Les sociétés, qu’elles soient civiles ou commerciales, relèvent d’une personne morale de droit privé, au même titre que les associations. Une personne morale de droit privé est une entité juridique constituée à l’issue d’un processus juridique contractuel.

Les sociétés qui sont civiles ou commerciales ont un but lucratif, alors que les associations n’ont pas de but lucratif et ne peuvent pas en avoir.

💡 Définition du but lucratif : le concept de but lucratif s’apprécie au regard de la notion de partage de bénéfice ou la réalisation d’économies à l’égard des membres de la personne morale de droit privé. Les membres de la personne morale de droit privé, dénommée société, se nomment associés ou actionnaires.

Une société est dite « à but lucratif », dans la mesure où elle est créée, avec pour objet de générer des bénéfices qui seront partagés par ses membres ou de faire réaliser des économies à ses membres.

Une association est dite à « but non lucratif », dans la mesure où elle n’est pas créée avec pour objet de générer des bénéfices qui seront partagés par ses membres ou de faire réaliser des économies à ses membres.

C’est précisément la notion de but lucratif, propre à la société, qui définit l’obligation pour le créateur d’une société, qui sera soit associé, soit actionnaire, d’effectuer un apport.

📌 Nota : l’apport traduit donc le lien juridique entre la société et ses membres, qui va permettre le lien financier propre à la notion de but lucratif, ce qui explique que pour devenir membre d’une société, il convient d’effectuer un apport.

Cette note sera articulée autour de la définition de la notion d’apport, suivie de l’étude des différents apports possibles.

Définition et modalités de l’apport en société

💡 Définition de l’apport en société : un apport est l’opération juridique qui consiste pour un associé ou un actionnaire à, soit, transférer la propriété d’un bien (apport en pleine propriété) ou, soit, confier la jouissance du même bien (apport en jouissance) à une société, en échange de l’obtention de titres de la société, qui sont des parts sociales ou des actions.

📌 Nota : l’opération d’apport traduit dès lors une double opération juridique, en ce que l’apporteur « apporte quelque chose » à la société, en contrepartie de quoi « il reçoit de la société des titres ».

Il existe deux modalités d’apport à une société (1) :

  • apport en pleine propriété : l’apport en pleine propriété concerne la situation dans laquelle l’apporteur transfert la propriété d’un bien lui appartenant au profit de la société en échange de titres de la société. Ce transfert de propriété est définitif. L’apport en pleine propriété relève de l’apport le plus usité dans le cadre de création de société ;
  • apport en jouissance : l’apport en jouissance concerne la situation dans laquelle l’apporteur autorise la jouissance (prêt) d’un bien, dont il est propriétaire, à la société, durant une certaine période, en échange de titres de la société. L’apport en jouissance est temporaire et peut concerner la durée de la société ou une autre durée plus courte. L’apport en jouissance concerne essentiellement les marques, les brevets.

Il existe trois types d’apport dans une société, l’apport en numéraire, l’apport en nature et l’apport en jouissance (2).

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Examen des différents types d’apport

Apport en numéraire

💡 Définition : l’apport en numéraire consiste en l’apport par un associé ou actionnaire d’une certaine somme d’argent.

Société où l’apport en numéraire est possible

L’apport en numéraire est possible dans toutes les sociétés.

Modalités de dépôt des apports en numéraire dans une SARL, SA et SAS

Dépôts des fonds dans une banque (3) : les fonds correspondant aux apports en numéraire doivent être déposés par le futur dirigeant de la société dans une banque ou assimilée ou chez un notaire, sur un compte bancaire ouvert au nom de la société en formation, et ce, dans les 8 jours de la remise par les fondateurs de la société. Le non-respect du délai de 8 jours n’implique nullement de sanction.

Les fonds sont bloqués jusqu’à ce que la société soit créée

Les fonds une fois déposés sont bloqués jusqu’à ce que la société soit réellement créée et donc immatriculée au RCS.

📌 Nota : une fois les fonds correspondant aux apports en numéraire déposés, le banquier établit le certificat de dépôt des fonds, qui dresse le nom du dépositaire et le montant de l’apport en numéraire.

📌 Nota : les statuts de la société ne peuvent être signés qu’après le dépôt des fonds dans une banque.

Cas de la société qui vient à ne jamais être créée (4) : si la société venait à ne pas être créée suite au dépôt des apports en numéraire sur un compte bancaire ouvert au nom de la société en formation, les associés ou actionnaires doivent attendre un délai de six mois avant de pouvoir solliciter le déblocage des fonds :

  • soit individuellement en s’adressant à justice ;
  • soit en donnant à l’unanimité mandat à un des fondateurs de solliciter le retrait des fonds auprès du banquier.      

Apport en nature

💡 Définition : l’apport en nature consiste en l’apport par un associé ou actionnaire d’un bien.

Nature du bien objet de l’apport en nature ; ce bien constituant l’apport en nature peut être :

  • un bien corporel (bien que l’on peut toucher) ;
  • incorporel (fiction juridique, tels fonds de commerce ou parts sociales ou actions de société) ;
  • mobilier (bien non ancré au sol que l’on peut déplacer) ;
  • ou immobilier (bien ancré au sol que l’on ne peut déplacer sans le détériorer).

Société où l’apport en nature est possible

L’apport en nature est possible dans toutes les sociétés.

Évaluation des apports en nature

L’apport en nature implique une évaluation par les créateurs de la société dans les statuts de la société.

Procédures d’évaluations pour certaines sociétés

Certaines procédures particulières d’évaluation sont prévues dans différents types de société dites « de capitaux à risque limité » (SARL, SA, SAS).

