Cette webconférence a été animée par Maître Anne-Laure Bellanger et Clémentine Picorit du cabinet La Boétie Avocats.

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L'Obligation d'Emploi de Travailleurs Handicapés (OETH)

- Commençons tout d'abord par rappeler ce que recouvre l'Obligation d'Emploi de Travailleurs Handicapés. A quelles entreprises s'applique-t-elle ? Et comment remplir ces obligations ?

L'obligation d'emploi des travailleurs handicapés est l'obligation pour les entreprises d'employer 6% de travailleurs handicapés parmi son effectif total, à temps plein ou à temps partiel (art. L. 5212-2 du Code du travail).

Ce taux d'emploi de 6% est révisable tous les 5 ans depuis le 1er janvier 2020, pour tenir compte de la prévalence des personnes en situation de handicap dans le marché du travail.

Pour connaître ce que recouvre l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés, il faut au préalable définir ce qui est juridiquement entendu par “travailleur handicapé”. Il s'agit de toute personne dont les possibilités d'obtenir ou de conserver un emploi sont effectivement réduites par suite de l'altération d'une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales ou psychiques (art. L. 5213-1 du Code du travail).

Par application de l'art. L. 5212-13 du Code du travail, les personnes suivantes vont également être bénéficiaires de l'obligation d'emploi :

-> les victimes d'accident du travail et de maladie professionnelle ayant entraîné une incapacité permanente au moins égale à 10 % et titulaires d'une rente attribuée au titre du régime général de sécurité sociale ou de tout autre régime de protection sociale obligatoire;

-> les titulaires d'une pension d'invalidité sous certaines conditions à condition que l'invalidité des intéressés réduise au moins des deux tiers leur capacité de travail ou de gain;

-> les sapeurs-pompiers volontaires titulaires d'une allocation ou d'une rente d'invalidité;

-> les titulaires de la carte "mobilité inclusion" portant la mention "invalidité”;

-> les titulaires de l'allocation aux adultes handicapés

Seules les entreprises d'au moins 20 salariés sont soumises à l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés.

Depuis la réforme entrée en vigueur le 1er janvier 2020, les effectifs sont calculés au niveau de l'entreprise, et non plus au niveau de l'établissement. Jusqu'alors, seuls les établissements dépassant l'effectif de 20 salariés y étaient assujettis.

En prenant en compte le périmètre de l'entreprise plutôt que celui de l'établissement, l'employeur est donc plus susceptible d'être assujetti à une obligation d'emploi des travailleurs handicapés. En conséquence, davantage de travailleurs handicapés vont être intégrés professionnellement pour satisfaire à l'obligation des entreprises.

L'employeur dispose de plusieurs possibilités pour s'acquitter de son obligation d'emploi des travailleurs handicapés.

Premièrement, et par application de l'article L. 5212-6 du Code du travail, l'entreprise peut employer les bénéficiaires de l'obligation d'emploi susvisés, quelles que soient la durée et la nature de leur contrat (CDD, CDI, temps plein, temps partiel, etc). Les entreprises peuvent également accueillir des bénéficiaires de l'obligation d'emploi en stage ou en période de mise en situation professionnelle, même au-delà de la limite de 2% de l'effectif total (limite imposée avant le 1er janvier 2020).

Deuxièmement, l'employeur peut s'acquitter de son obligation en faisant application d'un accord de branche, de groupe ou d'entreprise agréé, prévoyant la mise en oeuvre d'un programme pluriannuel en faveur des travailleurs handicapés pour une durée maximale de trois ans, renouvelable une fois. (art. L. 5212-8 du Code du travail).

La durée totale de l'accord étant limitée à 6 ans, l'employeur ne pourra pas satisfaire son obligation d'emploi au-delà au travers d'un accord agréé. Il pourra cependant négocier des accords concernant le handicap en entreprise, par exemple au travers d'un accord QVT.

