1. La sanction choisie est-elle légale ?
Le choix de la sanction
En tant qu'employeur, vous bénéficiez d'une certaine liberté quant au choix de la sanction disciplinaire que vous envisagez à l'encontre de votre salarié.
Cette sanction peut être :
-
légère : blâme, avertissement, etc. ;
-
lourde : mutation, mise à pied, rétrogradation, etc.
Une sanction disciplinaire lourde est une mesure qui a une incidence sur le contrat de travail du salarié. C'est le cas de la rétrogradation à titre disciplinaire !
Définition de la rétrogradation
Elle consiste à faire régresser le salarié dans la hiérarchie de l'entreprise, voire à réduire ses responsabilités.
Elle se traduit par une modification du poste, un déclassement professionnel, une suppression des responsabilités, un changement de fonctions...
Bien souvent, cette mesure s'accompagne d'une baisse de la rémunération. Elle a donc pour conséquence de venir à une modification du contrat de travail.
Dans ce contexte, la sanction doit être adaptée au manquement du salarié. De plus, vous devez respecter une procédure disciplinaire particulière et obtenir l'accord du salarié.
2. La mesure de rétrogradation disciplinaire est-elle possible dans mon entreprise ?
Lorsque votre entreprise comporte au moins 50 salariés, vous devez tout d'abord vérifier que la rétrogradation figure bien dans les sanctions prévues par le règlement intérieur de l'entreprise (1). Ce dernier fixe les règles générales relatives à la discipline, telles que la nature et l'échelle des sanctions que peut prendre l'employeur.
3. Comment rétrograder un salarié : bien appliquer la procédure pour rétrograder son employé ?
La rétrogradation doit se faire dans le respect d'une procédure stricte. En effet, l'employeur n'appliquant pas les règles procédurales s'expose à un risque de contestation de la licéité de la rétrogradation et d'une action devant le Conseil de prud'hommes. En cas de contestation, l'employeur ne peut pas licencier le salarié.
Convoquer le salarié à un entretien préalable
Vous devez impérativement convoquer le salarié à un entretien préalable (3) par lettre recommandée avec accusé de réception ou remise en main propre. Pour être valable, la convocation doit mentionner :
La convocation doit être envoyée dans un délai de 2 mois à compter de la connaissance des faits.
-
l'objet de l'entretien ;
-
la date, l'heure et le lieu de l'entretien ;
-
la possibilité pour le salarié de se faire assister.
Attention
La lettre de convocation doit être envoyée dans un certain délai à compter du jour où vous avez connaissance des faits fautifs afin d'éviter toute prescription (4).
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Tenir l'entretien préalable
Lors de l'entretien, vous êtes tenu d'indiquer au salarié le motif de la sanction envisagée et de recueillir ses explications (3).
Notifier la sanction envisagée
Enfin, vous devez notifier la sanction par écrit selon les mêmes modalités que lors de la convocation. Cette notification doit comporter l'énoncé des motifs invoqués.
En effet, aucune sanction ne peut être prise sans que le salarié ne soit informé, dans le même temps et par écrit, des faits retenus contre lui (5).
La notification doit intervenir dans un délai de 2 jours ouvrables après l'entretien, et au plus tard 1 mois après.
La sanction de la rétrogradation contient une particularité : vous ne pouvez pas l'imposer de manière unilatérale.
4. Peut-on imposer la rétrogradation au salarié ?
Diminution des responsabilités et attributions : la nécessité de l'accord du salarié
La déqualification du salarié assortie d'une baisse de salaire constitue une modification d'un élément essentiel du contrat de travail. En conséquence, l'employeur, doit obtenir l'accord du salarié.
En pratique, le recueil du consentement se traduit par l'indication, dans le courrier de notification de la rétrogradation, de la faculté pour le salarié de refuser la sanction. Le silence du salarié ne vaut pas acceptation.
Ainsi, en plus du courrier de notification, l'employeur doit joindre un avenant au contrat de travail précisant le nouveau poste, la nouvelle rémunération, et le cas échéant, le nouveau lieu de travail. Il est également possible de laisser un délai raisonnable au salarié pour lui demander de retourner les documents signés en cas d'acceptation.
Le choix d'une sanction alternative
En cas de refus du salarié, vous devez choisir une sanction alternative, et organiser à cet effet, un entretien préalable, sauf dans le cas où la sanction envisagée est un simple avertissement (6).
En cas de refus d'acceptation de la rétrogradation par le salarié, vous pourrez toujours, dans le cadre de votre pouvoir disciplinaire, prononcer une nouvelle sanction. Celle-ci peut être plus légère ou bien plus sévère. Cependant, il conviendra de recommencer la procédure et de convoquer une nouvelle fois le salarié à un entretien préalable, sauf si la sanction est un avertissement (3).
5. Comment justifier la rétrogradation ?
Les motifs de la rétrogradation
Alternative au licenciement, la rétrogradation est une sanction disciplinaire lourde intervenant après la prise de mesures préalables par l'employeur. Elle implique de grands changements dans les responsabilités du salarié, notamment dans ses fonctions et dans la diminution logique du salaire.
La rétrogradation doit donc être proportionnelle à la gravité de la faute pour être licite.
Ainsi, l'employeur peut choisir la rétrogradation quand le salarié qui commet une faute grave justifiant qu'il ne puisse pas continuer à exercer le poste qu'il occupe, reste, cependant, un élément que l'employeur souhaite garder au sein de son entreprise. Mais aussi lorsque le salarié n'a pas les compétences pour son poste, on parle d'insuffisance professionnelle. Il est également possible d'appliquer cette sanction en cas de réorganisation de l'entreprise suite à des difficultés économiques.
La rétrogradation de poste sans perte de salaire et la sanction pécuniaire
La rétrogradation disciplinaire reste une sanction délicate, car elle ne doit jamais s'apparenter à une sanction pécuniaire. Le changement de poste doit être justifié et ne pas représenter juste un moyen de sanctionner le salarié par une baisse de salaire.
De la même manière, la rétrogradation "cachée" qui implique le retrait de responsabilités sans baisse de salaire par l'employeur peut, dans certains cas, s'apparenter à du harcèlement moral, si le Conseil de prud'hommes dans le cadre de son appréciation souveraine le décide.
(1) Articles L1311-2 et L1321-1 du Code du travail
(2) Article L1334-1 du Code du travail
(3) Article L1332-2 du Code du travail
(4) Article R1332-1 du Code du travail
(5) Article L1332-1 du Code du travail
(6) Article L.1332-2 du Code du travail
(7) Cass. Soc, 2 mars 2010, n° 08-44902
(8) Cass. Soc. 10 février 2021, n° 19-20918
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