* Empreinte Humaine, Nouvelles du jour - près d’un salarié sur deux déclare une détresse psychologique - NOVEMBRE 2023

Détresse psychologique au travail, burn-out : définition et causes 

Qu’est-ce que la détresse émotionnelle au travail ?

La détresse psychologique des salariés est celle qui résulte de l'exposition à des risques psychosociaux (RPS) dans ses conditions d'emploi.

Selon Michel Gollac, sociologue, les risques psychosociaux sont ceux ayant trait à la santé mentale, physique et sociale: ils correspondent généralement à un déséquilibre entre la situation du salarié et son environnement de travail, aboutissant à des conséquences néfastes sur sa sécurité et sur sa santé physique et psychique.

Ces risques peuvent être présents dans toutes les entreprises, quels que soient leur taille et leur secteur d’activité. 

Reconnaître les facteurs de risques 

Le rapport Gollac met en évidence 6 principaux facteurs de risques psychosociaux dans l'entreprise.

 Exemples :

  • l'intensité de la charge de travail (stress) ;
  • le temps de travail ;
  • l'autonomie et les marges de manœuvre du salarié ;
  • les rapports sociaux et la reconnaissance au travail ;
  • les conflits de valeur.

Les violences internes à l'entreprise (harcèlement moral ou sexuel, conflits...) ou externes à l'entreprise (relations avec les clients ou les fournisseurs...) sont aussi des facteurs de risques.

Attention ! L'employeur doit prendre toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les faits de harcèlement, notamment sexuel, d'y mettre un terme et de les sanctionner.

Dans les lieux de travail ainsi que dans les locaux ou à la porte des locaux où se fait l'embauche, les salariés doivent être informés par tout moyen (notamment affichage harcèlement sexuel) (1) 

  • de la définition et des risques encourus pour harcèlement en matière pénale ;
  • des actions contentieuses civiles et pénales ouvertes en matière de harcèlement sexuel et des coordonnées des autorités et services compétents.

 À savoir :

Selon une étude de la Dares de 2022 (2), les contraintes psychosociales (travail intense, manque d’autonomie, exigences émotionnelles, insécurité socio-économique, conflits de valeur, rapports sociaux dégradés) entraînent une incapacité plus fréquente des salariés à tenir dans leur travail : elle peut s’élever jusqu’à 58 % pour les salariés les plus fortement exposés à ces nuisances. 

A contrario, lorsque l’autonomie et le soutien social s’accroissent, le sentiment d’insoutenabilité du travail diminue.

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Burn-out : prévention en entreprise et aider le salarié

Prévention du burn-out en entreprise, critères de reconnaissance d’une maladie professionnelle, traitement des demandes de reconnaissance des maladies psychiques, rôle des comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles, licenciement pour inaptitude, etc. : notre dossier fait le point.

Reconnaître et déceler une situation de détresse

Comment savoir si un salarié est en grave détresse psychologique due au travail ?

Pas de diagnostic officiel

Le burn-out ne fait pas l’objet d'un diagnostic officiel dans les classifications médicales de référence que sont la Classification internationale des maladies (CIM-10) de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), et le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM-5) de l’Association américaine de psychiatrie.

Pour qualifier la souffrance du salarié, les symptômes qui le caractérisent ne doivent être analysés que dans la sphère du travail - et non personnelle. 

Une souffrance mentale et/ou physique

La souffrance et la détresse psychologique peuvent se manifester de manière mentale et physique.

Il peut s'agir de troubles mentaux (tristesse, incapacité à se concentrer...) pouvant aller jusqu'à la dépression ou de souffrances physiques (douleurs musculaires, fatigue intense...).

Dans les cas les plus sévères, la détresse psychologique et le mal-être au travail peuvent aller jusqu'au suicide du salarié.

Selon la taille de l'entreprise, l'employeur dispose de moyens de se renseigner sur la santé mentale des salariés.

À savoir :

L'employeur ne peut se baser uniquement sur la détresse "émergée" des salariés pour juger de leur qualité de vie au travail : selon la même étude de la Dares, 1/3 des salariés s’estimant en très bon état de santé jugent leur travail insoutenable !

Une souffrance au travail peut-elle être qualifiée de maladie professionnelle ? 

Il n'existe pas de tableau des maladies professionnelles pour les pathologies psychiques mais le burn-out peut être reconnu comme maladie professionnelle.

Une maladie non désignée dans le tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle (3) :

  • lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime ;
  • lorsqu'il est établi qu'elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu'elle entraîne le décès de celle-ci ou une incapacité permanente d'un taux au moins égal à 25 %.

Dans ce cas, la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) reconnaît l'origine professionnelle de la maladie après avis motivé d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles.

Un traumatisme psychologique peut-il être qualifié d'accident du travail  ?

Est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise (4).

Dès lors qu'il remplit les conditions requises par la CPAM, un traumatisme psychologique peut être qualifié d'accident du travail, le salarié peut faire une demande de reconnaissance en ce sens.

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Prévenir les risques psychosociaux et préserver la santé mentale des employés au travail

Rôle de l'employeur

Évaluation des risques grâce au DUERP 

Le document unique d'évaluation des risques (DUERP) transcrit et met à jour les résultats de l'évaluation des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs (5).