Enfin troisièmement, l'employeur peut s'acquitter de son obligation d'emploi en versant une contribution annuelle pour chacun des bénéficiaires de l'obligation qu'il aurait dû employer (art. L. 5212-9 du Code du travail)

L'article D. 5212-20 du Code du travail précise les modalités de calcul de la contribution annuelle, en ce qu'elle est égale au nombre de bénéficiaires de l'obligation multiplié par 400, 500 ou 600 fois le salaire horaire minimum de croissance.

La réforme entrée en vigueur le 1er janvier 2020 a supprimé la possibilité pour l'entreprise de s'acquitter de son obligation en concluant des contrats de fourniture, de sous-traitance, de prestations de services avec le secteur aidé ou protégé. En revanche, les dépenses afférentes sont prises peuvent être déduites de la contribution annuelle (art. L. 5212-10-1 du Code du travail). Par cela, l'objectif poursuivi est de favoriser l'emploi direct des travailleurs handicapés.

Pour satisfaire son obligation d'emploi, l'employeur peut bénéficier de différentes aides financières, notamment pour :

-> faciliter l'insertion professionnelle des personnes handicapées, pour participer au coût d'adaptation du poste de travail, pour aménager l'accès aux lieux du travail (art. L. 5213-10 et art. R. 5213-32 et suivants du Code du travail);

-> compenser les charges supplémentaires d'encadrement (art. L. 5213-10 et R. 5213-36 et suivants du Code du travail) ;

-> ou encore pour compenser la lourdeur d'un handicap (art. L. 5213-11 et art. R. 5213-39 et suivants du Code du travail)

- Quels aménagements un employeur doit-il prévoir pour accueillir un travailleur handicapé dans son entreprise ?

L'employeur est tenu d'une obligation de non-discrimination. En conséquence, il ne peut ni sanctionner, ni licencier ou écarter d'une procédure de recrutement un salarié en raison de son état de santé ou de son handicap (art. L. 1132-1 du Code du travail).

Il est également tenu à une nécessaire égalité de traitement par application de l'article L. 5213-6 du Code du travail. Par cela, l'employeur doit prendre les mesures appropriées permettant aux salariés bénéficiaires de l'obligation d'emploi, d'accéder à un emploi ou de conserver un emploi correspondant à leur qualification, de l'exercer ou d'y progresser ou pour qu'une formation adaptée à leurs besoins leur soit dispensée.

A défaut, le refus de prendre en charge des mesures appropriées peut-être constitutif d'une discrimination (Cass. soc. 3 juin 2020, n°18-21.993).

Dans le cadre du principe d'égalité de traitement auquel il est tenu, l'employeur doit s'assurer de l'accessibilité des lieux de travail quel que soit le handicap. Le Code du travail définit l'accessibilité d'un lieu comme la possibilité, pour le travailleur handicapé, d'accéder à ces lieux, d'y circuler, de les évacuer, de se repérer, de communiquer, avec la plus grande autonomie possible (art. R. 4214-26 du Code du travail)

Par ailleurs, les travailleurs handicapés doivent disposer de sanitaires et lavabos appropriés, en ce qu'ils permettent notamment à des personnes en fauteuil roulant d'y accéder de manière autonome (art. R. 4217-2 du Code du travail), et doivent pouvoir accéder aisément aux locaux de restauration (art. R. 4225-6 du Code du travail).

Plus généralement, l'emploi est tenu à une obligation de santé et de sécurité, c'est-à-dire qu'il doit mettre tout en oeuvre pour préserver la santé des salariés, et donc des travailleurs handicapés (art. L. 4121-1 Code du travail).

En cela, l'employeur est notamment tenu de respecter les préconisations du médecin du travail justifiées par des considérations liées à l'âge, à l'état de santé psychique ou physique du travailleur. A défaut, l'employeur est considéré comme ayant manqué à son obligation de santé et de sécurité.

