Est-ce que l'état d'ébriété du salarié au travail est un motif de licenciement ?

Quelle peut être la sanction préalable au licenciement ? 

En tant qu'employeur, j'ai l'interdiction de laisser entrer ou séjourner des personnes en état d'ivresse dans les lieux de travail (1). Ainsi, lorsqu'un salarié se présente ivre sur son lieu de travail, j'ai la possibilité de le sanctionner, voire, de prononcer à son encontre un licenciement.

vous avez l'interdiction de laisser entrer ou séjourner des personnes en état d'ivresse dans les lieux de travail

Article R4228-21 du Code du travail

Je dois sanctionner mon salarié fautif proportionnellement à la gravité de la faute commise.

Pour cela, je peux tenir compte :

  • des fonctions exercées par le salarié : on doit se demander si l'état d'ébriété constitue un danger pour le salarié ou autrui dans le cadre de l'exercice de ses fonctions (conduite d'un véhicule…) ;
  • des éventuelles sanctions antérieures du salarié pour des faits similaires ;
  • de son comportement à l'égard de ses collègues, des clients (faits de violence, menaces…) ;
  • du trouble occasionné et de l'atteinte portée à l'entreprise (arrêt de l'activité, atteinte à l'image ou à la réputation de l'entreprise…).

Si je n'ai pas d'alternative au licenciement, est-ce un licenciement pour faute grave ou faute lourde ? 

En fonction des circonstances, l'état d'ébriété peut justifier un licenciement pour faute grave. L'état d'ébriété ne sera normalement pas qualifié de faute lourde, étant donné que c'est une faute reflétant une intention de nuire à l'employeur ou l'entreprise. 

Quelques exemples ayant justifié un licenciement pour faute grave :

  • le fait pour un chauffeur-livreur de conduire le véhicule de son employeur avec un taux d’alcool constitutif d'une infraction pénale est une faute grave (2) ;
  • le fait pour une salariée qui sentait l'alcool et avait des difficultés à conserver son équilibre, d'avoir sur son lieu de travail, au vu de tous, alors qu'elle était chargée de l'accueil et du standard, refusé avec grossièreté d'assurer ses tâches et d'avoir eu dans le bureau de sa supérieure hiérarchique une attitude grossière et insultante tant vis-à-vis de celle-ci que du directeur d'exploitation (3) ;
  • le fait pour un salarié d'abuser de l'alcool au cours d'une réunion professionnelle, entraînant un comportement agressif et qui avait déjà été sanctionné pour intempérance sur le lieu de travail (4).

​Pensez à conserver les preuves de l'état d'ébriété du salarié (témoignages d'autres salariés ou de clients, contrôle éthylotest…) afin de pouvoir justifier la sanction prise. L'état d'ébriété au travail peut justifier un licenciement.

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Comment réagir lorsqu'un salarié alcoolisé se présente sur le lieu de travail ?

En tant qu'employeur, je dois prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale de mes salariés (5).

Ainsi, lorsque l'un de vos salariés en état d'ivresse se présente sur son lieu de travail, plusieurs mesures peuvent être prises :

  • je dois avant toute chose isoler le salarié en état d'ébriété afin de le mettre en sécurité, mais également pour assurer la sécurité de ses collègues ;
  • prendre ensuite les dispositions nécessaires pour renvoyer le salarié chez lui (le faire raccompagner ou joindre la personne de confiance à contacter pour qu'elle vienne le récupérer…) ;
  • enfin, prendre une mise à pied conservatoire à son encontre afin d'écarter le salarié de l'entreprise et choisir la sanction adéquate.
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Comment lutter et faire constater l'alcoolisme au travail ? 

Pour lutter contre l'alcoolisme et éviter qu'un salarié arrive au travail en état d'ivresse ou ne consomme de l'alcool au travail, plusieurs mesures de prévention peuvent être mises en place.

Interdire totalement l'alcool en entreprise dans le règlement intérieur

Aucune boisson alcoolisée autre que le vin, la bière, le cidre et le poiré n'est autorisée sur le lieu de travail (6). Cette restriction n'empêche en rien la consommation d'alcool en dehors du temps de travail, c'est-à-dire, dans le cadre de la vie privée.

Cela implique également que l'état d'ébriété du salarié peut survenir après avoir consommé de l'alcool sur le lieu de travail puisque le Code du travail ne fixe pas de limite de consommation.

Un salarié peut donc très bien abuser de vin ou de bière au point d'en être ivre.

Ainsi, lorsque la consommation de ces boissons alcoolisées est susceptible de porter atteinte à la sécurité et la santé physique et mentale des travailleurs, je peux prévoir des mesures permettant de les protéger et de prévenir tout risque d'accident. Je peux l'inscrire dans le règlement intérieur ou, à défaut, prendre une note de service. 

Il peut s'agir de limiter, voire procéder à l'interdiction de l'alcool au travail. Veillez à ce que ces mesures soient proportionnées au but recherché.

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Avoir recours aux contrôles éthylotest

Je peux de plus prévoir une clause dans le règlement intérieur de l'entreprise qui autorise le recours à l'éthylotest.

Le recours à l'éthylotest est limité aux salariés suivants :

  • ceux qui manipulent des machines ou des produits dangereux ;
  • ceux qui conduisent des engins ou véhicules ;
  • ceux dont vous soupçonnez l'état d'ébriété : l'objectif est alors de faire cesser ou d'exclure toute situation dangereuse.

Cette clause n'est valable à la double condition que (7) :

  • les modalités de ce contrôle en permettent la contestation ;
  • qu'eu égard à la nature du travail confié à ce salarié, un tel état d'ébriété est de nature à exposer les personnes ou les biens à un danger, de sorte qu'il peut constituer une faute grave.
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Se tourner vers des professionnels de santé

En tant qu'employeur, je peux solliciter la médecine du travail qui pourra notamment :

  • apprécier l'aptitude du salarié à occuper son poste ;
  • faire pratiquer des examens complémentaires ;
  • orienter le salarié souffrant d'alcoolisme vers une association d'aide aux alcooliques.

Références :
(1) Article R4228-21 du Code du travail
(2) Cass. Soc, 6 mars 1986, n°83-41789
(3) Cass. Soc, 10 novembre 2010, n°08-44661
(4) Cass. Soc, 6 octobre 1998, n°96-42290
(5) Article L4121-1 du Code du travail
(6) Article R4228-20 du Code du travail
(7) Cass. Soc, 24 février 2004, n°01-47000