Recul de l'âge légal de départ à la retraite à 64 ans, quelle année de naissance sera concernée par la réforme des retraites ? Quelle génération sera touchée ?

L'âge légal de départ à la retraite, actuellement fixé à 62 ans, devrait reculer progressivement pour atteindre 64 ans en 2030

Les salariés qui sont nés à compter du 1er septembre 1961 seront les premiers concernés par le report de l'âge légal de départ à la retraite. L'âge l'égal de départ à la retraite à 64 ans sera atteint pour les salariés nés à partir de 1968. 

Face au recul de l'âge légal de départ à la retraite, les entreprises vont devoir s'adapter et prendre en compte les enjeux liés au vieillissement et au maintien dans l'emploi des seniors, notamment en protéger les salariés face à l'usure professionnelle et ce, tout au long de leur carrière.

Favoriser la protection des salariés face à l'usure professionnelle

Pour éviter l'exposition des salariés aux risques professionnels, notamment les troubles musculo-squelettiques et assurer leur maintien dans l'emploi, il est indispensable de prévenir l'usure professionnelle.

A ce titre, le Projet de réforme des retraites prévoit différentes mesures pour accompagner la reconversion des salariés usés par le travail en cours de carrière ou faciliter leur départ à la retraite dès 62 ans.

Ouverture du compte professionnel de prévention (C2P) à davantage de salariés

60.000 personnes supplémentaires pourraient bénéficier du compte professionnel de prévention.

Dossier de presse, Pour nos retraites, 10 janvier 2023

Le compte professionnel de prévention (C2P) permet aux salariés exposés à des facteurs de risques professionnels, au-delà des seuils minimum définis, d'acquérir des points pour chaque année d'exposition. Ils peuvent ensuite utiliser ces points pour financer des formations, financer un passage à temps partiel payé à temps plein ou encore pour bénéficier d'un départ anticipé à la retraite.


Bon à savoir :

Le compte professionnel de prévention est automatiquement créé lorsque l'employeur déclare via la déclaration sociale nominative (DSN), les facteurs de risques auxquels sont exposés les salariés au-delà des seuils.

Le Projet de réforme des retraites prévoit d'abaisser les seuils des principaux facteurs d'exposition aux risques professionnels pour permettre à davantage de salariés de bénéficier d'un C2P.


Exemples :

Pour être prise en compte au titre du C2P, l'exposition au travail de nuit doit actuellement dépasser 120 nuits par an. Le Projet de réforme prévoit d'abaisser ce seuil à 100 nuits par an.

De même, pour être prise en compte au titre du C2P, l'exposition au travail en équipe successives alternantes est actuellement de 50 nuits par an. Le Projet de réforme prévoit d'abaisser ce seuil à 30 nuits par an. 

Les travailleurs exposés aux facteurs de risques professionnels pourront ainsi acquérir plus rapidement des points sur leur C2P.

Par ailleurs, à l'heure actuelle, le nombre total maximum de points acquis pouvant être inscrits sur le C2P est de 100 points. Le Projet de réforme prévoit l'acquisition de points sans limite de nombre, ce qui devrait permettre d'augmenter les possibilités d'utilisation.

Employeurs, vous souhaitez être accompagnés dans la prévention des risques professionnels en entreprise ?

Création d'un droit à la reconversion pour faciliter les changements de carrière

Le Projet de réforme prévoit la création d'un nouveau cas d'utilisation du C2P. Il serait possible d'utiliser le C2P pour bénéficier d'un droit à la reconversion afin de faciliter les les changements de métiers en cours de carrière.

Concrètement, 60 points acquis sur le C2P pourraient permettre de financer une formation longue et qualifiante de 30.000 euros.

Par ailleurs, les droits à la formation seraient également renforcés puisque 1 point au C2P ouvrirait un droit de 500 euros de financement pour une formation. A l'heure actuelle, 1 point au C2P ouvre un droit de financement de formation de  375 euros.

Création d'un fonds d'investissement pour la prévention de la pénibilité

Le Projet de réforme prévoit aussi la création d'un fonds d'investissement dans la prévention de l'usure professionnelle.

1 milliard d'eurospour le fonds d'investissement

Les branches professionnelles devront, en collaboration avec la Sécurité sociale, identifier les métiers les plus exposés aux facteurs de risques ergonomiques à l'origine de 9 maladies professionnelles sur 10, à savoir :

  • les postures pénibles ;
  • le port de charges lourdes ;
  • les vibrations mécaniques.

