Racisme en entreprise en France : que dit la loi ?
Les comportements racistes sont condamnés par le Code pénal
Selon les termes de la loi, la provocation non publique à la discrimination, à la haine ou à la violence à l'égard d'une personne ou d'un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une prétendue race ou une religion déterminée est punie de l'amende prévue pour les contraventions de la 5e classe (1).
Pour mémoire, cette amende est égale au plus à 1.500 euros, ou 3.000 euros en cas de récidive (2).
Comportements racistes/discriminatoires en entreprise : la définition du Code du travail
Le racisme, en entreprise comme ailleurs, est une forme de discrimination.
Concrètement, ce terme peut être associé à des comportements et mesures défavorables ou négatifs de la part de l'employeur, de responsables hiérarchiques ou de salariés à l'égard d'une personne ou d'un groupe de personne en raison de leur origine, nationalité, de leur appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, à une nation ou à une prétendue race ou religion (3).
Pour mémoire, un principe général de non-discrimination (directe ou indirecte) s'applique dans le monde du travail, qui doit être respecté sous peine de l'application de diverses sanctions civiles comme pénales.
De fait, la jurisprudence considère que la tenue de propos à caractère raciste par un salarié constitue nécessairement une faute de sa part (4).
Comportements racistes en entreprise : illustrations/exemples (propos, injures, harcèlement, etc.)
Les comportements à caractère raciste en entreprises peuvent revêtir différentes formes : ils peuvent consister en des injures, des violences physiques, mais aussi en des attitudes plus subtiles ("blagues" à caractère raciste, par exemple sur les accents, sous-entendus, a priori, etc.).
Il peut aussi s'agir, selon la personne qui en est l'auteur, de mise à l'écart d'un groupe de salariés en raison d'un critère ci-dessus, ou de sa dévalorisation en public, de manière récurrente et ostensible.
⚠ Un comportement raciste peut être constitutif d'un harcèlement moral au travail.
Ces comportements répréhensibles peuvent avoir lieu lors de l'embauche de nouveaux salariés, mais aussi tout au long de la relation de travail (notamment dans le cadre de promotions, de la rémunération, de l'évolution professionnelle, de l'accès aux formations, etc.).
Ils peuvent émaner de simples collègues de travail, mais aussi de responsables hiérarchiques, et doivent dans tous les cas, pour pouvoir être sanctionnés par l'employeur, avoir été commis dans la sphère professionnelle.
📌 À noter : la notion de "sphère professionnelle" est perçue de manière relativement large par la Cour de cassation. En effet, par un arrêt du 15 mai 2024, celle-ci a précisé que les propos à caractère raciste tenus par la supérieure hiérarchique d'une salariée au cours d'un repas de Noël avec des collègues, organisé par le comité d'entreprise, relevaient de la vie professionnelle et constituaient une discrimination de la salariée en raison de ses origines (5).
En tant qu'employeur, il vous incombe d'être particulièrement attentif à tout type de comportement répréhensible pour pouvoir les corriger au plus vite, si cela devient nécessaire. Les conflits au travail peuvent créer des tensions dans votre entreprise. Ne tardez pas avant d'agir !
Rappel de l'obligation de sécurité de l'employeur
Selon la loi, vous êtes en effet dans l'obligation, en votre qualité d'employeur, de prendre toutes les mesures requises pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs (6). C'est ce que l'on appelle "l'obligation de sécurité" de l'employeur.
Parmi les mesures préconisées figurent notamment :
- des actions de prévention des risques professionnels (regroupées au sein du DUERP) ;
- des actions d'information et de formation ;
- la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.
Racisme en entreprise : comment lutter et réagir efficacement face aux discriminations ?
Comment lutter contre les discriminations ? Misez sur la prévention et la formation
Il est tout d'abord essentiel que vos salariés soient dûment informés du contenu des textes de loi applicables en matière de discrimination.
Au-delà de vos obligations légales, il est important que vous montriez à vos salariés votre détermination à lutter contre toute forme de comportement à connotation raciste.
Vous pouvez à cet effet rappeler, à diverses occasions, l'importance accordée au respect du principe de non-discrimination dans l'entreprise, notamment lors de la diffusion d'annonces internes d'emploi, ou par le biais d'affichages explicites dans les locaux de l'entreprise.
