Dans un arrêt rendu le 29 septembre 2014, la Cour de cassation rappelait la règle en matière de rupture unilatérale des contrats d'apprentissage : elle ne peut qu'intervenir dans les deux premiers mois d'exécution du contrat et doit être portée à la connaissance de l'apprenti au moyen d'un écrit.

En vertu de l'article L6222-18 du Code du travail,

"Le contrat d'apprentissage peut être rompu par l'une ou l'autre des parties durant les deux premiers mois de l'apprentissage.

Passé ce délai, la rupture du contrat, pendant le cycle de formation, ne peut intervenir que sur accord écrit signé des deux parties(...)".

L'article R6222-21 alinéa 1er précise que " La rupture unilatérale du contrat d'apprentissage par l'une des parties pendant les deux premiers mois de son exécution ou la rupture convenue d'un commun accord est constatée par écrit."

En l'espèce, la rupture unilatérale, que l'employeur fixait à une date comprise dans les deux premiers mois d'exécution du contrat, avait seulement été transmise à la chambre des métiers et de l'artisanat compétente.

L'employeur ne démontrait pas avoir informé par écrit l'apprenti de la rupture unilatérale de son contrat.

En conséquence et en application des articles précités, la rupture du contrat ne pouvait être jugée valable.

La Cour de cassation accueillait la demande de l'apprenti de voir son contrat résilié aux torts exclusifs de l'employeur et partant l'octroi de "dommages-intérêts pour préjudice résultant de la rupture anticipée de son contrat d'apprentissage et perte de chance d'effectuer un stage en rapport avec le diplôme préparé".

 

Cass. soc. 29 septembre 2014, n°11-26453 "LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 13 septembre 2011), qu'un contrat d'apprentissage a été conclu le 31 juillet 2009 pour la période du 7 septembre 2009 au 31 août 2010 entre la société TMO et Mathias X..., alors mineur, assisté de son représentant légal ; que la Chambre de métiers et de l'artisanat des Hauts-de-Seine a enregistré la rupture unilatérale de ce contrat le 2 décembre 2009 sur déclaration de l'employeur datée du 12 octobre précédant ;

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire qu'il n'avait pas valablement rompu le contrat d'apprentissage pendant les deux premiers mois du contrat, de prononcer la résiliation de celui-ci à ses torts à la date du 10 octobre 2009 et de le condamner à payer à l'apprenti des sommes à titre de dommages-intérêts pour préjudice résultant de la rupture anticipée de son contrat d'apprentissage et perte de chance d'effectuer un stage en rapport avec le diplôme préparé, alors, selon le moyen :

1°/ que le contrat d'apprentissage peut être rompu par l'une ou l'autre des parties durant les deux premiers mois de l'apprentissage ; qu'une telle rupture unilatérale durant les deux premiers mois de l'apprentissage se distingue de la rupture du contrat qui, passé ce délai, ne peut intervenir que sur accord écrit signé des deux parties ; qu'en retenant que la déclaration de la société TMO, datée du 12 octobre 2009, selon laquelle le contrat d'apprentissage de M. X... tait effectivement résilié à la date du 10 octobre 2009 pour absences et retards, ne portait pas les signatures de l'apprenti et de son représentant légal « aux emplacements prévus sur l'imprimé de constatation de la rupture », tout en constatant que la « période d'essai » correspondant aux deux premiers mois du contrat arrivait à son terme le 13 novembre 2009, ce dont il ressortait qu'à la date de la rupture unilatérale du contrat d'apprentissage, la société exposante n'avait pas à recueillir l'accord écrit et la signature de l'apprenti ou de son représentant légal « aux emplacements prévus sur l'imprimé de constatation de la rupture », la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L6222-18 du code du travail ;

2°/ que la connaissance par l'apprenti de la rupture de son contrat d'apprentissage, unilatéralement décidée par l'employeur dans les deux premiers mois de l'apprentissage, peut être démontrée par tous moyens et ne suppose pas notamment que soit rapportée la preuve d'une notification à l'apprenti ou à son représentant légal du document écrit de constatation de la rupture établi par l'employeur ; qu'en se bornant à relever que la société TMO ne justifiait pas avoir « notifié » la résiliation unilatérale à l'apprenti et à son représentant légal durant les deux premiers mois du contrat et qu'il n'apparaît pas que le document écrit de constatation de la rupture établi par la société TMO ait été porté à leur connaissance, avant sa transmission par la Chambre de métiers, sans nullement rechercher, ainsi qu'elle y était pourtant invitée, si la connaissance par l'apprenti, de la rupture de son contrat d'apprentissage dès le 10 octobre 2009, ne ressortait pas de l'absence de l'apprenti dans l'entreprise postérieurement au 8 octobre 2009, de son absence de fourniture de tout travail postérieurement à cette date, du défaut de paiement de tout salaire sans protestation de l'apprenti à compter du 10 octobre 2009, et, au contraire, du versement de son salaire exclusivement jusqu'au 10 octobre 2009, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L6222-18 du code du travail ;

3°/ qu'en retenant que l'imprimé de constatation de la rupture du contrat d'apprentissage indiquant que celui-ci est effectivement résilié à la date du 10 octobre 2009, n'a été enregistré que le 2 décembre 2009 par la Chambre des métiers et de l'artisanat des Hauts-de-Seine, la cour d'appel s'est prononcée par un motif inopérant comme étant insusceptible de caractériser l'absence de rupture du contrat durant les deux premiers mois de l'apprentissage et n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L6222-18 du code du travail ;

Mais attendu qu'ayant constaté que l'employeur ne justifiait pas avoir porté par écrit à la connaissance de l'apprenti, dans le délai des deux premiers mois du contrat d'apprentissage, sa décision de rompre unilatéralement le contrat, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société TMO aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société TMO à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé et signé par M. Lacabarats, conseiller le plus ancien en ayant délibéré, conformément à l'article 456 du code de procédure civile, en l'audience publique du vingt-neuf septembre deux mille quatorze."

 

Par Me JALAIN 

Avocat en droit du travail  au Barreau de Bordeaux

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