Qu'est-ce que la prime de partage de valeur (ex-prime Macron) ?
Initialement : la PEPA ou prime Macron
La Prime exceptionnelle de pouvoir d'achat (Pepa), dite aussi "prime Macron", a été créée fin 2018 à la suite des revendications des "Gilets jaunes". L'objectif affiché était d'augmenter significativement le pouvoir d'achat des salariés, notamment durant les périodes successives d'inflation en France. Elle a été versée une première fois en 2019.
Aujourd'hui : la PPV
Depuis le 1er juillet 2022, la prime de partage de la valeur (PPV) remplace la PEPA (1).
La loi qui transpose l'accord national interprofessionnel (ANI) sur le partage de la valeur en entreprise a été promulguée le 29 novembre 2023 et publiée au Journal officiel (2).
Cette prime permet aux entreprises de continuer de pouvoir verser à leurs salariés une prime défiscalisée et exonérée de cotisations sociales, sous certaines conditions.
La PPV pérennise ainsi le partage de la valeur des entreprises avec les salariés.
Est-ce que l'employeur est obligé de verser la prime de partage de valeur ?
Les employeurs n'ont pas l'obligation légale de verser une prime de partage de valeur. Chaque employeur peut décider d'attribuer ou non cette prime.
Quoi qu'il en soit, lorsque l'employeur fait le choix de verser une telle prime, il doit respecter les dispositions de l'accord qui institut cette prime ou le cas échéant, de la décision unilatérale (DUE).
Néanmoins, la Loi du 29 novembre 2023 portant transposition de l’ANI relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise prévoit différents dispositifs obligatoires pour inciter les entreprises à associer leurs salariés au partage de la valeur au sein de l'entreprise (abordés dans la dernière partie de cette acualité).
Qui peut toucher la PPV (salariés du privé, agents de la Fonction publique) ?
Quelles sont les catégories de travailleurs éligibles ?
Peuvent bénéficier de la prime :
- les salariés (qu'ils soient en CDD ou en CDI, à temps plein ou à temps partiel), y compris les titulaires d'un contrat d'apprentissage ou d'un contrat de professionalisation ;
- les salariés en intérim mis à disposition de l'entreprise utilisatrice ;
- les travailleurs handicapés bénéficiant d'un contrat de soutien et d'aide par le travail et relevant des établissements et services d'aide par le travail (Esat) ;
- et les agents publics relevant des établissements publics public administratifs ou industriels et commerciaux.
L'employeur peut-il exclure des salariés du bénéfice de la PPV ? Doit-on verser la PPV à tous les salariés ?
Les entreprises qui décident de verser la prime de partage de valeur à leurs salariés, ont le choix de la verser :
- à l'ensemble des salariés de l'entreprise ;
- à une partie seulement des salariés (ceux dont la rémunération ne dépasse pas un certain plafond) .
Comment est mise en place la prime de partage de valeur en 2024 ?
Négociation d'un accord d'entreprise
La mise en place de la prime de partage de valeur, le montant de la prime, le plafond de rémunération limitant le nombre de bénéficiaires et la modulation de son montant entre les bénéficiaires, doivent faire l'objet d'un accord d'entreprise ou de groupe conclu selon les mêmes modalités qu'un accord d'intéressement, c'est-à-dire :
- par convention ou accord collectif de travail ;
- par accord entre l'employeur et les représentants d'organisations syndicales représentatives de l'entreprise ;
- par accord conclu au sein du comité social et économique (CSE) ;
- par ratification d'un projet d'accord d'entreprise proposé par l'employeur, ratifié à la majorité des 2/3 du personnel.
Cet accord doit ensuite faire l'objet d'un dépôt auprès de la DDETS (Direction départementale de l'emploi, du travail et des solidarités) via la plateforme TéléAccords.
Rédaction d'une décision unilatérale de l'employeur
Le montant de la prime, le plafond et la modulation de son niveau entre les bénéficiaires, peuvent également faire l'objet d'une décision unilatérale de l'employeur. Dans ce cas, le comité social et économique (CSE) doit être informé et consulté en amont du versement de cette prime.
En l'absence de CSE ou dans les entreprises de moins de 11 salariés, l'employeur doit informer, par tout moyen, les salariés de sa décision de verser la prime de partage de valeur.
Quel est le montant maximum de la PPV ? Quels sont les montants moyens versés en 2023 et 2024 ?
Le montant de la prime de partage de la valeur est librement déterminé par l'employeur. Il n'y a pas de montant maximum fixé.
Néanmoins, cette prime ne peut bénéficier du régime d'exonération en vigueur, que dans la limite d'un certain montant (3 000 ou 6 000 euros selon les entreprises).
En 2023, dans le secteur privé, près de 5,9 millions de salariés en ont bénéficié, pour un montant total de versement de 5,27 milliards.
Le montant moyen distribué était de 885 euros.
L'employeur peut-il moduler le montant de la PPV selon le bénéficiaire (en fonction du temps de présence, de l'ancienneté...) ?
L'employeur peut décider de verser le même montant à tous les salariés bénéficiaires de la PPV.
