Interdiction de modifier le salaire sans l'accord du travailleur

Dans le cadre de votre pouvoir de direction, vos décisions s'imposent en principe aux salariés, hormis lorsque celles-ci ont pour incidence de modifier l'essence même du contrat de travail. Cela concerne les éléments contractuels déterminants, ayant motivé le salarié à accepter le contrat de travail. Ces éléments sont énumérés par une directive européenne (1) et selon elle, la rémunération est l'un de ces éléments essentiels du contrat, ce qui est confirmé par la jurisprudence française (2).

La modification du salaire, même à la hausse, ne pourra donc pas être effectuée sans l'accord du salarié (3). Ce principe est absolu. Il s'applique que ce soit sur les taux horaires (4), sur le montant de la rémunération du salarié (5), sur la structure ou sur le mode de calcul de celle-ci. La modification nécessite l'accord de votre salarié même si elle est justifiée par un motif économique (6)

A savoir :

Lorsque le législateur est à l'origine de cette hausse (augmentation du salaire minimum de croissance (SMIC)), le salarié touchant une rémunération au SMIC verra automatiquement son salaire augmenter étant donné qu'il s'agit d'une obligation légale.
Vous serez donc tenu d'adapter sa rémunération à la hausse, même sans l'accord du salarié.

En revanche, si l'augmentation de salaire provient d'une convention collective ou d'un accord d'entreprise, vous devez recueillir l'accord exprès du salarié avant de modifier sa rémunération (7).

💡 Enfin, l'acceptation d'une modification de la rémunération par votre salarié ne peut se déduire de la seule poursuite par celui-ci de son travail (8).

L'accord du salarié est donc obligatoire, même si le montant de la rémunération est plus élevé ou si la structure ou le mode de calcul est plus avantageux (9). Cette solution a été retenue par la Cour de cassation dans un arrêt du 25 janvier 2017 (10), où un salarié ayant été promu, a vu son salaire augmenter de 110 %. Cette augmentation est venue en contrepartie de la suppression de sa commission liée à son ancien poste. Cependant, le salarié en désaccord avec cette augmentation n'a pas signé l'avenant correspondant à cette modification, et il était dans son droit ! 

Modifier la rémunération par avenant au contrat de travail : est-ce obligatoire ?

Si vous souhaitez modifier la rémunération du salarié, que ce soit pour la diminuer, modifier le mode de calcul ou augmenter celle-ci, vous devez demander l'accord exprès du salarié. Pour des questions de preuve, vous devez recueillir son assentiment écrit par le biais d'un avenant au contrat de travail. Le fait pour le salarié d'exécuter sa prestation de travail avec cette nouvelle rémunération et sans contestation ne peut constituer une acceptation tacite de sa part. 

Téléchargez notre modèle d'avenant sur l'augmentation de salaire

Et si le salarié refuse ? Dans ce cas vous avez 2 choix :

  • soit revenir aux conditions initiales, c'est-à-dire continuer d'exécuter le contrat avec l'ancienne rémunération ;
  • soit licencier le salarié si vous parvenez à justifier des raisons vous ayant poussé à modifier le contrat (par exemple, en cas de difficultés économiques, si vous ne pouvez pas maintenir le mode de rémunération actuel).

Employeurs, si vous rencontrez des difficultés ou si vous avez un doute sur la procédure à suivre, n'hésitez pas à prendre contact avec l'un de nos professionnels du droit qui saura vous conseiller au mieux, en fonction de votre situation. 

 

Références :
(1) Directive Européenne n°2019/1152 du 20 juin 2019 relative à des conditions de travail transparentes et prévisibles dans l'Union européenne abrogeant la Directive Européenne n°91/533 du 14 octobre 1991
(2) Cass. Soc. 19 mai 1998, n°96-41573 et Cass. Soc. 18 mai 2011, n°09-69175
(3) Cass. Soc. 21 octobre 2014, n°13-18847
(4) Cass. Soc. 3 juillet 2001, n°99-40641 et Cass. Soc. 3 novembre 2011, n°10-11765
(5) Cass. Soc. 19 mai 1998, n°96-41573
(6) Cass. Soc. 31 octobre 2000, n°98-44988
(7) Cass. Soc. 15 septembre 2021, n°19-15732

(8) Cass. Soc. 16 novembre 2005, n°03-47560
(9) Cass. Soc. 3 mars 1998, n°95-43274, Cass. Soc. 28 janvier 1998, n°95-40275 et Cass. Soc. 5 mai 2010, n°07-45409
(10) Cass. Soc. 25 janvier 2017, n°15-21352