Chercher une solution de reclassement pour le salarié déclaré inapte au travail. Comment se passe le reclassement ? Modalités de recours pour contester l'avis du médecin 

Le licenciement pour inaptitude est, selon la loi, un licenciement pour motif personnel, non-disciplinaire.

Le salarié peut être déclaré inapte à reprendre son emploi par le médecin du travail à l'issue d'un examen médical, ou, depuis la Loi Travail (1) n°2016-1088 du 8 août 2016, de deux examens médicaux (si le médecin du travail l'estime nécessaire). 

Dans ce cas, vous êtes tenu de rechercher un poste de reclassement (2). En effet, vous devez lui proposer un autre emploi adapté à ses capacités. Il doit être aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé par le salarié.

Bon à savoir :

Vous êtes dispensé de l'obligation de reclassement dès lors que l'avis d'inaptitude émis par le médecin du travail mentionne que le maintien du salarié dans l'entreprise est : gravement préjudiciable à sa santé ou que son état de santé fait obstacle à tout reclassement dans un emploi.

Pour tout comprendre :

Hormis les deux cas dans lesquels vous pouvez en être dispensé par le médecin du travail, vous devez respecter cette obligation de reclassement, que l'inaptitude soit d'origine professionnelle (consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle) ou d'origine non professionnelle.

À ce titre, vous devez, s'il existe, consulter le comité social et économique (CSE) et ce, quelle que soit l'origine de l'inaptitude.

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Vous disposez d'un délai d'un mois, à compter de l'avis d'inaptitude émis par le médecin du travail, pour reclasser le salarié dans l'entreprise ou procéder à son licenciement. Si ce n'est pas fait dans le délai d'un mois, vous serez dans l'obligation de reprendre le versement du salaire (3).

Pour satisfaire votre obligation de reclassement, vous devez chercher un poste dans l'entreprise, mais également dans le groupe auquel l'entreprise appartient (4).

Vous devez proposer un poste de reclassement en prenant en compte l'avis du CSE, ainsi que les conclusions écrites du médecin du travail. Après avoir fait une étude du poste, le médecin du travail peut déclarer le salarié inapte s'il constate qu'aucune mesure d'aménagement, d'adaptation ou de transformation du poste de travail occupé n'est possible et que sont état de santé justifie un changement de poste (5).

Vous avez la possibilité de contester l'avis d'inaptitude émis par le médecin du travail. Pour cela, vous devez saisir le Conseil de prud'hommes dans un délai de 15 jours à compter de la notification de de ce dernier (6).

Dans le cas d'un reclassement ou d'un aménagement de poste impossible, ou en cas de refus du salarié, il conviendra, avant d'engager la procédure de licenciement (c'est-à-dire, avant d'envoyer la lettre de convocation à l'entretien préalable de licenciement au salarié), de faire connaître par écrit, au salarié, les motifs qui s'opposent à son reclassement (7)En cas de manquement à cette formalité, vous pouvez être condamné à payer des dommages-intérêts au salarié licencié (8).

À retenir :

Vous êtes en droit de procéder au licenciement pour inaptitude du salarié (7) si : 

  • le médecin du travail a déclaré dans l'avis d'inaptitude, que tout maintien du salarié dans l'emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que son état de santé fait obstacle à tout reclassement dans l'emploi ;
  • ou l'employeur justifie de son impossibilité de trouver un poste de reclassement ;
  • ou le salarié a refusé les postes de reclassement proposés par l'employeur.

Convocation du salarié inapte à un entretien préalable de licenciement avant de le licencier

Pour licencier un salarié pour inaptitude, qu'elle soit professionnelle ou non, vous devez respecter la procédure spécifique de licenciement pour motif personnel. Pour cela, vous devez impérativement convoquer le salarié à un entretien préalable de licenciement (9)

Cette convocation doit être envoyée par lettre recommandée avec accusé de réception ou remise en main propre contre décharge.

Si vous n'êtes pas dispensé de votre obligation de reclassement, il est recommandé de ne pas envoyer la lettre de licenciement le jour même de l'examen médical constatant l'inaptitude du salarié. En effet, en cas de litige avec le salarié devant le Conseil de prud'hommes, les juges pourraient estimer que vous n'avez pas engagé sérieusement les recherches de reclassement et requalifier le licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse (10).

Cette lettre doit contenir certaines informations essentielles, notamment :

  • l'objet de l'entretien ;
  • la date, l'heure et le lieu de l'entretien ;
  • la possibilité pour le salarié de se faire assister pendant l'entretien.

Vous souhaitez convoquer le salarié à un entretien préalable en vue d'un licenciement pour inaptitude ?

Tenir l'entretien préalable de licenciement, comment se passe-t-il ? Quel délai entre l'entretien préalable et le licenciement ?

Au cours de l'entretien, vous devez indiquer au salarié les motifs de la décision envisagée et le cas échéant, recueillir ses explications (11).