Il permet d'avoir connaissance et de prévenir l'exposition aux risques psychosociaux.

Protéger la santé mentale des travailleurs

Une fois qu'il a connaissance des risques, l'employeur doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs (6).

Le DUERP doit être tenu à disposition du comité social et économique (CSE).

Ces mesures comprennent :

  • des actions de prévention des risques professionnels ;
  • des actions d'information et de formation ;
  • la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.

L'employeur doit également présenter au CSE, un rapport annuel écrit faisant le bilan de la situation générale de la santé, de la sécurité et des conditions de travail dans l'entreprise et des actions menées au cours de l'année écoulée dans ces domaines.

L'employeur doit veiller à adapter ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes.

Faute inexcusable de l'employeur

Le manquement à l’obligation légale de sécurité et de protection de la santé du salarié peut être considéré comme une faute inexcusable de l'employeur.

 Exemple : l’employeur sait que les salariés sont exposés à un danger (surcharge de travail, exigences émotionnelles, stress...), mais ne prend pas les mesures nécessaires pour les en préserver.

Il appartient cependant au salarié d'apporter la preuve du danger et de la connaissance des faits par l'employeur.

Quels sont les exemples de solutions à mettre en place ?

 Exemples :

  • l'employeur peut proposer des entretiens réguliers aux salariés ou organiser des points "prévention santé" avec les responsables d'équipe ; 
  • il peut mettre en place un système de questionnaire régulièrement envoyé aux collaborateurs et leur permettant de s'exprimer de manière anonyme ou non.
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Prévention des risques psychosociaux dans l'entreprise : le rôle de l'employeur

Notre dossier fait le point sur vos obligations : 37 questions/réponses fondées juridiquement et 2 fiches explicatives complètes.

Rôle du CSE

L'employeur doit respecter le rôle du CSE dans la prévention de l'exposition des salariés aux RPS.

 À lire : Risques psychosociaux & télétravail : agir en tant que CSE

Propositions visant à améliorer les conditions de travail

Le CSE formule, à son initiative, et examine, à la demande de l'employeur, toute proposition de nature à améliorer (7) :

  • les conditions de travail, d'emploi et de formation professionnelle des salariés ;
  • leurs conditions de vie dans l'entreprise ;
  • et les conditions dans lesquelles ils bénéficient de garanties collectives complémentaires.

Inspection et enquêtes

Pour contrôler l'employeur dans le respect de ses obligations, le CSE procède, à intervalles réguliers, à des inspections en matière de santé, de sécurité et des conditions de travail (8).

Il réalise des enquêtes en matière d'accidents du travail ou de maladies professionnelles ou à caractère professionnel.

Droit d'alerte

Le représentant du personnel au CSE, qui constate qu'il existe une cause de danger grave et imminent, notamment par l'intermédiaire d'un travailleur, doit en alerter immédiatement l'employeur. Une fois informé, celui-ci doit prendre les mesures visant à faire cesser le danger (9).

Recours à un expert

Le CSE peut, dans les entreprises d'au moins 50 salariés, faire appel aux services d'un expert habilité en cas :

  • de risque grave, identifié et actuel constaté dans l'entreprise ;
  • ou en cas de projet important modifiant les conditions de santé, de sécurité ou de travail au sein de l'entreprise (5).

Un salarié en arrêt maladie pour détresse psychologique peut-il être licencié ?

La Cour de cassation montre une attention particulière au salarié en détresse psychologique et la jurisprudence tend à protéger le salarié en arrêt maladie dès lors que sa détresse est liée à un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité/prévention.

 Dans une décision, elle a même reconnu le caractère discriminatoire d'un licenciement d'un salarié en raison de son état de santé (10). Il comptait vingt-cinq ans d'ancienneté, et avait été licencié quelques jours seulement après l'envoi de son courriel d'alerte concernant la dégradation de son état de santé en lien avec le travail. Selon la Cour, il incombait à l'employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination et en l'espèce, aucun des griefs invoqués à l'appui de ce licenciement, motivé par une prétendue insuffisance professionnelle, n'était établi.

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Le télétravail assure-t-il le bien-être des salariés ?

Diminution de lien social, isolement, difficile respect du droit à la déconnexion, etc. : l'avenir du télétravail est remis en cause par certaines entreprises.

Pourtant, il peut être gage d'une meilleure qualité de vie au travail pour les salariés, en ce qu'il permet d'équilibrer la vie professionnelle et la vie privée et de réduire leur fatigue.

Il semble que ce mode de travail est apprécié différemment selon les besoins des salariés et peut s'envisager de différentes manières : télétravail partiel ou hybride, notamment.

Références :

(1) Article L1153-5 du Code du travail
(2) Quels facteurs influencent la capacité des salariés à faire le même travail jusqu’à la retraite ? 9 MARS 2023 DARES ANALYSES N°17 MIKAEL BEATRIZ
(3) Article L461-1 Code de la sécurité sociale
(4) Article L411-1 du Code de la sécurité sociale
(5) Article R4121-1 du Code du travail
(6) Article L4121-1 du Code du travail
(7) Article L2312-12 du Code du travail
(8) Article L2312-13 du Code du travail
(9) Article L2312-60 du Code du travail
(10) Cass. Soc., 5 février 2020, n°18-22399