Les baux à usage d’habitation, professionnel et commercial qui relèvent de contrats par essence, « à durée déterminée » obéissent à une réglementation particulière, s’agissant de leur durée et les conditions de leur renouvellement, règlementation dérogatoire par rapport à celle contenue dans le Code civil et plus précisément les articles 1212 à 1215.
Après une définition sommaire de chaque contrat de bail concerné, il sera examiné pour chaque bail évoluant suivant une règlementation spécifique, sa durée et ses conditions de renouvellement.
Définition du bail à usage d’habitation, professionnel et commercial
💡 Définition du bail à usage d’habitation : le contrat de bail à usage d’habitation est un contrat conclu entre un bailleur et un locataire au terme duquel le bailleur va permettre la jouissance au locataire d’un local à usage d’habitation. Le contrat de bail à usage d’habitation est régi par la Loi du 6 juillet 1989 (1), qui est une loi dite « d’ordre public ». Le principe même du contrat de bail à usage d’habitation est de permettre le logement et l’habitat du locataire.
💡 Définition du bail à usage professionnel : le contrat de bail à usage professionnel est un contrat conclu entre un bailleur et un locataire, au terme duquel le bailleur va permettre la jouissance au locataire d’un local à usage « professionnel libéral » uniquement, à l’exclusion de toute activité commerciale, artisanale ou agricole. Le contrat de bail à usage professionnel est régi par la Loi du 23 décembre 1986 (2). Le principe même du contrat de bail à usage professionnel est de permettre au locataire l’exercice d’une activité professionnelle dite « libérale » uniquement.
💡 Définition du bail commercial : le contrat de bail commercial est un contrat conclu entre un bailleur et un locataire au terme duquel le bailleur va permettre la jouissance au locataire d’un local à usage commercial ou artisanal. Le contrat de bail commercial est régi par les dispositions du Code de commerce (3). Le principe même du contrat de bail commercial est de permettre au locataire qui crée un fonds de commerce, l’exercice d’une activité commerciale ou artisanale.
📑 Vous pourriez être intéressé par notre article : Quelles différences entre le bail professionnel et le bail commercial ?
Durée et conditions de renouvellement du bail à usage d’habitation, professionnel et commercial
Bail à usage d’habitation
Durée minimale du bail à usage d’habitation
Le bail à usage d’habitation est conclu pour une durée minimale de trois ans, si le bailleur est une personne physique ou une SCI dite familiale (entre parents jusqu'au 4ème degré). Il en va de même si le bien est en indivision. Le bail à usage d’habitation est conclu pour une durée minimale de six ans, si le bailleur est une personne morale (4).
L’article 10 de la loi du 06 juillet 1989 indique très précisément que la durée du bail de trois ans pour les bailleurs personnes physiques ou les SCI dites familiales et de six ans pour les bailleurs personnes morales constituent des durées minimales et par là même, rien n’interdit aux parties de stipuler des durées plus longues. Il est par exemple tout à fait possible, pour un bailleur personne physique ou une SCI dite familiale de conclure un bail d’une durée de six ans, alors que la loi prévoit une durée minimale de trois ans dans ce cas de figure.
📑 Vous pourriez être intéressé par notre article Baux d'habitation : les modalités du préavis données par le locataire ou le bailleur
Reconduction du bail à usage d’habitation
Le contrat de bail à usage d’habitation qui arrive à son terme et en l’absence de congé donné par le bailleur se reconduit tacitement (4).
En cas de reconduction tacite, la durée du contrat reconduit est de trois ans pour les bailleurs personnes physiques et les SCI dites familiales et de six ans pour les bailleurs personnes morales.
Partant, le système prévu pour le bail à usage d’habitation est simple, faute de congé donné par le bailleur, le bail se reconduit et par là même, se duplique pour la même durée, que celle prévue initialement, soit trois ans lorsque le bailleur est une personne physique ou une SCI dite familiale et de six ans pour les bailleurs personnes morales.
📌 Que se passe-t-il si les parties ont décidé de convenir d’un bail à usage d’habitation d’une durée de six ans, sachant que le bailleur est une personne physique ou une SCI dite familiale et alors même, que dans ce cas de figure, la loi stipulait une durée minimale de trois ans ?
L’article 10 de la loi du 06 juillet 1989 indique que la durée du bail conclu pour un bailleur personne physique ou une SCI dite familiale est de trois ans au minimum, mais rien n’interdit dans ce cas de figure de convenir d’un bail d’une durée supérieure et pourquoi pas de six ans.
📌 Que se passe-t-il en cas de reconduction tacite d’un bail à usage d’habitation d’une durée de six ans, sachant que le bailleur est une personne physique ou une SCI dite familiale et alors même, que dans ce cas de figure, la loi stipulait une durée minimale de trois ans et non pas six ans ?
L’article 10 indique, que la durée d’un bail à usage d’habitation, en cas de tacite reconduction est de trois ans, lorsque bailleur est une personne physique ou une SCI dite familiale et de six ans lorsque le bailleur est une personne morale.
L’article 10 de la loi du 06 juillet 1989 présente donc cette particularité d’autoriser la conclusion d’un bail d’une durée supérieure à trois ans (par exemple six ans), lorsque le bailleur est une personne physique ou une SCI dite familiale, mais il fixerait d’autorité la durée du bail reconduit tacitement à trois ans et non plus six ans, en cas de tacite reconduction.
📌 L’article 10 de la loi du 06 juillet 1989 a-t-il vocation à autoriser la conclusion de baux d’une durée supérieure à trois ans, lorsque le bailleur est une personne physique ou une SCI dite familiale, mais par la suite, ramènerait d’autorité la durée du bail reconduit tacitement à la durée de trois ans ?