Le refus réitéré de suivre les préconisations médicales peut s'analyser en une situation de harcèlement moral. En effet, la Cour de cassation a déjà jugé que l'employeur qui s'obstine à ne pas respecter les indications données par le médecin du travail et à faire exécuter au salarié des tâches interdites, sous prétexte qu'elles faisaient partie intégrante de son travail, commettait des faits de harcèlement moral (Cass. Soc. 28 janvier 2010, n°08-42.616)

En outre, le travailleur handicapé qui sollicite du télétravail doit pouvoir bénéficier du dispositif prévu aux articles L. 1222-9 et suivants du Code du travail. L'employeur doit motiver sa décision de refus, le cas échéant.

Enfin, le préavis de licenciement du travailleur handicapé est doublé dans la limite de trois mois, sauf si la convention ou accords collectifs de travail, ou à défaut, les usages prévoient un préavis d'une durée supérieure ou égale à trois mois (art. L. 5213-9 du Code du travail).

En revanche, le doublement du préavis de licenciement n'emporte pas le doublement de l'indemnité compensatrice de préavis (Cass. soc. 10 mars 2009, n°08-42.249. En l'espèce, un salarié avait été déclaré par le médecin du travail inapte à reprendre l'emploi occupé précédemment et son contrat avait été rompu).

- Dans quelles entreprises un référent handicap est-il obligatoire ? Qui peut être référent handicap et quelles sont ses missions ?

Un référent handicap doit être désigné au sein des entreprises de plus de 250 salariés pour accompagner, orienter et informer les personnes en situation de handicap (art. L. 5213-6-1 du Code du travail).

Le Code du travail ne précise pas la qualité de la personne désignée référent handicap. Cependant, dans un souci de cohérence, il est préférable que soit désigné un salarié en lien avec les travailleurs handicapés dans l'entreprise (Responsable RH, Responsable RSE, etc).

L'Agefiph (l'Association de Gestion du Fonds pour l'Insertion Professionnelle des Personnes Handicapées) a publié une fiche destinée à éclairer les entreprises et les salariés sur le rôle du référent handicap. Parmi les missions principales identifiées par l'association, on peut notamment retenir les suivantes :

-> informer/orienter/accompagner les salariés en situation de handicap en particulier à certains moments clés (entrée en formation, retour après un long arrêt, évolution de l'organisation évolution professionnelle, accompagnement dans la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé...) ;

-> sensibiliser et outiller les acteurs internes au recours aux entreprises adaptées (EA), aux établissements ou services d'aide par le travail (ESAT), ou aux travailleurs indépendants handicapés (TIH) ;

-> organiser des actions d'information et de sensibilisation (notions clés sur le champ handicap et emploi, offres de services mobilisables...) en direction de l'ensemble des salariés ou des actions ciblées (Codir, recruteurs, managers, services supports...) ;

-> ou encore communiquer en interne sur le plan d'actions handicap, les résultats, les expériences réussies... ;

- A quelles sanctions s'exposent un employeur qui ne respecterait pas ses obligations sur l'emploi de personnes handicapées ?

La réforme entrée en vigueur le 1er janvier 2020 a supprimé la pénalité versée par l'employeur au Trésor public, en cas de non-respect de l'obligation d'emploi.

Pour satisfaire à son obligation d'emploi des travailleurs handicapés, s'il n'embauche pas de bénéficiaires de l'obligation d'employeur, l'employeur est susceptible de verser une contribution annuelle à l'Agefiph. Cette contribution est calculée en fonction du nombre de travailleurs handicapés que l'employeur aurait dû employer.

Par application de l'article L. 5212-10 du Code du travail, les entreprises qui n'ont occupé aucun bénéficiaire de l'obligation d'emploi, n'ont passé aucun contrat ou n'appliquent aucun accord collectif, sont susceptibles de verser une surcontribution. En l'occurrence, la contribution normalement limitée à 600 fois le SMIC horaire est portée à 1.500 fois le SMIC horaire.

Par ailleurs, un employeur qui sanctionne, licencie ou refuse d'embaucher un travailleur en raison de son handicap est passible d'une peine de 3 ans d'emprisonnement et de 45 000 EUR d'amende (art. 225-1 et suivants du Code pénal)

La Déclaration Obligatoire de Travailleurs Handicapés (DOETH)

- A quelle fréquence cette déclaration doit-elle être faite et que doit-elle contenir?

