Les dispositions ci-dessous concernent les ruptures conventionnelles individuelles.
Est-il possible de faire une rupture conventionnelle pendant la maladie (y compris maladie professionnelle, accident du travail) ?
Possibilité de conclure une rupture conventionnelle en arrêt maladie
Il est possible de demander, accepter et conclure une rupture conventionnelle, pendant un arrêt maladie dès lors que le consentement du salarié est libre et éclairé.
Rappel : le Code du travail qui considère qu'au cours des périodes de suspension du contrat de travail des salariés en maladie ou accident professionnel(le), l'employeur ne peut le rompre que s'il justifie soit d'une faute grave de l'intéressé, soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif.
Une circulaire avait exprimé le fait qu'une rupture conventionnelle était exclue en cas de suspension du contrat de travail du salarié, pour cause de maladie professionnelle ou d'accident de travail (1).
La jurisprudence a émis une position opposée selon laquelle le salarié en arrêt maladie pour maladie professionnelle / accident du travail (3) ou pour maladie non professionnelle (2) est en droit de signer une rupture conventionnelle.
=> Le salarié a la possibilité de proposer à son employeur de mettre un terme à son contrat de travail de manière amiable et négociée en signant une rupture conventionnelle (4). L'employeur peut également être à l'initiative de la rupture conventionnelle pendant l'arrêt maladie du salarié.
Attention ! La rupture conventionnelle est ouverte seulement aux salariés en contrat à durée indéterminée (CDI), que ces salariés soient à temps complet ou à temps partiel.
Être salarié et envisager une rupture conventionnelle : négocier votre indemnité et comprendre la procédure en 2023
Nécessité d'un accord libre et éclairé pour cette rupture
Le libre consentement de chacune des parties à la signature de la convention est nécessaire. Dans le cas contraire, la convention est nulle.
Pour s'assurer que cette rupture résulte bien de la volonté des deux parties et que le consentement n'est pas vicié, les parties au contrat doivent organiser un ou plusieurs entretiens.
À noter : une convention de rupture peut valablement être conclue par un salarié déclaré inapte par le médecin du travail, que l'origine de l'inaptitude soit professionnelle ou non, tant qu'il n'y a ni fraude, ni vice de consentement (5).
Comment les parties peuvent-elles demander une rupture conventionnelle durant un arrêt maladie ?
Aucun formalisme n'est imposé pour demander une rupture conventionnelle. Le salarié ou l'employeur peut solliciter une rupture conventionnelle par écrit ou à l'oral.
Néanmoins, le fait de demander une rupture conventionnelle par écrit (lettre ou mail de rupture conventionnelle) permet de conserver une preuve de la demande.
Par ailleurs, l'écrit incite l'autre partie à répondre et se positionner, ce qui peut constituer un gain de temps.
Quelle procédure respecter pour signer une rupture conventionnelle en arrêt maladie ?
Procédure habituelle de rupture conventionnelle
Lorsque le salarié est en arrêt maladie et qu'il souhaite mettre en place de mode de rupture, la procédure à respecter est identique à celle applicable habituellement, c'est-à-dire :
- convocation du salarié à un ou plusieurs entretiens ;
- signature de la convention de rupture par les parties ;
- respect d'un délai de rétractation ;
- décision de la DREETS (demande d'homologation ou d'autorisation s'il s'agit d'un salarié protégé).
Tout litige concernant la convention, l'homologation ou le refus d'homologation relève de la compétence du conseil de prud'hommes et doit être formé, à peine d'irrecevabilité, avant l'expiration d'un délai de 12 mois à compter de la date d'homologation de la convention.
Entretien(s) en vue de la rupture conventionnelle en cas d'arrêt maladie
Comme pour toute procédure de rupture conventionnelle classique, il est nécessaire d'organiser un ou plusieurs entretiens préalables, pour définir les conditions de la rupture (6).
Cas particulier de l'organisation des entretiens en cas de suspension du contrat
Ce ou ces entretiens doivent permettre de s'assurer que les parties sont d'accord pour rompre le contrat de façon amiable et de définir les conditions de la rupture (date de rupture du contrat, montant de l'indemnité spécifique de rupture conventionnelle, etc.).
Même dans le cas particulier de la maladie du salarié, le ou les entretiens doivent être organisés.
=> L'arrêt maladie ne dispense pas l'employeur de convoquer le salarié à l'entretien, et ne dispense pas le salarié de se rendre à l'entretien.
En pratique, il faut être vigilant et s'assurer d'organiser l'entretien pendant les horaires d'autorisation de sortie du salarié.
Si le salarié ne peut pas s'y rendre, la rupture conventionnelle ne peut pas aboutir.
C'est notamment lors de ce/ces entretiens que l'employeur peut s'assurer du consentement libre et éclairé du salarié.
Assistance des parties
Les deux parties peuvent se faire assister durant l'entretien de rupture conventionnelle. Pour l'employeur, cette faculté lui est octroyée uniquement si le salarié en fait lui-même usage.
