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Publication du décret du 17 avril 2023 au JO : délai de 15 jours

La présomption de démission est effective depuis le 19 avril 2023, soit au lendemain de la publication du décret du 17 avril 2023 au JO, sur la mise en oeuvre de la présomption de démission par l'employeur lorsque le salarié abandonne son poste volontairement. 
Ce décret prévoit un délai de 15 jours calendaires, après la mise en demeure, pour que le salarié en abandon de poste puisse être considéré comme démissionnaire.

Qu'est-ce qu'un abandon de poste ?

L'abandon de poste est une absence non justifiée, non autorisée, volontaire et prolongée.

Il signifie que votre salarié quitte soudainement son travail :

  • avant la fin de son service ;
  • sans raison apparente ou légitime ;
  • et sans vous en informer.

Il peut aussi s'agir de la situation dans laquelle votre salarié ne reprend pas son poste le lendemain, sans vous avertir et sans justifier son absence.

Les conséquences en cas d'abandon de poste peuvent être préjudiciables, car il peut désorganiser le travail de l'entreprise, dans la mesure où vous n'avez pas le temps d'anticiper et de remplacer le salarié absent.

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Quelles est la procédure pour un abandon de poste depuis la réforme Loi Travail du 23 décembre 2022 ? Qu'est-ce que la présomption de démission ? Comment sanctionner en cas d'absence injustifiée ?

Comment réagir face à un abandon de poste ? Combien de courrier l'employeur doit-il envoyer ? Voici la procédure et les délais à respecter !

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​À retenir :

- Obligation pour l'employeur d'envoyer une mise en demeure, par une lettre recommandée ou remise en main propre :
    - mise en demeure de justifier son absence ;
    - mise en demeure de reprendre le travail ;
    - définir un délai fixé par vous-même (employeur).

- À l'expiration d'un délai qui ne peut pas être inférieur à 15 jours, le salarié est présumé avoir démissionné.
- Contestation de cette présomption de démission, possible devant le CPH.
- Pas d'ouverture de droit au chômage pour le salarié qui abandonne son poste.

1. Attendre 48 heures puis envoyer une mise en demeure de reprendre le travail

Il convient d'attendre un délai raisonnable de 2 jours à compter du début de l'absence, avant d'envoyer la mise en demeure. En effet, le salarié dispose en principe d'un délai de 48 heures pour vous envoyer son justificatif d'absence.

Aussi, toutes les absences ne sont pas un abandon de poste, c'est notamment le cas dans les situations suivantes :

  • consultation en urgence d'un médecin, justifiée par l'état de santé du salarié (1) ;
  • décès d'un proche ;
  • exercice du droit de retrait (2).

Il se peut aussi que votre collaborateur ait un problème, une difficulté importante l'empêchant de vous prévenir (état de santé préoccupant, accident, grave problème familial) ou qu'il exerce son droit de retrait.

Si vous n'avez toujours pas de nouvelle de votre salarié dans les 48 heures, alors il peut s'agir d'un abandon de poste.

La première étape consiste, pour l'employeur, à lui envoyer une mise en demeure, par lettre recommandée ou par remise en main propre contre décharge. 

En effet, le nouvel article L1237-1-1 du Code de travail* prévoit, dans un premier temps, que l'employeur procède à l'envoi d'une mise en demeure au salarié, afin qu'il : 

  • justifie de son absence ;
  • reprenne son poste dans le délai défini par l'employeur (et qui ne peut pas être inférieur à 15 jours).

⚠ Nouvel article L1237-1-1 du Code du travail : "Le salarié qui a abandonné volontairement son poste et ne reprend pas le travail après avoir été mis en demeure de justifier son absence et de reprendre son poste, par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge, dans le délai fixé par l'employeur, est présumé avoir démissionné à l'expiration de ce délai. Le salarié qui conteste la rupture de son contrat de travail sur le fondement de cette présomption peut saisir le conseil de prud'hommes. L'affaire est directement portée devant le bureau de jugement, qui se prononce sur la nature de la rupture et les conséquences associées. Il statue au fond dans un délai d'un mois à compter de sa saisine. Le délai prévu au premier alinéa ne peut être inférieur à un minimum fixé par décret en Conseil d'Etat. Ce décret détermine les modalités d'application du présent article".

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2. Délai de 15 jours après la mise en demeure, pour que le salarié soit présumé démissionnaire

Le délai, pour que la présomption de démission s'applique, commence à courir à compter de la première présentation de la mise en demeure émise par l'employeur.

Un seul courrier suffit pour que soit présumée la démission, à l'expiration dudit délai. Le nouvel article R1237-13 du Code du travail prévoit un délai minimum de 15 jours calendaires pour reprendre le travail, après la mise en demeure, sans quoi le salarié est considéré comme démissionnaire (3). 

Le délai qu'impose l'employeur ne peut donc pas être inférieur au minimum fixé par la législation en vigueur. 

A réception de la lettre de mise en demeure, le salarié doit donc informer son employeur s'il souhaite reprendre le travail ou non. Par ailleurs, le salarié peut se prévaloir auprès de son employeur d'un motif légitime de nature à faire obstacle à la présomption de démission (exemples : raisons médicales, exercice du droit de retrait, exercice du droit de grève) (3). A défaut de réponse à l'issue du délai de 15 jours calendaire, le salarié sera présumé démissionnaire. 

