Quand pouvez-vous considérer que le débiteur a déposé le bilan ?

Cessation des paiements

Le débiteur dépose le bilan lorsqu'il est dans l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible : il est en cessation des paiements. En pratique, il ne peut plus régler ses dettes avec son actif disponible (1)

Dans ce cas, le débiteur doit déclarer l'état de cessation des paiements pour permettre la poursuite de l'activité de l'entreprise, le maintien de l'emploi et l'apurement du passif.

L'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire doit être demandée par le débiteur au plus tard dans les 45 jours qui suivent la cessation des paiements s'il n'a pas, dans ce délai, demandé l'ouverture d'une procédure de conciliation

Le tribunal fixe la date de cessation des paiements après avoir sollicité les observations du débiteur. À défaut, elle est réputée être intervenue à la date du jugement d'ouverture de la procédure.

Période suspecte

 Attention ! À compter de la date de cessation des paiements, le législateur prévoit une nullité relative ou de droit de certains actes et paiements accomplis (2) : paiement de dettes non échues (pas encore exigibles), paiement en nature, etc.

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Quel est l'ordre de paiement des créances ? Quelles sont les créances privilégiées et pouvant être payées à échéance ?

Tout savoir sur le dépôt de bilan et les procédures collectives.

Procédure de recouvrement avant le jugement d'ouverture de la procédure collective

Comment se faire rembourser à l'amiable en tant que fournisseur et obliger l'entreprise cliente à rembourser ?

Si vous avez connaissance du fait que votre client va déposer le bilan, vous pouvez tenter, avant l'ouverture de la procédure collective, de le mettre en demeure de respecter ses engagements contractuels et de solder sa dette sous un délai raisonnable - mais court - que vous allez lui impartir (3). Si le dépôt de bilan est imminent, la démarche semble toutefois peu engageante.

Comment le fournisseur peut-il se faire rembourser avec l'aide d'une société de recouvrement amiable ? 

Le créancier peut faire appel à une société de recouvrement amiable après avoir conclu une convention écrite dans laquelle il lui est donné pouvoir pour recevoir pour son compte (4).

Le juge peut-il intervenir ? Le recouvrement judiciaire

L'injonction de payer permet d'obtenir le paiement par un juge (5).

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Procédure de recouvrement après le jugement d'ouverture de la procédure collective

Modalité d'ouverture

Dès l'ouverture de la procédure, il est dressé un inventaire (6) :

  • du patrimoine du débiteur qui constitue le gage de ses créanciers professionnels ;
  • et des garanties qui le grèvent.

S'il apparaît, au cours de la période d'observation, que le débiteur dispose des sommes suffisantes pour désintéresser les créanciers et acquitter les frais et les dettes afférents à la procédure, le tribunal peut y mettre fin.

Dans sa mission, l'administrateur est tenu au respect des obligations légales et conventionnelles incombant au débiteur.

Déclaration de créances 

Le mandataire judiciaire, dans le délai de 15 jours à compter du jugement d'ouverture, avertit les créanciers connus de leur possibilité de déclarer leurs créances dans le - bref - délai de 2 mois à compter de la publication du jugement d'ouverture au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales Bodacc (7).

Sauf exceptions, les autres créanciers doivent déclarer la créance sous 2 mois à compter du jugement d'ouverture également.

=> La réalisation de cette étape permet au fournisseur d'avoir une chance de recouvrer sa créance.

 Attention ! Toute créance non déclarée ne sera pas considérée dans la procédure collective et la demande de remboursement ne pourra pas aboutir. Une exception consiste à formuler une requête en relevé de forclusion justifiant de l'impossibilité effective de déclarer la créance. Elle doit être adressée au greffe du tribunal de commerce, adressée au juge-commissaire dans les 6 mois qui suivent la publication du jugement d'ouverture au Bodacc (8). Si le créancier obtient une réponse favorable du juge-commissaire, il peut alors déclarer sa créance dans un délai d'1 mois suivant la notification de la décision de relevé de forclusion.

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Comment enregistrer/déclarer la créance pour demander à être remboursé ?

Personne habilitée à procéder à la déclaration :

Le représentant légal du créancier donc l'entrepreneur individuel lui-même ou le gérant dans le cas d'une SARL (société à responsabilités limitées) doit faire la déclaration. 
Il peut mandater un mandataire (avocat ou commissaire de justice - anciennement huissier de justice) ou un de ses préposés ayant reçu un pouvoir pour agir.

Contenu de la déclaration :

La loi ne prévoit pas de condition de forme pour effectuer la déclaration de créances mais elle doit contenir notamment, les éléments suivants (9) :

  • les éléments de nature à prouver l'existence et le montant de la créance si elle ne résulte pas d'un titre ; à défaut, une évaluation de la créance si son montant n'a pas encore été fixé ;

  • les modalités de calcul des intérêts dont le cours n'est pas arrêté, cette indication valant déclaration pour le montant ultérieurement arrêté ;

  • l'indication de la juridiction saisie si la créance fait l'objet d'un litige ;

  • la date de la sûreté et les éléments de nature à prouver son existence, sa nature et son assiette, si cette sûreté n'a pas fait l'objet d'une publicité.

À cette déclaration sont joints (sous bordereau) les documents justificatifs - pouvant être en copie. Il existe un formulaire-type de déclaration de créances.

