Comment fonctionne l'aménagement des horaires de travail ?
Le principe du décompte du temps de travail sur la semaine
En France, la durée légale de travail effectif d'un salarié à temps plein est fixée à 35 heures par semaine (1).
Les 35 heures fixent le seuil de déclenchement des heures supplémentaires. Autrement dit, hors dispositions conventionnelles spécifiques, toute heure effectuée par le salarié au-delà de 35 heures par semaine est une heure supplémentaire donnant droit à une majoration salariale ou à un repos compensateur équivalent (2).
Les heures supplémentaires vont ainsi se décompter sur la semaine (3).
Le principe de l'aménagement du temps de travail
Toutefois, pour certaines entreprises, ce décompte du temps de travail et des heures supplémentaires sur la semaine n'est pas adapté. Cela est notamment le cas pour celles d'entre elles qui connaissent des fluctuations de leur activité :
-
en périodes intenses, elles ont besoin de faire travailler leurs salariés plus de 35 heures par semaines ;
-
en périodes plus calmes, elles n'ont pas besoin de faire travailler leurs salariés à hauteur de 35 heures par semaine.
📌 Exemple : cela va être le cas dans le secteur de la grande distribution, où certaines périodes vont être propices à une hausse du travail (fêtes de fin d'année, rentrée scolaire, etc.), dans le secteur du tourisme en fonction de l'affluence ou non des touristes, dans le BTP où certains chantiers ne pourront être réalisés que lorsque les conditions météorogiques le permettent, etc.
L'aménagement du temps de travail sur une période supérieure à la semaine permet à ces entreprises d'adapter le temps de travail du salarié sur la période choisie, dite "période de référence", et de ne décompter les heures supplémentaires qu'à la fin de cette période (après 2 semaines, 9 semaines, 6 mois, 1 an, etc.) (4).
En organisant le travail sur tout ou partie de l'année, les entreprises peuvent ne pas avoir systématiquement recours aux heures supplémentaires en période de forte activité, et à l'inverse, de ne pas avoir à recourir à l'activité partielle lorsque l'activité est faible.
💡 Bon à savoir : un dispositif de modulation du temps de travail sur l'année existait auparavant, avant d'être supprimé par la loi du 20 août 2008 (5). Il a depuis été remplacé par le régime actuel d'aménagement du temps de travail, unique et simplifié. S'il n'est plus possible de conclure des accords collectifs de modulation depuis le 22 août 2008 (date d'entrée en vigueur de la loi), ceux conclus avant cette date restent en vigueur sous certaines conditions. Nous ne traitons pas de cet ancien dispositif au sein de cet article.
Comment mettre en place un aménagement du temps de travail en entreprise ?
Pour mettre en place un aménagement du temps de travail sur une période supérieure à la semaine, 2 options s'offrent à l'employeur :
- le champ de la négociation collective via la conclusion d'un accord collectif ;
- ou la décision unilatérale.
Comment la durée du travail peut-elle être aménagée par accord collectif ?
La mise en place par accord collectif
L'aménagement du temps de travail sur une période supérieure à la semaine peut être mis en place par accord collectif, à savoir : un accord d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche (6).
Dans un tel cas, la limite de la période de référence est de 1 an.
Elle peut toutefois être portée à 3 ans si un accord de branche l'autorise, et seulement dans ce cas.
Contenu de l'accord collectif
L'accord collectif doit définir les modalités d'aménagement du temps de travail et organiser la répartition de la durée du travail sur une période supérieure à la semaine.
Le texte doit ainsi prévoir (6) :
-
la période de référence ;
-
les conditions et les délais de prévenance des changements de durées ou d'horaires de travail ;
-
concernant la rémunération des salariés, les conditions de prise en compte des absences, ainsi que des arrivées et des départs en cours de période de référence. De manière facultative, il peut également prévoir que la rémunération mensuelle des salariés sera lissée (voir ci-après) ;
-
concernant les salariés à temps partiel, les modalités de communication et de modification de la répartition de la durée et des horaires de travail.
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Comment la durée du travail peut-elle être aménagée par décision unilatérale de l'employeur ?
Si l'entreprise n'est pas dotée d'un accord collectif, l'aménagement du temps de travail sur une période supérieure à la semaine peut malgré tout être mis en place par décision unilatérale de l'employeur. Toutefois, la période de référence sera restreinte par les seuils imposés légalement.
Effectivement, à défaut d'accord, la mise en place d'une répartition sur plusieurs semaines de la durée du travail est limitée (7) :
-
à 4 semaines au maximum pour les entreprises de 50 salariés et plus ;
-
à 9 semaines au maximum pour les entreprises de moins de 50 salariés.