La déclaration obligatoire de travailleurs handicapés doit être faite mensuellement voire annuellement pour les entreprises soumises à l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés.

En effet, les entreprises doivent déclarer mensuellement le nombre de bénéficiaires de l'obligation d'emploi au moyen de la DSN (déclaration sociale nominative). Toutes les entreprises sont concernées, y compris les entreprises non soumises à l'obligation d'emploi, c'est à dire dont l'effectif n'atteindrait pas 20 salariés.

En outre, les entreprises assujetties à l'obligation d'emploi sont soumises à une déclaration annuelle obligatoire, appelée DOETH. Pour les entreprises à établissements multiples, l'employeur choisit un établissement déclarant, lequel dispose des informations à déclarer de toute l'entreprise.

En pratique, la déclaration est réalisée dans la DSN afférente au mois de février, laquelle est exigible au mois de mars, sur la période de référence de l'année précédente.

Au titre de son obligation, l'employeur déclare (art. D. 5212-8 du Code du travail) :

-> le nombre de salariés travailleurs handicapés mis à sa disposition par une entreprise de travail temporaire ou un groupement d'employeurs,

-> le montant de la contribution Agefiph initialement due, avant les éventuelles déductions,

-> le montant des déductions non-plafonnées,

-> le montant de la contribution Agefiph effectivement due,

-> le cas échéant, l'application d'un accord agréé de branche, de groupe ou d'entreprise.

A défaut de toute déclaration, l'employeur est considéré comme n'ayant pas satisfait à son obligation d'emploi (art. L. 5212-5 du Code du travail).

- Le mode de calcul des effectifs des entreprises a changé cette année et des modulations de la contribution sont prévues jusqu'en 2024. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Le mode de calcul des effectifs dépend de l'effectif dit “sécurité sociale”, mesuré en moyenne sur l'année et non plus au 31 décembre de l'année de référence. Le seuil de 20 salariés doit être atteint pendant cinq années consécutives, pour que l'entreprise soit soumise à l'obligation d'emploi. Jusqu'alors, les entreprises bénéficiaient d'un délai de 3 ans d'exonération pour se mettre en conformité avec leur obligation d'emploi.

Pour calculer les effectifs, on se base sur les règles de décompte des effectifs sécurité sociale. En conséquence, un contrat temps plein est pris en compte au titre d'une unité, tandis qu'un temps partiel est pris en compte au prorata de son temps de présence. En cas d'entrée ou de sortie des effectifs d'un salarié, il est décompté au prorata du nombre de jours pendant lequel il a été employé.

Une modulation du montant de la contribution annuelle due au titre de l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés est proposée par l'Urssaf, pour limiter les éventuelles hausses de la contribution liées aux nouvelles modalités de calcul.

Pour reprendre expressément les modulation de l'Urssaf au titre de l'année 2020, la hausse de la contribution par rapport à l'année précédente est réduite de :

-> 30 % jusqu'à 10 000 EUR ;

->50 % de 10 001 EUR et jusqu'à 100 000 EUR ;

->70 % à compter de 100 001 EUR.

Pareillement, pour les années 2021 à 2024 au titre desquelles la contribution est due, un abattement unique est appliqué sur le montant de la hausse de la contribution par rapport à la contribution due au titre de l'année précédente :

-> 2021 : 80 % de la différence ;

-> 2022 : 75 % de la différence ;

-> 2023 : 66 % de la différence ;

-> 2024 : 50 % de la différence.

- La loi prévoit-elle des minorations du montant de la contribution ? Si oui, lesquelles ?

Le mécanisme de minoration a été supprimé par la réforme entrée en vigueur le 1er janvier 2020. Ce mécanisme permettait de réduire le nombre de bénéficiaires et donc le montant de la contribution.

