Dans quels cas licencier un salarié déclaré inapte ?

L'employeur est en droit de procéder au licenciement pour inaptitude d'un salarié  si : 

  • le médecin du travail a déclaré dans l'avis d'inaptitude, que tout maintien du salarié dans l'emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que son état de santé fait obstacle à tout reclassement dans l'emploi ;
  • ou il justifie de son impossibilité de trouver un poste de reclassement ;
  • ou le salarié a refusé les postes de reclassement proposés par l'employeur.
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Mieux comprendre le licenciement pour inaptitude

Vous avez une question sur l'inaptitude professionnelle ou non professionnelle (avis d'inaptitude établi par le médecin du travail, obligation de reclassement, procédure de licenciement, indemnités à verser...) ?

Quelles sont les étapes d'une procédure de licenciement ?

1. Chercher une solution de reclassement pour le salarié déclaré inapte au travail

Le licenciement pour inaptitude est un licenciement pour motif personnel, non-disciplinaire.

Le salarié peut être déclaré inapte à reprendre son emploi par le médecin du travail à l'issue d'un examen médical, ou de deux examens médicaux (si le médecin du travail l'estime nécessaire) (1).

Dans ce cas, vous êtes tenu de rechercher un poste de reclassement (2).

En effet, vous devez lui proposer un autre emploi adapté à ses capacités. Il doit être aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé par le salarié, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagements du temps de travail, et prenant en compte les préconisations et les indications du médecin du travail.

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Bon à savoir :

Vous êtes dispensé de l'obligation de reclassement dès lors que l'avis d'inaptitude émis par le médecin du travail mentionne que “tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé” ou que “l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi”.
L’avis du médecin du travail doit mentionner expressément cette formulation et ce, au mot près. Dès lors que la formulation inscrite n’est pas exacte, l’employeur n’est pas dispensé de rechercher un poste de reclassement pour le salarié et le licenciement prononcé, le cas échéant, n’est pas valable (3).

Hormis les deux cas dans lesquels vous pouvez en être dispensé par le médecin du travail, vous devez respecter cette obligation de reclassement, que l'inaptitude soit d'origine professionnelle (consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle) ou d'origine non professionnelle.

À ce titre, vous devez, s'il existe, consulter le comité social et économique dans le cadre d'une inaptitude et ce, quelle que soit l'origine de l'inaptitude.

Vous disposez d'un délai d'un mois, à compter de l'avis d'inaptitude émis par le médecin du travail, pour reclasser le salarié dans l'entreprise ou procéder à son licenciement. Si ce n'est pas fait dans le délai d'un mois, vous serez dans l'obligation de reprendre le versement du salaire (4).

Pour satisfaire votre obligation de reclassement, vous devez chercher un poste dans l'entreprise, mais également dans le groupe auquel l'entreprise appartient (5).

Vous devez proposer un poste de reclassement en prenant en compte l'avis du CSE, ainsi que les conclusions écrites du médecin du travail.

Dans le cas d'un reclassement ou d'un aménagement de poste impossible, ou en cas de refus du salarié, il conviendra, avant d'engager la procédure de licenciement (c'est-à-dire, avant d'envoyer la lettre de convocation à l'entretien préalable de licenciement au salarié), de faire connaître par écrit, au salarié, les motifs qui s'opposent à son reclassement (6)

En cas de manquement à cette formalité, vous pouvez être condamné à payer des dommages-intérêts au salarié licencié (7).

2. Convocation du salarié inapte à un entretien préalable : est-il obligatoire ?

Pour licencier un salarié pour inaptitude, qu'elle soit professionnelle ou non, vous devez respecter la procédure spécifique de licenciement pour motif personnel. Pour cela, vous devez impérativement convoquer le salarié à un entretien préalable de licenciement (8)

Cette convocation doit être envoyée par lettre recommandée avec accusé de réception ou remise en main propre contre décharge.

 

Si vous n'êtes pas dispensé de votre obligation de reclassement, il est recommandé de ne pas envoyer la lettre de licenciement le jour même de l'examen médical constatant l'inaptitude du salarié. En effet, en cas de litige avec le salarié devant le Conseil de prud'hommes, les juges pourraient estimer que vous n'avez pas engagé sérieusement les recherches de reclassement et requalifier le licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse (9).

Cette lettre doit contenir certaines informations essentielles, notamment :

  • l'objet de l'entretien ;
  • la date, l'heure et le lieu de l'entretien ;
  • la possibilité pour le salarié de se faire assister pendant l'entretien.
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Convoquer un salarié à un entretien préalable

Adresser à votre salarié une lettre de convocation à un entretien préalable en vue d'un licenciement pour inaptitude.

