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Bon à savoir :

Le 15 février 2024 (1), le Sénat a rejeté l'idée de création d'un arrêt de travail pour les femmes souffrant de règles douloureuses.
En réponse, une nouvelle proposition de loi a été déposée le 20 février dernier (2). Celle-ci doit être débattue à l'Assemblée nationale le 27 mars 2024.

Interruption spontanée de grossesse ou fausse couche : quels sont les apports de la loi de juillet 2023 ?

La loi relative à l'interruption spontanée de grossesse (dite loi "fausse couche"), résulte d'un projet porté par la députée Sandrine Josso, dont l'objectif était d'établir un cadre législatif renforcé afin de garantir une protection et un accompagnement appropriés aux couples confrontés à une interruption spontanée de grossesse

Publié le 8 juillet 2023 , ce texte prévoit diverses mesures protectrices au bénéfice des couples concernés (3).

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Mesure n°1 : un arrêt maladie spécifique, sans délai de carence en termes d'indemnisation par la Sécurité sociale

La loi prévoit qu'en cas de constat d'une incapacité de travail faisant suite à une interruption spontanée de grossesse ayant lieu avant la 22ᵉ semaine d'aménorrhée ou à une interruption de grossesse pratiquée pour motif médical, l'indemnité journalière versée par la Sécurité sociale est accordée sans délai (4).

Concrètement, cette mesure se traduit par le bénéfice, pour la salariée concernée, d'un arrêt maladie indemnisé par la Sécurité sociale sans délai de carence, à la différence d’un arrêt maladie classique.

Ces dispositions sont applicables aux arrêts de travail prescrits à compter du 1er janvier 2024.

La loi vise à remédier à une lacune existante dans le système de congé maladie en France. Actuellement, les arrêts maladie sont en principe soumis à un délai de carence, ce qui signifie qu'aucune rémunération n'est versée au salarié en arrêt pendant les premiers jours de celui-ci. En général, ce délai de carence est de 3 jours, mais il peut varier en fonction de la convention collective ou des accords d'entreprise applicables.

Cette nouvelle mesure permet donc aux salariées de bénéficier d'une prise en charge financière dès le premier jour de leur congé maladie, sans avoir à subir une perte de revenus pendant cette période difficile. Ainsi, elles peuvent consacrer pleinement leur énergie à leur rétablissement et à leur bien-être, sans se soucier des aspects financiers.

Mesure n°2 : une protection spécifique contre le licenciement pour la salariée concernée

Le texte de loi prévoit aussi une interdiction de licenciement de la salariée concernée durant les 10 semaines suivant la fausse couche survenue entre la 14ᵉ et la 21ᵉ semaine de grossesse incluse.

Les seuls cas où l'employeur peut rompre le contrat de travail sont (5)

  • le cas d'une faute grave commise par la salariée ;
  • ou dans le cas d'une impossibilité, pour ce dernier, de maintenir le contrat de travail pour un motif étranger à l'interruption spontanée de grossesse.

Cette mesure vise à protéger les droits des femmes et à garantir une sécurité professionnelle accrue pour les salariées ayant dû faire face à cette épreuve.

Cette protection est applicable depuis le 9 juillet 2023

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Bon à savoir :

Un parcours d'accompagnement spécifique par chaque Agence régionale de Santé (ARS) est mis en place depuis le 1er septembre 2024. Son objectif est de rassembler des professionnels médicaux et des psychologues hospitaliers et libéraux, qui travailleront en collaboration pour offrir aux femmes et à leurs partenaires un soutien complet et personnalisé (informations, orientation, accompagnement). 

Initiatives d'entreprises en France : congés maladie "fausse couche" et soutien aux employées touchées

De plus en plus d'entreprises en France avaient d'ores et déjà reconnu l'importance d'apporter un soutien spécifique aux employées qui font face à une fausse couche. Parmi ces entreprises, 2 acteurs majeurs se démarquaient :

  • les entreprises relevant de la convention collective Syntec ;
  • ainsi que Carrefour, l'un des leaders de son secteur.