Mais, il peut également moduler le montant de la prime selon les bénéficiaires, en fonction :
- de la rémunération ;
- du niveau de classification ;
- de l'ancienneté dans l'entreprise ;
- de la durée de présence effective pendant l'année écoulée : doivent être assimilés à des périodes de présence effective, les congés maternité, paternité, d'adoption et d'éducation des enfants. Il n'est donc pas possible de réduire la prime des salariés ayant bénéficié de ces congés au seul motif de leur absence ;
- du temps de travail prévu au contrat de travail.
Aucun critère ne peut conduire à une attribution de la prime fondée sur une discrimination entre les salariés.
L'employeur peut-il verser plusieurs PPV dans la même année ?
Les entreprises ont la possibilité de verser jusqu'à 2 PPV par année civile, dans la limite globale du plafond prévu actuellement :
- 3 000 euros par salarié et par an ;
- 6 000 euros par salarié et par an si l'employeur met en œuvre, à la date de versement des primes, ou a conclu un dispositif d'intéressement ou de participation.
La ou les PPV peuvent être versées en une ou plusieurs fois, dans la limite d’une fois par trimestre, au cours de l’année civile.
Quel régime d'exonération s'applique à la PPV ?
Quels sont les plafonds d'exonération de la PPV ?
La prime de partage de la valeur peut être exonérée de toutes les cotisations et contributions sociales d'origine légale ou conventionnelle à la charge du salarié et de l'employeur, dans la limite de 3 000 euros par bénéficiaire et par année civile.
Ce montant maximum peut être porté à 6 000 euros par bénéficiaire et par année civile dans les cas suivants :
- l'employeur a mis en place un dispositif d'intéressement alors même qu'il est déjà soumis à l'obligation de mettre en place un dispositif de participation ;
- l'employeur a mis en place un dispositif d'intéressement ou de participation alors même qu'il n'est pas soumis à l'obligation de mise en place d'un dispositif de participation.
Quelles sont les conditions d'exonération de la prime de partage de valeur 2024-2026 ?
La prime de partage de la valeur versée par une entreprise peut être exonérée de cotisations et contributions sociales patronales et salariales (y compris CSG et CRDS) et d’impôt sur le revenu lorsque les 3 conditions suivantes sont remplies (3) :
- elle est versée entre le 1er janvier 2024 et jusqu’au 31 décembre 2026 au plus tard ;
- elle est versée aux salariés ayant une rémunération brute inférieure à 3 Smic. Cette limite est ajustée à due proportion de la durée de travail ;
- elle est versée par une entreprise de moins de 50 salariés.
La prime est exonérée de forfait social et de taxe sur les salaires puisque les assiettes de ces contributions sont liées.
Lorsque la prime est versée par une entreprise de plus de 50 salariés ou à un salarié qui gagne plus de 3 fois le Smic, elle est exonérée de cotisations et contributions sociales patronales et salariales (hors CSG et CRDS). En revanche, elle ne bénéficie pas de l'exonération d'impôt sur le revenu (sauf si elle est affectée à un plan d'épargne mais seulement dans la limite de 3 000 ou 6 000 euros) et est assujettie au forfait social.
Est-ce que la prime Macron peut remplacer une autre prime ou augmentation de salaire ?
La prime ne doit pas avoir vocation à se substituer :
- à des augmentations de rémunération ;
- ni à des primes prévues par un accord salarial, par le contrat de travail ou par les usages en vigueur dans l'entreprise ;
- ni à aucun autre élément de rémunération.
Accord national interprofessionnel (ANI) sur le partage de la valeur retranscrit par la Loi du 29 novembre 2023 : quelles nouveautés ?
Suite à des négociations, un accord national interprofessionnel (ANI) sur le partage de la valeur a été signé par de nombreuses organisations syndicales et patronales (4). Le 22 novembre 2023, l'Assemblée nationale a définitivement voté le projet de loi qui transpose fidèlement les mesures de l'ANI. La Loi du 29 novembre 2023 est désormais entrée en vigueur, complétée par deux décrets d'application des 29 juin et 5 juillet (5) (6).
Possibilité de placer la prime de partage de la valeur sur un PEI, PER
La loi prévoit la possibilité, pour les salariés, de placer leur prime de partage de la valeur (en totalité ou en partie), dans un plan d'épargne salariale ou plan d'épargne retraite, comme ce qui est applicable aux primes d'intéressement ou de participation (7).
Ainsi, les salariés doivent désormais disposer de 15 jours à compter de la réception du document les informant du montant qui leur est attribué pour demander l'affectation de leur prime sur un plan d'épargne salariale ou sur un plan d'épargne retraite (5).
D'ailleurs, Le décret du 5 juillet 2024 prévoit 3 nouveaux cas de déblocage de l'épargne salariale ont récemment été ajoutés au 9 déjà prévus par le Code du travail (6) :
- l'affectation à des travaux de rénovation énergétique de la résidence principale (travaux visés sont les travaux de rénovation énergétique éligibles à l'éco-PTZ ;
- l'achat d'un véhicule utilisant l'électricité, l'hydrogène ou une combinaison des deux comme source exclusive d'énergie ou d'un cycle à pédalage assisté neuf ;
- l'activité de proche aidant exercée par l'intéressé, son conjoint ou son partenaire de PACS (pacte civil de solidarité) auprès d'un proche.