Principe (5) : pour une SARL, SA, SAS, un commissaire aux apports est obligatoire (il s’agit d’un expert désigné par les fondateurs ou par le Tribunal chargé d’évaluer les apports en nature dans le cadre d’un rapport. Le commissaire aux apports dresse un rapport d’évaluation du bien en nature qui sera annexé aux statuts de la société).

Exception (6) : dans les SARL et les SAS, uniquement, les associés ou actionnaires à l’unanimité peuvent se dispenser de la désignation d’un commissaire aux apports, si :

  • aucun des apports en nature ne dépasse la somme de 30.000 euros ;
  • et si la somme des apports en nature ne dépasse pas la moitié du capital social.

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Obligation d’enregistrement des apports en nature

L’apport en nature implique l’enregistrement des statuts à la recette des impôts dans le mois de la signature des statuts, ce qui implique de payer un impôt.

💡 Définition enregistrement d’un acte : l'enregistrement est une formalité fiscale qui est obligatoire pour un grand nombre d'actes et notamment un apport en nature à une société, qui consiste à présenter l’acte juridique soumis à l’enregistrement à la recette des impôts et à payer un droit d’enregistrement qui est un impôt.

📌 Nota : la fiscalité qui s’applique à l’apport en nature va dépendre de la nature du bien (meuble ou immeuble, meuble corporel ou meuble incorporel). Tous les apports en nature ne sont pas soumis à obligation d’enregistrement, les fonds de commerce, les titres de sociétés et les biens immobiliers sont soumis à obligation d’enregistrement.

Formule notariée

Si la société contient un ou plusieurs apports en nature de bien immobilier, les statuts doivent revêtir la formule notariée.

Apport en industrie

💡 Définition : l’apport en industrie est l’engagement d’un associé ou d’un actionnaire d’effectuer un travail au profit de la société ou d’apporter des connaissances et en contrepartie de cet engagement, l’associé ou l’actionnaire reçoit des titres de la société.

Caractéristiques de l’apport en industrie

L’apport en industrie ne concourt pas à la formation du capital social, mais donne lieu à l’attribution de parts sociales ou d’actions (7).

📌 Nota : les parts sociales ou les actions détenues au titre d’un apport en industrie ne peuvent être cédées et disparaissent avec le départ de l’associé ou l’actionnaire de la société, et ce, en vertu du caractère Intuitu Personae attaché à l’apport en industrie.

Société où l’apport en industrie est possible

L’apport en industrie n’est pas possible dans une société anonyme et il est donc possible dans toutes les autres sociétés (8).

Évaluation des apports en industrie

L’apport en industrie doit être évalué par les créateurs de la société dans les statuts.

📌 Nota : l’on considère que si l’apport en industrie dépasse la somme de 30.000 euros et qu’il représente plus de la moitié du capital social, une évaluation doit être prévue par un commissaire aux apports. Il s’agit d’une recommandation établie par les commissaires aux comptes et non d’une obligation légale.  

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Conclusion

Il existe trois types d’apport dans une société :
- l’apport en numéraire ne présente pas de difficulté particulière, si ce n’est, que les fonds, une fois déposés sur le compte bancaire ouvert au nom de la société en formation, sont bloqués, et ce, jusqu’à ce que la société soit effectivement immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés. Faute d’immatriculation effective de la société, les fonds sont bloqués au moins six mois, avant un déblocage possible ;
- l’apport en nature présente la difficulté de son évaluation dans les statuts, sur la base d’un rapport d’un commissaire aux apports, pour les sociétés de capitaux, telles la SA, SARL, SAS avec une possibilité de dispense pour la SARL et la SAS. La seconde difficulté concerne l’obligation d’enregistrement de certains apports en nature et notamment le fonds de commerce, les immeubles et les titres de société ;
- l’apport en industrie qui n’est pas possible pour la SA, nécessite une évaluation dans les statuts et surtout reste un apport « douteux » pour l’URSSAF et l’administration des impôts qui voient en cet apport « une relation de travail dissimulée ».  

Références :

(1) Article 1843-3 du Code civil alinéa 2 à 4 qui définissent les modalités de réalisation de l’apport
(2) Article 1843-3 du Code civil alinéa 1 qui définit les apports possibles dans une société
(3) Article R223-3 du Code de commerce sur le dépôt des fonds dans une banque ou assimilé ou chez un Notaire s’agissant de la SARL, Article R22-10-6 du Code de commerce sur le dépôt des fonds dans une banque ou assimilé ou chez un notaire s’agissant de la SA et par assimilation de la SAS
(4) Article L223-8 du Code de commerce sur le retrait des fonds correspondant aux apports en numéraire s’agissant de la SARL, Article L225-11 du Code de Commerce sur le retrait des fonds correspondant aux apports en numéraire s’agissant de la SA et par assimilation de la SAS
(5) et (6) Article L223-9 du Code de commerce sur les modalités d’évaluation des apports en nature et des cas de dispense de recourir à un commissaire aux apports s’agissant de la SARL, Article D223-6-1 du Code de commerce définissant le montant maximal de l’apport en nature permettant la dispense du commissaire aux apports, soit 30.000 euros, Article L225-8 du Code de commerce sur les modalités d’évaluation des apports en nature de la SA, Article L227-1 du Code de commerce permettant la dispense de recourir à un Commissaire aux apports pour une SAS, le système est le même que pour la SARL
(7) Article 1843-2 du Code civil précisant que l’apport en industrie ne concourt pas à la formation du capital social
(8) Article L225-3 du Code de commerce qui interdit les apports en industrie pour la SA