013, n°12-17182
(12) Cass. Soc. 26 février 2025, n°23-10506







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