Définition de la relation commerciale 

🔎Le contrat commercial met en relation un professionnel avec un autre professionnel, un non professionnel (défini comme un professionnel qui n'agit pas dans le cadre de sont activité) ou un consommateur. En tout état de cause, un contrat commercial a un objet commercial, c'est-à-dire qu'il a pour but la réalisation d'un acte de commerce (acte de vente, prestation services, etc.). Dès lors, il regroupe un nombre conséquent de contrats (contrat de prestation de services, contrat d'apporteur d'affaires, contrat commercial, contrat de partenariat, etc.).

Toutefois, la rupture abusive s'applique à certaines relations seulement. Tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers, qui décide de rompre brutalementmême partiellement, une relation commerciale, engage sa responsabilité. 

Donc dans quels cas précisément, peut-on parler de rupture abusive ?

Les critères de la rupture abusive 

La rupture abusive est réprimée par le Code du commerce. En effet, une rupture brutale engage la responsabilité de son auteur (1). La jurisprudence considère qu'elle se caractérise par la réunion de 2 critères cumulatifs.

Une relation commerciale établie

Un simple acte de vente, une relation commerciale récente, l'objet du contrat, etc., tout cela entre en considération. Dès lors, pour savoir si vous allez subir ou être auteur d'une rupture abusive, voici quelques indications.

📌

La Cour de cassation (2), déduit l'existence d'une relation commerciale établie par

  • le nombre des échanges entre les parties au contrat commercial ;

  • la durée de la relation commerciale ; 

  • l'étroite collaboration entre les parties et/ou la réalisation d'investissements techniques ou financiers impliqués par le projet commun. 

💡Ainsi, la relation s'apprécie dans son ensemble.

⚖ Les juges ont considéré que 5 commandes passées sur une période de 6 mois, sont la preuve d'une relation commerciale “ponctuelle et non suivie” et non d'une relation commerciale établie (3). Dans un autre arrêt pourtant, ils ont décidé "qu'une succession de contrats ponctuels peut être suffisant pour caractériser une relation commerciale établie"(4).

Retenez néanmoins que le juge reste souverain dans son appréciation, en cas de doute, rapprochez-vous d'un professionnel.

La brutalité de la rupture

Si la relation commerciale est établie, il convient de démontrer le caractère brutal de la rupture. Plusieurs situations peuvent alors se présenter.

🔍Le non respect du préavis : 

18 moisle délai de préavis maximal

  • le préavis est prévu contractuellement : son non-respect peut induire une rupture brutale ;

  • aucun délai de préavis n'est prévu contractuellement : la jurisprudence a tendance à prendre en compte la durée de la relation pour parvenir à un préavis raisonnable. Plus la durée est longue, plus le préavis le sera. Un préavis insuffisant est donc considéré comme une rupture brutale. 

⏳Néanmoins, le législateur a posé un plafond de 18 mois pour éviter les excès. Par conséquent, respecter un préavis de 18 mois devrait permettre de ne pas réaliser une rupture abusive. 

IMPORTANTLa volonté de la rupture doit être écrite et explicite. A défaut, la rupture brutale peut être caractérisée (5)

🔍Une inexécution du contrat :

  • généralement, un contrat-cadre est rédigé : il permet d'énumérer les principales obligations des parties. Si la rupture engendre un non-respect d'obligations préjudiciables pour les parties, éventuellement, le caractère abusif sera qualifié ;

  • en l'absence d'un contrat-cadre, il convient de démontrer en quoi les pratiques de l'auteur caractérisent une rupture brutale. 

⚖ Illustration : La jurisprudence a pu considérer que la seule baisse brutale des commandes et du chiffre d'affaires du cocontractant subissant la rupture, ne permettait pas d'établir une rupture abusive. De surcroît, elle a pu relever “l'absence d'accord-cadre comportant un engagement de commandes minimum" (6).

La rupture partielle, une rupture abusive

⛔ La rupture, même partielle, engage la responsabilité de l'auteur, et n'échappe pas à une sanction. Elle se présente sous plusieurs formes.
Elle peut être :
➡ une réduction significative du courant d'affaires (7) ;
➡ la modification des conditions tarifaires (8) ;
➡ une modification unilatérale et substantielle des conditions d'un contrat (9) ;
➡ le changement d'organisation dans le mode de distribution d'un fournisseur (10) ;
➡ la diminution significative de commandes (11).

La rupture abusive évincée 

Si le Code de commerce prévoit une sanction en cas de rupture abusive, cette qualification est évincée si la rupture est justifiée car étant la conséquence d'un manquement de l'autre partie.

📌

Illustrations : 

➙ Ainsi, une rupture peut avoir lieu sans préavis et ne pas être abusive si elle intervient alors que votre partenaire commercial n'est pas à jour dans ses paiements. La Cour de cassation considère que cela suppose une “faute d'une gravité telle” qu'elle ne permet pas le maintien de la relation (12).

➙ Votre contrat est composé d'une clause d'exclusivité (13) par laquelle votre cocontractant s'engage à vous accorder sa prestation de manière exclusive. En cas de non-respect, ce manquement pourrait aboutir à une résolution du contrat. 

Tout simplement, le législateur applique les règles civiles de la responsabilité contractuelle. Une inexécution de vos obligations peut aboutir à la rupture de votre contrat (14).

Se protéger d'une rupture abusive ?

📜La relation commerciale implique une rédaction minutieuse du contrat et des clauses inhérentes à celui-ci. En effet, la liberté contractuelle demeure pour prévoir en amont, avec votre partenaire contractuel, le déroulement d'une éventuelle rupture.

Différentes clauses peuvent être stipulées : 

  • une clause pénale peut venir anticiper le manquement à une obligation contractuelle en prévoyant par avance les indemnités par jour de retard ;
  • une clause résolutoire peut permettre la résiliation du contrat si les engagements prévus ne sont pas respectés ;
  • une clause compromissoire peut prévoir la désignation d'un arbitre en cas de litige ;
  • une clause de médiation préalable obligatoire oblige les parties à entrer en conciliation avant une assignation en justice ou la désignation de l'arbitre. 

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Références :
 
(1) Article L442-1 du Code de commerce
(2) Cass. Com., 25 avril 2006, n°02-19577, Inédit. 
(3) Cass. Com., 25 avril 2006, n°02-19577 
(4) Cass. Com. 15 septembre 2009, n°08-19200 
(5) Cass. Com., 17 mars 2004, n°02-17575
(6) Cass. Civ., 27 mars 2019, n°17-18047, Inédit. 
(7) CA Paris, 28 octobre 2005, n°2005-284109
(8) Cass. Com., 6 février 2007, n°04-13178
(9) CA Paris, 12 septembre 2001, n°99-15368
(10) CA Paris, 12 septembre 2001, n°99-15368
(11) Cass. Com., 24 septembre 2013, n°12-24155
(12) Cass. Civ., 27 mars 2019, n°17-16548, Inédit.
(13) Article L330-1 du Code de commerce
(14) Article 1217 du Code civil