Quelle est la définition du harcèlement moral ? Quels sont les signes du harcèlement moral ? C'est quoi la pression psychologique ?

Le harcèlement moral au travail se traduit par des agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail du salarié (1)

Cette dégradation des conditions de travail est susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Le harcèlement est un délit puni par la loi, que vous soyez salarié, stagiaire ou apprenti, voire même manager, bien que dans ce cas, ce soit plus rare. L'auteur de faits de harcèlement moral encourt une peine d'emprisonnement de 2 ans et une amende de 30.000 euros (2)


Bon à avoir :

Les pressions psychologiques auxquelles un salarié peut être confronté dans le cadre de son activité professionnelle ne sont pas constitutives en soi d'un harcèlement moral. Néanmoins, elles peuvent traduire une forme de harcèlement moral dès lors qu'elles ont un caractère répété et ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail du collaborateur susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel, elles peuvent constituer un harcèlement moral.

Victime de harcèlement moral, vous souhaitez savoir comment vous défendre ? 

Quels faits sont considérés comme harcèlement moral au travail ? 12 exemples concrets

Au travers d'exemples concrets, nous vous aidons à déterminer ce qui peut constituer un harcèlement moral afin de ne pas le confondre avec la pression inhérente à votre activité. Une telle confusion vous exposerait, en cas de dénonciation abusive, à des sanctions.

Voici des faits dans lesquels la Cour de cassation a reconnu l'existence d'un harcèlement moral.

1. Dénigrement et brimade

En l'espèce, le salarié avait reçu des ordres et des critiques d'une salariée qui se serait comportée comme sa supérieure et lui aurait lancé des quolibets (propos moqueurs). Il avait aussi été destinataire de courriers "insistants" de son employeur. 

La Cour de cassation a retenu la nécessité d'une réalité d'actes répétés et injustifiés caractérisant une violence morale et psychologique de nature à nuire au salarié pour pouvoir caractériser dans cette affaire, une faute imputable à l'employeur constitutive d'un harcèlement moral (3).

2. Critique injustifiée

Le supérieur hiérarchique de la salariée s'était livré, de manière répétée et dans des termes humiliants, à une critique de l'activité de cette dernière, en présence d'autres salariés (4).

3. Humiliation publique

Propos blessants et humiliants proférés de manière répétée par un supérieur hiérarchique (5).

4. Mesure vexatoire

Le salarié avait fait l'objet de multiples mesures vexatoires, telles que :

  • l'envoi de notes contenant des remarques péjoratives assénées sur un ton péremptoire propre à le discréditer ;
  • des reproches sur son "incapacité professionnelle et psychologique" et sa présence "nuisible et inutile" ;
  • le retrait des clés de son bureau ;
  • sa mise à l'écart du "comité directeur" ;
  • la diminution du taux horaire de sa rémunération.

La Cour de cassation a retenu que ces faits ne pouvaient pas être justifiés par l'exercice du pouvoir de direction de l'employeur (6).

5. Tâche dévalorisante

Le fait de confier à un salarié des tâches ne correspondant pas à sa qualification, d'opérer des retenues sur salaire injustifiées et d'opérer un discrédit auprès de ses collègues (7) est constitutif d'un harcèlement moral.

6. Agressivité

Le comportement agressif du supérieur hiérarchique traduisant une volonté de restreindre les fonctions du salarié (rétrogradation) sans explications (8) constitue des faits de harcèlement moral.

Dans une autre affaire, la Cour de cassation a relevé que les propos dénoncés par la partie civile ("comment on peut engager des bons à rien comme cela" et "si vous ne savez pas porter, vous n'avez qu'à pas prendre des métiers d'homme"), excédaient les limites du pouvoir de direction du prévenu (9).

"Comment on peut engager des bons à rien comme cela ?!''  et "Si vous ne savez pas porter, vous n'avez qu'à pas prendre des métiers d'homme !"

7. Tâche dépassant ses capacités

Confier au salarié de manière habituelle une tâche dépassant ses capacités et mettant en jeu sa santé (10) peut être assimilé à du harcèlement moral. 

8. Mise au placard dans l'entreprise

Salarié installé dans un local exigu, dépourvu de chauffage et d'outils de travail avec interdiction de parler à ses collègues (11).

Ou encore, le fait de s'opposer à ce qu'un salarié reprenne ses fonctions après un transfert d'entreprise et de l'obliger à prendre ses congés afin de l'écarter de ses fonctions (12).

9. Privation d'outils de travail professionnels

Injures à caractère racial et défaut de bureau, d'ordinateur et de téléphone au retour d'un congé maternité (13).

10. Avertissements infondés

Salariée subissant 4 avertissements dont aucun n'est fondé et sans reproche préalable  (14).

11. Situation de bore-out, ennui au travail

Un récent arrêt rendu par une Cour d'appel a retenu le bore-out (ennui au travail) comme constitutif de harcèlement moral (15).

Les conditions de travail du salarié (ennui et manque d'activité) sont en lien avec son état de santé dégradé (dépression, crise d'épilepsie). L'employeur n'a pas réussi à prouver que ces éléments n'étaient pas constitutifs de harcèlement moral. Il est donc condamné à verser des dommages-intérêts au salarié.

12. Pression disciplinaire

Nombreuses convocations à des entretiens préalables dans le cadre de 4 procédures disciplinaires dont 2 restées sans suite pendant une période de fragilité du salarié et une inaptitude liée à son état dépressif résultant de la dégradation de ses conditions de travail  (16).

Comment prouver et dénoncer un cas de harcèlement moral au travail ?

Il suffit pour le salarié de présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement pour disposer de moyens d'action à la fois devant le Conseil de prud'hommes et devant le juge pénal (17).

Vous envisagez de saisir le Conseil de prud'hommes pour harcèlement moral et souhaitez connaître la procédure ?

En revanche, dénoncer à tort des faits de harcèlement moral peut avoir de lourdes conséquences aussi bien pour vous mais aussi pour la personne faisant l'objet de telles accusations.

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Références :
(1) Article L1152-1 du Code du travail
(2) Article 222-33-2 du Code pénal 
(3) Cass. Soc. 24 juin 2009, n°07-43994
(4) Cass. Soc. 8 juillet 2009, n°08-41638
(5) Cass. Soc. 12 juin 2014, n°13-13951
(6) Cass. Soc. 26 mars 2013, n°11-27964
(7) Cass. Crim. 6 février 2007, n°06-82601
(8) Cass. Soc. 24 juin 2009, n°07-45208
(9) Cass. Crim. 19 juin 2018, n°17-82649
(10) Cass. Soc. 7 janvier 2015, n°13-17602
(11) Cass. Soc. 29 juin 2005, n°03-44055
(12) Cass. Soc, 12 juin 2019, n°17-13636
(13) Cass. Crim. 16 février 2010, n°09-84013
(14) Cass. Soc. 22 mars 2007, n°04-48308
(15) CA Paris, 2 juin 2020, n°18/05421
(16) Cass. Soc. 18 mars 2014, n°13-11174
(17) Article L1154-1 du code du travail