L'employeur ne peut pas baisser le salaire fixe des salariés de l'entreprise sans leur accord

La rémunération est un élément essentiel du contrat de travail. Comme tout élément du contrat, l'employeur ne peut pas le modifier unilatéralement, c'est-à-dire sans obtenir l'accord préalable du salarié.

Dans le cas contraire, le salarié peut tout à fait envisager la prise d'acte de la rupture de son contrat aux torts de l'employeur et obtenir la requalification de la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse (1).

Dans ce cas, l'employeur doit lui verser des indemnités (indemnité de licenciement, indemnité compensatrice de préavis et indemnité compensatrice de congés payés) et des dommages-intérêts pour licenciement abusif.

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Dans quel cas peut-on baisser un salaire ? Que dit le Code du travail ? Comment justifier une baisse de salaire ?

Baisse de salaire si accord du salarié

Si vous proposez à un salarié de baisser son salaire et qu'il vous donne son accord, vous avez le droit de procéder à cette diminution.

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Attention, il est impératif :

- de ne pas faire pression sur le salarié (pas de chantage, pas de menace, ne pas le forcer) ;
- d'obtenir son accord express et non équivoque (aucune forme n'est requise pour demander l'accord du salarié, mais un courrier en recommandé avec accusé de réception est une possibilité pour avoir la preuve que le salarié a reçu la proposition) ;
- d'établir un avenant au contrat de travail signé par l'employeur et par le salarié ;
- de ne pas prévoir une rémunération inférieure au SMIC ou au salaire minimum prévu par votre convention collective, s'il est plus élevé.

Si le salarié accepte la diminution de sa rémunération, l'employeur a tout à fait le droit de réduire son salaire. 

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Baisse de salaire pour motifs économiques (refus = licenciement économique)

Si l'entreprise fait face à de grosses difficultés de trésorerie, notamment suite à la crise sanitaire, l'employeur peut proposer à ses salariés de diminuer leur salaire (2).

En effet, l'employeur peut proposer au salarié une modification d'un élément essentiel de son contrat de travail en raison d'un motif économique (3), tel que des difficultés économiques.

Elles peuvent être liées à une évolution significative d'au moins un indicateur économique, tel que :

  • une baisse des commandes ou du chiffre d'affaires ;
  • des pertes d'exploitation ;
  • une dégradation de la trésorerie ou de l'excédent brut d'exploitation ;
  • ou tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés.

Pour constituer un motif économique valable, la durée de la baisse de commandes ou de chiffre d'affaires (en comparaison avec la même période de l'année précédente) doit être au moins égale à :

  • 1 trimestre (entreprise de moins de 11 salariés) ;
  • 2 trimestres consécutifs (entreprise de 11 à 49 salariés) ;
  • 3 trimestres consécutifs (entreprise de 50 à 299 salariés) ;
  • 4 trimestres consécutifs (entreprise de 300 salariés ou plus).

 Pour connaître tous les motifs économiques permettant de modifier un contrat de travail, consultez l'article suivant : Licenciement économique : 7 points pour tout comprendre

Si l'entreprise fait face à de telles difficultés économiques, l'employeur peut proposer une baisse de salaire à son salarié en respectant la procédure suivante :

  • proposer la baisse de salaire par lettre recommandée avec avis de réception ;
  • laisser un délai de réflexion de 1 mois au salarié pendant lequel il peut donner son accord ou son refus (15 jours si redressement ou liquidation judiciaire pour exprimer son accord ou son refus).

Si le salarié donne son accord dans le délai de 1 mois, l'employeur peut diminuer son salaire en signant un avenant au contrat.

À défaut de réponse dans ce délai, le salarié est réputé avoir accepté la baisse de salaire.

S'il refuse dans le délai de 1 mois, l'employeur ne peut pas baisser son salaire "de force", mais peut engager une procédure de licenciement économique à son encontre (3).

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Vous faites face à des difficultés économiques ? 

Notre dossier, consacré aux entreprises en difficulté, vous présente les mesures d'accompagnement et de prévention mises en place.

