I. Le régime de la conversion d'usufruit
Le conjoint survivant est très souvent bénéficiaire d’un usufruit légal (C. civ., art. 757) ou d’un usufruit conventionnel aux termes d’une donation entre époux (C. civ., art. 1094-1), les enfants se retrouvant alors nus-propriétaires.
L’usufruit du conjoint survivant dans la succession du défunt peut parfois s’avérer source de contentieux entre les héritiers, notamment lorsqu’ils sont issus d’un premier lit. Et pour cause, l’usufruit est supposé répondre aux intérêts difficilement conciliables du conjoint de conserver son train de vie et des héritiers de recevoir le patrimoine de leur parent.
Le nu-propriétaire voit son droit futur à profiter de la pleine propriété du bien suspendu au bon vouloir de l’usufruitier d’en assurer une gestion respectueuse ou au contraire abusive.
Le nu-propriétaire est également redevable, s’il y est assujetti, de l’impôt sur la fortune immobilière sur la valeur de la nue-propriété du bien grevé de l’usufruit légal du conjoint survivant résultant de l’article 757 du Code civil. Cet impôt reste, en revanche à la charge de l’usufruitier lorsqu’il tient son droit de la volonté du prédécédé.
L’usufruit peut aussi exposer l’usufruitier au risque de défaillance volontaire du nu-propriétaire à effectuer les grosses réparations prévues aux articles 605 et 606 du Code civil qui lui incombe sur le bien grevé.
Ce droit ne peut faire l’objet d’aucune renonciation anticipée avant l’ouverture de la succession et les héritiers ne peuvent non plus en être privés par le parent prédécédé.
En outre, le conjoint survivant ne peut plus être contraint par les héritiers à quitter le logement. En effet, il profite d’un droit légal d’occupation du logement et peut disposer du mobilier pendant un an.
II- La conversion en rente viagière
Conformément à l’article 759 du Code civil « Tout usufruit appartenant au conjoint sur les biens du prédécédé, qu'il résulte de la loi, d'un testament ou d'une donation de biens à venir, donne ouverture à une faculté de conversion en rente viagère, à la demande de l'un des héritiers nus-propriétaires ou du conjoint successible lui-même ».
Conformément à l’article 760 du Code civil, la conversion de l’usufruit en rente viagère peut intervenir amiablement et, à défaut d’accord, être demandée judiciairement. Cette opération doit être effectuée avant la clôture des opérations de partage de l’actif successoral.
Dans l’hypothèse où elle interviendrait dans le cadre d’un accord amiable, la conversion d’usufruit n’est soumise à aucune forme particulière, sauf celles requises pour la publicité foncière en cas de conversion d’un usufruit portant sur un immeuble qui justifie que soit établi un acte notarié. Le notaire fixera le montant de la rente en tenant compte de certains critères comme l’espérance de vie du crédirentier et le montant des biens qui sont en situation de démembrement. Le conjoint survivant et les héritiers peuvent intervenir pour moduler le montant de cette rente.
Dans l’hypothèse où les parties ne seraient pas d’accord, la saisine du juge devra être faite par le conjoint survivant ou les héritiers. Le juge compétent sera celui du tribunal du domicile du défunt et la demande devra être accompagnée des documents relatifs à la succession. Le juge statue en fonction des intérêts en présence et sa décision sera notamment motivée par l'âge et la solvabilité des parties, mais également leur aptitude à gérer les biens.
Cependant, sont exclus de ce mécanisme, les usufruits résultant :
- des donations entre vifs découlant du contrat de mariage,
- des donations de biens présents consenties pendant le mariage,
- ainsi que de toutes dispositions à titre gratuit ou onéreux par lesquelles le disposant s’est réservé l’usufruit avec clause de réversibilité au profit du conjoint survivant.
S’il fait droit à la demande, le juge doit alors fixer le montant de la rente en fonction des revenus nets que produiraient les biens grevés estimés au jour où il statue.
III- La conversion en capitale
La conversion de l’usufruit en capital est régie par l’article 761 du Code civil qui impose un accord amiable entre les héritiers et le conjoint. La demande, qui ne répond d’aucune forme, suppose l’accord de tous sans pouvoir être imposée d’aucune manière à l’usufruitier par le nu-propriétaire ni par l’usufruitier au nu-propriétaire.
La convention, régie par le droit des contrats, n’est pas soumise à d’autres conditions, sauf celles relatives à la publicité foncière et les parties restent libres du choix des biens dont l’usufruit est converti.
Sources
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006431107/2022-12-19
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006431087/2022-12-19
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006310173/2022-12-19
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006431105/2022-12-19
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006435800/2022-12-19
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006429496
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