Concernant la minoration qui était octroyée pour embaucher un travailleur handicapé de plus de 50 ans, elle est compensée par un mécanisme de survalorisation. Le nombre de travailleurs handicapés employés dans l'entreprise est survalorisé à chaque travailleur handicapé de plus de 50 ans.

En dehors du mécanisme des minorations, l'employeur peut déduire certaines dépenses à hauteur de 10% de la contribution due. La liste des dépenses déductibles est énumérée par l'article D. 5212-23 du Code du travail :

-> diagnostic et travaux en vue de l'accessibilité des locaux ;

->moyens humains, techniques ou organisationnels compensatoires à la situation de handicap, favorisant le maintien et la reconversion professionnelle des travailleurs handicapés.

->ou encore des actions de sensibilisation et de formation des salariés par des organismes extérieurs.

La contribution peut également faire l'objet d'une déduction :

-> au titre des emplois nécessitant des conditions d'aptitude particulière dont la liste est fixée à l'article D. 5212-25 du Code du travail ;

-> ainsi qu'au titre des contrats de fourniture, de sous-traitance et de prestations de services, à hauteur de 50% de la contribution due si l'entreprise embauche moins de 3% de travailleurs handicapés et 75% si elle embauche plus de 3% de travailleurs handicapés (art. D. 5212-22 du Code du travail).

La Reconnaissance de la Qualité de Travailleur Handicapé (RQTH)

En France, 85% des personnes handicapées le deviennent après l'âge de 15 ans. Se pose donc souvent la question du maintien dans l'emploi et de la Reconnaissance de la Qualité de Travailleur Handicapé (RQTH)

- La liste des personnes éligibles à la RQTH est beaucoup plus longue qu'on ne le pense. Pouvez-vous nous donner des exemples de personnes éligibles à ce dispositif ?

Pour mémoire, l'article L 5213-1 du Code du travail définit le travailleur handicapé comme ”toute personne dont les possibilités d'obtenir ou de conserver un emploi sont effectivement réduites par suite de l'altération d'une ou plusieurs fonctions physique, sensorielle, mentale ou psychique”.

Sont ainsi concernées les personnes souffrant d'un handicap, d'une maladie chronique (asthme, diabète, insuffisance cardiaque, sclérose en plaques, hépatite) ou d'un problème de santé ayant des répercussions au travail (problème de vue, troubles auditifs, dépression, rhumatisme, allergie à certains produits…).

Le statut de travailleur handicapé peut être attribué dans différents cas de figure, lorsque :

-> le travailleur a un problème de santé ou une déficience qui répond à la qualification évoquée ci-dessus. La MDPH fixe la liste des maladies invalidantes (de façon non exhaustive), notamment aux maladies suivantes : trouble déficit de l'attention (TDA),sclérose en plaque (SEP),diabète, polyarthrite rhumatoïde, spondylarthrite ankylosante, surdité ou trouble de l'audition, agoraphobie, migraines, dépression, autisme, maladie de crohn, trisomie 21, cancer

-> le travailleur handicapé est titulaire de l'Allocation adulte handicapé;

-> le travailleur est “invalide”

-> l'état du travailleur a été reconnu en maladie professionnelle ou ce dernier a été victime d'un accident du travail ayant donné lieu à un taux d'IP supérieur à 10 %

- Comment se déroule la RQTH ? Auprès de quels organismes les démarches doivent-elles se faire ?

Sur la base de cette définition, le statut de travailleur handicapé est reconnu, à titre temporaire ou définitif, par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH). Cette commission dépend de la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH).

Concrètement, le travailleur dépose un dossier auprès de la MDPH, avec des pièces justificatives et un certificat médical. On peut trouver le dossier facilement sur le site servicepublic.fr 

Pour cela, la CDAPH auditionne l'intéressé et tient compte notamment des certificats médicaux.

- Que l'on soit employeur, RH ou représentant du personnel, il faut parfois convaincre les salariés concernés d'entamer cette démarche. Afin de leur donner des arguments, quels sont les droits des salariés RQTH ?

