Quel est l'élément caractéristique de la qualité d'associé ?

En principe, chaque époux peut librement devenir membre d'une société en effectuant un apport d'un bien dont son régime matrimonial lui permet de disposer.


Il existe des atténuations à ce principe qui sont :

  • la mise en péril (c'est-à-dire la mises en danger du foyer, de la famille) ;
  • le logement familial qui bénéficie d'un régime particulier.

Pour avoir la qualité d'associé d'une société, il faut détenir des parts de celle-ci soit en achetant des parts (souscripteur), soit en faisant un apport (apporteur) lors de la constitution de la société. Cet apport peut être en nature (biens meubles, immeubles, droits de propriété intellectuelle…), en numéraire (toute somme d'argent), en industrie (savoir-faire, connaissances professionnelles…).

Acquérir la qualité d'associé d'une société permet également d'avoir au sein de cette société des prérogatives telles que le droit à la perception de dividendes, le droit de vote aux assemblées générales, le droit à l'information. Mais la qualité d'associé implique aussi de répondre à certaines obligations telles que la contribution aux pertes (1) pour les sociétés à risque limité (SARL, EURL,SAS, SASU, SA) à laquelle s'ajoute l'obligation à la dette pour les sociétés à risque illimité(SNC, SCI, SCA, SCS…) (2).

Devoir d'information du conjoint non souscripteur ou non acquéreur des parts sociales

Qui détient la qualité d'associé lors de l'apport de biens communs dans une société dont les parts ne sont pas négociables ?

En droit des sociétés, le principe est que la qualité d'associé appartient à l'apporteur indépendamment de la propriété ou du financement de l'apport ou de l'acquisition.

Les époux communs en biens peuvent réaliser seuls des apports à une société ou acquérir des parts sociales en utilisant que des biens communs, cela ne les empêche en rien d'acquérir la qualité d'associé et de participer ou non à la gestion de la société (3).

Bon à savoir :

L'époux qui finance l'acquisition d'actions ou de parts sociales par des fonds et/ou biens qui appartiennent à la communauté a seul la qualité d'associé mais la valeur des titres tombent dans la communauté (4).

Quels sont les droits du conjoint non souscripteur ou non acquéreur ?

Un époux ne peut, sous peine de nullité de l'acte, employer des biens communs pour faire un apport à une société ou acquérir des parts sociales non négociables sans que son conjoint en ait été averti et qu'il en soit justifié dans l'acte (5).

L'information du conjoint doit être justifiée en annexant une copie de la lettre qui a servi à notifier la réalisation de l'apport ou la souscription des parts ainsi que le droit de revendication du conjoint, aux statuts de la société. Il est également nécessaire de mentionner dans les statuts que l'apport a été réalisé avec des biens communs.

Le conjoint du chef d'entreprise commerciale qui souhaite participer à l'activité de l'entreprise peut opter pour trois statuts différents :

  • conjoint collaborateur ;
  • conjoint salarié ;
  • conjoint associé.

Bon à savoir :

La loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises est venue préciser que le statut de conjoint salarié s'appliquera de droit à défaut de choix exprès sur le statut du conjoint du chef d'entreprise dans le cadre d'une participation régulière à l'activité professionnelle de l'entreprise (6).

Les différents statuts du conjoint du chef d'entreprise ont été désormais étendus au partenaire de PACS du chef d'entreprise (7).

Les sociétés dont les parts sociales sont non négociables sont les seules concernées par l'obligation d'information. Il s'agit de :

  • la Société à Responsabilité Limitée (SARL) ;
  • l'Entreprise Unipersonnelle à Responsabilité Limitée (EURL) ;
  • la Société Civile Immobilière (SCI) ;
  • la Société en Commandite Simple (SCS) ;
  • la Société en Nom Collectif (SNC) ;
  • la Société en Participation.

Dans les sociétés dont les parts sont négociables(Sociétés anonymes, SAS, SASU, SCA), l'apport d'un bien commun est peu réglementé. L'époux qui souhaite réaliser un apport ou acquérir une action n'a pas l'obligation d'informer son conjoint sauf en cas d'apport de certains biens comme un immeuble, un fonds de commerce ou encore des droits sociaux non négociables.

L'apport d'un bien commun nécessite une simple information du conjoint et non une autorisation.

L'accord du conjoint non apporteur ou souscripteur est nécessaire pour l'emploi de tout bien commun lorsque le contrat de mariage prévoit une clause d'administration conjointe.

