Rappelons que les salariés bénéficient d'un droit d'expression direct et collectif sur le contenu, les conditions d'exercice et l'organisation de leur travail (1). Toute restriction doit donc être justifiée par la nature de la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché.
? Qu'il soit titulaire, suppléant ou représentant syndical, tout membre du CSE (Comité social et économique) doit pouvoir s'exprimer.
Attention cependant à ne pas faire un abus de la liberté d'expression.
1. Oublier que cette liberté s'exerce collectivement
La plus grande liberté d'expression doit pouvoir régner en réunion CSE. Ce principe ne connaît pas d'exception : l'employeur qui impose des limites peut se voir reprocher un délit d'entrave.
Toutefois, l'employeur ou son représentant, en tant que président de séance, doit assurer le bon ordre des débats et veiller à ce que certains ne monopolisent pas le temps imparti. Tout le monde a le droit d'être entendu et doit pouvoir s'exprimer librement.
Les représentants syndicaux au CSE, n'ayant qu'une voix "consultative", n'ont pas le droit de prendre part au vote mais ils peuvent tout de même manifester librement leurs opinions pendant les réunions du CSE.
La salle de réunion n'étant pas un lieu public, la législation sur les diffamations publiques n'y est pas applicable.
2. Croire que l'on ne peut pas être sanctionné (abus de droit, diffamation...)
Les propos injurieux peuvent justifier un licenciement du représentant du personnel et l'engagement de sa responsabilité civile (dommages-intérêts) (2).
Le représentant du personnel est un salarié de l'entreprise, restant soumis au pouvoir disciplinaire de son employeur. Il peut donc faire l'objet d'une sanction en cas de comportement fautif.
Tant que le représentant du personnel reste dans les limites de sa mission, il ne peut pas faire l'objet d'une sanction car il n'est plus sous la subordination de l'employeur pendant l'exercice du mandat.
La situation est différente en cas d'abus de droit dans l'exercice de son mandat.
Les juges font la distinction entre :
- une simple irrégularité commise dans le cadre de l'exercice normal des activités représentatives ou syndicales, n'autorisant pas une sanction disciplinaire ;
- et un abus de droit de la part du représentant du personnel dans l'exercice de son mandat, justifiant une sanction disciplinaire pouvant mener à une procédure de licenciement.. L'employeur devra prouver non seulement la faute, mais aussi l'existence d'un abus suffisamment important pour justifier une sanction disciplinaire (3).
Votre employeur envisage de licencier un salarié protégé (représentant du personnel) ? Sachez qu'en tant que membre du CSE, vous devez être consulté sur ce projet et vous pouvez donner votre avis, que l'employeur pourra suivre, ou non. A défaut de consultation, votre employeur commet un délit d'entrave.
3. Employer un langage grossier
Il faut être vigilant aux écarts de langage en réunion du CSE. Des termes injurieux à l'égard de l'employeur peuvent justifier une autorisation de licenciement par l'inspecteur du travail.
C'est ce qu'il s'est passé dans une affaire jugée par la Cour de cassation (4). Le comportement injurieux du représentant du personnel a justifié son licenciement, mais n'a cependant pas été jugé comme constitutif d'une faute grave. Le salarié en cause, secrétaire du comité, avait tenu envers le président de l'instance des propos outranciers et irrespectueux, utilisant des jurons. Il a été licencié, mais pas pour faute grave.
Pour sa défense, il avait notamment revendiqué "la banalisation de ce genre d'expressions et de langage" propres à son milieu professionnel.
L'injure peut donner lieu à sanction disciplinaire conduisant à une procédure de licenciement mais également à une amende (5).
4. Croire que l'on peut divulguer toute information portée à notre connaissance
Les représentants du personnel sont soumis à une obligation de discrétion concernant certaines informations. Ainsi, en tant que représentant du personnel, vous devez impérativement rester discret quant aux informations confidentielles et présentées comme telles par l'employeur (6). Vous pouvez en effet être sanctionné pour avoir révélé de tels éléments et ceci peut même conduire à votre licenciement.
Vous êtes également tenu au secret professionnel, vous interdisant ainsi de révéler toute information sur les secrets de fabrication.
? Veillez donc à être vigilant quant aux propos que vous tenez au cours des réunions avec votre direction, avec les salariés ou dans n'importe quelle situation. |
Faites également attention à ne pas révéler d'éléments portant atteinte à la vie privée d'un salarié, d'un membre de la direction ou de n'importe quelle personne appartenant à l'entreprise. En effet, vous pourriez être condamné à réparer le préjudice subi par la victime, en cas d'atteinte à sa vie privée (dommages-intérêts par exemple) (7) et même, dans certains cas, être condamné à une peine d'emprisonnement et d'amende (8).
Références :
(1) Article L2281-1 du Code du travail(2) Cass. civ. 2e ch. 1er avril 1974, n°73-10673
(3) Cass. Crim. 25 mai 1982, n°81-93443
(4) Cass. Soc. 27 février 2013, n°11-27474 (5) Article R621-2 du Code pénal (6) Article L2315-3 du Code du travail (7) Article 9 du Code civil (8) Article 226-1 du Code pénal
Lexique :
CSE = Comité Social et Economique
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