On peut comprendre les réticences de certains salariés à accomplir cette démarche, tant la question de la discrimination en raison du handicap reste une réalité. Il demeure une sorte de tabou mais cela reste réel.

Nous accompagnons actuellement une salariée qui s'est vue proposer une rupture conventionnelle par son employeur lorsqu'elle a adressé son diagnostic de troubles du spectre autistique et sa reconnaissance travailleur handicapé, à ce dernier.

On ne peut donc qu'inviter les représentants du personnel et les services RH à se saisir des questions de l'emploi des travailleurs handicapés en amont, afin que lorsqu'un salarié annonce une reconnaissance travailleur handicapé, l'employeur soit d'ores et déjà familiarisé et sensibilisé à cette thématique et incité à s'appuyer sur un processus déjà négocié.

Ainsi, cela pourra permettre au travailleur handicapé de se sentir autorisé à faire reconnaître ce statut auprès de son employeur pour pleinement bénéficier des droits qui découlent de ce statut.

On peut ainsi regrouper ces droits, sous 5 thèmes :

-> l'aide à l'orientation professionnelle

-> l'accès à l'emploi facilité notamment par l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés (OETH)

-> l'aide et aménagement du poste de travail (notamment au travers de l'AGEFIPH): les salariés handicapés peuvent bénéficier à leur demande, d'aménagements d'horaires individualisés, propres à faciliter leur accès à l'emploi, leur exercice professionnel ou le maintien dans leur emploi (C. trav., art. L. 3121-49);

-> la surveillance médicale renforcée auprès de la médecine du travail. Le Code du travail prévoit expressément que le médecin du travail peut proposer des mesures individuelles d'aménagement du temps de travail justifiées par le handicap du salarié (C. trav., art. L. 4624-3);

-> ou encore du doublement du préavis en cas de licenciement (dans la limite de 3 mois).

Mise en place d'une politique handicap au sein d'un groupe ou d'une entreprise

- Les élus de CSE doivent-ils être consultés sur le handicap dans leur entreprise? Quelles informations doivent leur être fournies par l'employeur ? Enfin y a-t-il des obligations de négociation avec les organisations syndicales sur ce sujet?

L'article L 2312-8 CT, énonce les attributions générales du CSE et notamment :

"II. - Le comité est informé et consulté sur les questions intéressant l'organisation, la gestion et la marche générale de l'entreprise, notamment sur (...):

5° Les mesures prises en vue de faciliter la mise, la remise ou le maintien au travail des accidentés du travail, des invalides de guerre, des invalides civils, des personnes atteintes de maladies chroniques évolutives et des travailleurs handicapés, notamment sur l'aménagement des postes de travail”.

Au terme de ses attributions spécifiques, l'article L 2312-9 du Code du travail prévoit quant à lui, que:

“Dans le champ de la santé, de la sécurité et des conditions de travail, le CSE (...):

2° Contribue notamment à faciliter (...) l'adaptation et à l'aménagement des postes de travail afin de faciliter l'accès et le maintien des personnes handicapées à tous les emplois au cours de leur vie professionnelle”

Ajoutons que le bilan annuel doit être présenté au CSE ou au Comité de groupe.

Relevons que les négociations annuelles obligatoires (NAO), comprennent le thème de négociation "insertion et maintien dans l'emploi des travailleurs handicapés". Ce thème fait partie du bloc "égalité professionnelle et qualité de vie au travail".

- La mise en place d'une politique handicap dans une entreprise ou dans un groupe passe d'abord par la communication et la sensibilisation des salariés sur le handicap. Quels exemples pouvez-vous nous donner ?

L'on peut ainsi citer le “Hackathon organisé avec l'Association Paul Guinot pour les personnes déficientes visuelles.

Nous vous invitons à vous rendre sur le site de APF entreprises France handicap. Vous trouverez notamment des initiatives comme le WorkLab. Il s'agit d'un regroupement d'acteurs de l'emploi des travailleurs handicapés dans les Hauts de Seine, créé pendant la pandémie en 2020, qui travaillent sur l'inclusion professionnelle. C'est un partage d'informations et de réseaux. Ca donne des informations, des exemples d'actions concrètes pour favoriser l'inclusion.

