Par des arrêtés du 27 février 2014, le préfet du Morbihan avait délivré à une société trois permis de construire pour la réalisation d’un parc éolien sur le territoire de la commune des Forges. Une association de défense pour l’environnement avait néanmoins obtenu l’annulation de ces arrêtés par le tribunal administratif de Rennes. Suite à l’annulation de ce jugement par la cour administrative d’appel de Nantes, l’association se pourvoit en cassation devant le Conseil d’Etat.

Pour mémoire, l’article R.111-21 du code de l’urbanisme dispose que : « le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales ».

Le Conseil d’Etat vient ici préciser qu’il ressort de cette disposition que si les constructions projetées portent atteinte aux paysages naturels avoisinants, l'autorité administrative compétente peut refuser de délivrer le permis de construire sollicité ou l'assortir de prescriptions spéciales. 


Il fournit ensuite un mode d’emploi à l’administration pour rechercher l'existence d'une atteinte à un paysage naturel de nature à fonder le refus de permis de construire ou les prescriptions spéciales accompagnant la délivrance de ce permis :
- l’administration doit tout d’abord apprécier la qualité du site naturel sur lequel la construction est projetée et d’évaluer ;
- elle doit apprécier ensuite l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site. L’administration ne peut alors mettre en oeuvre une balance d’intérêt autres que ceux visés à l’article R.111-21 du code de l’urbanisme pour apprécier la légalité du permis sollicité.

En l’espèce, la cour administrative d’appel s’est livré à une appréciation souveraine des faits de l’espèce en estimant que l’effet visuel des éoliennes sur le site était maîtrisé par le choix de leur implantation et par leur disposition. De plus, le site d’implantation du projet, certes répertoriée en ZNIEFF de type 2  ne fait l'objet d'aucune protection au titre du patrimoine naturel et ne figure pas parmi les paysages emblématiques du Morbihan répertoriés par l'atlas des paysages de ce département et a retenu.

Par ailleurs, l’association soutenait que le projet méconnaissait les dispositions de l’article R.111-2 du code de l’urbanisme en ce qu’elles prévoient que le projet peut être refusé ou assorti de prescriptions spéciales « s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ».
Le Conseil d’Etat estime ici que le projet retenu a fait l’objet de mesures de sécurité suffisantes et que le service d’incendie et de secours du Morbihan a donné un avis favorable au projet en cause. Dès lors  la cour a souverainement apprécié, sans les dénaturer, les faits de l'espèce et n'a pas commis d'erreur de droit en estimant que le préfet n'avait pas commis d'erreur manifeste d’appréciation.

Enfin, cet arrêt est l’occasion pour le Conseil d’Etat de venir préciser les dispositions de l’article R.111-26 du code de l’urbanisme qui prévoit que : « Le permis ou la décision prise sur la déclaration préalable doit respecter les préoccupations d'environnement définies aux articles L. 110-1 et L. 110-2 du code de l'environnement. Le projet peut n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si, par son importance, sa situation ou sa destination, il est de nature à avoir des conséquences dommageables pour l’environnement ».

Le Conseil d’Etat précise ainsi que ces dispositions ne  permettent pas à l'autorité administrative de refuser un permis de construire, mais seulement de l'accorder sous réserve du respect de prescriptions spéciales relevant de la police de l’urbanisme telles que celles relatives à l'implantation ou aux caractéristiques des bâtiments et de leurs abords, si le projet de construction est de nature à avoir des conséquences dommageables pour l'environnement.
Dès lors, s'il n'appartient pas à cette autorité d'assortir le permis de construire délivré pour une installation classée de prescriptions relatives à son exploitation et aux nuisances qu'elle est susceptible d'occasionner, il lui incombe, en revanche, le cas échéant, de tenir compte des prescriptions édictées au titre de la police des installations classées ou susceptibles de l'être.

En l’espèce, la cour s'est livrée à une appréciation souveraine des faits exempte de dénaturation et n'a pas commis d'erreur de droit en considérant que les permis litigieux n’étaient pas entachés d’une erreur manifeste. En effet, le pétitionnaire avait prévu un ensemble de mesures afin de limiter le risque incendie et le risque d’inondation.

Le recours de l’association est donc rejeté.

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