En ce sens, le salarié doit en informer l'employeur auparavant ; si l'employeur souhaite également se faire assister, il en informe à son tour le salarié.
Le formulaire de demande d’homologation doit préciser la date des entretiens, ainsi que, le cas échéant, l’identité des personnes ayant assisté les parties.
Le salarié peut-il négocier une rupture conventionnelle suite à un burn-out/dépression ou harcèlement moral ?
Pour que la convention de rupture conventionnelle soit validée par la DREETS et que le refus d'homologation soit évité, le salarié doit donner son accord libre et éclairé nécessaire à la signature de toute rupture conventionnelle.
La chambre sociale de la Cour de cassation a déjà validé certaines situations.
Exemple : la question a fait l'objet d'un arrêt dans lequel la Cour de cassation a validé le fait de conclure une rupture conventionnelle en cas de dépression nerveuse du salarié (7).
Cependant, conclure une rupture conventionnelle dans le cadre d'un arrêt maladie pour cause de dépression/burn-out est risqué, car le consentement du salarié peut être remis en cause et entraîner la nullité de la rupture.
En effet, dans quelles mesures peut-on considérer que le consentement d'un salarié dont la santé mentale est affectée est libre et éclairé ? L'état de santé du salarié peut-il faire obstacle au fait qu'une rupture conventionnelle soit valablement conclue ?
Si un salarié est, au moment de la signature de la rupture conventionnelle, dans une situation de violence morale entraînant des troubles psychlogiques, son consentement peut être vicié.
La problématique continue de faire débat et serait, en cas de litige, soumise à l'appréciation souveraine des juges du fond.
Quelle partie bénéficie d'un droit de rétractation ?
Après avoir signé la convention de rupture, l'une ou l'autre des parties peut le regretter.
À compter de la date de sa signature par les deux parties, chacune d'entre elles dispose d'un délai de 15 jours calendaires pour exercer son droit de rétractation (8).
Elles peuvent donc se rétracter avant l'homologation de la convention de rupture conventionnelle. Une fois l'homologation (ou la validation pour les salariés protégés) finalisée, les parties ne peuvent plus faire usage de leur droit de rétractation.
Ce droit est exercé sous la forme d'une lettre adressée par tout moyen attestant de sa date de réception par l'autre partie. En pratique, il s'agit d'envoyer une lettre recommandée avec accusé de réception (LRAR) ou remise en mains propres contre décharge.
L'indemnité de rupture conventionnelle est-elle versée au salarié en arrêt maladie ?
Oui. Le salarié dont le contrat de travail est suspendu pour accident ou maladie bénéficie d'une indemnité spécifique de rupture conventionnelle.
Montant de l'indemnité
Le montant de l'indemnité spécifique de rupture conventionnelle est identique, que la convention de rupture soit signée pendant un arrêt maladie ou non.
L'indemnité doit être au moins égale à l'indemnité légale de licenciement (9).
Ainsi, le montant de l'indemnité spécifique de rupture conventionnelle ne peut être inférieur à (10) :
- 1/4 de mois de salaire par année d'ancienneté pour les années jusqu'à 10 ans ;
- 1/3 de mois de salaire par année d'ancienneté pour les années à partir de 10 ans.
Pensez à vérifier la convention collective : le montant de l'indemnité ne doit pas être inférieur au montant de l'indemnité conventionnelle de licenciement lorsque celle-ci est supérieure à l'indemnité légale de licenciement.
Comment négocier et calculer l'indemnité de rupture conventionnelle d'un salarié pendant un arrêt maladie ?
Le salarié peut négocier une indemnité supra-légale, en plus du minimum légal ou conventionnel. Concernant le montant de cette indemnité, il s'agit d'une négociation dont le résultat est à déterminer par les parties.
À noter : la perception d'une indemnité supra-légale reporte celle de l'allocation de retour à l'emploi (ARE) par le salarié, octroyée par Pôle emploi.
Références :
(1) Circ. DGT, no 2009-04, 17 mars 2009, n°3241
(2) Cass. Soc, 30 septembre 2014, n°13-16297
(3) Cass. Soc., 30 septembre 2013, n°12-19711
(4) Cass. Soc., 16 décembre 2015, n°13-27212
(5) Cass. Soc., 9 mai 2019, n°17-28767
(6) Article L1237-12 du Code du travail
(7) Cass. Soc., 30 septembre 2013, n°12-19711
(8) Article L1237-13 du Code du travail
Commenter cet article
Pour commenter cet actualité, veuillez vous connecter.
Les informations recueillies sur ce formulaire sont destinées à Juritravail aux fins de traitement de votre demande et la réception d'information juridique par email. Elles font l’objet d’un traitement informatique destiné au service marketing de Juritravail.
Pour connaître et exercer vos droits, notamment de retrait de consentement à l'utilisation de vos Données, veuillez consulter notre Charte de protection des Données Personnelles et nous contacter à l'adresse suivante : [email protected].