Une caution peut-elle se libérer de sa dette en raison du défaut de déchéance du terme du prêt prononcée valablement ?

En principe, pour qu’une créance puisse être mise en recouvrement, elle doit être, non seulement certaine et liquide, mais aussi exigible. 

 

Selon la loi, la déchéance du terme d’un prêt, résultant du prononcé de la liquidation judiciaire du débiteur principal, n’a d’effet qu’à l’égard de celui-ci et ne peut être étendue à la caution, sauf clause contraire à l’article L 643-1 du code de commerce. 

 

Sur ce fondement, une caution a utilement contesté l’exigibilité de la dette par son créancier en raison du défaut de déchéance du terme du prêt prononcée valablement. 

 

Le 23 septembre 2021, la Cour d'appel d’Aix-en-Provence a jugé que l’engagement de la caution à garantir le remboursement d’un prêt ne permet pas d’étendre à la caution la déchéance du terme encourue par le débiteur principal. (Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 3-3, 23 septembre 2021, n 19/03743)

 

En l’espèce, une société a souscrit auprès de la société Lixxbail un contrat de crédit-bail, portant sur une engin professionnel. 

 

Le gérant de la société s’est porté caution solidaire des engagements au titre de ce contrat de crédit-bail. 

 

Par jugement, le tribunal de commerce a ouvert une procédure de liquidation judiciaire de la société. 

 

Le crédit-bailleur a mis en demeure la caution de régler la dette puis l’a assigné en paiement devant le tribunal de commerce.

 

Cependant, la caution s’est défendue en invoquant le fait que la déchéance du terme prononcée à l’encontre de la société débitrice ne lui était pas personnellement opposable. 

 

Ainsi, les juges ont débouté le crédit-bailleur considérant que la créance dont se prévaut la société Lixxbail à l’encontre de la caution n’est pas exigible. 

 

En effet, le contrat de crédit-bail n’avait pas été résilié avant l’ouverture de la procédure collective de la société débitrice principale et l’acte de cautionnement ne contenait aucune clause prévoyant l’exigibilité anticipée liée à l’ouverture d’une liquidation judiciaire de la société. 

 

La seule déclaration de créance au passif de cette procédure collective n’emportait pas exigibilité anticipée des sommes à l’encontre de la caution.

 

Le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire ne rend donc pas les créances non échues exigibles. 

 

La dette ne devient donc pas exigible de manière anticipée à l’égard de la caution, en l’absence de résiliation qui aurait pu survenir antérieurement à l’ouverture de la procédure collective. 

 

Il est aussi intéressant de relever que l’acte signé par la caution ne comportait aucune clause sur l’exigibilité anticipée liée à l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire à l’encontre du locataire. 

 

Autrement dit, l’acte de cautionnement litigieux ne contenait pas de clause, stipulant expressément sa renonciation au bénéfice d’un terme propre, susceptible de justifier une telle extension.

 

A défaut d’exigibilité anticipée du crédit-bail litigieux antérieurement à l’ouverture de la procédure collective, la résolution du contrat n’a donc jamais été prononcée à l’égard de la caution qui n’a donc rien à payer.

 

Par conséquent, l’exigibilité de la créance à l’égard de la société débitrice qui découle de l’ouverture de la procédure collective n’est pas opposable à la caution. 

 

Il résulte de cette décision que les cautions peuvent utilement se défendre contre leur créanciers suite à l’ouverture d’une procédure collective de l’entreprise garantie. 

 

En pratique, il convient de garder en mémoire que les cautions doivent toujours être mises en demeure de régler le montant des sommes dues au titre du contrat de crédit suite à l’ouverture d’une procédure collective à l’égard de la société emprunteuse puisque l’exigibilité anticipée du prêt n’est pas opposable à la caution.

 

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Anthony Bem
Avocat à la Cour