Syntec : un accord historique pour soutenir les salariées confrontées à une fausse couche 

La Fédération Syntec, en collaboration avec les organisations syndicales, a marqué un tournant sociétal en signant un accord inédit au sein de la branche. Cet accord, entré en vigueur le 1ᵉʳ mai 2023, avait accordé de nouveaux droits aux femmes et à leur conjoint ou conjointe suite à une interruption spontanée de grossesse.

Selon cet accord (6), en cas d'interruption spontanée de grossesse avant la 22ᵉ semaine d'aménorrhée, la salariée a droit à une autorisation d'absence exceptionnelle de 2 jours. Cet arrêt de travail n'est pas déductible des congés et n'entraîne pas de réduction de salaire. La salariée doit fournir un certificat médical dans les 15 jours suivant l'événement.

De plus, le conjoint de la mère ou la personne liée à elle par un pacte civil de solidarité ou vivant maritalement bénéficie également de ce congé dans les mêmes conditions, à condition d'être salarié d'une entreprise de la branche.

Ces dispositions s'appliquent sur l'ensemble du territoire national à tous les salariés employés, techniciens, agents de maîtrise et cadres des entreprises visés par la convention.

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Obtenez le dossier synthèse de la Convention collective Syntec

Vous souhaitez obtenir davantage d'informations sur les dispositions prévues par la convention collective syntec en matière de maladie, de maternité ou de congés exceptionnels ? Notre dossier complet vous informe.

L'engagement de Carrefour en faveur des femmes (fausse couche, endométriose, PMA)

Depuis l'été 2023, le groupe Carrefour met en place un dispositif spécial permettant aux collaboratrices de bénéficier de congés adaptés en fonction de leurs pathologies, telles que les fausses couches, la procréation médicalement assistée (PMA) et l'endométriose.

Pour bénéficier de ces congés, les femmes doivent présenter un document médical attestant d'une situation de handicap reconnue par l'entreprise. Carrefour accorde ainsi :

  • 3 jours de congés aux femmes ayant vécu une fausse couche ;
  • 1 jour de congé pour celles ayant eu recours à la PMA ;
  • et jusqu'à 12 jours de congés par an pour celles souffrant d'endométriose (les congés menstruels ne sont pas inclus dans ce dispositif pour le moment).

La confidentialité est préservée, les collaboratrices peuvent partager leurs difficultés avec leur supérieur hiérarchique, qui accepte les arrêts sans les mentionner sur leurs fiches.

Alexandre Bompard, PDG du groupe Carrefour, affirme que cette initiative vise à éliminer les obstacles qui entravent l'égalité entre les femmes et les hommes au sein de l'entreprise.

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Douleurs menstruelles : quelles sont les mesures discutées par le Parlement ?

66 % des salariées seraient favorables au congé menstruel en entreprise."

Selon un sondage de l'Ifop (Institut français d'opinion publique)

Discutée le 15 février 2024 au Sénat, une proposition de loi dite de Santé et Bien-être des femmes au travail (1) souhaitait que la dysménorrhée soit prise en compte en milieu professionnel, pour les personnes qui en sont victimes.

Néanmoins, le Sénat a rejeté l'idée de création d'un arrêt de travail pour les femmes souffrant de règles douloureuses.

En réponse, une nouvelle proposition de loi visant à reconnaître et à protéger la santé menstruelle et gynécologique dans le monde du travail a été déposée le 20 février dernier (2)

Pour rappel, la dysménorrhée est le terme médical désignant les douleurs menstruelles. C'est le cas, par exemple, de l'endométriose, maladie chronique, touchant 1 femme sur 10 selon les données de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) (7).

Voici les mesures discutées par le Parlement, en matière de santé menstruelle et gynécologique.

Mesure n°1 : un arrêt de travail en cas de règles douloureuses

Cette proposition contenue initialement dans la proposition de loi dite de Santé et Bien-être des femmes au travail n'a finalement pas été retenue (1).

La salariée souffrant de dysménorrhée (dont l'endométriose), sous constat d'un médecin ou d'une sage femme aurait pu se voir établir une prescription d'arrêt de travail.

Cette prescription aurait été valable 1 an et aurait permis à la salariée d'interrompre son travail, pour une durée de 2 jours maximum par mois, chaque fois qu'elle se serait trouvée dans l'incapacité physique de continuer le travail.