Bon à savoir :

L'entretien préalable ne peut avoir lieu moins de 5 jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation.

Notification du licenciement au salarié inapte à son poste : rupture du contrat de travail 

Vous devez enfin notifier le licenciement au salarié par lettre recommandée avec accusé de réception (12).

La lettre de licenciement doit comporter l'énoncé du ou des motifs invoqués.  

À ce titre, il existe dans le cadre d'un licenciement pour inaptitude, une particularité concernant la motivation de la lettre de licenciement.

Ne constitue pas l'énoncé d'un motif précis de licenciement, l'inaptitude physique du salarié, sans mention de l'impossibilité de reclassement.

Cass. Soc., 21 mars 2018, n°16-29073

En effet, la lettre de licenciement doit préciser qu'il s'agit d'un licenciement pour inaptitude tout en mentionnant un des motifs suivants :

  • soit l'impossibilité de reclassement (il est possible d'utiliser des termes similaires tels que "le refus du salarié d'une autre affectation conforme aux préconisations du médecin du travail" et "l'absence de tout autre poste disponible") (13) ;
  • soit l'un des deux cas de dispense de reclassement prévu par la loi, (ce sont des motifs de licenciement autonomes, il n'est donc pas nécessaire que soit précisée l'impossibilité de reclassement), pour rappel :
    -    le maintien du salarié dans l'entreprise est gravement préjudiciable à sa santé ;
    -    l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi.

La lettre de licenciement qui ne vise pas l'inaptitude et l'impossibilité de reclassement mais seulement le refus de la proposition de reclassement à un poste, ne constitue pas un motif de licenciement (14).

Vous ne pouvez pas licencier le salarié déclaré inapte pour un autre motif. 

Bon à savoir :

La lettre de licenciement ne peut être expédiée moins de 2 jours ouvrables après la date prévue de l'entretien préalable au licenciement auquel le salarié a été convoqué.

Apporter des précisions sur les motifs énoncés dans la lettre de licenciement et dans quel délai

Les motifs énoncés dans la lettre de licenciement peuvent, après la notification de celle-ci, être précisés par l'employeur, soit à son initiative soit à la demande du salarié (15).

En effet, le salarié peut, dans les 15 jours suivant la notification du licenciement, vous demander des précisions sur les motifs énoncés dans la lettre (16).

Vous disposez alors d'un délai de 15 jours après la réception de sa demande pour apporter des précisions si vous le souhaitez.

Vous pouvez, vous aussi, prendre l'initiative de préciser les motifs du licenciement dans ce même délai.

Une lettre de licenciement insuffisamment motivée peut avoir des conséquences différentes selon que vous ayez précisé ou non les motifs de licenciement mentionnés dans la lettre :

Précisions apportées à l'initiative de l'employeur ou à la demande du salarié
  • Les précisions apportées par l'employeur sont suffisantes
  • Les précisions apportées par l'employeur sont insuffisantes
Le licenciement est suffisamment motivé : plus de contestation possible.

Le licenciement est sans cause réelle et sérieuse : le salarié a droit à une indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse (17).

L'employeur n'a pas répondu à la demande de précisions du salarié
Le licenciement est sans cause réelle et sérieuse : le salarié a droit à une indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse (17)
Le salarié n'a pas demandé de précisions à l'employeur
  • Le licenciement a une cause réelle et sérieuse
  • Le licenciement est sans cause réelle et sérieuse
L'employeur verse au salarié une indemnité égale au plus à un mois de salaire en raison de l'irrégularité pour insuffisance de motivation (15). Le licenciement est sans cause réelle et sérieuse : le salarié a droit à une indemnité pour licenciement abusif (indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse) (17).

A l'issue de la procédure de licenciement, la rupture du contrat entraîne pour le salarié le versement d'indemnités, dont le calcul varie en fonction de l'origine de l'inaptitude.

Vous voulez savoir comment calculer le montant des indemnités de licenciement ? 

Indemnité de licenciement pour inaptitude : comment la calculer ? 

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Références :
(1) Loi Travail n°2016-1088 du 8 août 2016, relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels
(2) Articles L1226-2 et L1226-10 du Code du travail
(3) Articles L1226-4 et L1226-11 du Code du travail
(4) Cass. Soc. 18 janvier 2023, n°21-18418
(5) Article L4624-4 du Code du travail
(6) Article R4624-45 du Code du travail
(7) Articles L1226-2-1 et L1226-12 du Code du travail
(8) Cass. Soc. 25 janvier 2023, n°21-17663
(9) Article L1232-2 du Code du travail
(10) Cass. Soc., 4 novembre 2015, n°14-11879
(11) Article L1232-3 du Code du travail
(12) Article L1232-6 du Code du travail
(13) Cass. Soc., 1er mars 2017, n°15-24710
(14) Cass. Soc., 23 mai 2017, n°16-13222
(15) Article L1235-2 du Code du travail
(16) Article R1232-13 du Code du travail
(17) Article L1235-3 du Code du travail