Diminution de salaire suite à réduction ou suppression de primes

L'employeur peut supprimer les primes et les éléments de rémunération non prévus au contrat.

En effet, autre solution qui s'offre à l'employeur : diminuer ou supprimer des primes qui ne sont pas prévues au contrat.

Cependant, bon nombre de primes résultent d'un accord collectif ou sont devenues un usage. Par conséquent, si vous n'avez pas à demander l'accord de votre salarié, vous devez tout de même procéder à la dénonciation de l'accord d'entreprise ou de l'usage ou réviser l'accord en vue de supprimer ou diminuer la prime.

Négocier un accord de performance collective

L'employeur peut négocier un accord de performance collective pour répondre aux nécessités de fonctionnement de l'entreprise, pour préserver ou développer l'emploi.

Avec cet accord, l'employeur peut notamment :

  • aménager la rémunération (la diminuer par exemple) en respectant les minima hiérarchiques de la convention collective ;
  • aménager la durée, l'organisation et la répartition du travail ;
  • aménager des conditions de mobilité professionnelle ou géographique interne.

Avec un tel accord, qui se substitue aux clauses du contrat de travail, l'employeur peut baisser la rémunération de ses salariés. S'ils refusent, il peut envisager leur licenciement.

Qu'est-ce qu'une saisie sur salaire ? Est-ce une baisse de la rémunération ?

La saisie sur salaire (ou saisie sur rémunération) et la baisse de la rémunération du salarié sont 2 notions totalement différentes qu'il ne faut pas confondre.

La saisie sur salaire désigne une procédure selon laquelle l'employeur va affecter une partie de la rémunération du salarié, au remboursement de l'une de ses dettes (4). Concrètement, il s'agit de la situation dans laquelle l'employeur doit, conformément à une décision rendue par le juge de l'exécution, prélever une partie de ce salaire et la reverser au greffe du tribunal compétent, en vue du remboursement d'une dette.

Dans le cadre de cette procédure particulière, un avis de saisie est envoyé à l'employeur et au débiteur de la dette (le salarié), lequel indique les sommes saisies, les taux d'intérêts, et le mode de calcul de la fraction saisissable. La somme saisie est donc versée au greffe du tribunal tous les mois, jusqu'à la fin de la saisie. Cette saisie est conditionnée à certains seuils et certaines sommes (fraction insaisissable, règles particulières pour les pensions alimentaires, primes et indemnités insaisissables, etc.). 

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 Sur ce point, ce sont désormais les commissaires de justice (ex-huissiers de justice) qui seront chargés de la mise en œuvre et du suivi des saisies sur rémunération (5). Cette réforme a été validée par le Conseil constitutionnel le 16 novembre 2023, et est donc jugée conforme à la Constitution. Certains députés la considéraient comme contraire au respect de la vie privée et aux droits de la défense, mais cela n'a pas été retenu (6).

Ainsi, contrairement à la procédure actuelle, le juge de l'exécution n'aura plus à intervenir. C'est pour cette raison que la mesure est qualifiée de "déjudiciarisation de la procédure". L'ensemble des nouvelles dispositions entreront en vigueur, au plus tard, le 1er juillet 2025 et seront précisées par décret.

En conclusion, si la saisie impacte la rémunération que le salarié perçoit chaque mois, il ne s'agit toutefois pas d'une décision de l'employeur. Autrement dit, ce n'est pas l'employeur qui décide, ou non, de réduire la rémunération que le salarié perçoit. Celui-ci doit simplement répondre aux obligations qui lui incombent en la matière.

 Découvrez les barèmes de saisie sur salaire applicables en 2023

Références :

(1) Cass. Soc. 22 février 2006, n°03-47639
(2) Article L1222-6 du Code du travail
(3) Article L1233-3 du Code du travail
(4) Articles L3252-1 à L3252-13 et R3252-1 à R3252-49 du Code du travail 

(5) Loi n°2023-1059 du 20 novembre 2023 d'orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027
(6) Conseil constitutionnel, 16 novembre 2023, décision n°2023-855