Ce fonds servira à financer avec les employeurs, des actions de sensibilisation, de prévention et de reconversion à destination des travailleurs qui exercent l'un des métiers les plus exposés à ces facteurs de risques ergonomiques.

Mise en place d'une visite médicale de fin de carrière : qui peut partir à 62 ans en retraite anticipée ?

Depuis le 1er octobre 2021, les salariés qui partent à la retraite à compter de cette date (départ volontaire ou mise à la retraite par l'employeur) et qui ont été exposés au cours de leur carrière à des risques professionnels, doivent bénéficier d'une visite médicale de fin de carrière.

Le Projet de réforme des retraites prévoit de rendre cette visite médicale de fin de carrière obligatoire à l'âge de 61 ans. Jusqu'à présent, celle-ci était obligatoire avant le départ volontaire à la retraite du salarié ou avant sa mise à la retraite par l'employeur mais sans précision de l'âge à laquelle elle doit avoir lieu. 

L'objectif de cette mesure serait de permettre aux salariés qui ne sont pas en mesure de continuer à travailler et sont ainsi reconnus inaptes au travail, de bénéficier d'un départ anticipé à la retraite. Ils pourraient ainsi partir en retraite à l'âge de 62 ans, à taux plein. 

Création d'un CDI senior dit CDI de fin de carrière

Le Projet de réforme des retraites prévoit l'expérimentation d'un CDI senior.

Les entreprises pourraient conclure un CDI de fin de carrière avec les chômeurs de longue durée de plus de 60 ans. 

Une négociation entre les organisations d'employeurs et de salariés représentatives au niveau national et interprofessionnel doit être engagée à ce sujet. A défaut d'accord, le CDI fin de carrière sera mis en place, à titre expérimental, à compter du 1er septembre 2023 et ce, pour une durée de 3 ans (soit jusqu'au 1er septembre 2026).

Pour inciter les entreprises à conclure des CDI senior, il est prévu d'exonérer celles qui se prêtent au jeu, de cotisations familiales pendant un an. 

Harmonisation du régime social des indemnités de rupture conventionnelle et de mise à la retraite

Le régime social applicable à l'indemnité spécifique de rupture conventionnelle diffère selon que le salarié est en droit de bénéficier ou non d'une pension de retraite.

Lorsque le salarié n'est pas en droit de bénéficier d'une pension de retraite d'un régime légalement obligatoire, l'indemnité de rupture conventionnelle suit le même régime social que l'indemnité de licenciement.

Concrètement, l'indemnité est exonérée de cotisations sociales, de CSG et de CRDS dans la limite de 2 fois le plafond de la Sécurité sociale, soit 87.984 euros.

Toutefois, elle est assujettie au forfait social de 20% sur la partie exonérée de cotisations.


Bon à savoir :

Le forfait social est une contribution à la charge de l'employeur. Son taux est généralement fixé à 20%.

Mais, lorsque le salarié est en droit de bénéficier d'une pension de retraite, l'indemnité de rupture conventionnelle est exonérée de forfait social car elle est soumise intégralement aux cotisations, à la CSG et à la CRDS.

Ce régime social encourage fortement les entreprises a proposer une rupture conventionnelle à leurs salariés proches de l'âge de la retraite plutôt qu'une mise à la retraite.

En effet, l'indemnité de mise à la retraite est exonérée de charges sociales mais soumise à une contribution patronale de 50%. De quoi freiner les entreprises !

Pour dissuader les entreprises d'avoir recours à la rupture conventionnelle pour se séparer des seniors et au contraire, les encourager à maintenir les seniors dans l'emploi, le Gouvernement souhaite augmenter son coût. En effet, il est prévu dans la réforme des retraites, d'unifier les taux de contribution patronale des indemnités de rupture conventionnelle et des indemnités de mise à la retraite

30%Nouvelle contribution unique

Le taux de la contribution patronale sur les indemnités de rupture conventionnelle et de mise à la retraite devrait prochainement être fixé à 30%. En effet, le Projet de réforme des retraites prévoit la création d'une contribution unique à 30% qui remplacerait :

  • le forfait social de 20% sur les indemnités de rupture conventionnelle ;
  • la contribution spécifique de 50% sur les indemnités de mise à la retraite.

Aménagement du dispositif carrières longues : à quel âge laisser partir un salarié en retraite anticipée ?

