Définition : qu'est-ce qu'un abandon de poste ? 

Les conditions de l'absence du salarié

L'abandon de poste est une absence non justifiée, non autorisée, volontaire et prolongée

Dans cette situation, votre salarié quitte soudainement son travail :

  • sans raison apparente ou légitime ;
  • et sans vous en informer.

Les conséquences, en cas d'abandon de poste, peuvent être préjudiciables pour l'entreprise, dans la mesure où vous n'avez pas le temps d'anticiper et de remplacer le salarié absent.

Peu importe le type de contrat ou le moment dans le contrat, l'abandon de poste en CDD (contrat à durée déterminée) ou en CDI (contrat à durée indéterminée) peut produire des effets, tout comme un abandon de poste pendant la période d'essai.

⚠ En revanche, il convient de vérifier qu'il ne s'agit pas d'un autre motif de rupture du contrat (rupture libre du contrat pendant la période d'essai après respect d'un préavis, rupture du CDD pour un CDI, etc.).

Pour le salarié, cette absence injustifiée peut conduire à la rupture du contrat de travail.

📑 Cet article devrait vous intéresser : Abandon de poste CDI : guide complet

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Téléchargez notre dossier sur la procédure d'abandon de poste

À partir de quand l'absence injustifiée peut-elle devenir un abandon de poste ? Licencier ou appliquer la nouvelle Loi sur la présomption de démission ? Quels sont les motifs légitimes d'absence ? 
Ce dossier fait le point sur les absences injustifiées et sur la procédure à respecter en cas d'abandon de poste.

La durée de l'absence du salarié

L'absence injustifiée, de courte durée, ne peut caractériser la volonté du salarié d'abandonner définitivement son poste de travail.

Dans un premier temps, il est important de rechercher les causes de l'absentéisme du salarié. Le non-respect de ses obligations contractuelles peut-il s'expliquer autrement que par la seule volonté du salarié de ne pas retourner travailler au sein de votre entreprise ?

48Heures

Si votre collaborateur reprend rapidement le travail, il ne s'agit pas d'un abandon de poste mais d'une absence (justifiée ou non).

Dans tous les cas, il convient attendre une absence minimale de 48 heures avant d'engager toute procédure.

Exemple d'abandon de poste

Les exemples d'abandon de poste sont nombreux en jurisprudence. C'est le cas, par exemple, du salarié qui ne reprend pas son poste le lendemain d'une journée de travail, sans vous avertir et sans justifier son absence, ou encore de celui qui ne revient pas après une période de congés payés.

👨‍⚖️ Prenons l'exemple d'une affaire jugée en 2021, pour y voir plus clair.

À la suite d'une altercation avec un proche de la gérante d'une station d'entretien de véhicule, un salarié a précipitamment quitté son poste en début d'après-midi. Laissant la station sans la présence d'un autre salarié, il n'a pris aucune précaution lors de son départ (éteindre la lumière, fermer les locaux contenant les recettes en espèces de l'entreprise, etc.).
Selon le juge, et en présence des éléments de preuve mis à sa disposition, le comportement du salarié constituait bien un abandon de poste, caractérisant une violation des obligations du contrat de travail (1) (il est à noter que cet arrêt a été rendu avant la réforme de l'abandon de poste et des délais à respecter par l'employeur).

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Procédure étape par étape en cas d'abandon de poste

1. Attendre 48 heures puis envoyer une mise en demeure de reprendre le travail

Il convient d'attendre un délai raisonnable de 2 jours à compter du début de l'absence pour permettre au salarié de se justifier, avant d'envoyer la mise en demeure (vérifier ce que prévoit le règlement intérieur et la convention collective qui peuvent prévoir un autre délai).

2. Envoyer une lettre de mise en demeure : modalités et modèle de lettre

Les 48 heures passées, la deuxième étape consiste, pour l'employeur, à envoyer une mise en demeure au salarié, par lettre recommandée ou par remise en main propre contre décharge.

L'objectif de la mise en demeure consiste à demander au salarié de :

  • justifier de son absence ;
  • et reprendre son poste dans le délai imparti (qui ne peut pas être inférieur à 15 jours pour la présomption de démission).

Attention au contenu de la lettre de mise en demeure : elle doit contenir des mentions obligatoires si l'employeur entend faire jouer la présomption de démission. Le Conseil d'État s'est prononcé sur ce point, récemment (📂 se reporter au dossier complet).

À noter : le salarié étant absent, la remise en main propre semble peu réalisable.

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Rédigé par nos juristes, ce modèle de lettre, prêt à l'emploi, vous permet de mettre en demeure un salarié absent de justifier son absence et de reprendre son poste.