Prenez aussi l'initiative de former vos managers à la gestion de ces situations délicates, par exemple en élaborant une procédure spécifique à appliquer dans le cadre du traitement de ce type d'incidents. Diffuser et homogénéiser les bonnes pratiques permettra à votre équipe managériale de rester cohérente et unie dans ce type de situations.
👓Sur le sujet, cette actualité pourrait vous intéresser : Management et gestion d'équipe : les pièges à éviter pour être un bon manager
L'objectif global est de ne laisser aucun doute sur vos intentions en cas de comportements racistes dans l'entreprise. Cela dissuadera toute attitude inopportune, et rassurera toute victime éventuelle sur la qualité de votre écoute et de votre réactivité en cas de nécessité.
Traitez au plus vite tout incident à caractère raciste : respectez les étapes importantes
Prenez le temps de recueillir la parole de la victime et des éventuels témoins
En cas d'incident, il est très important de traiter le problème rapidement, et de recueillir la version de la personne qui s'estime victime d'actes racistes.
Celle-ci peut vous désigner les personnes ayant été éventuellement témoins de l'incident, et vous permettre de les interroger pour corroborer ses dires.
Isolez le salarié mis en cause, et obtenir sa version des faits
Prenez le temps de vous isoler avec le salarié mis en cause afin d'obtenir sa version des faits. La lutte contre tout comportement raciste ne doit pas, en effet, vous faire oublier la nécessité de mener une enquête la plus contradictoire possible.
Il s'agit d'éviter tout jugement hâtif, susceptible de sanctionner un comportement qui relèverait davantage d'un malentendu que d'un acte malveillant.
Quelles sont les sanctions possibles du salarié mis en cause en cas de discrimination ?
Si les faits apparaissent avérés, il vous incombe d'user de votre pouvoir disciplinaire pour sanctionner le salarié fautif.
Outre la sanction nécessaire de son comportement, cela constituera aussi un rappel pour l'ensemble de vos salariés que ce type de comportement n'est ni acceptable ni toléré au sein de votre entreprise, quelles qu'en soient les circonstances.
💡 Selon le Code du travail, constitue une sanction disciplinaire toute mesure (autres que les observations verbales) prise par l'employeur à la suite d'agissements fautifs du salarié, qui est de nature à affecter (immédiatement ou non) sa présence dans l'entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération (7).
Il peut ainsi s'agir d'une mise à pied disciplinaire, d'une mutation, etc.
Attention : si votre entreprise dispose d'un règlement intérieur, vous êtes tenu de respecter ce qu'il prévoit en matière disciplinaire. Pour mémoire, la rédaction d'un règlement intérieur est obligatoire pour les entreprises employant 50 salariés et plus (8).
👓 Pour en savoir plus sur l'élaboration de ce document obligatoire, consultez notre actualité dédiée : Comment rédiger un bon règlement intérieur ?
Respectez la procédure de licenciement applicable, le cas échéant
Selon la gravité du comportement fautif, vous pouvez être amené à envisager la rupture du contrat de travail du salarié mis en cause.
Dans ce cas, il vous incombe de respecter scrupuleusement la procédure de licenciement applicable.
Qu'en est-il du licenciement du salarié protégé ?
Selon le Conseil d'Etat, les propos sexistes et racistes (relatifs à l'origine et à la religion supposée de certaines salariées) d'un salarié protégé justifient son licenciement (9).
👓 Pour en savoir davantage sur la rupture du contrat de travail d'un salarié protégé, prenez le temps de lire notre actualité : Rupture du contrat de travail d’un salarié protégé : quelles sont les possibilités ?
(1) Article R625-7 du Code pénal
(2) Article 131-13 du Code pénal
(3) Article L1132-1 du Code du travail
(4) Cass. Soc., 2 juin 2004, n°02-44904
(5) Cass. Soc., 15 mai 2024, n°22-16287
(6) Article L4121-1 du Code du travail
(7) Article L1331-1 du Code du travail
(8) Article L1311-2 du Code du travail
(9) CE, 7 octobre 2022, n°450492
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