Les députés et sénateurs sont finalement parvenus à un accord sur le projet de loi concernant le passe sanitaire et ses conséquences sur l’accès à l’emploi. Dans un premier temps, l’avant projet de loi prévoyait une mesure inédite et incertaine relatif à « l’adaptation de nos outils de gestion de la crise sanitaire » : la possibilité de licencier un salarié qui ne serait pas en possession du passe sanitaire.
Le refus de se conformer à l’obligation vaccinale ou de présenter un passe sanitaire ne constituera pas, pour les salariés concernés, un motif de licenciement.
Le Sénat s’était opposé à ce que les intervenants dans des espaces recevant du public soumis à l’obligation de passe sanitaire, puissent être licenciés s’ils ne se conforment pas à cette obligation.
La suppression du licenciement a finalement été étendue à l’ensemble des salariés.
Les salariés ou les soignants qui ne disposeront pas de passe sanitaire après le 30 août qui ne seront pas vaccinés après le 15 octobre ne seront pas licenciés.
Le dispositif prévoit à la place du licenciement une suspension du contrat du travail et donc de l’obligation de versement du salaire par l’employeur qui ne sera pas sans conséquence pour le salarié non muni de son passe sanitaire.
Par ailleurs, la possibilité de procéder à une rupture anticipée de CDD en cas de refus de présenter un passe sanitaire avait déjà été acceptée par le Sénat et sera maintenue.
- Une situation de fragilisation des salariés démunis du passe sanitaire
Permettre à l’employeur de suspendre le contrat de travail, sans avoir à licencier son salarié, cela pourrait paraitre aller dans le sens de la modération ou du compromis.
Mais ce compris laisse circonspect sur ses conséquences : Que va-t-il se passer pour le salarié qui n’ira pas vers la vaccination et ne pourra pas rester sans salaire sur plusieurs mois une fois qu’il aura épuisé ses congés, RTT ?
Ne sera –t-il pas poussé à la démission et de ce fait bien moins bien « protégé » qu’avec un licenciement puisqu’il ne touchera aucune indemnité de licenciement et ne pourra alors prétendre aux allocations chômage ?
De l’autre côté, les employeurs risquent de se trouver fort dépourvus s’ils perdent ainsi une partie importante de leurs effectifs qui résisteront à ce qui ressemble fort à une injonction de vaccination de tous les salariés.
Cette disposition va créer de l’incertitude pour les deux parties, salariés et employeurs, et disons-le, une pression accrue sur le salarié.
Ainsi, le pass sanitaire va devenir une condition d’accès au travail et le fait que ce soit à l’employeur de contrôler cet accès constitue en soi une atteinte à la vie privée du salarié, ainsi qu’au secret médical, alors que la mission de contrôle aurait pu être confiée à la médecine du travail.
La plupart des syndicats de salariés et employeurs restent très critiques sur ce texte voté dans l’urgence et autant dire que les incertitudes ainsi créées ne sont pas levées.
Une fois adopté, le texte devra encore passer le filtre du Conseil constitutionnel qui aura un mois pour rendre sa décision, mais le gouvernement peut lui demander de le faire sous un délai restreint de huit jours.
Ce n’est qu’après la validation du texte par le Conseil constitutionnel que la loi pourra être promulguée et entrer en vigueur.
Maître JALAIN
Avocat en Droit du Travail
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