Dans ce cas, la salariée aurait eu droit au versement d'indemnités journalières, sans délai de carence. L'idée sous-jacente était que la salariée ne subisse pas de perte de revenu en raison de son arrêt de travail.

Mais, en réponse à ce rejet, la nouvelle proposition de loi déposée le 20 février 2024, prévoit elle aussi la possibilité, pour les personnes salariées ou agentes publiques atteintes de menstruations incapacitantes, de bénéficier d'un arrêt de travail, intégralement pris en charge par l'Assurance maladie. Cet arrêt de travail serait exempt de jours de carence et pourrait aller jusqu'à 13 jours ouvrés, posés consécutivement ou séparément, sur une durée de 1 an et sans limite mensuelle (2).

Nous sommes donc actuellement dans l'attente. Il n'existe pas pour le moment en France d'obligation légale d'accorder un congé pour règles douloureuses.

Mesure n°2 : un accès au télétravail pour les salariées souffrant de dysménorrhée

La première proposition de loi rejetée, souhaitait inscrire, au sein du Code du travail, la possibilité pour les femmes souffrant de dysménorrhée, d'avoir accès au télétravail.

Plus précisément, il aurait été inscrit dans l'actuel article dédié au télétravail (8), que l'accord collectif applicable ou, à défaut, la charte télétravail élaborée par l'employeur, les modalités d'accès des salariées souffrant de dysménorrhée invalidante à une organisation en télétravail.

L'idée aurait été de permettre aux salariées, lorsqu'elles connaissent des périodes de douleur, de travailler depuis chez elles, et ce, dans des conditions préétablies avec leur employeur.

La nouvelle proposition de loi déposée en février dernier à l'Assemblée nationale propose de nouveau que les salariées et agentes publiques concernées par des menstruations incapacitantes, puissent avoir recours au télétravail et que cette possibilité ne se substitue pas au droit à l'arrêt de travail.

Mesure n°3 : Intégrer la santé menstruelle et gynécologique dans la négociation collective

La dernière proposition de loi déposée en février 2024 prévoit d'intégrer la santé menstruelle et gynécologique comme objet de la négociation collective, aussi bien dans le secteur privé que dans le secteur public.

Les négociations devraient alors porter sur l'aménagement du poste de travail et du temps de travail, précisément sur les points suivants :

  • les besoins liés à la santé menstuelle et gynécologique ;
  • le recours au télétravail pour les salariées et agentes souffrant de menstruations incapacitantes ;
  • l'accès à des sanitaires adaptés et à des protections menstruelles ;
  • l'organisation par l'employeur de cycles de sensibilisation à destination de l'ensemble des personnes salariées.
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Mesure n°4 : Intégrer la santé menstruelle et gynécologique dans les prérogatives d'action de la médecine du travail

Enfin, la proposition de loi visant à reconnaître et protéger la santé menstruelle et gynécologique dans le monde du travail prévoit d'intégrer la médecine du travail à la gestion des problématiques liées à la santé menstruelle et gynécologique.

En effet, il s'agirait d'intégrer la santé menstruelle et gynécologique dans les prérogatives d'action de la médecin du travail via l'accompagnement, l'orientation et le suivi médical des salariées et agentes publiques.

La médecine du travail aurait également pour rôle d'apporter son aide à l'aménagement de leur poste de travail et de sensibiliser le personnel mais aussi les entreprises et services publics sur les questions de santé menstruelle et gynécologique.

Les questions d'aménagement de l'environnement de travail, du recours à l'arrêt de travail ou au télétravail en cas de menstruations incapacitantes pourraient également être intégrées à la visite d'information et de prévention.

