Le harcèlement moral : que dit la loi ?
Deux textes définissent le harcèlement moral :
- Code du travail (article L1152-1) : il s’agit d’agissements répétés qui détériorent les conditions de travail d’un salarié ;
- Code pénal (article 222-33-2) : même définition, mais avec des conséquences pénales (amende, prison).
Les deux définitions semblent identiques, mais en réalité, la façon dont les juges les appliquent est très différente.
🔍 Comment reconnaître du harcèlement moral ? Notre actualité vous détaille 12 exemples concrets pour reconnaître du harcèlement moral
Harcèlement moral : quelles sont les différences entre une action au pénal et aux prud'hommes ?
Devant les prud’hommes : une logique de protection du salarié
Le conseil de prud’hommes cherche à protéger le salarié. Le salarié doit apporter des faits précis qui font penser à du harcèlement. Il n’a pas besoin de prouver l’intention de nuire de son employeur. C’est ensuite à l’employeur de montrer que ces faits sont justifiés et ne relèvent pas du harcèlement.
📌 Exemple : la Cour d’appel de Versailles, le 15 septembre 2022, a considéré que des charges de travail trop lourdes et un comportement managérial irrespectueux pouvaient suffire à caractériser un harcèlement moral (RG n° 19/03834).
Le juge social regarde l’ensemble du contexte. Il peut retenir le harcèlement même en l’absence d’un acte unique très grave. Ce qui compte, c’est la répétition et les effets sur la santé ou les conditions de travail.
En cas de harcèlement reconnu, le salarié peut :
- obtenir la résiliation de son contrat comme s’il avait été licencié sans cause réelle et sérieuse ;
- faire condamner l’employeur pour manquement à l’obligation de sécurité.
Devant le juge pénal : une exigence d’intention
La justice pénale est plus stricte. Pour le juge pénal, le harcèlement moral est un délit, ce qui suppose une intention de nuire. Il faut donc prouver que l’auteur voulait consciemment porter atteinte à la victime.
Dans un arrêt du 1er décembre 2015 (pourvoi n° 14-85.059), la Cour de cassation a annulé une condamnation car l’intention de nuire n’était pas démontrée, même si les faits semblaient graves.
📌 Le juge pénal ne se contente pas d’indices ou de ressentis : il veut des preuves concrètes, précises et vérifiables.
Peut-on agir sur les deux terrains à la fois ?
Oui, mais il faut faire attention à ne pas lancer deux procédures qui se contredisent ou se bloquent. Les actions doivent avoir des bases juridiques différentes :
- l’une pour obtenir réparation (prud’hommes) ;
- l’autre pour faire condamner (tribunal correctionnel).
Si vous êtes victime, votre avocat évaluera avec vous la stratégie la plus efficace selon votre situation : santé, preuve, contexte, volonté d’indemnisation ou de sanction.
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En résumé : deux juges, deux logiques
| Prud'hommes | Tribunal pénal |
| Objectif : protéger le salarié | Objectif : sanctionner un délit |
| Pas besoin de prouver l'intention | Intention obligatoire |
| Présomption possible | Preuve stricte exigée |
| indemnisation et rupture du contrat | Peines pénales (prison, amende) |
Références :
- Article L1152-1 et suivants du Code du travail
- Article 222-33-2 du Code pénal
- Cour d’appel de Versailles, 15 sept. 2022, RG n° 19/03834
- Cass. soc., avis n° 9015, 16 nov. 2022, n° 21-80478
- Cass. crim., 1er déc. 2015, n° 14-85059
- Cass. crim., 13 nov. 2018, n° 18-80374
- Lamy Droit du travail, fascicules « Harcèlement moral » et « Obligations de l’employeur"




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