Quelles sont les étapes à respecter avant de prononcer une mise à pied disciplinaire ?

Lorsque l'employeur envisage de prononcer une sanction lourde à l'encontre d'un salarié, telle qu'une mise à pied disciplinaire, il doit respecter la procédure expliquée ci-dessous.

1. Convoquer le salarié à un entretien préalable avant sanction

⚠ Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de 2 mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu, dans le même délai, à l'exercice de poursuites pénales (1).

Avant de prononcer la mise à pied disciplinaire du salarié, vous devez le convoquer à un entretien préalable à sanction, par lettre recommandée avec accusé de réception ou remise en main propre contre décharge.

💡 Cette lettre doit indiquer (2) :

  • la date ;
  • l'heure ;
  • le lieu ;
  • l'objet de cet entretien ;
  • la possibilité pour le salarié d'être accompagné lors de l'entretien.
Le Code du travail ne prévoit aucune disposition relative au délai entre la convocation et la date fixée pour l'entretien préalable. Le salarié doit pouvoir disposer d'un délai suffisant pour se préparer à cet entretien et, s'il en ressent le besoin, faire appel à un autre salarié qui viendra l'assister.

Vous envisagez de convoquer votre salarié à un entretien préalable à une mise à pied disciplinaire ?

2. Recevoir le salarié en entretien préalable

Au cours de l'entretien, vous devez indiquer au salarié le motif de la sanction envisagée : les faits qui lui sont reprochés, c'est-à-dire pourquoi la sanction est éventuellement prévue, pour quelles raisons.

💡 Vous devez également recueillir les explications du salarié quant à son comportement fautif.

3. Choisir la sanction adéquate : mise à pied disciplinaire, conservatoire etc.

Après avoir reçu le salarié en entretien et recueilli ses explications, vous devez choisir la sanction définitive.

Si votre entreprise dispose d'un règlement intérieur, la sanction prise devra être prévue par ce règlement.

⚠ Ainsi, si vous souhaitez prononcer une mise à pied disciplinaire, mais que celle-ci ne fait pas partie des sanctions prévues par le règlement intérieur de l'entreprise, vous ne pourrez pas retenir une telle sanction à l'encontre du salarié (3).

Quoi qu'il en soit, la sanction retenue contre votre salarié doit être justifiée et proportionnée à la faute commise.


📎 Bon à savoir :

Depuis le 1er janvier 2020, le règlement intérieur est obligatoire uniquement dans les entreprises d'au moins 50 salariés (4).

Votre entreprise compte plus de 50 salariés et vous ne disposez toujours pas de règlement intérieur ?

4. Notifier la mise à pied disciplinaire au salarié : procédure et modèle

Veillez à respecter un délai de 2 jours ouvrables au minimum après l'entretien, avant de notifier la mise à pied disciplinaire. En effet, la sanction ne peut intervenir en deçà de ce délai ni plus d'un mois après le jour fixé pour l'entretien.

Enfin, après avoir reçu le salarié en entretien préalable et choisi la sanction adéquate, il convient de la notifier.

La décision doit être écrite, motivée et préciser les griefs retenus à l'encontre du salarié pour sanctionner son comportement (5).

Si vous avez choisi de prononcer une mise à pied disciplinaire, la lettre de notification doit également indiquer la durée de cette sanction. La mise à pied disciplinaire, ayant pour conséquence une perte de salaire, doit être limitée dans le temps.

✉ La notification de la mise à pied disciplinaire doit être faite par lettre recommandée avec accusé de réception ou remise en main propre contre décharge.

Vous souhaitez notifier une mise à pied disciplinaire à l'un de vos salariés ?

Quelles sont les erreurs à ne pas commettre et leurs conséquences ?

Plusieurs erreurs sont régulièrement observées lorsque la mise à pied disciplinaire est envisagée.

1. Confondre mise à pied disciplinaire et mise à pied conservatoire

Ces 2 procédures n'ont de commun que le nom ! En effet, elles n'ont pas du tout le même objet.

👉 La mise à pied disciplinaire, comme son nom l'indique, est une sanction disciplinaire à part entière. Elle est prononcée à l'encontre d'un salarié lorsque celui-ci commet une faute d'une certaine gravité nécessitant son exclusion temporaire de l'entreprise.

👉 La mise à pied conservatoire, quant à elle, est une mesure provisoire prise dans l'attente d'une décision de sanction. Elle vise à écarter un salarié dont le maintien dans l'entreprise pourrait être préjudiciable, le temps qu'une sanction définitive soit prononcée à son encontre.