3. Mener l'entretien préalable de licenciement, comment se passe-t-il ?

Au cours de l'entretien, vous devez indiquer au salarié les motifs de la décision envisagée et le cas échéant, recueillir ses explications (10).

L'entretien préalable ne peut avoir lieu moins de 5 jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation.

4. Notification du licenciement au salarié inapte à son poste : rupture du contrat de travail 

Vous devez enfin notifier le licenciement au salarié par lettre recommandée avec accusé de réception (11).

La lettre de licenciement doit comporter l'énoncé du ou des motifs invoqués.  

À ce titre, il existe dans le cadre d'un licenciement pour inaptitude, une particularité concernant la motivation de la lettre de licenciement.

Ne constitue pas l'énoncé d'un motif précis de licenciement, l'inaptitude physique du salarié, sans mention de l'impossibilité de reclassement.

Cass. Soc, 21 mars 2018, n°16-29073

En effet, la lettre de licenciement doit préciser qu'il s'agit d'un licenciement pour inaptitude tout en mentionnant un des motifs suivants :

  • soit l'impossibilité de reclassement : il est possible d'utiliser des termes similaires tels que "le refus du salarié d'une autre affectation conforme aux préconisations du médecin du travail" et "l'absence de tout autre poste disponible" (12) ;
  • soit l'un des deux cas de dispense de reclassement prévu par la loi : ce sont des motifs de licenciement autonomes, il n'est donc pas nécessaire que soit précisée l'impossibilité de reclassement.

La lettre de licenciement qui ne vise pas l'inaptitude et l'impossibilité de reclassement mais seulement le refus de la proposition de reclassement à un poste, ne constitue pas un motif de licenciement (13).

Vous ne pouvez pas licencier le salarié déclaré inapte pour un autre motif. 

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Bon à savoir :

La lettre de licenciement ne peut être expédiée moins de 2 jours ouvrables après la date prévue de l'entretien préalable au licenciement auquel le salarié a été convoqué.

 

5. Apporter des précisions sur les motifs énoncés dans la lettre de licenciement

Les motifs énoncés dans la lettre de licenciement peuvent, après la notification de celle-ci, être précisés par l'employeur, soit à son initiative soit à la demande du salarié (14).

En effet, le salarié peut, dans les 15 jours suivant la notification du licenciement, vous demander des précisions sur les motifs énoncés dans la lettre (15).

Vous disposez alors d'un délai de 15 jours après la réception de sa demande pour apporter des précisions si vous le souhaitez.

Vous pouvez, vous aussi, prendre l'initiative de préciser les motifs du licenciement dans ce même délai.

Une lettre de licenciement insuffisamment motivée peut vous engager à devoir verser des dommages et intérêts au salarié (16)

6. Verser les indemnités de licenciement et réaliser les formalités de fin de contrat

Par ailleurs, à l'issue de la procédure de licenciement, la rupture du contrat entraîne pour le salarié le versement d'indemnités de licenciement pour inaptitude, dont le calcul varient en fonction de l'origine de l'inaptitude et de l'ancienneté du salarié.

Vous devez également transmettre les documents de fin de contrat au salarié licencié pour inaptitude (certificat de travail, solde de tout compte, attestation Pôle emploi et dernier bulletin de salaire).

Pensez également à réaliser les démarches nécessaires pour que le salarié puisse bénéficier de la portabilité des régimes d'assurance complémentaire.

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Références :
(1) Article R4624-42 du Code du travail
(2) Articles L1226-2 et L1226-10 du Code du travail
(3) Cass. Soc, 13 septembre 2023, n°22-12970
(4) Articles L1226-4 et L1226-11 du Code du travail
(5) Cass. Soc. 18 janvier 2023, n°21-18418
(6) Articles L1226-2-1 et L1226-12 du Code du travail
(7) Cass. Soc. 25 janvier 2023, n°21-17663
(8) Article L1232-2 du Code du travail
(9) Cass. Soc., 4 novembre 2015, n°
14-11879
(10) Article L1232-3 du Code du travail
(11) Article
L1232-6 du Code du travail
(12) Cass. Soc., 1er mars 2017, n°
15-24710
(13) Cass. Soc., 23 mai 2017, n°16-13222
(14) Article L1235-2 du Code du travail
(15) Article
R1232-13 du Code du travail
(16) Article L1235-3 du Code du travail