3. S'assurer du fait qu'il ne s'agisse pas d'un motif légitime

Toutes les absences ne sont pas des abandons de poste, c'est notamment le cas dans les situations suivantes :

💡 Exemple : 

Il est possible qu'un salarié victime d'un accident ou d'une maladie ne soit pas en état d'informer immédiatement son employeur de son absence. Il est donc important de ne pas se précipiter et de vérifier si le salarié présente un motif légitime d'absence.

Dans notre exemple, il est probable que dans un tel cas, le salarié aurait pu par la suite déclarer être en arrêt maladie et son absence ne serait, en conséquence, pas assimilable à un abandon de poste (5).

4. Respecter un délai raisonnable et ou de 15 jours après la mise en demeure, si l'employeur entend que le salarié soit présumé démissionnaire

15 joursDélai à respecter

Après la mise en demeure, l'employeur reste libre :

  • d'exercer son pouvoir disciplinaire ;
  • ou de préférer faire jouer la présomption de démission.

💡 Il doit laisser un délai raisonnsable au salarié pour se justifier. S'il veut faire jouer la présomption de démission, un seul courrier suffit pour que la démission soit présumée, à l'expiration du délai de 15 jours.

À la réception de la lettre de mise en demeure de justifier ses absences, le salarié doit informer l'employeur de son intention de reprendre le travail ou non. Par ailleurs, le salarié peut se prévaloir auprès de son employeur d'un motif légitime de nature à faire obstacle à la présomption de démission (📂 se reporter à notre dossier complet) (6).

Dans ce cas, le Code du travail prévoit un formalisme strict qu'il doit respecter.

5. Rompre le contrat de travail 

Appliquer de la présomption de démission 

🗓 Depuis le 19 avril 2023, le salarié en abandon de poste peut être présumé démissionnaire. En principe, la démission du salarié doit résulter d'une volonté claire et non équivoque.

Néanmoins, dans le cas d'un abandon de poste, le Code du travail prévoit que le salarié qui n'a pas repris son poste de travail avant l'expiration du délai imparti par l'employeur et qui n'a pas justifié son absence est présumé démissionnaire (7)

Bon à savoir : l'idée, pour le législateur, était de mettre un frein à une pratique qui consistait, pour le salarié, à ne pas démissionner, mais à abandonner son poste, dans l'objectif d'être licencié et de percevoir ensuite les allocations chômage pour privation involontaire d'emploi.

📑 Pour en savoir plus : Abandon de poste : la présomption de démission établie par la loi

À l'expiration du délai imparti par l'employeur, le salarié est présumé démissionnaire et le point de départ du délai de préavis commence, le cas échéant.

Appliquer la procédure disciplinaire

Si l'employeur n'entend pas faire jouer la présomption de démission, l'employeur peut décider de sanctionner la faute que constitue l'absence injsutifiée du salarié. La sanction peut aller jusqu'au licenciement.

Pour ce faire, il doit impérativement respecter la procédure disciplinaire.

6. Contestation possible devant le conseil de prud'hommes

Par le salarié

Le salarié dispose d'un délai légal maximum pour contester et renverser la présomption (absence due à l'usage du droit de retrait, du droit de grève, procédure de mise en demeure non respectée, comportement de l'employeur, etc.).

L'affaire est portée directement devant le bureau de jugement du conseil de prud'hommes (CPH) : il n'y a pas la phase préalable, normalement obligatoire, de l'audience de conciliation permettant de trouver une solution amiable. Le Conseil statue sur la nature de la rupture du contrat de travail et ses conséquences.

Si le salarié conteste le licenciement, il saisit également le conseil de prud'hommes.

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À noter :

L'abandon de poste ne doit pas découler d'un comportement fautif de l'employeur. Si tel était le cas, le salarié pourrait faire produire les effets d'une prise d'acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur. La rupture du contrat de travail pourrait être ainsi qualifiée de licenciement sans cause réelle et sérieuse ou de licenciement nul.

 

Par l'employeur

Du côté de l'employeur, le bénéfice de dommages et intérêts en raison de l'abandon de poste du salarié n'est pas automatique

Pour obtenir une telle compensation, l'employeur doit notamment prouver une intention du salarié de nuire à l'entreprise, intention qui ne résulte pas de sa seule absence injustifiée.

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Procédure abandon de poste infographie

Procédure abandon de poste infographie

Les conséquences de la présomption de démission pour les indemnités chômage du salarié

📌 Le salarié présumé démissionnaire ne perçoit pas, au terme de son contrat de travail, les allocations chômage versées par France Travail (aide au retour à l'emploi, dite ARE) puisque la démission est considérée comme une privation volontaire d'emploi.

Comme nous l'avons vu, il s'agit justement de l'objectif recherché dans le cadre de la réforme relative au "plein emploi" : limiter les départs volontaires "déguisés" sous forme de licenciement ouvrant droit aux allocations chômage.

