Qu'est-ce que le barème Macron pour les indemnités prud'hommes ? Que dit le Code du travail ?

Lorsqu'un licenciement est sans cause réelle et sérieuse (= licenciement abusif, = licenciement injustifié), le salarié a droit, en plus de l'indemnité légale de licenciement (1), à des dommages et intérêts (=indemnités prud'homales).

Le montant de ces indemnités prud'homales est déterminé selon le barème Macron (2). Ce barème d'indemnisation encadre le montant minimum et maximum qu'un salarié peut toucher au titre des dommages-intérêts. 

Il varie en fonction de l'ancienneté du salarié licencié abusivement et du nombre de salariés qu'emploie habituellement l'entreprise.

Indemnités pour licenciement abusif, qu'est-ce que c'est ?

Ces indemnités pour licenciement abusif sont des indemnités qui permettent de réparer le préjudice subi par le salarié, du fait de son licenciement non justifié. Ce sont des dommages-intérêts pour un licenciement qui a été jugé sans cause réelle et sérieuse. Ce sont ces indemnités qui sont encadrées par le barème Macron.

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Barème Macron : les débats continuent en 2023

Refus d'application du barème par certaines Cours d'appel

Malgré l'obligation, pour les juges, d'appliquer le barème Macron, de nombreuses cours d'appel écartent encore ce dispositif (3)

Elles estiment que ce barème ne permet pas de garantir une indemnisation adéquate aux travailleurs licenciés sans motif valable.

Pour de nombreuses Cours d'appel, le droit à une indemnité, au sens de l'article 24.b de la Charte sociale européenne, n'est pas garantie en raison des plafonds fixés par le barème Macron.

Validation constante du barème Macron par la Cour de cassation

Même si de nombreuses Cours d'appel écartent l'application du barème Macron, la Cour de cassation a une jurisprudence constante : elle valide le barème et estime que les juges doivent l'appliquer.

Dans une décision du 11 mai 2022, la Cour de cassation a validé le barème d'indemnisation du salarié licencié sans cause réelle et sérieuse (4). Les juges sont donc tenus de l'appliquer strictement et ne peuvent pas appliquer une indemnisation au cas par cas. 

La Cour de cassation est venue préciser que ce barème ne va pas à l'encontre de la Convention n°158 de l'OIT (organisation internationale du travail), qui prévoit en son article 10 que le juge a le pouvoir de décider de verser une indemnité adéquate. Elle précise également que le barème ne porte pas une atteinte disproportionnée à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme (CEDH) et que le barème ne peut pas être mis à mal par la Charte sociale européenne, qui n'a pas d'effet direct en la matière (pas d'effet contraignant).

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La Cour de cassation a une nouvelle fois validé le barème Macron dans une décision du 20 septembre 2023 (5). D'après les juges, la situation concrète du salarié doit être appréciée pour déterminer le montant de l'indemnité entre les montants minimaux et maximaux du barème, et non pour décider d'écarter ce barème.

Le comité européen des droits sociaux (CEDS) contre le barème Macron

D'après Comité européen des droits sociaux (CEDS), les plafonds du barème Macron, prévus par l'article L1235-3 du Code du travail, ne sont pas assez élevés :

  • pour réparer le préjudice subi par la victime ;
  • et pour être dissuasifs pour l'employeur.

Pour ce comité, le droit à une indemnité adéquate n'est ainsi pas garanti. C'est ce qu'il a précisé dans ces arrêts.

La Cour de cassation n'a pas suivi ces décisions, indiquant qu'elles n'avaient pas de caractère contraignant en droit français.

Les recommandations du Comité des ministres du Conseil de l'Europe envers la France : 6 septembre 2023

C'est ainsi que le 6 septembre 2023, le Comité des ministres du Conseil de l'Europe a adopté une recommandation à destination de la France (suite aux réclamations des syndicats et aux rapports qui lui ont été transmis par le CEDS) (6).

Le Comité recommande notamment à la France :

  • de poursuivre ses efforts pour garantir que le montant des dommages et intérêts accordés aux victimes de licenciement injustifié sans motif valable soit dissuasif pour l'employeur, afin d'assurer la protection des travailleurs contre ces licenciements injustifiés ;
  • de réexaminer et modifier, le cas échéant, la législation et les pratiques pertinentes pour garantir que les indemnités et tout barème utilisé pour les calculer, tiennent compte du préjudice réel subi par les victimes et des circonstances individuelles de leur situation.
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Important : il ne s'agit que de recommandations

Les recommandations du Comité des ministres du Conseil de l'Europe ne sont pas contraignantes, elles sont uniquement incitatives. Elles ne s'imposent pas aux Etats, mais elles donnent des pistes d'action et peuvent faire l'objet d'un suivi.

Combien peut-on toucher pour un licenciement abusif ?

