Face à une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, le juge doit examiner tous les faits qui lui sont soumis par le salarié, même si ces faits sont plus anciens (Cass. Soc. 30 juin 2021, n° 19-18533).

 

Définition de la résiliation judiciaire du contrat de travail 

La résiliation judiciaire du contrat de travail repose sur l’initiative du seul salarié qui a des reproches à faire à son employeur.

En effet, lorsque l’employeur a commis un ou plusieurs manquements, d’une gravité telle qu’ils rendent impossible la poursuite du contrat de travail, le salarié peut saisir le juge et de lui demander de prononcer la rupture du contrat de travail.

Dans une résiliation judiciaire, c’est le juge qui décide de la rupture du contrat de travail.

Le critère essentiel porte sur le manquement reproché par le salarié à son employeur : empêche-t-il ou non la poursuite du contrat de travail ?

La résiliation judiciaire n’est possible qu’en présence d’un contrat de travail à durée indéterminée (CDI). (Par exception, un salarié en contrat de professionnalisation peut également solliciter la résiliation judiciaire de son contrat de travail).

 

 

Les faits qui justifient une résiliation judiciaire du contrat de travail  

La question qui sert de fil conducteur à la résiliation judiciaire est toujours la suivante : les faits reprochés sont-ils suffisamment graves pour justifier l’impossibilité pour le salarié de poursuivre son contrat de travail.

 

Les faits peuvent être variés. 

Ils peuvent viser, par exemple, les situations suivantes :

  • Le harcèlement moral subi au travail (Cass. soc. 3 février 2016, n° 14-25843) ;
  • La rétrogradation imposée à un salarié au retour d’une longue absence pour maladie (Cass. soc. 26 mai 2010, n° 08-43152) ;
  • La discrimination subie par un salarié du fait de son état de santé (Cass. soc. 28 juin 2018, n° 16-28511) ;
  • Le non-paiement des heures supplémentaires (Cass. soc. 4 mai 2011, n° 10-14586) à la condition qu’elles ne soient pas contestables.
  • Etc…

  

Que doit faire le salarié pendant la procédure prud’homale ?

L’action en résiliation judiciaire doit être portée devant le Conseil de prud’hommes (CPH) qui devra examiner les faits portés à sa connaissance et se forger un avis.

L’employeur et le salarié doivent maintenir leurs relations contractuelles durant la procédure. Le salarié doit donc continuer de travailler. 

En pratique, le salarié est très souvent en arrêt maladie, pour justifier du fait que les manquements rendent impossible sa présence dans les locaux de l’entreprise.

 

Les effets de la résiliation judiciaire 

La conséquence directe est la rupture du contrat de travail, aux torts de l’employeur. 

A la condition que les faits reprochés à l’employeur soient reconnus comme des manquements suffisamment graves. 

Le contrat ne prend fin qu’au jour du prononcé de la résiliation judiciaire, sauf si le contrat de travail a été rompu avant cette date ou si le salarié n'est plus au service de l'employeur.

Cette résiliation judiciaire a les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ou nul (Cass. soc. 26 mars 2014, n° 12-21372).

 

L’employeur sera alors condamné à verser au salarié :

-          Une indemnité de licenciement,

-          Une indemnité compensatrice de préavis,

-          Des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

 

 

Les faits examinés par le juge

Par principe, le ou les manquements reprochés par le salarié ne doit pas reposer sur des faits anciens (Cass. soc. 9 décembre 2015, n° 14-25148 ; Cass. soc. 21 avril 2017, n° 15-28340).

En pratique la solution est plus nuancée.

C’est ce qu’a rappelé la Cour de cassation récemment (Cass. Soc. 30 juin 2021, n° 19-18533).

Dans cette affaire, une salariée était en arrêt maladie depuis juillet 2012. 

Elle a saisi le conseil de prud’hommes d’une demande de résiliation judiciaire en juillet 2015. 

Elle reprochait à son employeur un manquement à son obligation de sécurité l’ayant conduite à son arrêt de travail et des faits de harcèlement moral.

Certains faits étaient prescrits et d’autres étaient plus récents.

Les juges avaient alors considéré que sa demande effectuée en 2015 était tardive et l’avaient donc rejetée.

L’affaire a été portée devant la Cour de cassation qui n’est pas de cet avis.

La Haute juridiction a rappelé que le juge, saisi d’une demande de résiliation judiciaire, doit examiner l’ensemble des faits invoqués, quelle que soit leur ancienneté.

 

Sources :

Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 30 juin 2021 : RG n° 19-18533 

Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 3 février 2016 : RG n° 14-25843

Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 26 mai 2010 : RG n° 08-43152

Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 28 juin 2018 : RG n° 16-28511

Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 4 mai 2011 : RG n° 10-14586

Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 26 mars 2014 : RG n° 12-21372

Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 9 décembre 2015 : RG n° 14-25148

Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 21 avril 2017 : RG n° 15-28340

 

 

Par Maître Virginie LANGLET

Avocat au Barreau de Paris