Un salarié professionnel de santé peut-il reprocher à son employeur d’avoir motivé sa lettre de licenciement par des éléments couverts par le secret médical ?
La Cour de cassation rappelle en matière de licenciement et secret médical, dans un arrêt récent du 15 juin 2022 (Cass.soc. 15-6-2022, n°20-21.090), que le secret médical a été institué dans le seul intérêt du patient.
En l’espèce, une infirmière coordinatrice, employée dans une maison de retraite est convoquée à un entretien préalable à la suite du décès d’une résidente ; l’employeur considérait que ce décès serait en partie imputable à un défaut de surveillance et de prise en charge par les équipes soignantes placées sous la responsabilité de la salariée.
De plus, en approfondissant ses recherches, l’employeur a constaté notamment que :
- Les plans de soins des résidents n’étaient pas à jour, voire qu’ils étaient totalement absents de leurs dossiers de soins,
- Le contrôle des pesées de plusieurs résidents était négligé,
- La tenue des dossier médicaux était défectueuse,
- De nombreux résidents avaient pris des traitements sans ordonnance en cours de validité,
- La salariée avait laissé les aides-soignants installer des barrières de lit à certains résidents, en dépit de toute prescription médicale.
De ce fait, considérant que la salariée avait commis des négligences graves dans l’exécution de son contrat de travail et porté ainsi atteinte à la santé des résidents, l’employeur a prononcé à son encontre un licenciement pour faute grave.
La salariée a porté l’affaire devant le Conseil de Prud’Hommes en contestant la légitimité de son licenciement. Celui-ci lui a donné raison.
La Cour d’Appel, saisie du litige par l’employeur, a jugé au contraire que le licenciement pour faute grave était bien fondé et que les manquements relevés rendaient impossible le maintien de la salariée dans l’entreprise.
La salariée va former un pourvoi en cassation contre l’arrêt d’appel, en faisant valoir que son licenciement était nécessairement dépourvu de cause réelle et sérieuse car fondé sur une violation par l’employeur du principe fondamental du secret médical.
Elle en veut pour preuve la motivation de sa lettre de licenciement qui fait état d’un manque de soins à l’égard de patients identifiables, en renvoyant à des informations tirées de leur dossier médical.
La Chambre sociale de la Cour de cassation a rejeté le pourvoi de la salariée. Elle relève que le secret médical professionnel prévu par ces dispositions est institué dans l’intérêt des patients, afin de protéger leur vie privée et le secret des informations médicales les concernant.
La Cour de Cassation, s’agissant d’un droit propre du patient, déduit que le salarié, professionnel de santé, ne peut pas invoquer à l’égard de son employeur une violation du secret médical pour contester le licenciement fondé sur des manquements à ses obligations portant atteinte à la santé des patients.
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