Dans ce cas, l'employeur doit établir un programme indicatif de la variation de la durée du travail (c'est-à-dire un planning prévisionnel), qu'il soumet, avant sa première mise en œuvre, au comité social et économique (CSE d'entreprise). Les modifications de ce programme font ensuite l'objet d'une consultation de l'instance (8).
Enfin, chaque année, l'employeur communique au CSE un bilan de la mise en œuvre du programme indicatif de la variation de la durée du travail.
💡 Bon à savoir : des dispositions particulières s'appliquent aux entreprises qui fonctionnent en continu. Retrouvez-les en détail au sein de notre dossier.
Le salarié peut-il refuser la modulation de son temps de travail ?
Non, le salarié ne peut pas refuser l'aménagement de son temps de travail sur toute ou partie de l'année lorsque celui-ci est mis en place :
-
par accord collectif (9) ;
-
par décision unilatérale de l'employeur (10).
Le législateur et le juge considèrent que cet aménagement ne constitue pas une modification du contrat de travail du salarié à temps complet, justifiant son accord préalable.
💡 Bon à savoir : pour les salariés à temps partiel, l'accord reste toutefois être un préalable nécessaire.
Comment rémunérer les salariés dont le temps de travail est aménagé ?
L'organisation de la rémunération en cas d'accord collectif
Lorsque l'aménagement du temps de travail est mis en place par accord collectif, 2 choix sont permis (6) :
-
soit la rémunération mensuelle des salariés est lissée (lissage de la rémunération): cela signifie qu'elle sera indépendante de l'horaire réel et que le salarié percevra la même rémunération chaque mois. Une régularisation aura ensuite lieu à la fin de la période de référence ;
-
soit la rémunération mensuelle se fait à hauteur de l'horaire réellement effectué par le salarié, ce qui peut donc la faire fluctuer.
L'organisation de la rémunération en cas de décision unilatérale
Lorsque l'aménagement du temps de travail sur une période supérieure à la semaine est mis en place par décision unilatérale de l'employeur, le Code du travail oblige ce dernier à lisser la rémunération (11).
Celle-ci est calculée sur la base de 35 heures par semaine.
Comment sont décomptées les heures supplémentaires lorsque la durée du travail est aménagée ?
L'aménagement du temps de travail sur une période supérieure à la semaine n'est pas synonyme d'extinction du régime des heures supplémentaires.
Celles-ci sont toujours possibles, mais vont être décomptées à la fin de la période de référence, au lieu du rythme hebdomadaire classique (4).
Décompte des heures supplémentaires si la période est inférieure à 1 an
Si la période de référence est inférieure à 1 an, les heures supplémentaires sont (12) :
-
les heures effectuées au-delà d'une durée hebdomadaire moyenne de 35 heures calculée sur la période de référence choisie.
📌 Exemple : sur 4 semaines, sur 9 semaines, etc. ; -
les heures effectuées au-delà de 39 heures par semaine.
💡 Bon à savoir : un accord collectif peut également prévoir une limite hebdomadaire, nécessairement supérieure à 35 heures mais ne pouvant dépasser 39 heures, au-delà de laquelle les heures effectuées sont des heures supplémentaires. Celles-ci seront alors payées sur le mois où elles ont été effectuées et ne seront pas décomptées une nouvelle fois lors du décompte opéré à la fin de la période de référence. En revanche, cette limite ne peut pas être mise en place par décision unilatérale de l'employeur.
Décompte des heures supplémentaires si la période est égale à 1 an (annualisation)
En cas de période de référence égale à 1 an (c'est-à-dire en cas d'annualisation du temps de travail), les heures supplémentaires sont (12) :
-
les heures effectuées au delà de 1.607 heures ou d'un seuil inférieur si l'accord le prévoit ;
-
les heures effectuées au-delà de 39 heures par semaine.
💡 Bon à savoir : un accord collectif peut également prévoir une limite hebdomadaire, nécessairement supérieure à 35 heures mais ne pouvant dépasser 39 heures, au-delà de laquelle les heures effectuées sont des heures supplémentaires. Celles-ci seront alors payées sur le mois où elles ont été effectuées et ne seront pas décomptées une nouvelle fois lors du décompte opéré à la fin de la période de référence.
Décompte des heures supplémentaires si la période est supérieure à 1 an
En cas de période de référence supérieure à 1 an, les heures supplémentaires sont (12) :
-
les heures effectuées au-delà d'une durée hebdomadaire moyenne de 35 heures calculée sur la période de référence.
📌 Exemple : sur 14 mois, 18 mois, etc. ; -
les heures effectuées au-delà de 39 heures par semaine.
