Harcèlement moral en télétravail : une définition juridique
L'article L1152-1 du Code du travail définit le harcèlement moral comme des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail, portant atteinte aux droits et à la dignité du salarié, altérant sa santé, ou compromettant son avenir professionnel.
Cette définition s’applique pleinement au télétravail, même si les faits ne se déroulent pas physiquement dans les locaux de l’entreprise. Ce sont les effets sur le salarié qui comptent.
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Des formes spécifiques de harcèlement moral à distance
Le télétravail favorise certaines formes de maltraitance psychologique, souvent moins visibles. Voici quelques exemples concrets :
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isolement organisé : exclusion de réunions, absence de réponses aux messages, interdiction de contacter les collègues ;
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privation d’outils : retrait d’accès aux logiciels, blocage de la messagerie, impossibilité de téléphoner ;
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dévalorisation numérique : critiques répétées par mail, humiliations écrites visibles par toute l’équipe, ton méprisant en visioconférence ;
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petites humiliations répétées : silences lourds, sarcasmes, plaisanteries déplacées, retrait de missions sans explication.
Chaque acte pris isolément peut paraître anodin. Mais c’est leur répétition et leur effet cumulé sur le salarié qui permettent de qualifier le harcèlement moral.
Le harcèlement moral en télétravail peut être reconnu même sans intention de nuire
La jurisprudence rappelle qu’il n’est pas nécessaire que l’auteur ait voulu nuire. Ce qui importe, c’est l’impact réel de ses actes qui compte.
Le harcèlement moral peut donc être reconnu même si l’auteur affirme ne pas avoir eu de mauvaise intention. C’est l’impact sur la santé du salarié, son isolement ou la dégradation de ses conditions de travail qui sont pris en compte.
La responsabilité de l'employeur à distance
L’article L4121-1 du Code du travail impose à l’employeur une obligation de sécurité. Il doit protéger la santé physique et mentale de ses salariés, y compris en télétravail.
Cela implique notamment :
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d’être attentif aux signaux d’alerte,
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de réagir à toute alerte ou plainte,
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de ne pas ignorer les situations de souffrance,
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de sanctionner les comportements fautifs.
Un employeur qui laisse se développer un harcèlement moral en télétravail peut être condamné. Il peut voir sa responsabilité engagée devant le conseil de prud’hommes, et dans certains cas devant le juge pénal.
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Références :
- Article L1152-1 du Code du travail : définition du harcèlement moral
- Article L1152-4 du Code du travail : obligation de prévention du harcèlement moral par l’employeur
- Article L4121-1 du Code du travail : obligation générale de sécurité (santé physique et mentale)
- Article L1222-9 du Code du travail : encadrement du télétravail
Jurisprudences :
- Cass. soc., 17 octobre 2012, n° 11-18855 : la Cour de cassation rappelle que le harcèlement moral est constitué par des faits répétés altérant les conditions de travail, sans exiger l’intention de nuire
- Cass. soc., 6 juin 2012, n° 10-27694 : un salarié affecté à domicile contre son gré, privé de missions réelles, a vu reconnu le harcèlement moral en raison de son isolement professionnel
- Cass. soc., 8 juin 2016, n° 14-13418 : le juge n’est pas lié par les résultats d’une enquête interne ; il apprécie souverainement les faits constitutifs de harcèlement
- CA Paris, 2 octobre 2018, n° 16/09123 : un salarié privé de téléphone, d'accès aux outils métiers, et isolé du reste de l'équipe en télétravail a obtenu la reconnaissance du harcèlement moral




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