📑 Vous êtes salarié ? Découvrez notre article sur le sujet : Abandon de poste assimilé à la démission : quelles conséquences sur le chômage ?

Salarié revenu avant le délai imparti : sanction disciplinaire ou licenciement 

L'absence injustifiée du salarié n'est pas forcément synonyme de rupture du contrat de travail.

⚠ En revanche, en vertu de son pouvoir disciplinaire, l'employeur peut sanctionner cette absence s'il le considère nécessaire, et peut, dans les cas les plus graves, prononcer un licenciement.

Une sanction nécessairement prévue par le règlement intérieur

Le salarié qui reprend son activité avant l'expiration du délai prévu dans la mise en demeure, n'est pas présumé démissionnaire, mais l'employeur peut user de son pouvoir disciplinaire pour sanctionner la faute résultant du défaut de justification de son absence.

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Attention !

Avant d'envisager de le sanctionner, pensez toutefois à prendre en considération des éléments objectifs et subjectifs tels que l'ancienneté du salarié, son attitude irréprochable ou compliquée, etc.
En effet, si l'employeur est libre d'user de son pouvoir disciplinaire ou non, il doit cependant veiller à ce que la sanction choisie soit proportionnée à la faute du salarié (durée de l'absence, contexte de l'absence, comme un burn-out, par exemple).

 

La sanction envisagée doit être prévue par le règlement intérieur de l'entreprise lorsqu'il existe. 

💡 Exemples :

  • le blâme ;
  • l'avertissement ;
  • ou encore la mise à pied. 

Si la sanction n'est pas prévue par le règlement intérieur, il est tout de même possible, pour l'employeur, de procéder à un licenciement disciplinaire.

Bon à savoir : il est obligatoire, pour les entreprises de 50 salariés ou plus, d'avoir un règlement intérieur. Il reste facultatif pour les entreprises ayant un effectif inférieur (8).

Les règles en cas de procédure disciplinaire pour abandon de poste

Si vous envisagez de prendre à l'encontre du salarié une sanction lourde, vous devez le convoquer à un entretien préalable.

2mois

Par exemple, dans le cadre d'un licenciement disciplinaire, la convocation à l'entretien préalable de licenciement doit être adressée au salarié, par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai 2 mois suivant la connaissance du fait fautif (9). Ce délai est applicable aux autres sanctions.

Il est à noter que des poursuites disciplinaires sont possibles au-delà de ce délai, lorsque le comportement fautif du salarié (en l'occurrence l'absence injustifiée) perdure depuis plus de 2 mois, mais plus l'employeur tarde à agir, moins la faute grave se justifie.

💡 Exemple : un délai de 6 semaines a pu être considéré par les juges comme étant trop long pour invoquer la faute grave (10).

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Quelles sont les conséquences sur le salaire en cas d'abandon de poste ?

Tant que l'absence du salarié n'est pas justifiée (maladie, accident, etc.), le contrat de travail est suspendu.

De ce fait, la rémunération du salarié est suspendue elle aussi. En effet, pour rappel, la rémunération du salarié est due en contrepartie du travail accompli. Lorsque son absence n'est pas justifiée, la contrepartie n'est donc pas due.

⚠ Attention : les périodes de suspension du contrat de travail ne permettent pas non plus au salarié d'acquérir des congés payés. Il ne s'agit pas de temps assimilé à du travail effectif.

L'abandon de poste représente donc une perte de revenu pour le salarié. S'il souhaite bénéficier des allocations chômage, d'autres solutions existent, comme la négociation d'une rupture conventionnelle ou la démission pour motif légitime (exemple : un déménagement pour suivre son conjoint).

📑 Pour en savoir plus : Démission et chômage : toucher le chômage après la démission d'un CDI

Quelles sont les obligations de fin de contrat à respecter après un abandon de poste ?

Classiquement, au terme du contrat, l'employeur est tenu de remettre au salarié les documents de fin de contrat :

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✉ Notre modèle :
Modèle de lettre de mise en demeure pour abandon de poste pendant le préavis
Lettre de mise en demeure pour absences injustifiées (CDD)

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Références :

  • (1) Cass. Soc. 17 septembre 2014, n°13-16756
  • (2) Cass. Soc. 3 juillet 2001, n°99-41738
  • (3) Article L4131-3 du Code du travail et CA Paris, 7 novembre 2013, n°11/12273
  • (4) Cass. Soc. 21 avril 2022, n°20-18402
  • (5) Cass. Soc. 13 mars 2019, n°17-27015
  • (6) Article R1237-13 du Code du travail
  • (7) Article L1237-1-1 du Code de travail
  • (8) Article L1311-2 du Code de travail
  • (9) Article L1332-4 du Code du travail
  • (10) Cass. Soc. 6 décembre 2000, n°98-43441