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Bon à savoir : la suspension du contrat de travail du salarié

Lors d'un abandon de poste, le contrat du salarié est considéré comme suspendu, durant toute la durée de l'absence. Autrement dit, l'employeur ne lui verse aucun salaire pour les jours d'absence.

3. Une présomption de démission établie par la loi

Le salarié qui n'a pas repris son poste de travail avant que le délai expire (15 jours calendaires minimum), est présumé démissionnaire et ce, même en l'absence d'une manifestation de volonté claire et non équivoque de quitter l'entreprise définitivement (4).

Ainsi, le principe selon lequel la démission ne se présume pas, est remis en cause. L'abandon de poste devient, en quelque sorte, l'exception à ce principe.

4. Contestation possible devant le Conseil de prud'hommes

Cette présomption peut être contestée dans le délai d'un mois, directement devant le bureau de jugement du Conseil de prud'hommes (CPH). C'est-à-dire sans passer par la phase préalable, et normalement obligatoire, de l'audience de conciliation permettant de trouver une solution amiable.

Le Conseil statuera sur la nature de la rupture du contrat de travail et ses conséquences.

Le caractère volontaire de l'abandon de poste emporte présomption de démission. L'abandon de poste ne doit pas découler d'un comportement fautif de l'employeur. Si tel était le cas, le salarié pourrait faire produire les effets d'une prise d'acte aux torts de l'employeur. La rupture du contrat de travail pourrait être ainsi qualifiée de licenciement sans cause réelle et sérieuse ou de licenciement nul.

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Sanction disciplinaire : connaître la procédure dès la convocation du salarié

Vous souhaitez obtenir plus d'informations sur la procédure à suivre pour sanctionner un salarié ? Grâce à notre dossier, évitez les erreurs dans cette procédure de sanction disciplinaire !

5. Est-ce que le salarié touche le chômage après un abandon de poste ? Quelles sont les conséquences de la présomption de démission pour les indemnités Pôle emploi ?

La loi "marché du travail" a prévu que la présomption de démission, lors d'un abandon de poste, ne permet pas aux salariés d'ouvrir des droits aux allocations chômage puisqu'il est ainsi assimilé à une perte volontaire d'emploi.  

En effet, la démission n'ouvre pas droit à la perception des indemnités Pôle emploi puisqu'elle est considérée comme une privation volontaire d'emploi.

C'est l'objectif recherché par le Gouvernement dans le cadre de sa réforme relative au "plein emploi" : limiter les départs volontaires silencieux permettant d'ouvrir droits aux allocations chômage. 

En effet, auparavant, c'était la procédure de licenciement pour motif personnel qui était enclenchée par l'employeur pour mettre fin à cette situation. Cette dernière donnait la possibilité, pour le salarié, d'ouvrir des droits aux indemnités chômage.

Si le salarié revient avant l'expiration de la mise en demeure : est-il possible de sanctionner l'absence injustifiée ? Peut-on engager une procédure disciplinaire ?

Le salarié qui reprend son activité avant l'expiration du délai prévu dans la mise en demeure, ne sera pas considéré comme démissionnaire. L'employeur aura tout de même la faculté d'user de son pouvoir disciplinaire pour sanctionner le salarié.

Ainsi, même si votre salarié revient suite à la mise en demeure que vous lui avez adressée par courrier recommandé, vous pouvez engager une procédure disciplinaire.

Les différentes sanctions prévues par le règlement intérieur de l'entreprise, peuvent être appliquées. Par exemple :

  • le blâme ; 
  • l'avertissement ;
  • ou encore la mise à pied. 

Si la sanction n'est pas prévue par le règlement intérieur, il est tout de même possible, pour l'employeur, de procéder à un licenciement disciplinaire.

Pour rappel, il est obligatoire, pour les entreprises de 50 salariés ou plus, d'avoir un règlement intérieur. Il reste facultatif pour les entreprises ayant un effectif inférieur (5)

Si vous envisagez de prendre à l'encontre du salarié une sanction lourde, vous devez le convoquer à un entretien préalable à sanction disciplinaire, pouvant aller jusqu'au licenciement.

Par principe, la convocation à l'entretien préalable doit être adressée au salarié, par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai 2 mois suivant la connaissance du fait fautif (6)

Toutefois, des poursuites disciplinaires sont possibles au-delà de ce délai, lorsque le comportement fautif du salarié (en l'occurrence l'absence injustifiée) perdure depuis plus de 2 mois.

L'absence injustifiée est un comportement fautif.

Une procédure disciplinaire à l'encontre de votre salarié doit être, par principe, rapide. Plus vous attendez pour le sanctionner, moins la faute grave se justifie.

📌 Exemple : un délai de 6 semaines a pu être considéré par les juges comme étant trop long pour invoquer la faute grave (7).

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Références :
  • (1) Cass. Soc. 3 juillet 2001, n°99-41738
  • (2) Article L4131-3 du Code du travail et CA Paris, 7 novembre 2013, n°11/12273
  • (3) Article R1237-13 du Code du travail
  • (4) Article L1237-1-1 du Code de travail 
  • (5) Article L1311-2 du Code de travail
  • (6) Article L1332-4 du Code du travail
  • (7) Cass. Soc. 6 décembre 2000, n°98-43441