En raison de leur fonction, les représentants du personnel bénéficient d'une protection particulière contre d'éventuelles sanctions abusives de la part de leurs employeurs.
Oui, vous pouvez sanctionner un représentant du personnel
Sanctionner un salarié protégé : pour quel motif ?
Comme tout salarié, si un membre du CSE d'entreprise (comité social et économique) commet une faute (simple, grave ou lourde) ou manque à ses obligations professionnelles, il peut faire l'objet d'une procédure disciplinaire en vue de l'application d'une sanction. Il ne bénéficie donc d'aucune immunité du fait de son mandat.
Ainsi, vous pouvez prononcer une sanction disciplinaire à l'égard d'un élu représentant du personnel pour sauvegarder les intérêts de votre entreprise. Cette sanction peut aller du simple avertissement au licenciement pour faute grave ou faute lourde
Le cas de la faute commise dans le cadre de l'exécution du contrat de travail
Son mandat représentatif n'autorise pas le salarié protégé à adopter un comportement fautif, à ne pas respecter les règles prévues par le règlement intérieur de l'entreprise, et encore moins à ce que ses fautes ne soient pas sanctionnées.
Comme tout salarié, le salarié protégé reste donc soumis, pendant l'exécution de son contrat de travail, au pouvoir disciplinaire de l'employeur, qui doit veiller à protéger les intérêts de l'entreprise et à sanctionner d'éventuels manquements.
Le (vaste) sujet de la faute commise dans le cadre de l'exercice du mandat représentatif
La question du pouvoir de sanctionner un salarié protégé pour une faute commise dans le cadre de l'exercice de son mandat représentatif est en revanche plus épineuse.
En effet, vous ne pouvez pas engager une action disciplinaire à l'encontre d'un représentant du personnel si le comportement fautif de celui-ci n'a consisté qu'en une simple irrégularité dans l'exercice de son mandat (retard à une réunion CSE par exemple (1)). En principe, lorsqu'il est dans le cadre de l'exercice de son mandat, le membre du CSE n'est en effet pas sous la subordination de son employeur.
Par exception toutefois, si le salarié abuse de ses prérogatives de représentant du personnel, l'employeur pourra prononcer une sanction disciplinaire pour ce motif s'il prouve la faute commise et la gravité de cet abus (utilisation du crédit d'heures de délégation d'un collègue, perte de confiance, répercussions sur l'entreprise et ses intérêts, sur la santé et sécurité des salariés, etc).
Comment sanctionner un salarié protégé ? Quels types de sanctions disciplinaires pouvez-vous prendre ?
Sanction légère (l'exemple de l'avertissement, du blâme…)
Pour les sanctions légères, c'est-à-dire celles qui sont sans incidence sur les conditions ou le contrat de travail du salarié, vous n'avez pas de procédure spécifique à respecter. Dès lors, vous pouvez prononcer un avertissement, un blâme, un rappel à l'ordre à l'encontre d'un salarié protégé responsable de manquements à ses obligations professionnelles, sans avoir à respecter une procédure particulière.
Sanction lourde (l'exemple de la mise à pied, de la mutation, de la rétrogradation)
Pour rappel, on parle de "sanction lourde" pour désigner toute sanction qui a une incidence, immédiate ou non, sur la présence dans l'entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié.
Dans le cas de l'application d'une sanction lourde, l'employeur est tenu au respect d'une procédure disciplinaire plus stricte, qui comprend notamment la tenue d'un entretien préalable.
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La modification du contrat ou des conditions de travail du salarié protégé
Selon une jurisprudence constante de la Cour de cassation, aucune modification du contrat de travail ou changement des conditions de travail de celui-ci ne peut être imposée au salarié protégé (2).
Si le salarié refuse cette modification ou ce changement, vous êtes tenu, en tant qu'employeur, d'engager une procédure de licenciement à son égard en demandant l'autorisation de l'inspecteur du travail.
Attention au respect de la procédure : l'entretien préalable, autorisation administrative, etc.
Au vu des dispositions ci-dessus, la Cour de cassation estime donc que pour toutes sanctions qui touchent aux conditions de travail (comme une mise à pied disciplinaire) ou au contrat de travail (comme une mutation disciplinaire, rétrogradation disciplinaire) d'un salarié protégé, vous serez dans l'obligation, en tant qu'employeur (3) :
- de convoquer le salarié à un entretien préalable ;
- de veiller au bon déroulement de l'entretien, notamment en ce qui concerne la possible assistance du salarié par une personne de l'entreprise ;
- d'informer le salarié de son droit d'accepter ou de refuser la modification des conditions ou du contrat de travail qu'entraîne la sanction disciplinaire ;
- d'obtenir son accord pour cette modification, ce qui devra donner lieu à la signature d'un accord écrit signé par le salarié et vous ;
- de lui notifier la sanction retenue.
En cas de refus du représentant du personnel, il vous faudra soit renoncer à la sanction, soit envisager le licenciement du salarié protégé, en respectant la procédure spécifique prévue dans ce cas.
Bon à savoir :
La Cour de cassation a récemment rappelé à ce sujet que l'acceptation par un salarié protégé de la modification de son contrat de travail ou de ses conditions de travail ne peut résulter ni de son absence de protestation, ni de la poursuite de son travail. Dès lors, le seul fait qu'un salarié protégé se soit rendu sur son nouveau lieu de travail suite à sa mutation disciplinaire n'équivaut pas à un consentement de sa part (4).
Annulation de la mise à pied conservatoire du salarié protégé
Si la mise à pied conservatoire que vous avez prise à l'encontre d'un salarié protégé est annulée, la Cour de cassation a récemment rappelé que vous êtes alors tenu, en tant qu'employeur, de verser l'intégralité des salaires correspondant à la période de mise à pied, et ce, même si votre salarié a été mis en arrêt maladie sur cet intervalle et qu'il a perçu des indemnités journalières à ce titre (5).
Licenciement d'un représentant du personnel : que dit le Code du travail ?
Si vous souhaitez licencier un représentant du personnel comme un membre du CSE ou un délégué syndical, vous êtes tenu de suivre une procédure spécifique comprenant notamment :
- la convocation à l'entretien préalable à licenciement du salarié protégé ;
- la veille au bon déroulement de l'entretien ;
- la consultation obligatoire du Comité social et économique (CSE) s'il existe dans l'entreprise ;
- la demande d'autorisation de licenciement à l'inspecteur du travail ;
- la notification du licenciement au salarié protégé.
L'autorisation de l'inspecteur du travail est nécessaire pour vérifier que le licenciement n'a pas de lien avec le mandat du délégué du personnel au CSE.
Pour vérifier ce point, il procède à une enquête contradictoire et donne son accord ou son refus dans les 2 mois qui suivent la demande d'autorisation. À défaut de réponse de l'inspecteur dans ce délai, l'autorisation de licenciement est réputée rejetée (6).
En cas de non-respect de la procédure de licenciement, le salarié protégé pourra saisir le Conseil de Prud'hommes.
Licenciement d'un représentant du personnel, ce qu'il faut retenir :
Le licenciement disciplinaire d'un membre du CSE obéit donc à la procédure classique, applicable à tout salarié, à laquelle s'ajoute toutefois l'avis obligatoire du CSE s'il en existe un, et la demande d'autorisation à l'Inspecteur du travail. Il est indispensable que le licenciement ou la sanction n'ait aucun lien avec le statut de représentant du personnel
conforme à mes attentes