💡 Bon à savoir : un accord collectif doit obligatoirement prévoir une limite hebdomadaire, nécessairement supérieure à 35 heures mais ne pouvant dépasser 39 heures, au-delà de laquelle les heures effectuées sont des heures supplémentaires. Celles-ci seront alors payées sur le mois où elles ont été effectuées et ne seront pas décomptées une nouvelle fois lors du décompte opéré à la fin de la période de référence.
Comment les horaires et la durée du travail aménagés peuvent-ils être communiqués aux salariés ?
Puisque les horaires de travail vont varier pendant la période de référence, l'employeur doit remplir certaines obligations d'informations auprès des salariés dont le temps de travail est aménagé.
Délai de prévenance
7 joursdélai de prévenance
Tout d'abord, l'employeur doit respecter un délai de prévenance de 7 jours ouvrés dès lors qu'intervient (13) :
-
un changement de la durée du travail ;
-
un changement des horaires de travail.
L'accord collectif mettant en place le dispositif peut toutefois prévoir un autre délai de prévenance, tant que celui-ci est raisonnable. Dans ce cas, c'est ce dernier que l'employeur doit respecter.
Sans accord collectif, l'employeur doit respecter le délai légal de 7 jours ouvrés.
Affichage de la période de référence et des horaires de travail
De façon classique, lorsque tous les salariés d'un atelier, d'un service ou d'une équipe travaillent selon le même horaire collectif, celui-ci est affiché en caractère lisibles et apposé de façon apparente dans chacun des lieux de travail auxquels il s'applique (14).
À défaut de précision conventionnelle contraire, lorsqu'un dispositif d'aménagement du temps de travail s'applique, l'affichage indique (15) :
-
le nombre de semaines que comporte la période de référence fixée par l'accord collectif ou le Code du travail (voir ci-dessus) ;
-
et, pour chaque semaine incluse dans cette période de référence :
- l'horaire de travail ;
- et la répartition de la durée du travail.
Enfin, l'affichage des changements de durée ou d'horaire de travail est réalisé en respectant le délai de 7 jours ou le délai prévu par l'accord collectif, le cas échéant.
🔍 Faites le point : Affichage obligatoire : quels sont les panneaux d'affichages obligatoires en entreprise ?
Quelles sont les informations à faire figurer sur le bulletin de paie du salarié dont le temps de travail est aménagé ?
Un document annexé au bulletin de paie du salarié doit comporter le total des heures de travail accomplies depuis le début de cette période (16).
Cette information est communiquée :
-
à la fin de cette période de référence ;
-
ou lors du départ du salarié, si celui-ci part au cours de cette période de référence.
🔍 Cet article peut vous intéresser : Informations obligatoires sur la relation de travail : quelle obligation pour l'employeur ?
Quelles sont les informations à fournir à l'inspection du travail en cas de temps de travail aménagé ?
L'employeur tient à la disposition de l'inspection du travail les documents existant dans l'entreprise ou l'établissement qui permettent de comptabiliser les heures de travail accomplies par chaque salarié (17).
Ces documents sont mis à la disposition auprès de l'inspecteur du travail :
-
pendant une durée de 1 an ;
-
ou, si la période de référence est supérieure à 1 an, pendant cette durée (exemple : 24 mois).
🔍 Pour aller plus loin : Quels sont documents à tenir à disposition lors de l'inspection du travail ?
Quels sont les autres dispositifs permettant d'aménager le temps de travail du salarié ?
D'autres dispositifs particuliers liés au temps de travail des salariés sont prévues par le Code du travail. Parmi eux, nous pouvons citer :
- le contrat cadre au forfait jours ou heures ;
- les horaires individualisés ;
- le travail par relais, roulement, ou équipes successives ;
- le travail de nuit ;
- le travail à temps partiel ;
- les astreintes ;
- l'activité partielle (ou chômage partiel) ;
- le congé-intempéries dans le secteur du BTP ;
- etc.
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Références :
(1) Article L3121-27 du Code du travail
(2) Article L3121-28 du Code du travail
(3) Article L3121-29 du Code du travail
(4) Article L3121-41 du Code du travail
(5) Loi n°2008-789 du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail
(6) Article L3121-44 du Code du travail
(7) Article L3121-45 du Code du travail
(8) Article D3121-27 du Code du travail
(9) Article L3121-43 du Code du travail
(10) Cass. Soc. 11 mai 2016, n°15-10025
(11) Article D3121-28 du Code du travail
(12) Articles L3121-41, L3121-44 et D3121-25 du Code du travail
(13) Articles L3121-44, L3121-47 et D3121-27 du Code du travail
(14) Article D3171-2 du Code du travail
(15) Article D3171-5 du Code du travail
(16) Article D3171-13 du Code du travail
(17) Article D3171-16 du Code du travail







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