Modalités de transmission de la déclaration :

La déclaration de créances est généralement adressée par lettre recommandée avec accusé de réception (LRAR) (pensez à en conserver l'accusé de réception).

Elle est transmise au mandataire judiciaire ou au liquidateur judiciaire selon la procédure collective ouverte (sauvegarde de justice, redressement ou liquidation judiciaire).

Créances à déclarer

  • les créances antérieures au jugement d'ouverture de la procédure collective. La déclaration des créances doit être faite alors même qu'elles ne sont pas établies par un titre. Celles dont le montant n'est pas encore définitivement fixé sont déclarées sur la base d'une évaluation ;
     
  • les créances postérieures au jugement d'ouverture ne bénéficiant pas du privilège de paiement (remboursables en priorité d'autres créances). Certaines créances postérieures au jugement d'ouverture bénéficient d'un privilège de paiement, c'est-à-dire qu'elles n'ont pas besoin d'être déclarées. Les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture sont à déclarer. Les délais courent à compter de la date d'exigibilité de la créance. Les créanciers dont les créances résultent d'un contrat à exécution successive déclarent l'intégralité des sommes qui leur sont dues (10) ;
     
  • certaines sûretés consenties par l'entreprise sur ses créances. 

Conditions requises pour le remboursement de la dette : ce que prévoit la loi

Vérification des créances

Le remboursement potentiel des sommes est soumis à vérification de chacune des créances déclarées par le mandataire judiciaire ou le liquidateur (existence effective et montant de la créance). 

Liste des créances

Dans le délai fixé par le tribunal, le mandataire judiciaire établit, après avoir sollicité les observations du débiteur, la liste des créances déclarées avec ses propositions d'admission, de rejet ou de renvoi devant la juridiction compétente. Il transmet cette liste au juge-commissaire (11).

Procédure d'admission

Les décisions d'admission ou de rejet des créances ou d'incompétence prononcées par le juge-commissaire sont portées sur un état (document appelé état des créances : il regroupe l'ensemble des décisions concernant l'admission des créances) qui est déposé au greffe du tribunal. Toute personne intéressée peut former une réclamation devant le juge-commissaire dans le mois suivant la publicité au Bodacc. Le dépôt de l'état des créances fait courir le délai de recours.

Procédure de conciliation

Si le débiteur n'est pas en cessation des paiements depuis plus de 45 jours, il est institué, devant le tribunal de commerce, une procédure de conciliation dont peuvent bénéficier les débiteurs exerçant une activité commerciale ou artisanale qui éprouvent une difficulté juridique, économique ou financière, avérée ou prévisible (12)

Le conciliateur a pour mission de favoriser la conclusion d'un accord amiable entre le débiteur et ses principaux créanciers destiné à désintéresser autant que possible les créanciers et mettre fin aux difficultés de l'entreprise (13).   

Cessation d'activité du débiteur sans déclaration de la cessation des paiements

Si le débiteur n'a pas déclaré la cessation des paiements, le fournisseur créancier peut l'assigner en vue de l'ouverture de la procédure. 

À noter : les membres du comité social et économique (CSE) peuvent communiquer au président du tribunal ou au ministère public tout fait révélant la cessation des paiements du débiteur.

Attention ! Lorsque le débiteur a cessé son activité professionnelle, l'assignation doit intervenir dans le délai d'1 an à compter de (14)

- la radiation du registre du commerce et des sociétés ;

- la cessation de l'activité, s'il s'agit d'une personne exerçant une activité artisanale, d'un agriculteur ou d'une personne physique exerçant une activité professionnelle indépendante, y compris une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé ;

- la publication de l'achèvement de la liquidation, s'il s'agit d'une personne morale non soumise à l'immatriculation.

Rappels :

Sauf dispositions contraires figurant aux conditions de vente ou convenues entre les parties (maximum 60 jours après la date d'émission de la facture), le délai de règlement des sommes dues ne peut dépasser 30 jours après la date de réception des marchandises ou d'exécution de la prestation demandée (15).

Par dérogation, un délai maximal de 45 jours fin de mois après la date d'émission de la facture peut être convenu entre les parties, sous réserve que ce délai soit expressément stipulé par contrat et qu'il ne constitue pas un abus manifeste à l'égard du créancier.

Les conditions générales de vente (CGV) doivent également préciser les conditions d'application dans lesquelles le retard produit intérêt au taux légal (taux directeur).

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Les CGV constituent le socle unique de la négociation commerciale : elles doivent être établies avec la plus grande attention (clauses obligatoires et facultatives).

Références :
(1) Article L631-1 du Code de commerce
(2) Article L632-1 du Code de commerce
(3) Article 1344 du Code civil
(4) Article R124-3 du Code des procédures civiles d'exécution
(5) Article 1405 du Code de procédure civile
(6) Article L622-6 du Code de commerce
(7) Article R622-21 du Code de commerce
(8) Article L622-26 du Code de commerce
(9) Article R622-23 du Code de commerce
(10) Article L622-24 du Code de commerce

(11) Article L624-1 du Code de commerce
(12) Article L611-4 du Code de commerce
(13) Article L611-7 du Code de commerce
(14) Article L631-5 du Code de commerce
(15)  Article L441-10 du Code de commerce