Même lorsqu’il est justifié par une faute grave du salarié, le licenciement peut lui causer un préjudice supplémentaire s’il est prononcé dans des circonstances vexatoires (Cass. Soc. 16.12.2020 : n°18-23966).
Qu’est-ce que le licenciement pour faute ?
Dans le cadre de son pouvoir de direction, l’employeur a le droit de sanctionner des fautes qui sont soit d’origine disciplinaire, soit d’origine professionnelle.
Les fautes disciplinaires sont des manquements aux règles s’imposant à l’ensemble des salariés dans l’entreprise. Ces règles sont souvent rappelées dans un règlement intérieur, mais pas de manière systématique. Elles figurent également dans le contrat de travail.
Les fautes professionnelles visent l’inexécution fautive ou l’exécution défectueuse du travail.
Les fautes sont :
- soit des actes positifs : cela est le cas lorsque le salarié adopte un comportement interdit par les règles applicables dans l’entreprise ;
- soit des abstentions de nature volontaire vis-à-vis d’une obligation contractuelle ou d’une instruction ou une consigne donnée par l’employeur (par exemple, le défaut de respect des horaires).
Le licenciement pour faute donne lieu à une procédure de licenciement disciplinaire, dont l’intensité doit être adaptée à la faute en elle-même.
Il existe une hiérarchie des fautes.
Il existe quatre types de fautes, selon leur gravité.
Ainsi, une faute peut, selon les circonstances, constituer une faute légère, une faute simple, une faute grave ou une faute lourde.
Il est toujours tenu compte notamment de la position hiérarchique du salarié, de ses antécédents, de ses responsabilités et des conséquences dommageables ou non pour l’entreprise.
Chacune de ces fautes entraîne des conséquences différentes sur le contrat de travail et le droit des salariés.
Ainsi, le licenciement prononcé peut l’être soit pour faute simple, soit pour faute grave, soit parfois jusqu’à la faute lourde (mais dans des circonstances très particulières notamment d’intention de nuire du salarié).
A chaque type de faute correspond une procédure spécifique qui doit être scrupuleusement respectée par l’employeur, pour ne pas voir le licenciement requalifié en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Qu’entend-on par circonstances vexatoires du licenciement ?
Le licenciement peut être sans cause réelle ou sérieuse, ou reposer sur une cause réelle et sérieuse.
Néanmoins, s’il est intervenu dans des circonstances vexatoires ou brutales pour le salarié qui justifie d’un préjudice distinct, le salarié pourra obtenir des dommages et intérêts.
Le fait que licenciement, notamment pour faute grave soit réel et sérieux n’interdit pas au salarié de réclamer des dommages et intérêts s’il a été entouré de circonstances vexatoires (Cass. soc. 19 juillet 2000, n° 98-44025 ; Cass. soc. 21 novembre 2012, n° 11-19260 ; Cass. soc. 12 octobre 2016, n° 14-29468).
C'est par une appréciation souveraine des éléments qui leur sont soumis que les juges du fond constatent le caractère vexatoire de la rupture et l'existence d'une faute (Cass. soc. 26 octobre 2010 RG : n° 09-42076).
Les circonstances vexatoires sont par exemple :
- la fouille du salarié obligé de quitter immédiatement l'entreprise
- l’interdiction faite au salarié d'accéder à l'entreprise pendant la durée de la procédure de licenciement, alors qu'il n'était invoqué aucune faute grave à son encontre et que les tiroirs de son bureau contenant des affaires personnelles ont été forcés.
L’arrêt du 16 décembre 2020 (Cass. Soc. 16.12.2020 : n°18-23966) est une nouvelle illustration de ces circonstances brutales et vexatoires dans lesquelles est intervenu le licenciement.
En l’espèce, un responsable de bar avait été licencié pour faute grave.
Le salarié reprochait à son employeur « de s’être répandu en public sur les motifs [de son] licenciement, en prétendant qu’il prenait de la drogue et qu’il était un voleur ».
Le salarié contestait le bien fondé du licenciement et réclamait en outre des dommages et intérêts pour le préjudice subi en raison des circonstances vexatoires dans lesquelles il était intervenu, au regard des propos tenus par l’employeur.
Si le licenciement n’est pas remis en cause par les juges, en revanche, la Cour de cassation a bien estimé que le licenciement était entouré de circonstances vexatoires.
Et la Haute Juridiction rappelle sa jurisprudence bien ancrée :
Même lorsqu’il est justifié par une faute grave du salarié, le licenciement peut lui causer un préjudice, en raison des circonstances vexatoires qui l’ont accompagné. Il est donc bien fondé à demander la réparation de ce préjudice distinct.
Sources :
Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 16 décembre 2020 : RG n° 18-23966
Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 19 juillet 2000 : RG n° 98-44025
Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 21 novembre 2012 : RG n° 11-19260
Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 12 octobre 2016 : RG n° 14-29468
Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 26 octobre 2010 : RG n° 09-42076
Par Maitre Virginie LANGLET
Avocat au Barreau de Paris
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