Généralisation des dispositifs de partage de la valeur pour les entreprises de 11 à 49 salariés
La Loi du 29 novembre 2023 portant transposition de l’ANI relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise prévoit que pour les exercices ouverts à partir du 1er janvier 2025, certaines entreprises devront obligatoirement mettre en place un dispositif de partage de la valeur.
Ce dispositif de partage de la valeur pourra se traduire par la signature d'un accord de participation ou d'intéressement, un abondement d'un plan d'épargne salariale ou encore le versement d'une prime de partage de la valeur.
Sont concernées les entreprises suivantes :
- celles d'au moins 11 et de moins de 50 salariés ;
- qui exercent leur activité sous la forme juridique de société ;
- qui réalisent un bénefice net fiscal d'au moins 1 % du chiffre d'affaires pendant 3 exercices consécutifs.
Possibilité d'instaurer un dispositif de participation dérogeant à la formule légale dans les entreprises de moins de 50 salariés
Afin d'encourager et de faciliter le développement de la participation dans les petites et moyennes entreprises, les partenaires sociaux ont choisi de simplifier le dispositif en levant la référence à la formule légale du Code du travail.
www.travail-emploi.gouv.fr
Les entreprises non soumises à l'obligation de mettre en place la réserve spéciale de participation, notamment les entreprises de moins de 50 salariés, peuvent mettre en place, à titre volontaire, un dispositif de participation de branche ou d’entreprise pouvant être moins favorable que la formule légale (dérogeant à la règle des avantages consentis aux salariés).
Négociation sur les bénéfices exceptionnels dans les entreprises d'au moins 50 salariés
Une nouvelle obligation de négocier sur les bénéfices exceptionnels concerne désormais les entreprises de 50 salariés et plus qui disposent d'un ou plusieurs délégués syndicaux, lorsqu'elles ouvrent une négociation sur un dispositif de participation ou d’intéressement.
Ainsi, un bénéfice exceptionnel peut les contraindre à verser un supplément d'intéressement ou de participation à leurs salariés.
Les entreprises déjà couvertes par un accord d'intéressement ou de participation, au 29 novembre 2023, devaient engager une négociation au plus tard le 30 juin 2024 pour définir ce qu'est un bénéfice exceptionnel et comment il sera partagé avec les salariés.
Création d'un plan de partage de la valorisation de l'entreprise (PPVE)
En quoi consiste le PPVE ?
Le PPVE est un dispositif facultatif qui permet aux salariés de bénéficier d’une prime lorsque la valeur de l'entreprise augmente au cours des 3 années suivant la mise en place du plan. C'est ce que l'on appelle la prime de partage de la valorisation de l'entreprise.
Ce nouveau dispositif permet d'intéresser financièrement les salariés à la croissance de la valeur de l'entreprise. Il représente un outil de fidélisation et de motivation des collaborateurs en place mais aussi un argument supplémentaire pour recruter de futurs collaborateurs.
Tous les salariés de l'entreprise peuvent en bénéficier dès lors qu'ils justifient d'au moins 12 mois d'ancienneté (sauf dispositions conventionnelles plus favorables).
Le montant de la prime de partage de valorisation de l'entreprise est fixé en tenant compte, pour chaque salarié, de l’application au montant de référence du taux de variation de la valeur de l’entreprise. Le salarié perçoit la prime si ce taux est positif.
Il ne peut pas dépasser 75 % du plafond annuel de la Sécurité sociale (PASS), soit 34 776 euros pour 2024.
Modalités de mise en place
Le plan de partage de la valorisation de l'entreprise est mis en place par un accord collectif.
Il est également possible d'organiser un référendum sur une proposition d'accord. Il devra être signé par 2/3 des salariés.
Cet accord est conclu pour une durée de 3 ans.
Le plan doit être déposé sur la plateforme de téléprocédure "Téléaccords" dans les conditions de droit commun de dépôt des accords collectifs de groupe, d'entreprise ou d'établissement, par le représentant légal du groupe, de l'entreprise ou de l'établissement. Un contrôle est opéré par la DDETS.
Retrouvez l'intégralité de notre webconférence sur les primes et avantages en nature
(2) Loi n°2023-1107 du 29 novembre 2023 portant transposition de l'accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l'entreprise
(3) Instruction relative aux conditions d'exonération de la prime de partage de la valeur prévue par l'article 1 de la loi n°2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat
(4) Accord national interprofessionnel du 10 février 2023 relatif au partage de la valeur au sein de l'entreprise
(5) Décret n°2024-644 du 29 juin 2024 portant application des articles 9, 10, 12 et 18 de la loi n° 2023-1107 du 29 novembre 2023 portant transposition de l'accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l'entreprise
(6) Décret n°2024-690 du 5 juillet 2024 portant transposition de diverses mesures prévues par l'accord national interprofessionnel du 10 février 2023 relatif au partage de la valeur au sein de l'entreprise
(7) Article D3348-1 du Code du travail
Contenu claire et précis.