La situation en serait de même pour un bail originaire de plus de six ans conclu lorsque le bailleur est une personne morale. Il n’existe en l’état pas de solution clairement tranchée. Il existe en effet peu de décisions ayant eu à trancher ce débat.
Il est cité une première décision de justice :
- Cass. 3e civ., 28 nov. 2012 (5)
Cette décision certes ancienne valide le renouvellement du bail par tacite reconduction pour la même durée que bail initial, ce qui tend à admettre que les parties peuvent à la fois convenir d’une durée du bail supérieure à la durée minimale légale, et cela s’applique dans les mêmes conditions pour le renouvellement.
Une décision antérieure à celle déjà citée a développé la même argumentation.
- Cass. 3e civ., 17 octobre 2007 (6)
Il est cité une troisième décision plus récente, mais qui s’applique à un bail verbal, par là même, sans durée, où la Haute Cour considère que le bail initial conclu lorsque le bailleur est une personne physique ou une SCI dite familiale est d’une durée de trois ans, tout comme la nouvelle durée en cas de reconduction qui doit être de trois ans. Il y existe bien un doute qui mériterait d’être tranché dans les mois à venir.
- Cass. 3e civ., 17 novembre 2021 (7)
Nota : l’incertitude serait moindre, si les parties prenaient la peine de préciser dans le cadre du contrat de bail, que le contrat serait reconduit, par tacite reconduction, pour la même durée, que le bail initial, la précision est d’importance.
Bail à usage professionnel
Durée minimale du bail à usage professionnel
La durée du bail professionnel est fixée à six ans minimum, ce qui implique que rien n’interdit de convenir d’une durée supérieure, et ce, d’un commun accord entre les parties (8).
Reconduction du bail à usage professionnel
Le bail à usage professionnel se renouvelle par tacite reconduction pour la même durée de six ans (8).
L’article 57 A de la loi du 23 décembre 1986 ne crée pas la même incertitude que s’agissant du bail à usage d’habitation conclu pour une durée initiale plus importante que celle prévue par la loi. Il est en effet indiqué que « au terme fixé par le contrat, le contrat est reconduit tacitement pour la même durée ».
La lecture de l’article 57 A de la loi du 23 décembre 1986 détermine à penser, qu’en cas de conclusion d’un bail professionnel d’une durée supérieure à six ans, ledit bail sera reconduit pour la même durée que le bail originaire, soit plus que six ans.
Bail commercial
Durée minimale du bail commercial
Le bail commercial est conclu pour une durée minimale de 9 ans et jusqu’à 12 ans maximum (9). Au-delà de 12 ans, un bail notarié est obligatoire.
Renouvellement du bail commercial
Le bail commercial, d’une durée de neuf ans au minimum, se renouvelle pour la même durée, si et seulement si, le locataire en forme la demande expresse ou si le bailleur lui accorde expressément le renouvellement (10). Le bailleur ne peut s’opposer au renouvellement du bail commercial du locataire, qu’en lui versant une indemnité d’éviction, qui correspond au-moins à la valeur du fonds de commerce.
⚠ Attention : le bail commercial d’une durée de neuf ans au minimum ne se renouvelle pas par tacite reconduction, de sorte que, si aucune des parties ne formule de demande particulière au terme des neuf ans ou plus, le bail commercial se poursuit pour une durée indéterminée. Si le bail commercial se poursuit pour une durée ininterrompue de plus de douze ans, le loyer est déplafonné de plein droit et il doit être fixé en fonction de la valeur locative réelle du local.
📑 Vous pourriez être intéressé par nos autres articles sur le sujet : Bail précaire d'un local commercial : avantages, durée, inconvénients, Tout savoir sur la cession du bail commercial, Comment résilier un bail commercial après les 3, 6 ou 9 ans
Références :
(1) Loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, relative aux baux à usage d’habitation
(2) Loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 tendant à favoriser l'investissement locatif, l'accession à la propriété de logements sociaux et le développement de l'offre foncière, relative aux baux à usage professionnel
(3) Articles L145-1 à L145-60 du Code de commerce
(4) Article 10 de la Loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, relative aux baux à usage d’habitation
(5) Cass. 3e civ., 28 nov. 2012, n° 11-25529 « Décision qui valide le renouvellement d’un bail à usage d’habitation par tacite reconduction de la même durée que le bail initial et donc pour une durée différente de celle prévue par la loi »
(6) Cass. 3e civ., 17 octobre 2007, n° 06-11104, Inédit, « Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait des termes clairs et précis de la clause du bail, sous l'intitulé "reconduction", qu'à défaut de congé donné par l'une ou l'autre des parties, le contrat devait être reconduit pour une durée de six ans, la cour d'appel a violé le texte susvisé »
(7) Cass. 3e Civ., 17 novembre 2021, n° 20-19450, « Il résulte de l'article 10, alinéas 1 à 3, de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 que le bail verbal portant sur un logement à usage d'habitation principale conclu par des bailleurs personnes physiques, en société civile immobilière (SCI) familiale ou en indivision, l'est pour une durée au moins égale à trois ans, et qu'en absence de congé valablement donné par les bailleurs, ce contrat parvenu à son terme est reconduit tacitement par périodes triennales »
(8) Article 57 A Loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 tendant à favoriser l'investissement locatif, l'accession à la propriété de logements sociaux et le développement de l'offre foncière, relative aux baux à usage professionnel, traitant de la durée des baux à usage professionnel et de leur renouvellement
(9) Articles L145-4 à L145-7-1 du Code de commerce
(10) Articles L145-8 à L145-12 du Code de commerce




Le modèle est un peu trop chargé avec des pages inutiles avant et après le contenu pertinent.