Principe du barème : plafond prudhommes pour l'indemnisation du salarié

Le montant des dommages et intérêts, accordés par le juge en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, est soumis à un plancher minimum et à un plafond maximum au-delà duquel les juges ne peuvent pas aller.

Tableau d'application du barème Macron pour les entreprises de 11 salariés ou plus

Le barème d'indemnisation applicable est le suivant (2) :

Ancienneté dans l'entreprise (en année)

Montant minimal (en mois de salaire brut)

Montant maximal (en mois de salaire brut)

0

---------------

1

1

1

2

2

3

3,5

3

3

4

4

3

5

5

3

6

6

3

7

7

3

8

8

3

8

9

3

9

10

3

10

11

3

10,5

12

3

11

13

3

11,5

14

3

12

15

3

13

16

3

13,5

17

3

14

18

3

14,5

19

3

15

20

3

15,5

21

3

16

22

3

16,5

23

3

17

24

3

17,5

25

3

18

26

3

18,5

27

3

19

28

3

19,5

29

3

20

30 et plus

3

20

📌 Exemple de lecture de ce tableau : un salarié ayant 4 ans d'ancienneté au moment du licenciement abusif, pourra obtenir des dommages-intérêts correspondant au minimum à 3 mois de salaire brut et au maximum à 5 mois de salaire brut. Le juge ne pourra pas aller en dessous ou au-dessus de ces 2 montants.

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Comment calculer le Barème Macron pour les entreprises de moins de 11 salariés ?

Néanmoins, il existe une particularité pour les entreprises de moins de 11 salariés (TPE). Une dérogation au plancher (au montant minimal) cité ci-dessus, est prévue.

Pour les salariés ayant jusqu'à 10 ans d'ancienneté, le montant minimum des dommages-intérêts est inférieur à celui prévu dans les entreprises de 11 salariés ou plus.

Ce plancher se compose ainsi :

Ancienneté dans l'entreprise (en année)

Indemnité minimale (en mois de salaire brut)

0

---------------

1

0,5 (donc 15 jours)

2

0,5 (donc 15 jours)

3

1

4

1

5

1,5

6

1,5

7

2

8

2

9

2,5

10

2,5

Au-delà de 10 ans d'ancienneté, la même indemnité minimale que celle prévue par le barème pour les entreprises de 11 salariés ou plus, s'applique également aux salariés des TPE (entreprises de moins de 11 salariés). Ainsi, au-delà de 10 ans d'ancienneté, le salarié a droit à une indemnité minimale égale à 3 mois de salaire en cas de licenciement abusif.

Le plafond est identique, qu'il s'agisse de TPE ou d'entreprises de 11 salariés ou plus.

 Cette actualité pourrait aussi vous intéresser : Litige devant le Conseil des prud'hommes (CPH) : pouvez-vous utiliser un élément de preuve déloyal ?

Exemples : quelle indemnité en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, selon le barème Macron ?

Exemple n°1 :

Robert a été licencié abusivement au bout de 5 ans par l'entreprise X, qui emploie 50 salariés.

Le montant de ses dommages et intérêts sera au minimum de 3 mois de salaire brut et plafonné à 6 mois de salaire brut.

Exemple n°2 :

Marc a été licencié abusivement au bout de 5 ans par l'entreprise X qui emploie 9 salariés.

Le montant de ses dommages et intérêts sera au minimum de 1,5 mois de salaire brut et plafonné à 6 mois de salaire brut.

💡 À noter : Ne confondez pas les dommages-intérêts pour licenciement abusif avec l'indemnité légale de licenciement qui, elle, reste non plafonnée.

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Les dommages et intérêts sont-ils plafonnés en cas de licenciement nul ?

Non, le barème Macron ne s'applique pas aux indemnités en réparation d'un licenciement nul (7).

6 mois de salaireDommages-intérêts minima en cas de licenciement nul

En effet, l'absence de plafonnement est maintenue lorsqu'il s'agit de licenciements nuls, car prononcés en violation d'une liberté fondamentale (droit de grève, droit d'expression, droit de retrait etc.), ou nuls en application d'une disposition législative.

Il s'agit des licenciements liés notamment à :

Dans ce cas, aucun plafond n'est applicable. Cependant, un plancher, égal à 6 mois de salaire minimum, pour compenser le préjudice subi, est applicable.

Références :
(1) Article L1234-9 du Code du travail
(2) Article L1235-3 du Code du travail
(3) Cour d'appel de Grenoble - Soc - Section B, 22 juin 2023 / n°21/03352
(4) Cass, Soc., 11 mai 2022, n°21-15247
(5) Cass. Civ. Soc. 20 septembre 2023, n°22-12751
(6) Recommandation CM/RecChS(2023)3 du Comité des Ministres du Conseil de l'Europe
(7) Article L1235-3-1 du Code du travail