L’achat d’un fonds de commerce nécessite de la part de l’acquéreur la prise de nombreuses précautions.

Le bail, un point central : il convient d’examiner attentivement ses stipulations, sa durée restante ainsi que le montant du loyer. L’acquéreur doit aussi anticiper un éventuel déplafonnement de ce loyer, vérifier si l’activité mentionnée dans le bail correspond bien à celle réellement exercée par le vendeur, et s’informer sur les dispositions du règlement de copropriété, notamment en ce qui concerne les travaux.

Vérifier les éléments essentiels dès la rédaction du compromis

Avant la loi du 19 juillet 2019 (1), l’acte de cession d’un fonds de commerce devait impérativement comporter plusieurs mentions obligatoires :

  • le nom du précédent vendeur, la date et la nature de son acquisition, ainsi que le prix payé pour les éléments incorporels, les marchandises et le matériel ;
  • l’état des privilèges et nantissements grevant le fonds ;
  • le chiffre d’affaires réalisé au cours des trois exercices précédant la vente (ou sur la durée de possession du fonds si celle-ci était inférieure à trois ans) ;
  • les résultats d’exploitation sur cette même période ;
  • les informations relatives au bail : date, durée, nom et adresse du bailleur et du cédant, le cas échéant.

L’omission de l’une de ces mentions pouvait entraîner la nullité de la cession, cette action devant être intentée dans un délai d’un an.

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Depuis l’entrée en vigueur de la loi du 19 juillet 2019, l’absence de ces mentions ne cause plus la nullité automatique de l’acte. Toutefois, une action en nullité reste possible sur le fondement de l’erreur, du dol ou de la violence, dans un délai de cinq ans. En outre, l’acheteur peut demander des dommages et intérêts en cas de manquement à l’obligation d’information préalable par le vendeur, conformément à l’article 1112-1 du Code civil (2).

En pratique, il est donc dans l’intérêt de l’acheteur de demander l’ensemble de ces informations afin de sécuriser son investissement. Ces précautions protègent également le vendeur, qui ne pourra se voir reprocher un défaut d’information.

Cependant, d’autres éléments non révélés, dès lors qu’ils sont déterminants pour l’acheteur, peuvent également entraîner la nullité de la vente. En effet, si l’acheteur avait eu connaissance de ces éléments lors de la signature, il n’aurait pas contracté.

🔍 À titre d’exemple, une vente de fonds de commerce de restauration et le bail afférent ont été annulés, car le vendeur n’avait pas informé l’acheteur d’un procès-verbal d’assemblée générale de copropriété. Celui-ci limitait l’activité de restauration à la seule dégustation de plats à emporter, et uniquement jusqu’à 20 heures (3) .

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Prévoir des conditions suspensives pour sécuriser l’achat

Pour renforcer la sécurité juridique de l’acquisition, il est possible d’insérer diverses conditions suspensives dans le compromis de vente.

🔍 Exemples de conditions suspensives :

  • obtention d’un prêt bancaire : si l’acquéreur ne parvient pas à obtenir le financement, il peut renoncer à l’achat sans pénalité, à condition de ne pas avoir commis de faute, comme ne pas avoir déposé sa demande dans les délais ou sans les justificatifs requis ;
  • renouvellement du bail aux mêmes conditions : l’acheteur peut subordonner son engagement à la signature d’un nouveau bail commercial identique à l’ancien. Par exemple, un acquéreur avait exigé cette condition. Le bailleur a donné son accord, mais en réintroduisant une clause d’indexation déjà connue de l’acheteur. Ce dernier ne pouvait donc se dédire (4) ;
  • autorisation d’exercer une nouvelle activité : il est fortement recommandé à l’acheteur de consulter le règlement de copropriété pour connaître les activités autorisées. L’activité ou les activités autorisées par le bail, ou par avenant, sont seules cessibles. Si le futur acquéreur souhaite exercer une activité différente, il peut demander au vendeur de négocier avec le bailleur une procédure de déspécialisation, ou le faire lui-même. Il s’expose alors à une éventuelle hausse ou un déplafonnement du loyer. Le locataire peut aussi négocier directement avec le bailleur, par exemple en signant un avenant pour étendre une activité de crêperie-gaufrerie à celle de pizzeria. Le bailleur devra alors assurer la conformité des locaux, notamment en installant un conduit d’extraction adapté à l’activité de restauration ;
  • obtention d’autorisations administratives : si l’acquéreur envisage de réaliser des travaux nécessitant un permis de construire ou d’aménagement, l’obtention de ces autorisations peut être prévue comme condition suspensive. À défaut, l’acheteur pourra se désengager sans frais ;
  • résiliation ou remboursement de contrats par le vendeur : certains contrats peuvent être transmis lors de la vente (bail, assurances, éditions, contrats de travail). L’acheteur peut exiger la résiliation préalable de certains d’entre eux ou le remboursement de crédits en cours. À défaut de réalisation de ces conditions, il pourra se délier de l’achat. En ce qui concerne les contrats de travail, leur rupture ne peut être motivée par la seule cession du fonds, mais reste possible pour d’autres causes, comme une faute ou une rupture conventionnelle ;
  • audit préalable entre la promesse et la vente : il est souvent recommandé de réaliser un audit juridique, social (notamment des contrats de travail), fiscal et financier, avant l’achat. Cet audit peut être confié à un cabinet d’avocats spécialisés, en collaboration avec l’expert-comptable habituel de l’établissement.

📌Conclusion : l’acquisition d’un fonds de commerce ne s’improvise pas ; elle requiert une vigilance accrue et une analyse approfondie de nombreux éléments juridiques, financiers et pratiques. La mise en place de garanties contractuelles, telles que les conditions suspensives ou les audits préalables, permet à l’acheteur de sécuriser son investissement tout en limitant les risques. Un accompagnement par des professionnels spécialisés (avocat, expert-comptable) est vivement recommandé pour mener à bien cette opération dans les meilleures conditions.

SELARL Cabinet PETROUSSENKO
Avocats à la Cour
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Références :
(1) Loi n°2019-744 du 19 juillet 2019 de simplification, de clarification et d'actualisation du droit des sociétés
(2) Article 1112-1 du Code civil
(3) Cour de cassation, chambre commerciale, 6 janvier 2021, n° 18-25098
(4) CA Douai, 31 mai 2018, n° 16/04360