Initiatives d'entreprises en France et dans le monde : reconnaître l'absence en raison des menstruations douloureuses

En France

Certaines entreprises françaises et collectivités territoriales n'ont pas attendu un mouvement législatif avant de reconnaître ces problématiques. Par exemple :

  • depuis le 1er janvier 2021, le personnel féminin de la SCOP La Collective bénéficie d'un jour de congé payé supplémentaire. Une initiative permettant à 16 femmes salariées sur les 37 de l'entreprise de s'absenter du travail lorsqu'elles rencontrent des difficultés du fait de leurs menstruations. Pour le cogérant de la coopérative, faire bénéficier de ce congé payé permet de favoriser la qualité de vie et des conditions de travail (QVCT) et l'égalité entre les femmes et les hommes. Le congé menstruel est facultatif et la démarche pour en bénéficier est simple. La travailleuse en fait la demande par email au directeur administratif de la SCOP, le jour même de l'absence si besoin. Cette absence n'est pas considérée comme un arrêt de travail classique et est à la charge de l'employeur ;
     
  • à Toulouse, au sein de la start-up Louis qui fabrique du mobilier écoresponsable pour bureaux, il est proposé aux salariées de prendre 1 jour de congé menstruel, qui peut aussi être décliné en jour de télétravail, une fois par mois, et ce, sans justificatif médical, ni perte de salaire. Une charte de consentement a été signée par l'ensemble des salariés (hommes et femmes) en faveur du congé menstruel ;
     
  • à Lyon, les agents de la Métropole ont accès à un congé menstruel depuis octobre 2023. Elles peuvent désormais poser 2 jours de congé (ou du télétravail), lorsqu'elles ont des règles douloureuses ou si elles souffrent d'endométriose, et après présentation d'un certificat médical (à présenter une seule fois pour ouvrir droit à l'autorisation d'absence).
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Bon à savoir :

Certaines associations alertent toutefois sur les potentiels dangers concernant les discriminations envers les femmes dans le milieu du travail ou les freins supplémentaires à leur embauche. Elles indiquent également leur inquiétude face au secret médical des salariées vis-à-vis de leur employeur et de leurs collègues.

Dans le monde

Si le congé menstruel n'est qu'au stade de projet législatif, d'autres États l'ont d'ores et déjà reconnu :

  • l'Espagne : il s'agit du premier pays européen à avoir légiférer sur la question. La loi, votée le 16 février 2023, a été prise dans le but de réduire les inégalités entre les femmes et les hommes ;
     
  • le Japon : le congé menstruel est inscrit dans la loi japonaise depuis 1947. Les entreprises japonaises ne peuvent forcer une salariée à travailler si elle demande un congé menstruel. La salariée peut prendre autant de jours que nécessaire, ils ne seront en revanche pas rémunérés pour 70 % des cas. Seuls 30 % des entreprises proposent une prise en charge partielle ou complète de ces congés, ce qui explique en partie la faible part de femmes profitant de ce congé. Selon une étude menée par le ministère du Travail japonais en 2020, seules 0,9 % des femmes en auraient profité ;
     
  • la Corée du Sud : les salariées coréennes bénéficient de 1 jour par mois, depuis 2001. Cependant, ce congé n'est pas rémunéré, mais les entreprises doivent malgré tout respecter l'absence de la salariée, sous peine d'une amende ;
     
  • l'Indonésie : dans ce pays, les salariées disposent de 1 ou 2 jours de congés menstruels par mois. Effectivement, depuis 2003, en cas de douleurs de règles, les salariées peuvent prendre 1 ou 2 jours de congé, payé(s) par l'entreprise, mais seulement en début de cycle et avec l'obligation d'anticiper la date et de la notifier à son employeur. Cela peut donc s'avérer difficilement applicable en cas de cycles irréguliers.
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Références : 
(1) Proposition de loi visant à améliorer et garantir la santé et le bien-être des femmes au travail, déposée le 18 avril 2023
(2) Proposition de loi visant à reconnaître et protéger la santé menstruelle et gynécologique dans le monde du travail, déposée le 20 février 2024
(3) Loi n°2023-567 du 7 juillet 2023 visant à favoriser l'accompagnement psychologique des femmes victimes de fausse couche

(4) Article L323-1-2 du Code de la sécurité sociale, tel qu'impacté par la Loi n°2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024
(5) Article L1225-4-3 du Code du travail
(6) Accord Syntec du 13 décembre 2022 relatif à l’interruption spontanée de grossesse 
(7) "Endométriose", Organisation mondiale de la Santé, 24 mars 2023
(8) Article L1222-9 du Code du travail