- Des accords d'entreprise ou de groupes peuvent être négociés afin de mettre en place une politique handicap. Que doivent-ils comporter ? Quels plans d'action peut-on mettre en place ?

Les partenaires sociaux sont invités à conclure des accords agréés en faveur de l'emploi des travailleurs handicapés. Il s'agit d'un accord d'entreprise de droit commun, soumis aux règles communes de la négociation collective, mais qui a cette spécificité de pouvoir faire l'objet d'un agrément de l'administration.

Il est conclu pour 3 ans maximum renouvelable une fois.Il prévoit la mise en oeuvre d'un programme annuel ou pluriannuel en faveur des travailleurs handicapés. Il permet aux entreprises de s'acquitter de leur obligation d'emploi de travailleurs handicapés.

Il doit être précédé d'un état des lieux portant sur des données précises de la situation de départ et du taux d'emploi à partir des 3 dernières déclarations obligatoires d'emploi des travailleurs handicapés.

Il comporte obligatoirement (R 5212-14 CT):

-> un plan d'embauche en milieu ordinaire (objectif d'emploi) ;

-> un plan de maintien ;

Ainsi, une au moins des actions suivantes :

-> un plan d'insertion et de formation ;

-> et/ou un plan d'adaptation aux mutations technologiques.

Une instruction de la DGT du 7 janvier 2021 précise les modalités de mise en oeuvre d'un accord en faveur de l'emploi des travailleurs handicapés.

Elle détaille également, dans ses annexes, le plan d'embauche, le plan de maintien dans l'emploi, les actions de formation, les actions de sensibilisation, l'animation et le pilotage et propose une grille de bilan final de l'accord (Instr. no DGEFP/METH/2021/11 du 7 janvier 2021).

Les données inscrites dans l'accord doivent être précises et chiffrées, les processus décrits avec précision et clarté. Cela est nécessaire pour obtenir l'agrément de l'administration, puis pour dresser le bilan.

Nous vous invitons à consulter le guide pratique des accords agréés mis en ligne par le Ministère du travail

Concrètement, on peut citer les types d'engagements pris dans certains accords, notamment:

Au sein du groupe HERMES : l'accord groupe énonce, qu'après avoir réalisé un diagnostic conseil au niveau du groupe, une négociation a été décidée. Les futurs négociateurs syndicaux et les référents RH ont tout d'abord été formés à la problématique. Chaque partie prenante devait arriver à la négociation avec au moins trois propositions sur chacun des quatre thèmes ouverts : recrutement, maintien dans l'emploi, développement des achats au secteur aidé et communication sensibilisation. C'est une bonne façon d'être un négociateur aguerri sur le thème.

TRACTEBEL ENGIE : l'accord en faveur de l'emploi des travailleurs handicapé, implique des engagements sur plusieurs aspects : un plan de recrutement en externe ; un processus d'intégration avec adaptation au poste de travail, ou encore la mise en place d'un parrain, d'une marraine ou d'un tutorat ; des mesures d'accompagnement pour le maintien dans l'emploi et en faveur de la mobilité ou du reclassement dans le groupe ; la désignation d'un référent handicap ; une aide au transport domicile-travail ; des absences autorisées ; un entretien annuel spécifique avec la fonction RH ; la favorisation d'une collaboration avec les entreprises adaptées (EA) et les Esat (établissements d'aides par le travail) ; des formations à la sensibilisation ; la création d'une commission de suivi.

Plus l'entreprise sera sensibilisée, les acteurs se seront saisis de ces questions et plus il sera simple pour les salariés concernés, de faire valoir leurs droits. C'est donc le moment de passer à l'action!

Prochaine webconférence le 23 novembre 2021 à 14h :

Toutes les clés pour gérer un contrôle fiscal en entreprise

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