Le Projet de réforme des retraites prévoit de maintenir le dispositif carrières longues.

Néanmoins, celui-ci va faire l'objet d'un aménagement.

Le Projet de réforme des retraites introduit en effet un niveau intermédiaire pour les personnes qui ont commencé à travailler avant 18 ans.


Bon à savoir :

A l'heure actuelle, le départ anticipé pour carrière longue permet aux salariés qui ont commencé leur carrière avant 20 ans et qui justifient avoir cotisé suffisamment de trimestres, de partir en retraite dès 60 ans ou à partir de 58 ans pour ceux qui ont commencé leur carrière avant 16 ans.

Ainsi, lorsque l'âge légal de départ à la retraite aura été décalé à 64 ans (en 2030), un employeur devra laisser partir un salarié en retraite anticipée, sous réserve qu'il justifie des conditions exigées, à l'âge de :

  • 58 ans pour les personnes ayant commencé à travailler avant 16 ans ;
  • 60 ans pour les personnes qui ont commencé à travailler entre 16 et 18 ans ;
  • 62 ans pour les personnes qui ont commencé à travailler entre 18 et 20 ans ;
  • 63 ans pour les personnes qui ont commencé à travailler entre 20 et 21 ans.

Initialement, le Projet de réforme des retraite ne prévoyait pas l'application du dispositif carrières longues aux salariés ayant commencé à travailler entre 20 et 21 ans. Cet élargissement du dispositif a été annoncé par Elisabeth Borne, dans le Journal du Dimanche du 5 février 2023, conformément à la demande formulée par les députés Les Républicains.

Obligation pour les entreprises d'au moins 300 salariés de publier leur index seniors !

Le Projet de réforme des retraites prévoit également la création d'un index seniors. Cet index permettrait de mettre en avant les bonnes pratiques de l'entreprise concernant l'embauche et le maintien des seniors dans l'emploi mais aussi, d'identifier les mauvaises pratiques.

Les entreprises seraient ainsi encouragées à replacer la question de la gestion des âges au coeur du dialogue social. A ce titre, elles devront s'appuyer sur les indicateurs de l'index lors de la négociation sur la gestion des emplois et des parcours professionnels (GEPP) dans l'entreprise. En effet, la question de l'emploi des seniors devra obligatoirement être intégrée à la négociation sur la GEPP.

Les entreprises pourraient avoir l'obligation de publier les résultats de cet index chaque année, au risque de se voir appliquer une pénalité financière en l'absence de publication des indicateurs pouvant aller jusqu'à 1% de la masse salariale de l'entreprise.

L'obligation de publication des résultats permettra de jouer sur leur effet de réputation.

Cette obligation de publication des résultats pourrait s'appliquer dès le 1er novembre 2023 aux entreprises de plus de 1.000 salariés, puis à celles de plus de 300 salariés au 1er juillet 2024.

La mesure visant à imposer aux entreprises de plus de 50 salariés la publication de leur index senior, à compter de juillet 2025, n'a finalement pas été retenue.

Faciliter la retraite progressive

La retraite progressive permet, sous certaines conditions, aux salariés âgés d'au moins 60 ans, de réduire leur activité professionnelle en fin de carrière. Ceux qui font le choix de mobiliser ce dispositif touchent à la fois le salaire correspondant à leur activité à temps partiel mais également une partie de leur retraite de base et de leur retraite complémentaire.

Puis, lorsqu'ils cessent définitivement leur activité professionnelle, leurs droits définitifs à la retraite sont recalculés. Les périodes à temps partiel effectuées au titre de la retraite progressive sont prises en compte puisque pendant cette période, ils ont continué de cotiser à l'Assurance vieillesse. 

Seulement 23.000 salariés bénéficient aujourd'hui de la retraite progressive.

Le projet de loi de réforme des retraites prévoit de faciliter l'accès au dispositif de retraite progressive.


Bon à savoir :

Jusqu'à présent, l'employeur était libre d'accepter ou de refuser une demande de passage à temps partiel au titre de la retraite progressive. Son accord était également nécessaire pour fixer le volume d'heures de travail du salarié et leur répartition (sur la semaine ou sur le mois).

La charge de la preuve devrait prochainement être inversée au bénéfice du salarié.

Une demande de passage à temps partiel pour accéder à la retraite progressive serait autorisée sauf réponse contraire de l'employeur justifiant de l'incompatibilité avec l'activité économique.

