Qu'est-ce qu'un usage d'entreprise ?
Définition de l'usage d'entreprise
Bien qu'il soit courant, l'usage d'entreprise ne trouve pas de définition au sein du Code du travail.
Il est communément défini comme "une pratique courante de l'employeur à l'égard de son personnel s'incorporant au contrat lors de l'embauche" (1).
Autrement dit, il s'agit d'une pratique répétée au sein de l'entreprise, conférant un avantage aux salariés. Cet avantage n'est prévu ni par la loi, ni par une convention collective (une prime, un jour de repos supplémentaire, etc.).
Il est donc question d'une décision discrétionnaire de l'employeur : rien ne l'obligeait à attribuer cet avantage.
L'usage n'a pas besoin d'être écrit pour être constitué et produire ses effets.
Cependant, une fois que l'usage d'entreprise est constitué, l'employeur est lié par celui-ci. En d'autres termes, il ne peut plus cesser de faire bénéficier ses salariés de l'avantage en question sans respecter une procédure particulière. La reconnaissance d'un usage d'entreprise fait donc naître une obligation à la charge de l'employeur.
Bon à savoir : l'usage d'entreprise n'a pas à être intégré au contrat de travail du salarié. Dans le cas contraire, c'est-à-dire dans le cas d'une contractualisation, l'avantage ne peut être modifié ou supprimé sans l'accord du salarié, puisqu'il s'agit alors d'une modification du contrat de travail.
Quels sont les 3 critères permettant de définir l'usage ?
Si aucune définition légale ne détermine ce qu'est l'usage d'entreprise, c'est le juge qui a eu le rôle d'en définir les contours au fil de ses décisions.
La jurisprudence a dégagé 3 critères cumulatifs et objectifs définissant l'usage d'entreprise obligatoire (2) :
- la généralité : il concerne tous les salariés ou une catégorie d'entre eux ;
- la constance : la pratique est répétée et s'inscrit dans le temps de façon régulière (il ne s'agit pas d'une mesure ponctuelle) ;
- la fixité : l'avantage répond à des règles précises et objectives (ses modalités ou ses modes de calcul ne sont pas aléatoires).
Ainsi, si une pratique cumule ces 3 critères, elle constitue un usage d'entreprise et oblige l'employeur à s'y conformer.
Le salarié concerné peut alors réclamer son application, puisqu'il s'agit, pour lui, d'une source génératrice de droits au même titre que sa convention collective ou tout autre texte.
Exemples d'usages d'entreprise
Plusieurs avantages peuvent être mis en place par un usage d'entreprise. Les exemples sont nombreux :
- une prime de 13ème mois ;
- une prime de fin d'année ou de Noël ;
- une prime d'assiduité ;
- des jours de repos ou des temps de pause supplémentaires ;
- des jours de congés supplémentaires ;
- un départ de l'entreprise plus tôt les derniers vendredis de chaque mois ;
- etc.
Comme nous l'avons vu, dans tous les cas, il s'agit d'un avantage que l'employeur choisit d'octroyer à ses salariés (ou à une catégorie de salariés), sans qu'aucun texte ne l'y oblige. Un usage d'entreprise ne peut donc pas être moins favorable que la loi ou un accord collectif.
Comment dénoncer un usage d'entreprise ? Est-ce possible de supprimer une prime par ce biais ?
Une fois que l'usage d'entreprise est constitué, l'employeur peut tout à fait décider d'y mettre fin, et ce, peu importe son objet (le versement d'une prime, etc.) : c'est la procédure de dénonciation. Un droit consacré par usage d'entreprise n'est pas définitivement acquis.
Par exemple, cela peut être le cas si l'usage d'entreprise consiste en un versement d'une prime, mais que l'entreprise connaît des difficultés financières. Ce peut également être le cas si l'entreprise connaît une réorganisation et que l'avantage en question ne répond pas à cette nouvelle organisation.
Dans tous les cas, l'employeur n'a pas à justifier sa décision. La seule limite qui lui est imposée est qu'il ne doit pas supprimer l'usage pour un motif illicite (ex : punir des salariés pour avoir usé de leur droit de grève).
Cependant, il n'est pas possible de supprimer l'usage sans répondre à une procédure particulière :
- informer les salariés ;
- informer le comité social et économique (CSE) ;
- respecter un délai de prévenance.
Bon à savoir : il existe, par ailleurs, d'autres cas où un usage d'entreprise est amené à disparaître, notamment lorsqu'un accord collectif est signé et porte sur le même objet. Plus de détails au sein de notre dossier !
Comment informer les salariés ?
Les salariés doivent être informés de la décision de l'employeur de dénoncer un usage, et ce, par écrit et de façon individuelle, dès lors qu'ils profitent eux-mêmes dudit usage (3).
Par exemple, la diffusion d'une note de service, ou l'annonce sur un tableau d'affichage dans l'entreprise ne sont pas considérés comme une information individuelle.
Il est donc recommandé de privilégier l'information par lettre recommandée avec accusé de réception ou remise en main propre contre signature.
Important : l'accord du salarié n'est pas exigé et la justification de la décision n'est pas obligatoire. Notons toutefois que cette dernière peut parfois aider le salarié à comprendre votre décision.
Comment informer le CSE de la dénonciation ? Faut-il procéder à une information ou à une consultation ?
Le comité social et économique, s'il existe, doit également être informé de la décision de dénonciation de l'usage en question (4).
Il s'agit d'une simple information et non d'une consultation. Autrement dit, l'avis du CSE n'a aucun effet sur le sort de la décision.
L'employeur doit ainsi convoquer les représentants du personnel à une réunion d'information, et la décision doit être inscrite à l'ordre du jour.
Quel est le délai de prévenance respecter ?
Enfin, la dénonciation d'un usage doit respecter un délai de prévenance suffisant entre le moment de l'information des salariés et des représentants du personnel et sa disparition effective (5).
Aucun texte ne fixe la durée d'un délai de prévenance suffisant. C'est à l'employeur de fixer, en fonction de la nature de l'usage, sa durée dans l'entreprise, ainsi que le nombre de salariés concerné, ce délai.
Ce délai doit par exemple permettre d'organiser d'éventuelles négociations pour mettre en place un accord collectif sur l'avantage en question.
Attention : un délai de quelques semaines seulement pourrait être considéré comme insuffisant, et donc rendre la procédure irrégulière.
Quelles sont les conséquences d'une dénonciation irrégulière ? Les salariés ont-ils droit de réclamer le bénéfice de l'usage ?
Si le chef d'entreprise ne respecte pas ou mal les conditions précitées, l'usage reste en vigueur tant qu'une nouvelle dénonciation régulière n'est pas intervenue. L'irrespect d'une seule des étapes suffit à rendre la procédure de dénonciation irrégulière.
Les salariés pourront alors en réclamer l'application devant le conseil de prud'hommes et obtenir une condamnation de l'employeur (rappel d'arriéré d'une prime, indemnité réparatrice, exécution forcée de l'usage, etc.).
En cas de litige, la charge de la preuve revient à celui-ci qui invoque l'application de l'usage. La preuve se fait par tout moyen (bulletins de salaire, etc.).
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