2 choix possibles pour le conjoint de l'apporteur ou acheteur des parts sociales

Une fois informé, le conjoint commun en biens du futur associé bénéficie d'un droit de revendication de la qualité d'associé. Ainsi il peut choisir de :

  • renoncer définitivement à la qualité d'associé ;
  • revendiquer immédiatement ou postérieurement la qualité d'associé.

Renonciation définitive à la revendication de la qualité d'associé

Le conjoint du futur associé peut choisir de renoncer définitivement à sa faculté de revendiquer personnellement la qualité d'associé.

Cette renonciation peut intervenir lors de la constitution de la société ou en cours de vie sociale.

En cas de renonciation, l'époux futur associé sera le seul à bénéficier, sous réserve de l'agrément des associés, du titre d'associé ainsi que des droits et obligations qui y sont rattachés.

Bon à savoir :

Pour des questions de preuve, les lettres d'information du conjoint, de notification de la renonciation à la qualité d'associé ou de notification du droit de revendication sont à envoyer par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.


Revendication de la qualité d'associé

La revendication de la qualité d'associé peut avoir lieu pour la moitié des parts sociales souscrites ou acquises (5) jusqu'à ce qu'un jugement de divorce passé en force de chose jugée n'intervienne (9) :

  • soit au moment de l'acte d'apport ou d'achat des parts sociales ;
  • soit postérieurement, c'est-à-dire au cours de la vie sociale.

 Revendication au moment de l'acte d'apport ou de l'achat des parts sociales

La qualité d'associé est reconnue au conjoint qui a notifié à la société son intention d'être personnellement associé lors de l'apport ou de l'achat des parts sociales.

Dans ce cas l'agrément des associés envers l'un des époux vaut pour les deux et leur permet de bénéficier du titre d'associé. Par conséquent il est impossible, en cas de revendication immédiate, d'agréer uniquement l'époux futur associé.

Précisons qu'en cas de revendication de la qualité d'associé lors de la formation d'une EURL, celle-ci devient alors immédiatement et automatiquement une SARL puisque par définition l'EURL ne peut avoir qu'un seul associé (10).

Revendication au cours de la vie sociale

Le conjoint a la faculté de revendiquer sa qualité d'associé postérieurement à l'apport ou l'acquisition de parts sociales. Dans cette hypothèse, les clauses d'agrément prévues à cet effet par les statuts lui sont applicables.

Lors de la délibération sur l'agrément, l'époux associé ne participe pas au vote et ses parts ne sont pas prises en compte pour le calcul du quorum et de la majorité (5).

Si le conjoint revendiquant obtient l'agrément, il bénéficiera du statut d'associé. Dans le cas contraire, son époux continue d'être seul associé au sein de la société pour la totalité des parts souscrites.

Absence de choix de l'époux

En ce qui concerne le choix de la qualité d'associé, si l'époux de l'associé ne manifeste aucune intention après la notification, les associés de la société peuvent décider de l'agréer quand même ou lui demander directement de renoncer définitivement à sa faculté de revendiquer la qualité d'associé.

Depuis la loi PACTE, il n'est plus possible de rester sans choix de statut pour le conjoint du chef d'entreprise qui participe régulièrement à l'activité de l'entreprise sinon, la loi attribue automatiquement le statut de conjoint salarié par défaut (6).

Une fois son choix effectué, le conjoint doit notifier sa décision, de préférence, par lettre recommandée avec accusé de réception à la société visée dans la lettre d'avertissement préalablement reçue.

Tableau récapitulatif

Types de société Information du conjoint nécessaire Autorisation du conjoint nécessaire Droit de revendication
Sociétés dont les parts ne sont pas négociables (SARL, EURL, SCI, SNC, Société en participation) Oui. Non. Clause d'administration conjointe Oui. Lors de la constitution de la société ou au cours de la vie de la société.
Sociétés dont les parts sont négociables (SA, SAS, SASU) Non. Sauf apport d'immeuble, fonds de commerce, droits sociaux non négociables,... Non. Clause d'administration conjointe Non.


👓 A lire également :

Références :
(1) Article 1832 du Code civil
(2) Article L221-1 du Code de commerce; Article 1857 du Code de commerce
(3) Article 1832-1 du Code civil
(4) Cour de cassation, 1ère chambre civile, 4 juillet 2012, n°11-13.384
(5) Article 1832-2 du Code civil
(6) Article L121-4 du Code de commerce
(7) Article L121-8 du Code de commerce
(9) Cour de cassation, chambre commerciale, 14 mai 2013, n° 12-18.103
(10) Article L223-1 du Code de commerce