Par ailleurs, le temps partiel pourrait être accordé pour une durée inférieure à 24 heures.

Le dispositif de retraite progressive devrait également être généralisé et ainsi ouvert aux fonctionnaires et à l'ensemble des travailleurs indépendants.

Employeurs, vous souhaitez obtenir davantage d'informations pour mieux gérer le départ à la retraite d'un salarié ?

Augmentation du taux de cotisations vieillesse (cotisations assurance retraite)

Le projet de réforme des retraites prévoit l'augmentation des taux de cotisation vieillesse pour les employeurs.

En effet, la part patronale des cotisations vieillesse évoluerait de +0,1%.


Bon à savoir :

L'Assurance vieillesse, qui constitue le régime de retraite de base des salariés, est financée par les cotisations d'assurance vieillesse à la charge des employeurs et des salariés. Ces cotisations sont calculées pour une partie, sur la fraction de la rémunération inférieure ou égale au plafond de la Sécurité sociale et pour l'autre partie, sur la rémunération totale versée au salarié.

Dans le même temps, les entreprises verraient le taux de leur cotisation AT-MP (accident du travail / maladie professionnelle) diminuer.

Revalorisation du niveau de pension retraite des travailleurs indépendants

Il est également prévu d'ici le Projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS 2024) d'engager des concertations avec les représentants des différentes professions indépendantes et leurs organismes de sécurité sociale, pour réformer l'assiette sociale des indépendants.

A l'heure actuelle, les cotisations et contributions dont doivent s'acquitter les travailleurs indépendants repose sur une assiette sociale complexe et distincte de celle des salariés.

La volonté du Gouvernement est double :

  • simplifier le calcul des cotisations et des contributions sociales des travailleurs indépendants afin que leurs droits à la retraite soient renforcés ;
  • parvenir a davantage d'équité entre les salariés et les indépendants : une carrière complète sur une rémunération équivalente au SMIC garantirait aux travailleurs indépendants, une pension égale à 85% du Smic net

La réforme de l'assiette sociale des travailleurs indépendants sera intégrée au PLFSS pour 2024.

Vous êtes travailleurs indépendants et souhaitez obtenir des informations complémentaires sur vos droits en matière de protection sociale ?

Réforme des retraites : où en est-on aujourd'hui ? La nouvelle Loi retraite va t-elle être appliquée suite à l'utilisation du 49.3 par la Première ministre ? A quand la mise en place du Projet de réforme des retraites ? 

Le 16 mars 2023, la Première ministre Elisabeth Borne a engagé la responsabilité de son gouvernement en ayant recours à l'article 49.3 de la Constitution pour faire adopter le texte sur la réforme des retraites.

Deux motions de censure ont été déposées, l'une par le Rassemblement National, l'autre part le groupe indépendant LIOT pour empêcher l'adoption du Projet de réforme. En vain !

Les deux motions de censure ont été rejetées à l'Assemblée nationale le lundi 20 mars, dont l'une à 9 voix près !

La réforme des retraites a donc été adoptée par le Parlement

Cependant, les oppositions ont saisi le Conseil constitutionnel afin que celui-ci se prononce sur la recevabilité du texte dans le délai de un mois.

Si le Conseil constitutionnel déclare le texte recevable, les premières mesures pourraient s'appliquer dès le 1er septembre 2023.

Quelles sont les prochaines journées de grève prévues ?

Voilà maintenant plusieurs semaines que la réforme des retraites fait parler d'elle. A tel point que plusieurs appels à la grève et journées de mobilisation ont eu lieu et sont encore prévus.

23 mars 2023nouvelle journée de mobilisation contre la réforme des retraites

Depuis le 19 janvier dernier, de nombreux secteurs d'activité (énergie, ferroviaire, automobile, éducation nationale etc...) se sont mobilisés contre le Projet de réforme des retraites.

Une grosse journée de mobilisation s'est déroulée le 23 mars suite à la décision d'Elisabeth Borne d'engager la responsabilité de son Gouvernement le jeudi 16 mars et au rejet des deux motions de censure à l'Assemblée nationale. La prochaine aura lieu le 28 mars 2023.

Cette actualité devrait vous intéresser : Comment réagir en cas de grève dans votre entreprise ?

Référence :
(1) Projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 pourtant réforme des retraites 

Source :
Dossier de presse, Pour nos retraites, 10 janvier 2023