📌 Bien souvent, la mise à pied conservatoire débouche sur un licenciement pour faute.

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2. Prononcer une mise à pied disciplinaire non prévue au règlement intérieur

📌 Dans les entreprises dans lesquelles un règlement intérieur existe, que ce soit par obligation ou par choix, l'employeur ne peut pas prononcer de mise à pied disciplinaire si celle-ci n'est pas prévue dans le règlement intérieur (6).

La mise à pied disciplinaire prévue par le règlement intérieur n'est licite que si ce règlement précise sa durée maximale (7).

💡 À noter : s'il survient un litige sur la mise en place de ce règlement, il appartient à l'employeur de prouver qu'au jour du prononcé de la sanction, le seuil d'effectif de l'entreprise était resté inférieur à celui imposant la mise en place du règlement intérieur (8).

L'employeur doit également vérifier que la durée maximale de la mise à pied, fixée dans le règlement intérieur, ne dépasse pas celle fixée dans la convention collective applicable au sein de l'entreprise (9). Si tel est le cas, c'est la durée la plus courte qui s'appliquera.

 

3. Ne pas prévoir une durée déterminée à la mise à pied disciplinaire

📌 La mise à pied disciplinaire doit avoir une durée déterminée, c'est-à-dire limitée dans le temps et fixée à l'avance.

En effet, la mise à pied disciplinaire entraîne une perte de salaire, ce qui explique qu'elle doit être limitée dans le temps. Sa durée doit ainsi être proportionnelle à la faute commise par le salarié.

Cette durée doit d'ailleurs être précisée dans la lettre de notification de la sanction. Si tel n'est pas le cas, la sanction pourra être annulée. Votre salarié bénéficiera alors d'un rappel de salaire, et éventuellement, de dommages et intérêts.
 

4. Reporter l'exécution d'une mise à pied disciplinaire après l'arrêt de travail

Lorsqu'une mise à pied disciplinaire a été décidée avant que le salarié ne soit en arrêt maladie, l'exécution de la mise à pied disciplinaire ne peut pas être reportée après celui-ci (10).

📌 Si la mise à pied disciplinaire n'a pas d'effet sur le versement des indemnités journalières, l'employeur n'est, en revanche, pas tenu de verser au salarié des indemnités complémentaires pendant la période de mise à pied qui coïncide avec l'arrêt maladie.

Annulation de la mise à pied disciplinaire : causes et effets

Le salarié peut demander l'annulation de la mise à pied disciplinaire prononcée par l'employeur pour plusieurs raisons :

  • lorsque l'employeur applique une mise à pied disciplinaire au salarié alors qu'elle n'est pas prévue par le règlement intérieur ;
  • lorsque la durée maximale de la mise à pied n'est pas prévue au règlement ;
  • lorsque la durée de la sanction excède celle prévue par le règlement intérieur ;
  • lorsque l'employeur applique une mise à pied disciplinaire à un salarié sans avoir respecté la procédure applicable :           
    - respect du délai de 2 mois pour sanctionner un salarié ;    
    - convocation à un entretien, entretien lui-même, notification de la sanction ;  
    - disproportion de la sanction prise avec la faute commise.

Afin de contester la mise à pied disciplinaire prise à son encontre, le salarié peut envoyer un courrier à son employeur.

Dans le cas où l'employeur décide de maintenir la sanction à l'encontre du salarié, ce dernier a la possibilité de saisir le Conseil de Prud'hommes afin de faire constater l'irrégularité de la procédure, l'inexistence de la faute ou encore la disproportion de la sanction prise à son égard.

Si les juges estiment que la mise à pied disciplinaire prise à l'encontre du salarié n'est pas licite, celui-ci peut alors bénéficier d'un rappel de salaire correspondant à la période pendant laquelle il a été écarté de l'entreprise.

Il peut également demander des dommages et intérêts.

Références :
(1) Article L1332-4 du Code du travail
(2) Articles L1332-1, L1332-2 et R1332-1 du Code du Travail
(3) Cass. Soc., 26 octobre 2010, n°09-42740
(4) Article L1311-2 du Code du travail
(5) Article R1332-2 du Code du travail
(6) Cass. Soc., 26 octobre 2010, n°09-42740
(7) Cass. Soc., 26 février 2013, n°11-28293
(8) Cass. Soc., 6 janvier 2021, n°19-14440
(9) Cass. Soc., 24 novembre 2010, n°09-42267
(10) Cass. Soc., 21 octobre 2003, n°01-44169